--- 7 Juillet ---

Il avait décidé de quitter Aigue Royal sur un coup de tête. Embourbé jusqu'au cou dans ses divers devoirs, il n'avait plus le temps de rien faire, pas même d'éduquer lui-même Eliowir… ce qui lui laissait un goût amer sur la langue. Néanmoins pour cette fois, il avait fait une exception. Parce que de toute façon, l'objet de son départ était également du domaine de l'important. Depuis la fin de la bataille de l'Aube rouge, les anciens et leurs partisans avaient afflué vers la citadelle rebelle en reconstruction et il avait attendu, questionné… mais elle n'était pas du nombre. N'avait-elle pas vu son signe, durant la bataille, ou bien avait-elle délibérément choisie de rester aux côtés de ce fou de Lorenz ? L'un comme l'autre était envisageable. Elle était après tout très attachée aux vampires, et ne voudrait pas abandonner les jeunes… mais de l'autre côté, elle devait bien se rendre compte que Lorenz était fou à lié et qu'il ne ressortirait que du mal de son règne sur le long terme, y compris pour leur peuple. Il aurait aimé qu'elle se joigne à lui, vraiment. L'avoir à ses côtés… en faire sa conseillère, et plus tard, pourquoi pas, la princesse. Mais pour le moment ses hypothèses étaient oisives. Il voulait du concret et il en aurait bientôt, si ce qu'Aegle lui avait dit était juste. La maîtresse des murmures n'était pas vampiresse à faire des blagues et à se déranger pour rien, il escomptait donc bien trouver Vanaël et avoir un tête à tête avec elle.

Il chevauchait à bride abattue, poussant son destrier au maximum de ses capacités. L'armée vampirique avait de l'avance sur lui et il ne voulait pas trop en approcher, mais elle, elle s'en éloignait et venait dans sa direction. Lorsqu'il serait assez proche, il la sentirait et lui ferait savoir qu'il était là. En attendant, il chevauchait sans se retourner. Seul. Cyrène avait bien tenté de s'imposer, mais il ne voulait personne avec lui pour cette fois. Si les choses n'allaient pas, il avait sa magie, Unité, et Silarae qui pourrait voler plus vite que le vent lui même pour le soutenir. C'était bien assez d'assurance à son goût. Et après un long moment, plusieurs heures, il sembla enfin qu'il touchait au but. Faisant ralentir sa monture, il la laissa hennir et étendit ses sens magiques pour trouver ce qui se dissimulait dans les environs. Fronçant légèrement les sourcils, il balaya la scène de son regard de clair lagon, sentant que quelque chose n'allait pas. Puis, en se détendant de nouveau, il comprit et usa d'un sortilège d’illusionniste pour feindre ses battements de coeur. Encore un moment à attendre et il le vit lui foncer dessus sans sembler vraiment comprendre ce qu'il faisait. Le dragonnier l'accueillit d'un coup net sur la tempe qui l'étala de tout son long par terre, une position qu'il maintint par magie en observant la créature, tandis que l'illusion se dissipait.

Un jeune. Probablement pas plus de quelques semaines. Du gâchi si on ne le dressait pas correctement. Il descendit de cheval au moment où il la sentait enfin, et son expression impassible et dure se détendit tandis qu'il relevait les yeux, son regard passant sur elle comme une caresse affectueuse mais distante. « Vanaël... » Il observa de nouveau le nouveau-né. « Il est à toi ? » Question rhétorique, il s'en doutait un peu, mais quand même. Un nouveau silence, puis il approcha d'elle lentement, jusqu'à se tenir à ses côtés ; face à elle. Face à cette vampiresse qui, un jour, avait également apprit. Lui prenant la main, il la porta à ses lèvres, y déposant un léger baisé avant de faire de même sur l'intérieur de son poignet avant de la relâcher. « Je t'attendais... » Parlait-il de cet instant, d'Aigue, ou des deux à la fois ? Peut-être de tout autre chose, d'ailleurs. Dans tous les cas, il était satisfait de poser à nouveau les yeux sur elle. « Ta vue est une source qui m'abreuve, quoiqu'elle se pare de voiles délétères. Je ne me cherche nulle excuse, mais sache que, quelque soit tes décisions, tu trouveras toujours reconnaissance, auprès de moi... » Que cela soit dit, avant toute chose. Il ne l'accusait ni ne la mettait en cause….

----------La journée commençait mal au sein du camp vampirique. Ils étaient partis en vitesse, et depuis, chaque jour était une course contre le temps, afin de rattraper le plus possible de troupes alayiennes. Cela incombait ainsi une ribambelle de problèmes, qui étaient loin d'être rapide à résoudre. Chaque jour et chaque nuit avait son lot de blessés, mais surtout, son lot de nouveaux nés, dont il fallait s'occuper. Ils étaient affamés, perdus, et pour une partie quelque peu dépressifs. Il fallait les comprendre, ils arrivaient dans un monde en mouvement, où ils étaient bridés au possible, contraint chaque jour de subir les reproches de leurs ainés face à leur comportement. Ils devaient apprendre à contenir leur faim, à se comporter dignement, et à faire face au souvenirs qui parfois émergeaient, rendant les choses encore plus complexes. Vanaël passa ainsi la majeure partie de la matinée à apprendre aux vampires leur condition, afin qu'ils aient une bonne idée de ce dans quoi ils venaient d'arriver. Survivre dans la masse, se faire sa place, tout ceci en respectant ceux qui le méritent et en veillant à ne pas trahir les siens. Il n'était pas évident de se faire un place au sein des vampires, encore moins durant cette période mouvementée. Et faire en sorte que chaque vampire ici présent soit apte à se rendre utile et à servir les intérêts de son peuple demandait beaucoup de temps et d'investissements. Si seulement la vampiresse pouvait n'avoir à s'occuper que de ceux qu'elle avait mordue, ce serait raisonnable, et ne représenterait pas une part trop importante de travail. Mais non, malheureusement, il y en avait d'autres qui s'ajoutaient à cette liste, à sa plus grande peine. La vampiresse avait d'autre objectifs que cela, et elle espérait pouvoir gagner de l'influence auprès de son prince pour assumer pleinement son rôle de conseillère, et ainsi le guider dans les choix qu'il se devait de faire pour leur peuple, plutôt que de s'égarer sur des chemins tortueux. Ce jour ci n'était toute fois pas arrivé, loin de là ! Son après midi se consacra à traquer un de ces jeunes, qui pour une raison obscure avait décidé de se faire la malle. Une envie pressante de liberté, ou d'aventures peut-être ? Un souvenir ayant ressurgit, lui donnant le besoin de partir ? Peu importait les raisons, maintenant que la vampiresse s'en était rendu compte, elle devait le récupérer, ce n'était jamais bon de laisser des miettes sur son chemin... Qui plus est c'était un des siens, et elle éprouvait le besoin de le faire soi même, un peu d'air frai ne lui ferait pas de mal à elle non plus !

----------Vanaël harnacha ainsi sa mouture et partit au galop sur les traces de ce jeu imprudent. Épiant d'abord ses traces, elle se dirigeait vers Aigue. Elle ne craignait bien sûr pas de s'approcher de la ville de trop près, ils en étaient tout de même à presque une semaine de marche, elle avait de la marge. Les minutes défilaient, et bientôt elle pu sentir l'odeur du fugitif. Il allait regretter d'avoir osé partir, ou du moins de n'avoir pas mieux préparer son départ. C'était toujours compliqué ce genre de situation... Soit ça allait dans le sens qu'on souhaitait et il ne pensait plus à s'y essayer, soit ça empirait et là, les conséquences étaient plus complexes. L'odeur se faisait de plus en plus forte, elle touchait son but ! Il avait bien courut le bougre. Un autre odeur se faisait sentir, qui n'aurait pas due se trouver ici. Non, c'était absurde, il n'avait aucune raison de venir dans les parages. À moins de la rencontrer ? Il est vrai qu'il avait surement gardé des contacts dans l'armée de Lorenz, ce n'était peut-être pas si étonnant. Mais tout de même, c'était surprenant que de sentir l'odeur de son cher Achroma dans les parages. Il était seul apparemment, et s'approchait à la même allure. Bientôt ses yeux le trouvèrent, avec étendu sur le sol son imbécile de vampire qui avait pris la poudre d'escampette. Elle descendit de cheval, et s'approcha de son vieil ami. Une courbette polie envers lui, ainsi qu'un regard amusé et plein d'étonnement lui firent lieu d'accueil. Elle avait été surprise de ne plus le trouver après la bataille, étant rester tout du long aux cotés de Lorenz, elle n'avait pas vraiment eue l'occasion de voir ce qu'il faisait sur son front. La trahison de Lorenz y avait surement fais quelque chose, il s'était tout de même délaissé d'un bonne partie de ses troupes dans l'affaire, sans vraiment s'en soucier plus que cela...

"Mon cher Achroma..." Elle marqua une légère pause, savourant du regard le visage de son mentor, ami, et allié. "Je le crains oui..." Et oui, celui-ci l'était en effet. Elle n'était pas vraiment fière d'un tel manquement aux règles, surtout devant celui avec qui elle avait appris. Malheureusement, elle avait eue une charge de travail supplémentaire à cause de la guerre, et devait maintenant en assumer la lourde tâche. Comme ce vampire montrait, elle n'y parvenais pas entièrement. Achroma s'approcha alors, se donnant la liberté de la saluer avec charme et délicatesse. C'était toujours plaisant d'être ainsi accueillie... Ainsi l'attendait-il ? C'est bien ce qu'elle s'était dit en sentant sa présence et elle n'en fut ainsi pas vraiment surprise." Ta présence illumine mes jours, les voiles de la nuit se font de plus en plus sombres." Elle avait en effet beau suivre son but d'aider son peuple et de le soutenir du mieux qu'elle pouvait, le doute commençait à prendre racine. Même si les actes de Lorenz se paraissaient de bonnes intentions, comme de montrer que les vampires sont un peuples solitaire, et qu'ils arriveront un jour à faire valoir pleinement leurs droits sur la totalité d'Armanda. Que les autres races ne leur sont que des outils à leur ascension, et qu'il est ainsi bon de le leur rappeler de temps en temps. Oui, malgré cela, Lorenz était en train de s'égarer du chemin. Il avait non seulement trahit trop tôt, bien trop tôt la rébellion, mais il s'était aveuglé d'un objectif dérisoire, qui lui avait ainsi fait perdre du temps, des hommes, et avait aidé Néant dans sa quête. La conseillère voulait bien aider, mais il fallait pour cela qu'elle sache les véritables intentions de Lorenz, ce qui n'était à vrai dire pas le cas. Et sans cela, elle ne pouvait qu'espérer, encore et toujours, de faire le bon choix.

"La reconnaissance d'un père, ou d'un pair, sera toujours la bienvenue, je l'avoue." Elle le regardais d'un air légèrement déconfit, l'esprit relativement perdu quant aux décisions qu'elle devait prendre. "J'ai l'impression que chaque jour me plonge un peu plus dans les limbes de la confusion, c'est troublant..." C'était surement étonnant de la voir se confier ainsi à quelqu'un, et quiconque aurait été dans les parages aurait probablement eu l'impression que c'était une tout autre personne de la vampiresse froide et intransigeante qu'elle se montrait être d'habitude. Pourtant, c'était bien Vanaël, bien qu'elle se comporte de manière quelque peu différent avec Achroma. Elle le connaissait depuis si longtemps, il était pour elle plus qu'un père, et elle ne pouvait ainsi lui exprimer autre chose que de la sympathie et de la bienveillance. Il lisait en elle comme dans un livre ouvert, il ne servait à rien qu'elle tente de lui cacher ses peurs ou ses angoisses, il l'aurait remarqué, elle préférait se confier en toute connaissance de cause, et assumer pleinement son état pitoyable. C'est peut-être un peu exagéré, mais à force de se poser des questions quant à ses choix, la conseillère éprouvait justement le besoin d'être conseillée, et ne trouvant satisfaction elle en devenait moins persévérante. Forcément, à ne pas savoir où l'on va, il est dur de s'y consacrer pleinement ! La seule chose dans lequel elle parvenait à s'investir au maximum était pour s'occuper des jeunes. Elle y prenait plaisir, et comptait bien faire d'eux des vampires dignes de confiance, qui seraient prêts à sacrifier plus que leur vie pour l'avenir de leur peuple. L'absence d'anciens suite à la guerre lui permettait d'être plus présente quant à cela, et elle essayait, du moins pour ceux qui était de son ressort, d'en faire des alliés à sa cause. Par sa cause, elle entendait qu'ils devaient allégeance à Lorenz bien sûr, mais que Vanaël avait autant, voir plus d'autorité auprès d'eux. Ce n'était l'histoire que d'une bonne dizaine de vampires pour l'instant, dont celui qu'elle s'était accaparée lors de la rencontre avec le maître des esclaves et celui qui gisait inconscient à quelques mètres d'eux, mais c'était un bon début.

Elle était délicieuse… mais s'il était ravi de la retrouver, les récents événements jetaient une ombre sur leur entretient. L'heure n'était certainement pas aux frivolités, ni à la douceur, quoi qu'ils puissent au demeurant partager. L'heure était grave. Et s'il n'était pas aussi troublé qu'elle semblait l'être, il avait tant de préoccupations que cela ne faisait guère de différence, aussi n'était-il pas prompte à la juger d'une quelque façon que ce soit… Il comprenait parfaitement ce qu'elle vivait. Et d'une certaine façon, il était profondément désolé de lui infliger cela. Car c'était en partie sa faute, en partie au moins. S'il avait pu agir différemment, il l'aurait fait. Hélas, ce n'était pas possible. Face à l'ingérence de Lorenz, il n'y avait pas des milliers de solutions, et il n'aurait absolument pas pu poursuivre avec l'armée… Pourtant ça aurait sans doute était, d'une certaine façon, plus simple de s'enfouir encore la tête dans la terre, au moins pour un temps. Mais elle n'était pas aveugle bien au contraire, et elle s'inquiétait elle-même de plus en plus des agissements et façons de Lorenz. Cela allait même au-delà et il aurait voulu pouvoir la rassurer, tout simplement. Mais il n'était pas un hypocrite, quoi qu'on puisse penser de lui au demeurant…

« Ce n'est guère surprenant, le monde entier part à la dérive, ne se poser aucune question serait bien étrange, et preuve d'une terrible insouciance. Je suis dans le même cas que vous… Je m'interroge » Il fronça sensiblement les sourcils, mais son regard restait paisible malgré tout, comme s'il s'intitulait une fois encore montagne face à la tempête, impassible. « Lever les voiles dissimulant les intentions de Lorenz Wintel ne peut qu'apporter de nombreux questionnements, n'est-il pas ? » Nouveau silence. Lui et le soit disant prince avaient toujours entretenu une étrange relation. Lorenz aurait pu être son élève, à l'époque, s'il avait été dans ses habitudes de voler un fils à un autre vampire, s'il avait eut le temps pour un second apprenti… Mais ce n'était pas le cas. Il avait consacré une grande partie de son attention à Vanaël, justement, en plus de ses autres devoirs. Se serait-il, pourtant, laissé prendre en traître s'il avait été son maître ? Non, il ne lui aurait pas laissé l'opportunité de le tuer. Mais ça allait bien au-delà de cela… Lorenz était fondamentalement incapable de comprendre sa façon de penser, sa logique et sa manière d'être, et pour cela il lui était dangereux. Un adversaire, un rival que l'on ne pouvait cerner, était tout à fait capable de vous prendre par surprise et de vous vaincre… ils savaient cela, tous deux. Comme ils savaient que Lorenz serait mort s'il n'avait pas bu le sang du dragon.

Sans compter le poids politique qu'il avait, auprès du peuple vampirique. La désertion des anciens avait donné un coup à son pouvoir. Il en avait même perdu son meilleur réseau d'espions, avec Aegle. Et pourtant, ce n'était que le début. « Je le lui rendrais, Lorenz se soucie réellement de la place des vampires, et de leur réhabilitation. Il veut vraiment leur rendre une place digne de ce nom. Mais ce n'est pas sa seule motivation. La vengeance en est une autre… Avoir été intimement lié à lui m'en a appris davantage sur ses motivations, sur son passé. La vengeance… une autre façon que nous devrions pouvoir comprendre. Mais lorsqu'elle vise le génocide d'un peuple entier et l'asservissement d'un autre, je ne peux le soutenir. Ce n'est pas ainsi que je désirais nous voir reprendre place en ce monde, ça n'a jamais été ainsi… Pendant un moment, je me suis consacré à ce devoir, à mon rôle d'ancien et de champion vampirique, je le devais, les enfants avaient besoin de moi, d'un père et d'un protecteur autant qu'ils ont besoin d'une mère. La traîtrise perpétrée durant l'aube rouge était cependant de trop… Cette alliance était une bonne chose à mon sens, et même si je savais qu'il finirait par leur tourner le dos, je ne pensais pas qu'il le ferait pour un si piètre gain. En vérité, qu'y as-t-il gagné exactement ? Un répit éventuelle avec l'entité glorienne ? »

Il baissa à nouveau les yeux alors que le jeune vampire semblait gigoter un peu, mais le coup qu'il lui avait mit était suffisant pour qu'il reste un peu tranquille… Secouant légèrement la tête, il revint à la diamantine, près de lui. « Le sais-tu, toi ? Ce qu'il a gagné à tout cela ? A part un suicide politique évidemment. Non, tu ne sais pas non plus, n'est-ce pas… ? Je parviens péniblement à conserver quelques acquis, auprès des rebelles, mais jamais plus il ne feront confiance avec la même sincérité… Ce fut un pas en avant pour trois en arrière » Et cela entraînait de nombreuses conséquences… « … Et les perles ? Qu'en fait-il, dis moi »

----------Qu'il était bon d'enfin profiter d'un moment de tranquillité avec son désirable ami, au milieu de cette pleine balayée par le vent tiède de l'été. Le moment était agréable, mais malheureusement, il ne se prêtait pas à la situation, Vanaël et Achroma avaient bien des soucis à aborder, et peu de temps pour profiter l'un de l'autre... Les paroles de l'ancien étaient sensées, comme toujours, et il avait le talent de mettre en évidence les problèmes les plus importants pour l'heure. Comme il e disait si justement, Lorenz était le cadet de leurs soucis, et sa soif de vengeance envers les elfes ne prévalait rien de bon. La vampiresse le comprenait sur le fait que les autres races leurs étaient inférieurs, et elle l'appuyait sur ce point. Elle même était d'avis de mettre en avant la prédominance que se devait d'avoir leur peuple. Un asservissement, peut-être pas, mais au moins le règne des leurs. Ils s'étaient fait pourchasser, traquer des millénaires durant, tout cela parce que les autres peuples n'étaient pas prêts à payer le tribut de sang et de personnes qu'il leur devait. Oui ils le leur devait ! Les vampires en avaient besoin pour la survie et la prolifération de leur population, et si c'était le cas, c'est qu'ils avaient été jugés supérieurs aux autres races. Les dragons leur était égaux, puisqu'ils ne pouvait s'en nourrir, voire même supérieurs de par leur puissance et leur savoir procuré par leur mémoire ancestrale. Ils avaient du subir l'affront de se terrer dans ses galeries, attendant leur heure et nourrissant leur haine pour les autres races. En cela, Achroma avait fait le bon choix en partant. Le siècle durant lequel il s'était absenté lui avait permit de se libérer de cette atmosphère nuisible qui régnait dans le royaume. La conseillère en était consciente, être restés plusieurs siècles à patienter sans faire preuve de discernement et sans oser se montrer leur avait coûter cher moralement. Les vampires en étaient devenus hargneux et leur esprit se délectaient peu à peu de la vengeance qu'ils allaient pouvoir savourer. Elle même s'y était fait prendre, et nourrissait une haine sans nom pour les elfes, ou du moins pour leur peuple. Détruire le conseil, les membres encore présent depuis les guerres entre leur peuples, était un objectif séduisant, dont elle ne se priverait pas si l'occasion se présentait ! Mais en bon vampire qu'elle était, Vanaël savait attendre son heure pour savourer sa vengeance, et le moment était loin d'y être propice, ainsi que le soulevait Achroma.

"Il est trop fier de son peuple et de lui même pour accepter cette alliance plus longtemps, et je pense le comprendre sur ce point, il est difficile d'accepter une telle situation au vu de notre manière de vivre. Mais il est vrai que s'isoler à ce moment ne lui a rien apporté, il y a même plus perdu qu'autre chose, que ce soit en terme de moral, de troupes, ou même quant à l'avenir de notre peuple."

Elle marqua une pause, remarquant que son chenapan de vampire commençait lentement à reprendre ses esprits. Vanaël posa son index sur ses lèvres avant d'englober d'un geste souple son admiré ami ainsi qu'elle même. Elle ne tenait pas à ce qu'ils puissent dire sur Lorenz soit entenu, ni même à ce qu'il voie qu'elle était en compagnie d'Achroma, aussi leva-t-elle ses paumes devant elle afin de créer un brume l'enveloppant elle ainsi que son compère ancestral. C'était une mesure quelque peu épuisante, certes, mais toutefois nécessaire. Et s'il lui venait à l'idée de reprendre la fuite, elle le sentirais de toute manière. Ce serais un geste bien effronté de sa part de s'y essayer, maintenant qu'il se savait attrapé... Elle reprit alors la parole, répondant ainsi à ce qu'Achroma avait énoncé.

"Peut-être y trouves-t-il un quelconque intérêt, mais je serais bien incapable de te dire lequel... Je n'en ai moi non plus pas la moindre idée. Son action va nous coûter beaucoup, c'est certain. Mais il est malheureusement trop puissant et bien entouré pour qu'on s'essaye à le détrôner..." L'idée lui avait vaguement traversée l'esprit à une ou deux reprises, mais restait du domaine du fantasme pour le moment. Avec son presque frère à ses cotés, qui était non seulement dragonnier, mais aussi baptistrel, il aurait été insolent de s'y risquer, aussi bien entouré qu'on puisse l'être.."Il ne semble pas s'en soucier, il est omnibulé par l'annihilation des Alayiens, et semble plus inquiet d'avoir été séparé de sa compagne humaine ainsi que de sa général que du sort de l'Armanda..." C'était une triste réalité, qu'il était bien dur de digérer.

"Je serais curieuse de savoir ce que tu sais de lui d'ailleurs. J'ai beau connaître son nom depuis bien des siècles, je dois avouer ne pas en savoir beaucoup sur sa personne. Combler cette tare pourrait être intéressant, voir même vital." En apprendre plus sur ses alliés était en effet primordial, surtout dans des situations comme celle-ci, où l'on n'était loin d'être certain que nos alliés ne deviennent nos ennemis. Et en ce sens, il était ainsi au moins autant important de s'informer des rebelles. "Et de ton côté, comment se déroule les choses ? Tu parviens à calmer les discordes entre les peuples ? J'aimerais t'aider, sois en certain, mais il y a tant à faire pour les notre, je ne peux me diviser. Hélas !"

----------La majorité des siens étaient aux cotés de son prince, elle se sentait en effet obligée de rester, ne serais-ce que pour tenter encore et toujours de jouer son rôle. À savoir celui de conseillère, mais aussi et surtout celui de mère, de protectrice, et de préceptrice. Un rôle qu'elle jugeait nécessaire et qu'elle se refusait à abandonner pour l'instant. Trop nombreux étaient les vampires qui en avaient besoin, et c'était essentiel au futur de leur peuple.

Était-ce bien de son peuple qu'il était fier? N'était-ce pas plutôt d'une image, d'une illusion, qu'il était fier ? Une aberration de son esprit projetant son arrogance pour faire des vampires un mirage de sa propre personne. Le doute demeurait dans son esprit. En revanche il était clair qu'il était fier de lui-même. Bien trop fier. Trop fier… son arrogance l'aveuglait. Mais c'était dans son intérêt à lui , ou leur intérêt à eux. Qu'il soit trop sûr de lui le ferait plus aisément tomber dans les chausses trappes qu'il comptait lui réserver. Il avait là un avantage de plus, si on comptait que l'incompréhension demeurant entre eux en était un second. Mais l'illusion se paraît de réalité pour au moins une chose… les vampires étaient trop fiers d'eux-même et souvent à tort. Rien de comparable avec ses pairs, ou les ancestraux tels que Vanaël… eux avaient des raisons d'être fiers. Mais ce n'était pas le cas de la masse. Ce n'était pas une question de manière de vivre, c'était avant cela une question d'état d'esprit. Une des raisons pour lesquelles il souhaitait réformer leur race. Pour le reste, il ne pouvait que la croire sur parole quand aux conséquences internes de la trahison des vampires. Lui n'avait aucunement l'opportunité de jauger de la réaction de l'armée, même s'il l'imaginait fort bien et qu'il s'étonnait de savoir que les soldats de l'ombre puissent être démoralisés. D'où cela pouvait-il provenir exactement ? Il allait devoir demander des précisions à Aegle.

Il la laissa user de la magie pour les dissimuler, mais lui transmit de son énergie sans en avoir l'air, très discrètement. L'attention était délicate, quoi qu'elle pouvait surtout signifier qu'elle tenait à son enfant. Quoi qu'il en soit, il avait bien plus de réserves énergétique qu'elle, lui en offrir n'avait donc rien d'un terrible sacrifice. La discussion repris. Un intérêt à son action ? Il se demandait bien lequel. En revanche, il savait effectivement ce que le prince auto proclamé avait pu perdre. Les vampires étaient plus isolés que jamais. Les loyalistes les pourchasseraient, les rebelles également, et si les alayiens se regroupaient, ils seraient également une cible. Trop puissant et bien entouré ? Peut-être pas tant que cela en réalité… Mais Vanaël n'était pas encore au courant, elle le serait après leur entrevue. Finalement, il reprit la parole. « Les rebelles se méfient, on ne peut les blâmer. Mais ils ont bien comprit que tous les vampires ne se comportaient pas comme ceux qui ont trahit leur cause. Lentement, ils ré apprennent à faire confiance à mes partisans. Cependant, il est clair qu'il faudra bien plus que cela pour parvenir à leur faire accepter les vampires dans leur globalité…. » Il soupira posément puis poursuivit « Ne le pense pas au-delà notre portée. Il est puissant, certes. Mais nous aussi, et nous le seront bien plus encore, une fois mon travail achevé. Je construis la caste des dragonniers… »

Il eut un sourire « J'ai discuté avec le créateur du lien, et il m'a appris énormément de choses. De secrets. Il m'a aussi avoué la vérité. Sa vérité. Le lien a été construit pour rivaliser avec les Supérieurs. Et eux seuls seront à craindre lorsque nous combattrons comme un. Alors il tremblera… mais en attendant, je pense qu'il est important que tu conserves ta place. Les enfants ont besoin de toi, Vanaël » Elle ferait une très bonne mère. Il en était certain. « Il y a tant de mauvaises influences qu'une bonne serait providentielle. Poursuit ton œuvre, notre œuvre. Gagne des soutiens et une place plus importante encore. Le moment venu, ce sera d'autant plus important que je te soutiendrais pour l'obtention du titre de princesse » Un silence ponctua leur dialogue, durant lequel son regard se perdit dans l'avenir potentiel qu'il entrevoyait et aidait à dessiner. Il reprit après un moment. « Cendremont est prisonnier mais il ne le sera pas indéfiniment. Je sais qu'il t'a offert une alliance, mais méfie toi de lui. Crois-moi, il ne t'apportera pas ce que nous désirons. Il sait se contrôler, mais ses penchants vont à l'encontre de tout ce qui ferait la grandeur de notre race. Que l'on nous vois comme des monstres n'est pas notre but... »

----------L'avenir était toujours une chose forte incertaine, et être à même de voir ce qu'il pouvait offrir était bien difficile. Chaque informations étaient primordiales, que ce soit du simple ragot à la missive d'un chef, rien ne devait être mis de côté, et il fallait être attentif, réceptif au monde qui nous entoure. Avec les Alayiens et Néant qui menaçaient leur terre, ainsi que leurs alliés, qui risquait de n'être que potentiel, il était indispensable d'être bien informés. C'était d'ailleurs une véritable bataille qui était menée quand à cela, chacun cherchant à en apprendre sur les uns et les autres sans pour autant commencer d'affrontements. Et que ce soit un allié ou un ennemi, il était toujours bon d'en apprendre plus. Ainsi, ce que la vampiresse apprenait quant à la création d'une Caste des Dragonniers l'intéressait vivement, qui plus est lorsque c'était son cher ami qui semblait en être à la tête. Les paroles de ce dernier étaient toujours synonymes de justesse et de clairvoyance. Achroma avait le talent de percevoir les choses correctement et la conseillère l'écoutait avec intérêt.

" Le... " Vanaël marqua une pause, écarquillant les yeux suite à une telle annonce. "Créateur du lien ? C'est une bien curieuse rencontre qui voici ! Qu'est-t-il pour être parvenu à perdurer ainsi à travers les âges ? S'il en est le créateur, il a plus de 2 mille ans ! Même peut-être pas loin de 3 mille ! A moins d'être un dragon, je vois mal comme une telle espérance de vie est possible. Il me semble en tout cas bien arrogant, pour oser vouloir s'opposer aux Grands esprits ! Certes, je comprends qu'avec l'apparition de Néant, il soit envisagé de devenir plus puissant afin de ne pas avoir à dépendre de nos créateurs pour assurer notre survie, mais tout de même... Une telle éventualité est quelque peu effrayante, non ? Qu'as-tu pensé de ce Créateur ? La puissance n'est pas toujours la meilleure solution, j'ai peur que tu ne soit en train de te dévouer trop pleinement dans cette quête de pouvoir. Ces intentions étaient-elles percevables ?"

----------Elle n'avait jamais été une vampiresse d'une puissance exemplaire, et ne s'en était en effet jamais plaint, il y avait d'autres moyens de parvenir à ses fins qu'en faisant prévaloir ses droits sur autrui par la force. Et d'ailleurs, c'est aussi ce qu'elle faisait lorsqu'elle était une elfe, d'une puissance similaire, même plus médiocre, elle ne baissait pas les bras et cherchait à progresser sur la bonne voie. Elle n'était alors pas conseillère, mais diplomate, et avait ainsi toujours cherché à avoir une influence sur les gens de pouvoir Le fait d'être devenu une vampiresse n'avait au final pas changé grand chose, bien qu'elle ne s'en rende compte faute de souvenirs. Hormis la cause qu'elle servait, ses buts et ses moyens demeuraient en grande partie les mêmes. Mais malgré cela, elle ne pouvait rester indifférente à l'alléchante proposition que lui faisait Achroma. Le titre de princesse... aaahhh ! quel doux son était-ce pour la Diamantine. C'était aussi bien des responsabilités, et une prise de risque considérable, mais pouvoir enfin diriger son peuple ainsi qu'elle le souhaitait la rendait d'humeur joyeuse. *Ce serait une bien belle récompense...* Il était bien difficile de renoncer au pouvoir lorsque celui-ci se présentait à soi sur un plateau d'argent, tout comme il l'était que d'accepter ce lourd fardeau et d'en assumer les pleines conséquences en prenant par la suite les bonnes décisions. La sagesse était une qualité bien rare, il fallait chérir et valoriser ceux qui en faisait preuve, car c'était eux qui permettrait de progresser et de construire un avenir digne de ce nom.

"Je ferais en sorte d'être à la hauteur de tes espérances, ce n'est pas toujours facile... Tu es presque aussi pointilleux et perfectionniste que moi, voire peut-être même plus, cela fait longtemps que je n'ai pas eu le loisir d'en faire les frais. Quant au maître des esclaves, ce n'est qu'un pion, il a bien trop peu de fidélité pour qu'on puisse lui accorder ne serait-ce qu'une once de confiance. Je ne fais que l'utiliser afin de satisfaire ma curiosité. Le fait qu'il puisse me fournir un accès plus libre à nos esclaves m'est utile pour mes recherches. Comme tu t'en doutes, je suis toujours aussi avide connaissances et d'informations qu'auparavant, si ce n'est plus. "

----------Ce n'était qu'énoncer une vérité, qui était si flagrante et significative de sa personne que ne pas l'accepter aurait été renier sa propre existence. La vampiresse s'arrêta là dessus, hésitante dans sa démarche. Elle voulait montrer à son ami la joie qu'elle éprouvait de le revoir et d'avoir un moment rien qu'à eux (enfin, presque, mais l'autre vampire ne compte pas), mais n'étais pas sûre de savoir comment le lui montrer autrement que par la parole. Elle s'approcha ainsi lentement de lui, et lui prit les mains. L'ancestrale regardais Achroma avec douceur, chose rare chez elle. Ses yeux d'émeraude étaient plus clair que d'habitude, et se reflétait en leur centre l'objet de son désir. Cet immense vampire qu'elle appréciait tout particulièrement, et pour lequel elle cultivait une admiration et un respect tout particulier.

Il avait parfaitement conscience de l'intérêt qu'elle porterait à la question. Qu'elle réagisse différemment aurait été terriblement dommage après tout. Il pencha un instant la tête en l'observant attentivement. Oui, bien dommage effectivement et terriblement sot d'ailleurs, de sa part. Ne pas s'intéresser à un tel sujet aurait été sot, oui. Mais Vanaël était beaucoup de choses, beaucoup, mais pas sotte. Ça aussi c'était certain. « Ses intentions, il me les a révélé, entièrement. Et bien plus encore. Il m'a révélé énormément de secrets. Beaucoup que je ne peux transmettre, pas même à mes pairs dragonniers, parce que ce droit ne m'appartient pas » Qu'elle ne s’affole pas à l'idée d'obtenir toutes les confessions d'Edwyn Ruddy. Il voulait être honnête, ainsi il lui en parlait, mais lui faisait aussi confiance pour comprendre sa position. Peut-être qu'un jour, les choses changeraient, et lui permettraient de tout avouer. Mais pour le moment ce n'était pas envisageable.

« Ce que je peux t'en dire, cependant, c'est que cette créature a bien plus de trois mille ans. Edwyn est issu de la première race Armandéenne, les Tarenth, bien aimé des esprits. Il est immortel. D'une véritable immortalité, et bien plus proche des esprits que nous. Et oui il était arrogant. Il l'est encore, mais moins. Il a fait des erreurs qui lui ont coûté. Et Néant n'a rien à voir là-dedans. Néant n'a jamais été le problème. Néant est un esprit supérieur, elle existait bien avant que nous ayons conscience d'elle et existera bien après nous. Mais de ses raisons, je ne parlerais pas davantage, elles lui appartiennent. Et je ne recherche pas le pouvoir, il n'est qu'une conséquence de mes aspirations. Ce que je désire, exactement comme lui, c'est l'unité » Il sourit « Je ne juge pas pour les autres, chacun est libre quand à son attitude face à lui, il est le premier à l'affirmer. Je l'ai pardonné, et soutenu, voilà tout. Il n'avait pas de raison de s'attarder auprès de nous, mais il l'a fait…. »

Tout simplement. Il avait sauvé Silarae, Ashy, Korentin… Il avait fait tant d'autres choses également. Mais elle ne pouvait pas comprendre, pas complètement, parce qu'elle n'était pas dragonnière. Cependant, elle comprendrait beaucoup et c'était déjà très bien. Ce n'était de toute façon pas le plus important pour elle. Ce qui était important pour elle, c'était ce qu'il lui offrait. La caste ne serait sous aucune coupe, sous aucune domination. Il guiderait les siens, mais pas en tyran, non… Et elle ? Elle ferait une bonne princesse. Lui abandonnant ses mains il l'observa une fois de plus avec attention, oscillant et savourant une envie bien particulière. Qu'il finit par mettre à exécution.

Et d'une délicate pensée, s'introduisit dans son esprit, un bref instant, pour en prendre la teneur. Une teneur qui le fit soupirer. Avec délicatesse. Elle était adorable, comme une jeune pêche à peine mûrie dans laquelle on aurait voulu croquer. « Vous le montrer fort bien, ma chère... » Il éleva une main, après l'avoir libérée, et il effleura le contour d'une joue pâle à l’albâtre agréable, un bref instant, avant de glisser sa paume sur sa taille fine, déployant leurs mains jointes dans une posture de danse. Ses yeux pétillaient doucement, trahissant son amusement. « Me ferez-vous l'honneur ? » Un rire chaud lui fut soutiré, alors qu'il l'entraîna mine de rien dans un pas simple, alanguis, sous les étoiles.

----------Il n'était pas chose nouvelle qu'Achroma garde pour lui de nombreux secrets, et la vampiresse était bien de son avis sur ce point ! Les secrets étaient un bien précieux, et être le gardien de ces trésors était un privilège certain ! Vanaël prenait d'ailleurs plaisir à en obtenir auprès des autres, avide de renseignements. Elle fut tout de même curieuse de voir à quel point son mentor semblait lui cacher des choses, qui ne semblaient pourtant pas si importantes que cela. Savoir qu'une autre race bien plus ancienne, presque qu'autant que le dragons, voire peut-être même plus, existait encore à ce jour, c'était pour le moins stupéfiant ! En revanche, elle bloqua sur un mot. Auprès de nous disait-il ? Voulait-il faire mention à la bataille des bois sombres, lorsqu'ils avaient investit le monde Astral lui ainsi que Korentin, ainsi que bien sûr, leurs liées respectives, ou voulait-il parler des armandéens en général ? Ses deux dernières phrases étaient vagues, trop pour satisfaire la curiosité de la conseillère. Elle comprenait son envie de conserver ses secrets, et qu'il ne puisse tout lui dévoiler, mais il semblait parler ici d'un moment peut-être plus... personnel. Et sa personne intéressait beaucoup Vanaël. C'était même au delà de l'intérêt, c'était un amour fraternel, elle le considérait comme son grand frère oui, lui qui l'avait éduqué alors qu'elle était arrivée dans ce monde obscur et rude qu'était celui des vampires. Il avait fait en sorte qu'elle soit à même de se protéger, et elle ne pouvait que le remercier pour cela. Elle n'avait pas cherché, comme son prince l'avait fait, à surpasser ce maître. Elle n'en avait point l'envie premièrement, trouvant bien stupide de supprimer une personne plus faible que soit, alors qu'elle peut encore se rendre utile. Et dans un deuxième temps, elle se savait encore faible en comparaison à Achroma, ou même à Lorenz. Elle avait eue la chance de bénéficier de son influence pour s'élever parmi les siens, elle avait travaillée ardemment afin d'exploiter au mieux ses compétences et ainsi se faire respecter. Mais en terme de puissance magique, ou même de puissance à travers sa présence, elle était consciente d'être encore bien en déca de ce qu'elle devait viser pour atteindre ses objectifs.

"Arrêtes-moi si mes questions dépassent le domaine de ce à quoi tu peux répondre, je le comprendrais bien sûr. Cela peut paraître simplet, mais si ce n'est Néant le problème, quel est-il ? Quelle puissance met donc en danger notre continent si ce n'est elle ? N'est-ce pas cet Esprit qui menace d'annihiler la magie présente sur notre terre ?"

----------Alors qu'elle marquait une pause, son bien aimé ami fut pris d'une envie surprenante, et l'invita joyeusement à danser. La vampiresse était pour le coup étonnée, et le rire chaud qu'elle émit ne manqua pas de le montrer. "Je suis toute à toi mon cher, tu le sais bien..." Ses pas suivaient ceux de l'ancien, son regard d'émeraude fixait celui vert-bleu de son cavalier. Vanaël se sentait bien petite maintenant qu'elle était si proche du dragonnier, et la main qui lui enserrait la taille lui donnait une sensation agréable de protection. Elle était sereine, reposée. Elle se sentait libre, et surtout libérée des soucis actuels. Les deux millénaires étaient dans une bulle, virevoltant joyeusement au rythme d'un je ne sais quoi d'irréalisme. Vanaël se fichait bien en ce moment de son statut, de celui de son ami, ou même du lieu où ils étaient, de même que des raisons qui l'avait amenée à se rendre ici. Non, ce qui importait, c'est qu'elle pouvait jouir d'un moment de solitude en compagnie d'un ami cher, pour qui elle était prête à bien des choses ! Profitant d'une légère pause, durant laquelle Achroma contemplait une fois de plus le visage lumineux de la vampiresse, celle-ci le questionna, rebondissant sur un élément qui l'avait marqué.

"Tu as dis «auprès de nous», entendait-tu qu'il n'avait pas de raison de s'attarder auprès de ce continent qui l'a pourtant hébergé de si longue années, ou faisait-tu mention à votre aventure astrale à toi et Dame Silarae, en compagnie des autres dragonniers ?"

----------Elle s'inquiétait de son sort, l'attirance qu'elle éprouvait pour lui n'y étant pas pour rien. C'était un frère et un ami, et en tant que sœur, elle trouvait normal d'être ainsi soucieuse quant à sa personne. C'était un peu l'exception qui faisait la règle, la vampiresse se fichant bien du sort des autres. Tant qu'ils remplissaient leurs fonctions et pouvaient se montrer utile, elle était satisfaite, et dans le cas contraire, ce n'était que des indésirables. Alors qu'Achroma.... c'était différent ! Et de loin ! Comment ne pouvait-elle pas être plus délicate envers lui ? Elle lui était redevable de sa personne, et même si dans les faits ce n'était pas lui qui l'avait mordu, il s'était comportait envers elle comme s'il l'avait accepté en tant que sienne. Elle ne pouvait qu'être plus... sociable.

Il savait qu'elle cogiterait sur ses paroles. Il ne pouvait en être qu'ainsi et d'ailleurs le contraire aurait été dommage. Et ses questionnements ne le vexait pas. Ils étaient bien assez sages pour accepter les décisions de l'un et de l'autre. Vanaël ne lui en voudrait pas, s'il décidait de ne pas répondre. Et s'il pouvait répondre, il le ferait avec plaisir car il lui faisait confiance. Il ne fermerait pas les yeux pour autant en lui offrant tout aveuglément, mais il lui faisait effectivement confiance. Cela aussi, elle le comprenait sans doute parfaitement. « Le comportement de Néant n'est que le fruit d'un tort et d'une malfaisance bien plus réelle et brute. Je n'aime pas parler en terme de bien et de mal, mais cette créature est effectivement mauvaise. C'est cette créature qui pousse Néant à tant de folie. Elle est décrite, dans la prophétie. Vraorg le voleur de cœur. Le voleur du cœur de Néant » La question était terriblement grave. Il ne pouvait lui révéler l’entièreté de la vérité mais elle en saurait déjà assez ainsi. La prophétie n'était plus un secret depuis déjà un moment. Curieuse comme elle l'était, elle l'avait étudié et si ce n'était pas le cas, il la lui apprendrait. Ce n'était pas quelque chose qu'il fallait ignorer, c'était quelque chose qu'il fallait régler. Pourtant, pour toute la gravité de ses paroles, il continuait cette danse qu'il avait initié, comme si rien n'y paraissait. A croire qu'il avait finit par s'habituer à agir ainsi. Avant l'aube rouge, déjà, il s'efforçait de ne pas céder à l'inquiétude, afin d'offrir un solide support aux autres.

En apparence, tout semblait aller bien. En apparence, tout était… et bien oui, tel que cette danse le semblait. Harmonieuse. Paisible. Et pourtant la situation ne l'était pas, quand bien même goûtait-il à l'échange avec plaisir. Qui n'aurait pas apprécié de danser avec une si délicieuse créature ? Vanaël avait de l'esprit, et comme lui, elle n'était plus une enfant. Et elle n'était pas désagréable à regarder non plus, en y pensant. Ses questions supplémentaires virent, et il répondit après un instant, pensif, continuant de l'entraîner avec lui. « Certes, il aurait pu ne pas rester sur ce continent. Son peuple en fut banni si j'ai bien compris. Mais je faisais référence à notre caste, à nous, dragonniers. Nous sommes ses frères. Nous sommes ses enfants, d'une certaine façon. Et pour nous il serait prêt à tout. Il veut nous protéger. Et même si j'entrevois encore une part d'ombre chez lui je sais qu'il ne ferait rien contre nous, il ne nous fera aucun mal. C'est une sensation… terriblement étrange, de se sentir plus jeune qu'un autre. Plus faible. Je n'en avais plus l'habitude » Un vague sourire vint réchauffer ses traits pendant un moment « Mais tu as tort, je ne suis pas allé sur le plan astral. Je n'étais pas en état de le faire et je le regrette. Mais peut-être cela changera-t-il dans le futur. Je n'en sais rien. Encore faut-il survivre je suppose... »

Enfin, il cessa leur danse, tenant encore simplement sa main dans la sienne. L'observant avec attention, avec intensité, il poursuivit. « Edwyn aurait préféré resté auprès de nous et m'aider. Il voulait nous enseigner. Mais son temps manquait. Alors il m'a transmit sa sagesse, pour que je l'offre en retour à mes pairs. En se confiant à moi il a fait plus que me donner des certitudes. Il a fait de moi son héritier, un rassembleur pour les dragonniers. J'ai l'intention de les établir sur l'île du flocon. J'espère que tu viendras nous rendre visite. Comme... » Un sourire un peu ironique « Comme ambassadrice des vampires ? »

----------Comment avait-elle pu oublier les fait de la prophétie ? Elle les avait entendue pourtant ! Elle avait même pris le soin de les écrire ! Achroma lui faisait-il tant tourner la tête que cela ? C'était à croire que oui. Elle se souvenait bien sur de ce nom, Vraorg, auquel elle ne parvenait à associer aucune entité, aussi bien parmi les humains, les elfes, les vampires, ou même les dragons. Pourtant, elle en avait connu une quantité non négligeable depuis le temps que ses pieds foulaient le sol d'Armanda... Mais tout de même, constater qu'elle avait pu se permettre de poser une telle question la gênait, à un point rarement atteint ! Elle qui se vantait de son côté d'avoir une bonne mémoire, et qui, même avec ceci, prenait en plus soin de poser à l'écrit ses trouvailles. Non vraiment, c'était perturbant ! La présence en ces lieux de son ancien ami lui procurait de bien étranges réactions, tant est que son embarras se faisait ressentir sur son visage. Ce n'était pourtant rien de bien important en apparence, mais au final, ce n'était pas tant l'erreur qui préoccupait Vanaël, mais plutôt les causes de celles-ci, et le fait d'admettre cela. Elle ne considérait jusqu'alors Achroma que comme un ami, un mentor, ou même un frère, très proche peut-être, encore que durant ces dernières années, cela n'avait pas tant été le cas que cela, mais le lien s'arrêtait là. Et ceci était jusqu'à aujourd'hui une chose que tout deux acceptaient, bien que jamais cela ne leur fut arrivé d'en parler. C'était évident, il était son maître, et aussi proche qu'il ai pu devenir, c'était resté une relation d'amitié. Jusqu'à aujourd'hui, les réactions de Vanaël lui faisaient se poser des questions.

----------Le visage de l'ancestrale était d'ordinaire pourvu d'une blancheur lunaire, dont les seuls éléments qui l'éclairaient étaient ses lèvres sanguine, ainsi que ses yeux dont l'éclat verdoyant contrastait étrangement avec le reste de sa personne. Souvenirs d'une vie elfique, elle ne les regrettait pas, au contraire, les considérant comme le rappel d'une expérience vivifiante, qui lui avait permis de se construire, et de devenir ce qu'elle était a présent. Son visage donc, ou du moins ses pommettes, si tant est qu'elle en ait de bien marquées, semblaient se colorer d'une lueur rougeâtre, virant doucereusement sur un rose chaleureux. Un moment bien étrange qu'elle vivait, mais qui, aussi surprenant que cela puisse paraître, la rendait heureuse. Savoir qu'elle parvenait à exprimer ses sentiments grâce à Achroma la ravissait. Non pas qu'elle était triste d'être devenue une vampire, bien sur que non, elle en était fière ! Fière d'appartenir à cette puissante race ! Néanmoins, elle trouvait bien triste d'être aussi insensible au monde extérieur et aux faits et gestes de son voisinage. Elle qui aimait discuter, et qui l'avait toujours aimé, avait l'impression d'avoir perdu un moyen d'expression. Il était vrai que c'était pratique, que de pouvoir cacher ses émotions lorsqu'on parle à quelqu'un d'étranger, ou d'inamical, rien n'empêchait que la chose en demeurait dommage sur bien des points.

----------Alors que son visage continuait de s'exprimer librement, l'esprit de Vanaël, lui, était concentré sur ce que disait le dragonnier. Et il y avait de quoi l'être ! Elle avait peur de comprendre ce qu'il était en train de lui raconter, et ne pouvait qui lui être reconnaissante de lui faire part de telles déclarations. Pour une fois qu'elle était mise au courant, de choses que peut-être même Lorenz ne savait pas, c'était pour le moins... jouissif ! Oui, c'était le mot... Les informations qu'elle venait d'apprendre étaient en revanche bien moins plaisantes en soi. Elle savait Achroma puissant et était consciente qu'il ne faisait qu'augmenter cette puissance au fil des années, lesquelles commençaient d'ailleurs à devenir nombreuses sur le fil de leur vie, ainsi, savoir qu'un être le surpassait en ce domaine, au point que l'ancien l'admette et en fasse part, c'était surprenant, et en devenait presque effrayant.

"Que vous dragonniers lui deviez votre existence, est-ce que ce lien dont tu as parlé est un fait qui lui revient ? Comment, Ô Dracos, une telle création pourrait-elle être réalisable ? Est-il si puissant que cela ?"

----------Vanaël le laissa interrompre leur danse, ils en avaient profité suffisamment, et cela avait suffit à nourrir le sentiment d'extase qu'elle avait ressentit en rougissant. Elle se sentait rajeunie, en quelque sorte, plus vivante, plus expressive. Le froideur de leur corps se mélangeait, et malgré la nuit tout aussi fraîche par ce temps d'été, la vampire ne pouvait que ce sentir réchauffée. Par la joie de la rencontre, par le sourire léger mais si chaleureux qui venait de décorer le visage de l'ancien, par le regard de son ami qui la fixait intensément... La conseillère entendit bien sur ses projets d'avenir, et ne pouvait que s'en réjouir. Aurait-elle était une elfe ou une humaine qu'elle aurait surement sauté de joie à une telle annonce, mais elle se contenta d'un sourire discret, faisant ressortir légèrement ses pommettes aux couleurs toujours aussi chatoyantes. Elle continuait toutefois de lui faire part de ses interrogations, ses remarques parfois bien crues pouvant choquer. Elle était dure, aussi bien avec soi-même qu'avec les autres, et elle ne s'attardait pas sur les marques d'attention, politesses exclues. Achroma lui en voudrait peut-être pour réagir ainsi, ce serait triste, certes, bien qu'elle en douta. Après tout, il y était habitué, il la connaissait suffisamment bien pour cela.

"Si c'est le cas, ne devons nous pas craindre, nous autres non-liés qu'il ne menace notre existence ? J'admire son action, et ne peut que le féliciter d'avoir permis de se rapprocher ainsi des dragons, soit en conscient, tu connais mon amour pour ces êtres libres, il n'empêche... L'arrogance que tu lui a confirmé, cette part d'ombre dont tu parles, ne crains-tu pas qu'il n'aspire aux même ambitions que Lorenz ? Ne crains-tu pas qu'il ne fasse de vous, ses fils, un moyen d'asseoir la supériorité d'une... nouvelle race ? Je ne renie pas ton bon sens, ni ton objectivité, j'ai simplement..."

----------Elle marqua une pause, hésitante, confuse d'avouer ainsi sa faiblesse, et ce même en l'unique présence d'Achroma. Elle n'osait pas le concéder, et ne parvenait à se faire à cette idée ridicule. Son regard décrocha quelques instants de celui de son mentor, et finalement, lorsqu'elle s'y replongea, ce ne fut que pour la convaincre qu'elle ne pouvait après tout rien lui cacher, qu'il était le seul, l'unique, à qui elle s'accorderait une telle liberté, aussi folle et non-conforme à ce qu'elle était et pouvait être. Elle l'avoua alors d'une voix légère, d'un murmure qui se suffisait à lui même, quelles que soient les paroles qui auraient pu être prononcées.

"J'ai simplement peur... "Encore une pause, plus courte, mais tout aussi marquante au milieu d'un tel discours."Peur que tu puisse être corrompu par les ambitions de cet être qui parait si bon et bienveillant. Peur qu'il ne puisse t'arriver mésaventure, peur que.. Peur de ne pouvoir rester à tes côtés..."

----------Enfin, elle l'avouait ! Oui, enfin franchissait-elle cette ligne qu'elle avait longtemps ignoré, oublié, ou peut-être rejeté. L'ancestrale avait durant de longue année longée cette limite, osant peut-être, quelque-fois, y passer brièvement le bout du pied. Mais jamais elle n'avait décidée de l'aimer plus que d'une simple amitié, qu'elle ait pu être professionnelle, amicale, ou bien même fraternelle. Enfin elle acceptait de reconsidérer sa vision des choses, et de se conformer à ce que ses sentiments lui inculquaient. Vanaël resta quelques moments immobile, triturant nerveusement la main qui retenait la sienne. Elle la pris alors, ainsi que la deuxième, et les serra toute deux contre soi. Dans un même temps, elle baissa les yeux quelques instants, se contentant d'observer ses lèvres sombres, plus que le sang, bien qu'encore loin d'être de la couleur de la nuit.

"D'abord princesse, maintenant ambassadrice des vampires, que voilà de titres élogieux, me caches-tu quelque chose ?"

----------Elle lui disait cela d'une voix qui ne lui correspondait en rien, d'habitude plutôt sèche et impérieuse, ou du moins retranscrivant une certaine autorité, elle se faisait en ce moment frêle, doucereuse, comme si sa personne semblait douter dans son existence, se balançant entre dureté et gentillesse...

La sensation qu'il avait ressentit en apprenant qu'il n'était plus l'être le plus âgé parmi les bipèdes, le poids qu'on lui retirait soudain… tout cela s'était gravé en lui, un ressentit à nul autre pareil. Un soulagement singulière, mêlé à de la surprise, et quelque chose de très diffus qu'il n'aurait su précisément décrire. C'était tellement inattendu ! Tellement invraisemblable ! Le monde dans lequel ils vivaient était si agressif qu'ils mourraient tous relativement jeune. Parvenir à son âge était un miracle. Alors voir un individu encore plus âgé, et immortel, d'une immortalité si différente… oui, il avait été émerveillé, et encore davantage de savoir qu'il était à l'origine du lien des dragonniers. C'était un monde complet qui s'ouvrait pour lui. Un monde où il n'était qu'un nouveau-né et où il devait tout découvrir… cela lui plaisait, l'attirait terriblement. Il voulait pouvoir grandir, en temps que dragonnier et plus uniquement en temps qu'ancien. Les questions de Vanaël, au regard de tout ce qu'elle ne savait pas, le firent sourire. « C'est ce que je t'ai dis, ma chère » Il l'avait bien nommé comme créateur du lien, après tout « Le vois-tu comme un mortel, un membre de nos jeunes races ? Ce n'est pas ce qu'il est, et la première race était bien plus puissante que les mortels et les sangs-froids ne le seront jamais. Plus puissant que Lorenz et sa malédiction » Mais pas plus puissant que ses fils, pas lorsqu'ils seraient unis.

Il avait tellement hâte de cet avènement. Il voulait tellement voir les siens agir comme un. Il voulait tellement les protéger et les voir prospérer. Comme il voulait protéger les vampires, à défaut qu'on avait directement placé la responsabilité sur ses épaules, au sujet de la caste, contrairement à sa race. Il voulait bien faire. Presque comme un enfant voulant faire plaisir à son grand frère, le prenant comme modèle. A défaut qu'il n'était pas un enfant et qu'il savait qu'il ne devait pas échouer. Il sourit à nouveau. La suprématie d'une nouvelle race ? « Tu lui prêtes des considérations appartenant aux nouvelles races. A nous autres, les jeunes races. Tu lui prêtes des pensées qui sont les nôtres. Mais je comprend ta crainte, elle est naturelle et bien compréhensible. Et elle me touche » Oui, il était réellement touché de ce qu'elle sous-entendait par ses mots. Comment aurait-il pu ne pas l'être ? Il vint embrasser ses doigts avec douceur, et en s'avançant, déposa son front contre le sien, quelques mèches dorées venant se perdre dans sa crinière sanglante. Il continua, avec cette même douceur. « Je ne mépriserais jamais tes craintes, tu le sais, n'est-ce pas ? » Il ne savait encore comment réagir à cette soudaine ouverture de sa part, ne s'attendant pas du tout à cela.

Il n'avait pas pensé qu'elle pourrait l'aimer ainsi… mais il respectait ses sentiments quoi qu'il en soit. Ses sentiments, et ses idées. « Sais-tu pourquoi je ne crains en rien d'être corrompu ? » A nouveau, il sourit légèrement. « Parce que tu seras toujours là pour me rattraper, chère Vanaël » Elle et d'autres, comme Korentin et Eliowir. « J'ai confiance en toi pour cela. Et j'ai confiance en lui également. Je ne pense pas qu'il veuille aller à l'encontre de ce qui tient au cœur des siens. Et nous tenons à vous tous. Jamais je ne me retournerais contre vous, sache-le… vous êtes mon peuple » Et puis quand on y pensait, sans les mortels cloués au sol… il ne pouvait y avoir de nouveaux dragonniers. Leur caste ne pouvait pas se renforcer sans eux. Oui ils étaient importants, à bien des égards. Il ne pouvait admettre de les voir opprimés ou disparus. Et elle encore moins. Serrant l'une de ses douces et froides mains, il la pressa contre son torse, en soupirant doucement, les yeux un instant clos. « Mais… non je ne te cache rien. J'aimerais simplement te montrer mon rêve, lorsqu'il sera réalisé »

----------Oui, c'était vrai, il le lui avait déjà dis, qu'il était le créateur du lien, mais sur le coup, elle n'avait pas tilté. Après tout, il l'avait dis au début de leur conversation, et lui avait tant révélé qu'elle avait surement omis ce détail. Détail non pas sans importance, loin de là même ! Quant à la vision qu'elle avait de cet être étrange et trop ancien, elle n'en savait trop rien. De ce qu'elle en savait, il n'inspirait pas la peur ou la sensation de petitesse, elle était une bipède, comme les vampires, les elfes et les humains. Il n'avait en rien la beauté effrayante des dragons, leur prestance ou leur stature. Comment pouvait-elle le voir comme un être plus puissant que leurs amis dragons ? Savoir qu'il était le créateur du lien, et cette fois le retenir, changeait par contre l'idée qu'elle se faisait de cet individu. Il avait surement accès, tout comme les dragons, à la trame supérieure, ce n'aurait surement pas été possible autrement, et il était de par ce fait bien plus proche des esprits que la vampiresse le pensait auparavant. Achroma avait raison, elle ne devait pas le voir comme une race semblable à la leur, cela aurait été une grave erreur. Il était bien plus, autant en bien qu'en mal. L'accepter n'était peut-être pas facile, mais ce devait d'être fait, avant que cela n'entraîne des erreurs dans le futur. Sous estimer les autres n'est jamais une bonne chose, et engendrait bien souvent de tristes répercussions, que ce soit pour un allié ou un ennemi, ou même quelqu'un de neutre, comme cet Edwyn.

"Contrairement à nos amis dragons, il n'a pas cette apparence qui impose le respect, le voir comme ce qu'il est réellement n'est ainsi pas une chose aisée. Là seule chose que je savais de lui avant notre discussion, c'est qu'il était un voyageur errant à travers Armanda, se trouvant alors étrangement là où les grands événements se déroulaient. Le voir ainsi comme l'être ancien et puissant qu'il est est... pour le moins déroutant. Son apparence est-elle vraiment celle d'un homme ? Ne pourrait-il pas avoir adopté une autre forme ?"

----------Surement n'aurait-il pas de réponse, lui non plus... Après tout, si Edwyn avait décidé d'adopter une forme qui leur ressemble, pourquoi l'admettrait-il ? Cela ne lui apportait rien de plus. Ce ne ferait que nourrir un sentiment négatif à son égard. Les différences que nourrissent les races entre-elles sont bien toujours sources de conflits, pourquoi en serait-il autrement avec ces fameux Tarenths ? Non, vraiment, il serait étrange qu'elle puisse avoir réponse à cette question... Qu'Achroma le sache ou pas, il serait même étonnant qu'il le lui révèle, qu'un trop grand nombre de personnes le sache pouvait être dangereux.

----------L'ancien la traitait avec douceur, et continuait de manifester de la tendresse à son égard. Se penchant vers Vanaël, il lui embrassa les mains avec tendresse, puis posa son front froid sur le sien, leurs regards se fusionnant presque, de même que leur chevelure. L'ancestrale savait qu'il ne l'avait jamais méprisée, ni elle ni ses actions, mais l'entendre le redire était pour le moins plaisant. Autant que de savoir qu'il lui faisait confiance, et qu'il comptait sur elle pour le soutenir. Ses douces paroles étaient un baume qui venait calmer les inquiétudes de la vampire, et éclairait quelque peu le chemin qu'elle envisageait de prendre. Elle savourait le moment, consciente qu'il ne durerait pas et que bientôt, elle allait devoir s'en retourner au camp et adopter une attitude qui lui était bien plus habituelle. Achroma était bien le seul à réussir à percer cette carapace froide dans laquelle elle s'enfermait, ce moment le prouvait, puisque ce n'était jamais encore arrivé avec une autre personne. Pas de sa non-vie en tout cas.

"Tu sais toujours trouver les bon mots on dirait, cela te ressemble bien..." Elle lui souriait légèrement, nostalgique de toutes les fois où, en effet, il avait su trouver les mots justes afin qu'elle continue sa route et ne flanche pas, afin qu'elle surmonte ses épreuves, afin qu'elle puisse arriver là où elle est actuellement. Et pour ça, Vanaël lui devait beaucoup, peut-être pas son existence, mais pas loin... Elle en était consciente, et ne pouvait ainsi pas lui cacher ce qu'elle ressentait. Tant de liens les réunissaient. Il était d'abord son mentor, puis était ensuite devenu son ami. Et comme si cela ne suffisait pas, ils s'étaient alliés, faisant de leur objectif un but commun. Elle le considérait désormais aussi comme un frère, et aujourd'hui, par cette belle nuit étoilée, se demandait si... cela ne pouvait se concrétiser en une relation plus proche encore. "Tes paroles m'honorent." Le laissant lui voler sa main, qu'il serra contre lui, alors qu'il fermait les yeux l'espace d'un instant. Sa respiration glaciale se faisait ressentir sur son visage, qui au goût de Vanaël lui semblait finalement d'une température agréable, elle le regardait alors avec envie... Cet être filiforme, dont la grâce l'éloignait en tout points des hommes auxquels il appartenait jadis. Il aurait été d'ailleurs impossible de le confondre avec l'un d'entre eux... Cette peau parcheminée, dont les veinures apparentes lui donnait un air presque éthéré, cela avait beau être la preuve de son âge avancé, il n'en restait pas moins qu'elle lui donnait une allure impressionnante.

----------Vanaël, contemplant encore cet aimé ami, fut prise de l'envie de déposer sur cette étrange peau un baiser, ses lèvres vermeilles embrassant alors la joue d'Achroma. Un geste délicat, empli de sentiments, bien que cela puisse n'être qu'une forte amitié. Et pourtant, il en était bien plus à l'esprit de la millénaire. "J'aimerais, j'aimerais tant t'aider..." Elle posa sa tête contre la sienne, leurs fronts se touchant de nouveau. "Et je le ferais, si cela peux permettre à notre blason d'être redoré. Il m'est douloureux d'avoir a accepter n'être que l'égal de ces humains éphémères et de ces elfes imbuvables, mais je dois bien admettre que c'est au moins une étape nécessaire, si ce n'est une finalité. Je serais honorée de t'apporter mon soutien, et quand je le pourrais, celui de notre peuple tout entier." Elle fit une légère pause, profitant du calme environnant. Ils étaient seuls, isolés, dans un lieu on me peut plus silencieux. Vanaël n'était pas une romantique, mais il fallait avouer que l'endroit s'y prêtait. Enfin, si l'on excluait ce vampire de bas âge qui continuait de gigoter dans son coin, apeuré par l'obscurité qui l'entourait, et ne comprenant toujours pas ce qui lui était arrivé. " Je respecte ta bienveillance, après tout, si les dragons, qui nous sont supérieurs, les ont eux aussi acceptés, il faut croire qu'ils ne sont peut-être pas si mauvais que cela..." Peut-être qu'en effet, son désir de montrer la supériorité des vampires n'était qu'une chimère qu'elle poursuivait, un rêve idéaliste, nourri par la haine que vouait Lorenz et ses fidèles à toutes les autres races. Enfin, toutes... on dira qu'Ambre et Merithyn seraient les exceptions qui confirme la règle... Après tout, un cas par race, cela semblait raisonnable..." Tu as l'air de le penser aussi, en dehors de ton envie de créer cette caste, si j'en crois cette jeune humaine dont tu t'es pris d'affection, que comptes-tu faire d'elle d'ailleurs ?"

----------Ce n'était pas la transition la plus fine qu'elle ait eu faite, mais il fallait croire que la jalousie touchait peut-être aussi les vampires. Et maintenant qu'elle était en train de lui dévoiler ses sentiments, la question prenait d'autant plus de sens, elle craignait pour l'amour qu'elle même vouait à Achroma... Cette gamine demeurait un soucis, dont elle avait eu vent à maintes reprises. Que ce soit de la bouche d'Achroma Seithveilj, ou de celles d'autres personnes, il en ressortait à peu près la même chose, ce qui était d'autant plus frustrant. Savoir qu'il se complaisait de la compagnie d'une humaine, la dorlotait, prenait soin d'elle et son bien-être, veillait à ce qu'elle soit satisfaite... Cela avait un goût amère. La vampire savait bien sûr, que son ami aimait avoir des fils et des filles dont s'occuper, et surtout, être le moteur de leur évolution. Elle connaissait son envie d'observer la progression de ceux dont il assumait l'éducation, et en était d'autant plus consciente pour avoir été elle aussi son élève. Ce qu'elle était toujours à ce jour d'ailleurs. Mais malgré cela, l'existence de Livilith lui était à ce jour une épine brulante au travers de la chair. Elle voulait confirmer ses soupçons, et s'assurer qu'au moins, il ne comptait pas la garder en tant qu'humaine, et souhaitait connaître de quelle manière il se positionnait vis à vis de cette jeunette.

" Je n'ai pas encore eue l'occasion de la rencontrer, et c'est bien dommage, j'aurais pris plaisir à rencontrer cette pupille que tu as trouvé."

----------La voix de Vanaël était alors amusée, peut-être agrémentée d'un soupçon de sarcasme, dû au fait qu'Achroma ne lui l'ait jamais présentée. Elle ne s'offusquait pas de cette nouvelle, mais souhaitait simplement avoir une idée claire de ce qu'il en était. Surement était-elle jalouse, mais hormis son changement de sujet peu délicat, elle ne l'avait point montré. Elle n'en voulait nullement à Achroma, et acceptait sa manière de faire. Mais après tout, si elle souhaitait le considérer à sa juste valeur, ainsi qu'elle le désirait, il lui fallait être certaine. De la même manière qu'elle avait ses secrets, elle ne supportait pas que les autres en aient qui puisse la concerner de près ou de loin. Et avec Achroma, elle ne considérait pas avoir de secret pour lui, qu'il en ait à son propos lui paraissait ainsi injuste. Égoïste, oui, mais après tout, ne le méritait-elle pas ? Une si belle créature.... il lui fallait bien quelques défauts !

Oui, selon ce que les bipèdes s'étaient rapportés, Edwyn Ruddy n'avait effectivement rien de bien extraordinaire. Pourtant quand on le rencontrait, on ne pouvait se tromper. On ne pouvait manquer son aura de puissance, ou simplement le parfait tout en subtilité de son être, la profondeur de ses yeux d'argent, à côté desquels ses propres prunelles n'étaient que des disques ternes. Et puis… il y avait eut quelque chose. Ce quelque chose qu'ils partageaient tous deux, qui était si naturel entre eux, comme ce n'était naturel avec aucun autre bipède. Le lien. Tout simplement. Il l'avait compris très rapidement, et il n'avait cessé de chercher à le stimuler, à le comprendre… Il ne l'avait pas rejeté et n'avait pas été perturbé de le découvrir. Sans doute était son existence de magie qui l'influençait, mais à ses yeux ce n'était que naturel et instinctif. Et il avait réussit à comprendre, à la surprise même d'Edwyn. Il avait aimé le découvrir, au final. Un simple sourire vint orner ses lèvres, sans qu'il puisse répondre aux interrogations et hypothèses de sa douce amie. Non effectivement ce n'était pas sa véritable apparence, cela aussi il l'avait deviné, grâce au lien, et Edwyn avait confirmé. Il avait été terriblement honnête avec lui et il en était reconnaissant… Il ne regretterait jamais leur échange. S'il ne savait à quoi il ressemblait réellement, s'il savait simplement que sa défroque actuelle n'était qu'un déguisement, il s'en guignait simplement. Pour lui Edwyn n'était pas une apparence, c'était un esprit, une âme et une puissance. Celle du père des dragonniers.

Il ne pouvait pas en parler, cela ne lui appartenait pas. Pas plus que le reste. Si il décidait un jour de se révéler, ce serait uniquement sa volonté et de son fait. Rien d'autre. Comme s'était sa volonté à lui de continuer de protéger les races d'Armanda. Il ne voulait pas être un tyran, il voulait les protéger, leur venir en aide, se faire l'ambassadeur d'un jour meilleur, tout simplement… et c'était autant par respect, par affection et par soucis d'écouter les avis des autres, qu'il prenait avec autant de sérieux ce qu'elle pouvait émettre, montrer, et ressentir. Parce que ça lui était important. Il estimait plus encore la diamantine que beaucoup d'autres, alors pourquoi aurait-il refusé de l'écouter, de prendre en compte ses inquiétudes ? Non il les entendait parfaitement. Il ne savait pas s'il trouvait effectivement les bons mots, comme elle le lui affirmait, mais ils étaient sincères, en tout cas. La sincérité avait toujours été son maître mot et il s'était vu confirmé ses hypothèses à plus d'une reprise. Jamais il n'utilisait l'affect dans ses transactions, ses échanges, il n'offrait qu'un raisonnement purement logique et défait de toute préférence personnelle, de telle sorte que, pour un individu comme Lorenz, il était impossible de le comprendre, parce que même quand il voyait la logique, celle-ci se biaisait fatalement… et que dire de la façon dont une majorité d'armandéen voyaient des mensonges partout ? A force, il lui suffisait de dire la vérité, elle était interprétée comme un mensonge et, presque à coup sûr, il en profitait.

Pourtant cette fois, il était amusant et agréable que l'objectivité rejoigne ses complaisances personnelles. Ça avait souvent été le cas, avec elle au moins. Il n'avait pas à soupeser chaque mot comme il l'aurait fait en n'importe quelle autre compagnie. Leur relation n'en était que plus vivace. Et le baisé soudain déposé, un tribus à ce qui s'était installé entre eux. Tête contre la sienne, il continua de l'observer avec bienveillance, goûtant ses mots sans jamais l'interrompre. Elle comprenait et comprendrait encore, à l'avenir, se trouvant dans l'idéale position qui permettait de saisir tout le concept qui était celui des êtres éternels, qu'une conception ne s'arrêtait jamais à l'instant présent ni même à moyen termes, et que la vision qu'ils avaient des questions du monde prenait parfois des angles innombrables. Mais hélas, cette perspective en tous points naturelle à leurs êtres n'était pas partagée par beaucoup, sans doute du fait qu'elle ne devenait véritablement saisissante qu'avec l'âge, que si peu des jeunes atteignaient. Le sujet, soudain, de la mortelle dont il s'était entiché le fit sourire d'une façon toute différente, amusée mais plus vivante, moins lointaine et intemporelle. Et bien ? Drôle de transition que celle-ci, il n'était pas vraiment l'exemple le plus probant de ses propres théories pourtant. Pourquoi la mentionner, si ce n'était au regard des sentiments qu'elle émettait désormais à son encontre ?

Gêné ? Pas le moins du monde. La gêne n'était pas dans ses habitudes. Et sûrement encore moins auprès de sa douce amie. Serait-elle jalouse ? Voilà qui serait passablement drôle. Une millénaire vampiresse à ses côtés depuis longtemps, jalouse d'une jeune éphémère promise sans intervention extérieur à une mort rapide, après une centaine d'années qui n'étaient qu'un grain de poussière dans leurs sabliers. Finalement, il répondit, le regard pétillant d'azure, et la voix chaude. « Tu n'as pas eu l'occasion de la rencontrer parce que je n'ai moi-même appris sa venue à Aigue-Royal qu'après la fin de l'aube rouge. Aegle n'avait pas jugé bon de m'informer avant cela, de toute évidence, elle semblait penser que je me détournerais de mes devoirs et que je perdrais mon temps….Mais tu auras sans doute l'occasion de la jauger par toi-même, lorsque tu reviendras auprès de moi » La condition n'était que pure logique, mais elle tombait à pic évidemment, pour lui surtout « Quand à ce que je compte en faire… et bien dans l'absolue, tu le sais, je répugne à m'en prendre aux femmes, mais je considérerais peut-être l'hypothèse d'en faire ma fille, si elle en émet clairement le désir » Car pour le moment, tout n'était que non-dits, et il ne briserait pas son code de conduite pour des non-dits. « Et si elle en est digne. Tu es bien placée pour savoir que je m'investis pleinement dans l'avenir de ma progéniture, je tiens à ne posséder que des éléments prometteurs. Elle m'a parue l'être, cela reste à confirmer » Mais il avait, certes, bon espoir… « Et puis cela fera de la compagnie à mon fils. Je n'ai jamais eu une pair ensemble, l'expérience est tentante »

Il lui décocha un coup d'oeil quelque peu malicieux « Peut-être prendras-tu part à son éducation ? »

----------Son silence quant à Edwyn ne la surprit pas le moins du monde, elle acceptait et comprenait pleinement qu'il n'était pas en mesure de lui répondre. Après tout, ce n'était pas ses secrets, mais ceux d'un autre, qu'il ne puisse les révéler était normal. Il lui faudrait attendre de rencontrer Edwyn pour le savoir, chose que la conseillère ferait avec patience. Elle était curieuse de rencontrer cet être de pouvoir et de se faire sa propre idée du personnage. C'était après tout la meilleure manière de se faire un avis sur quelqu'un ou quelque chose que d'y être directement confronté. Et savoir qu'Achroma le respectait suffisamment pour satisfaire ses demandes, et ainsi garder pour lui ses secrets, cela signifiait qu'il valait la peine d'y porter de l'attention. Ses actions le prouvaient aussi d'ailleurs... Il s'était fait connaître à travers le continent, apportant son aide et demandant à collecter des reliques étranges. Mais au final, toujours, il semblait avoir apporté un soutien. Qu'Achroma confirme, qu'en effet, ses actions étaient nourries par de bons sentiments, cela suffisait pour le moment à la vampire pour croire en cette supposée bonté dont était pourvu le voyageur.
----------Elle l'écouta silencieusement, contemplant ses yeux au reflets d'azur qui lui rappelait les couleurs de la mer. Sa voix contrastait avec la fraîcheur de son regard, et ses paroles la rassurait. Qu'il prévoit de la faire sa fille, et donc qu'il l'estime digne de cela ne pouvait que la rendre jalouse, elle n'avait beau être qu'une éphémère humaine pour l'instant, qu'il en fasse l'une des leurs la mettrais sur un pied d'égalité... Et malgré la différence d'âge, Vanaël le prenait de la même manière. Qu'il lui dise vouloir la faire s'approcher d'Eliowir, cela la rassurait, il ne nourrissait donc qu'une attirance de père envers elle. L'ancestrale le comprenait lorsqu'il disait s'investir pleinement dans l'avenir de sa progéniture, elle étais bien placée pour le savoir. Bien qu'elle ne soit pas sa fille, il l'avait traité comme telle, et l'attention qu'il avait alors porté à son éducation prouvait les efforts qu'il mettait en place afin de pouvoir être fier de lui, et de ses fils et filles. Et elle même, se comportait de la même manière avec les siens.
----------Pour ce qui est de les estimer dignes, cela dépendait, elle n'en avait pas pris le temps lorsqu'elle avait pris la décision d'avoir un fils Alayien. Non pas qu'elle les trouvent tous pareil, non, ils avaient beau n'être que des humains, ils avaient tout de même tous leur différences, néanmoins, elle n'avait pas jugé utile de s'y intéresser pour ce cas. Son but après tout n'était que d'exploiter la mémoire de ce peuple, afin de s'informer plus en détail de leur passé, plus qu'ils ne pourraient le faire en tant qu'humains adorateurs de Néant. Chose qui était devenue fausse désormais, puisque la dite Esprit les avait abandonnés, et risquait de changer "légèrement" les choses vis à vis de ces Alayiens. Il lui faudrait du temps afin de parvenir à son but, mais un jour surement, elle y parviendrait. Quoi qu'elle se demandait s'il était réellement possible de raviver ses souvenirs d'une terre si lointaine. En rencontrant d'autres Alayiens peut-être... il est vrai que rien ne garantissait qu'un jour il se souviendrait de sa terre natale...

----------Le regard espiègle d'Achroma la surprit, il n'avait pas vraiment l'habitude d'être ainsi, mais cela lui allait bien, il paraissait rajeunir ainsi. Sa question la toucha, d'ordinaire, il éduquait ses fils et filles seul, estimant que c'était son travail et sa responsabilité. Qu'il lui propose cela était pour le moins affectueux. L'ancestrale le prenait comme une réponse à ses réactions plus sensuelles qu'à l'ordinaire. C'était pour elle une manière de dire qu'il acceptait ses pensées, et était du même avis qu'elle. Que son visage s'empourpre légèrement ne fut ainsi qu'une conséquence logique à cela, après tout, savoir qu'il semblait nourrir les mêmes sentiments qu'elle à son égard là touchait profondément. Tournant sur ses talons, elle se mis de dos à Achroma, s'appuyant contre lui et prenant dans ses mains celles de son cher ami. Elle ne le regardait plus, il n'y en avait plus besoin... Et elle était déjà suffisamment rouge comme cela, elle n'avait pas envie qu'il la voie ainsi, c'était suffisant pour une seule soirée !

" Tu comptes te faire le médiateur de leur rencontre ? C'en serait presque de l'inceste à ce stade, tu es bien mesquin." Elle lui parlait d'une voix claire, onctueuse, tandis que se mains caressaient avec soin celles d'Achroma, ainsi que ses bras. Il était confortable d'être ainsi étreinte par celui dont elle chérissait l'existence depuis de si longues années... " Si la possibilité m'est offerte, j'en serais honorée. De même que je serais ravie de pouvoir passer plus de temps en ta compagnie. Nous n'avons après tout pas vraiment eu d'occasions de passer de temps ensemble, et je me lasse de cette solitude. " Certes, elle n'était pas seule et avait quelques enfants à s'occuper, plus ceux dont elle prenait soin, mais ce n'était pas le même type de relation, et avec la guerre, elle n'avait plus le temps de passer autant de temps avec ceux qui lui étaient réellement liés. Ils avaient beau, pour certains être responsables et ne mériter qu'une moins grande attention quand à leur désir de chair, il restait qu'elle n'avait avec eux pas la même attitude qu'avec Achroma, loin de là ! Comment cela pouvait être possible d'ailleurs.... ? Non, vraiment, elle avait du mal à se passer de lui, il représentait tant pour elle. Oh, elle survivrait, et aboutirait à ses objectifs, mais l'absence de son aimé ami lui procurait une gêne étrange, comme si elle avait été délestée de quelque chose. Elle ne savourait alors pas pleinement sa non-vie, et chaque jour en son absence lui laissait un goût amer dans la bouche.
----------Ce moment de tranquillité était fort apprécié, et elle comptait en profiter autant que possible, qui sait combien de temps s'écoulerait avant qu'ils ne se revoient à nouveau ? Elle ignorait les objectifs de Lorenz lorsque celui-ci aurait exterminer les alayiens, et ne pouvait ainsi se projeter plus loin dans le futur. De même qu'elle ignorait grandement les objectifs d'Achroma. Elle savait qu'il voulait créer cette caste des dragonniers, mais quel plans avait-il exactement prévu à cet effet, cela, elle l'ignorait. Penchant sa tête de côté afin de profiter pleinement du torse de l'ancien, Vanaël enserrait toujours les bras de cet être admiré dont elle pouvait profiter durant cette belle nuit parsemée d'étoiles. " Je ne sais quand cela pourra se faire, les desseins de Lorenz me sont en grande partie inconnus. Quant à toi, j'imagine que tu comptes solidifier ta position au sein de la rébellion, et peut-être profiter de la présence de Korentin pour asseoir la position de la caste, je me trompe ?" Elle ne faisait que des suppositions, les mots ne venant pas autrement afin d'exprimer ses interrogations. Fermant les yeux, la millénaire mit une main sur l'épaule de son compère, et lui souffla d'une voix mélancolique. "Cette nuit serait donc la dernière avant longtemps... " Elle laissa sa phrase en suspens, et savoura cette douce étreinte.

Quoi qu'ils se parent de moins de subtilité qu'à l'ordinaire, ils n'en étaient pas moins ce qu'ils étaient. Et il n'en restait pas moins que c'était avant tout certains non-dits qui avaient plus de sens que beaucoup de mots. Surtout quand on connaissait les habitudes de son interlocuteur. Il avait proposé en tout état de cause, sachant qu'elle le connaissait assez bien pour savoir quelle teneur avait l'offre. C'était un geste plus que symbolique qu'il offrait là après tout. Cela allait non seulement à l'encontre des tendances possessives des vampires, mais également de son éthique personnelle… Il n'aurait pas offert cela à n'importe qui. Mais elle n'était pas n'importe qui, et elle avait également montré ses inclinaisons. La voir alors s'empourprer lui tira un vague sourire satisfait. Il la prit dans ses bras sans se faire prier, lui offrant de l'entourer, solide appui qui jamais ne se brisait. A cet égard au moins, il était encore réellement un glacernois, car comme eux, il refusait de plier et de s'abaisser. Fort heureusement, il n'avait pas conservé leur charmant caractère, autrement exister en temps que vampire aurait été compliqué… Chassant cette pensée ironique, il vint nicher un moment son nez contre les boucles sanglantes de sa chevelure, en respirant le parfum en silence. Et en profita pour dissimuler contre elles son rictus joueur. Mesquin lui ? Oh voyons, elle pouvait le qualifier de bien des choses mais certainement pas de mesquin. Tout de même, il n'était pas Lorenz ! Mais il lui passait cette pique-là, ce n'était qu'un minuscule grain de sable après tout.

Et puis il ne pouvait guère que le lui passer, puisqu'elle le satisfaisait par ailleurs. Il aurait été, cette fois, mesquin de sa part justement, de lui en tenir rigueur en pareil instant. Il était bien trop occupé à imaginer comment remplir les rares moments de calmes qu'ils parviendraient à arracher aux mains du destin. Ce qui n'était pas une mince affaire. Ils avaient tant d'obligations, chacun de leur côtés, chacun avait des intérêts et des individus attendant quelque chose d'eux. Il aurait voulu pouvoir dire qu'il l’enlèverait et la garderait pour lui et la famille qu'il créait mais… il ne pouvait pas vraiment se le permettre. Il y avait trop en jeu pour qu'il soit égoïste à ce point aussi, il faudrait faire avec ce qu'ils pourraient grappiller, quand ils le pourraient. « Non, tu ne te trompe pas » fit-il avec douceur. Mais ce serait avec la volonté de Korentin, pas sans elle. Il le savait déjà un ami de la caste après tout. Il soupira à sa douloureuse conclusion et resserra légèrement son étreinte sur elle. Oui sans doute la dernière avant longtemps. « Alors peut-être serait-il bon de la rendre inoubliable... » Pour un bas humain, il offrait là une toute autre étreinte. Mais elle comprendrait certainement que pour eux, il y avait d'autres façons de savourer leur duo dans l'immensité de leur éternité...