Éclosion
8 mai 1258
Il y a de cela cinq cents années, un temps de paix régnait sur Armanda tandis que les vampires avaient été repoussés dans ce qui formait le royaume souterrain. Pouvait-on se réjouir pour autant? Difficile à dire avec la disparition des dragons et l’affaiblissement de la magie en même temps. Pourtant, à l’Ouest du continent, deux elfes étaient les plus heureux qui soient et cette joie se partageait à toute la communauté du royaume. La raison était fort simple : un nourrisson venait de voir le jour, une petite elfette à la chevelure de jais et au regard plus rayonnant que le soleil lui-même. Une Vallaël à l’avenir prometteur selon cette noble famille qui remercia les esprits pour ce formidable miracle. Durant la semaine qui suivit sa naissance, de grandes festivités furent lancées et les rires, les chants, les poèmes, les jeux et les remerciements furent au rendez-vous. Dans la clairière du grand chêne, un baptistrel accueillit l’enfant de son chant et un nom se tint à toutes les lèvres : Kälyna.
Croissance
1258 – 1357
La petite Kälyna était la fierté de ses parents et ils voyaient en elle tous leurs espoirs se concrétiser. Ils n’avaient rien de plus précieux et à chaque jour, ils remerciaient les Esprits de leur avoir accordé une gamine aussi énergique et en santé. Elle était aimée de toute la communauté elfique qui s’assurait qu’elle ne manquât jamais de rien et qui avait d’ailleurs bien plus que ce dont elle avait de besoin. Elle était choyée, protégée et gâtée.
C’est dans une grande joie que les elfes virent Kälyna grandir et avec plaisir qu’ils partagèrent leurs savoirs avec elle. Ils lui inculquèrent tout ce dont elle devait savoir en passant par le langage, autant l’elfique que le commun, la lecture, l’écriture, les traditions, la magie, la musique, les mathématiques, la géographie et bien d’autres. Il s’avérait que la gamine était dotée d’une curiosité insatiable qui amusaient grandement, et décourageaient parfois, ses instructeurs par toutes les questions qu’elle posait sans relâche. Elle cherchait à comprendre comment le monde fonctionnait autour d’elle. C’était une enfant énergique, affable, talentueuse, intelligente et très fière. Capricieuse, entêtée et égoïste, certes elle avait des défauts, mais il était bien difficile de les reprocher à la mignonne petite elfe qu’elle était.
On chercha à lui faire découvrir divers domaines afin d’en vérifier son intérêt et ses capacités. Elle détesta toucher aux armes et eut plutôt une étincelle pour la politique, bonnes nouvelles aux oreilles de son père qui faisait partie du conseil. Ainsi, elle fut élevée pour devenir conseillère à son tour. Lorsque l’on ne la voyait pas s’instruire quant à ce rôle, il n’était pas rare de la voir dessiner, jouer d’un instrument de musique, particulièrement la lyre, faire fleurir sa magie et se promener parmi les jardins de fleurs du royaume elfique. Ce n’était pas un secret que la petite Vallaël aimait les roses.
Dès son adolescence, Kälyna sut qu’elle était promise à Aranwë, membre de la noble famille Nalwaë. Bien qu’elle eut un pincement au cœur de ne pas se marier par amour, elle n’en fit pas tout un drame. Après tout, l’union de ses parents avait également été planifiée de même que celui de ses grands-parents et ils ne lui avaient jamais semblé malheureux pour autant. Aranwë était un elfe charmant, intelligent et attentionné, elle trouverait certainement le bonheur près de lui, n’est-ce pas? Bien qu’une partie d’elle-même refusait d’y croire, elle s’accrocha à cette idée et à celle de faire plaisir à son entourage.
Lys nacrés
1358
Le grand jour, ou devrait-on dire, les grands jours vinrent où la famille Vallaël s’unirait à la famille Nalwë. Les parents de Kälyna étaient si fiers de l’elfette qu’elle était devenue et des décisions qu’elle avait prises. Ils voyaient déjà en elle tout le potentiel d’une bonne conseillère. Dotée d’un grand charisme, elle était déjà capable de capter l’attention de ses auditeurs et de faire valoir son point de vue aisément et ce, tout en restant respectueuse. Déjà à cet âge, elle semblait prôner l’autarcie et suivre les idées conservatrices, ce qui plaisait également à son père. Mais avant d’entrer dans le conseil, elle devait se marier à Aranwë.
La joie et les sourires étaient sur tous les visages de la communauté elfique, tous sauf un. Si Kälyna semblait avoir tout pour elle, alors pourquoi avait-elle ces larmes à ses yeux? Dans sa maison à confectionner des ornements et des décorations comme le voulait la tradition, seul son futur époux avait pu lire la tristesse en elle. D’une fine caresse, il sécha ses larmes de sa main et la rassura de ses douces paroles. Il prendrait soin d’elle et elle serait aimée comme nulle autre. Il lui disait comprendre ce qu’elle ressentait, comprendre ses craintes et comprendre son désarroi. Mais savait-il seulement ce qui se tramait dans le cœur de sa promise, cœur qu’elle ne comprenait pas elle-même? Aranwë était loin de comprendre quoi que ce soit.
Aranwë lui avait proposé de reporter la cérémonie, voire de l’annuler complètement, ce que l’elfette refusa. Elle avait accepté de l’épouser et c’est ce qu’elle ferait. Tâchant d’enfermer son malaise dans un recoin de son âme, elle posa un sourire sur ses lèvres pour la suite de l’événement. La baptistrelle Aramis Thredë chanta l’histoire des deux elfes sous le grand chêne et au septième jour, elle unit les deux nobles par les liens du sort végétal. Une fois que le couple eut prononcé leurs vœux, leurs élus coupèrent les végétaux et remirent à chacun un collier d’argent orné d’une perle où un lys y avait été gravé. Pour sa part, elle avait choisi Eliowir Serillëiel pour partager ce moment avec elle.
Ainsi, à partir de ce moment, on put l’appeler Kälyna Nalwaë.
Rose
1368
Dix ans plus tard, voilà que Kälyna fit une prouesse que rares elfes pouvaient se vanter. Admirée de tous, c’est un 13 décembre qu’elle mit au monde son premier et seul enfant. Le labeur avait été difficile et il avait fallu l’aide de Merithyn Shadowsong pour qu’Armanda accueille en son monde une petite elfette à la chevelure ténébreuse de sa mère et aux iris verdoyants de son père agrémentés d’étincelles dorées. La Vallaël fut heureuse d’apercevoir sa mignonne petite frimousse et d’apprendre que sa petite était en santé. Toutefois, elle refusa de la prendre dans ses bras, prétextant qu’elle était fatiguée et que toute la communauté attendait de voir ce cadeau avec impatience. Obéissant, son mari entraîna le nouveau-né dans la clairière du grand chêne. L’âme de feu apporta les soins à la nouvelle mère et lorsqu’elle fut rétablie, elle rejeta sa présence puisqu’elle désirait être seule. Le baptistrel fut probablement le premier elfe à se douter que quelque chose n’allait pas chez elle.
Kälyna ne participa pas à la cérémonie d’accueil à la vie et elle resta clouée au lit avec ce sentiment de grand vide comme jamais elle ne l’avait vécu auparavant. Malgré la présence de son mari et de cette nouvelle créature dans sa vie, c’était la première fois qu’elle se sentait aussi seule. Elle avait cette impression d’avoir commis une erreur et ses pensées étaient noircies par ses craintes et ses doutes. Serait-elle capable d’aimer son nourrisson alors qu’elle n’y était jamais parvenue avec Aranwë? Certes, elle l’aimait, mais pas autant qu’il méritait de l’être. Serait-elle une bonne mère? Elle se sentait coupable, déprimée, découragée, honteuse et avait l’impression que les Esprits l’avaient abandonnée.
Ce n’est que quelques jours plus tard que Kälyna eut les larmes aux yeux lorsque son époux lui appris le nom qu’il avait offert à leur enfant : Mëryl. Nom choisi en l’honneur de son épouse et de cette fleur qu’elle aimait tant : Meril. Malgré toutes les inquiétudes prenant place chez elle, une chose était certaine : Mëryl serait sa petite rose.
Pluie écarlate
1375
Kälyna aimait son mari, aimait son peuple et aimait sa fille.
Si elle disait tant aimer Aranwë, alors pourquoi n’arrivait-elle plus à le regarder dans les yeux? Pourquoi s’éloignait-elle de lui dès qu’elle le pouvait? Pourquoi son cœur hurlait-il lorsqu’il lui disait qu’il l’aimait? Pourquoi n’arrivait-elle plus à lui dire des mots aussi simples que « Je t’aime »?
Si elle disait tant aimer les elfes, pourquoi ne participait-elle pas aux activités communes? Pourquoi préférait-elle passer des journées entières en solitaire dans la forêt? Pourquoi n’était-elle plus motivée de devenir conseillère?
Si elle disait tant aimer Mëryl, pourquoi devait-on lui rappeler qu’elle avait une fille? Pourquoi les elfes pouvaient-ils se vanter de l’avoir vue plus s’épanouir qu’elle? Pourquoi la Rose devait-elle lui demander de lui conter une histoire pour qu’elle y pense? Pourquoi était-elle toujours aussi distante?
Simplement parce que les couleurs étaient devenues grises, que les mets n’avaient plus de saveurs et que les roses avaient perdu de leur éclat. Un sentiment de vide semblait s’agrandir en elle plus les jours passaient. La maison familiale lui semblait devenir de plus en plus étouffante. La Rose Épineuse souffrait d’un mal que personne ne pouvait comprendre. Chaque souffle lui était pénible et chaque pensée était ténébreuse.
Levant les yeux au ciel, Kälyna jeta un dernier regard à la pluie d’étoiles filantes qui mettrait fin à ses souffrances. Elle n’avait pas peur. Si, peut-être un peu à vrai dire, mais ce n’était rien en comparaison à la volonté de vouloir en finir. C’est seule qu’elle mettrait fin à ses jours, seule comme elle se sentait depuis ce qu’elle qualifierait de toujours. Elle eut une pensée pour Mëryl qu’elle ne verrait pas grandir et qu’elle ne verrait plus sourire. Puissent les Esprits pouvoir la protéger, mieux qu’ils ne l’avaient fait avec elle. Mais voilà que des pas de courses se dirigeaient vers elle. Voilà qu’on criait son nom. Voilà que la peur vibrait en elle et que ses bras se refermaient sur le petit corps d’une enfant à la chevelure d’encre. Des hurlements déchirèrent le calme de la forêt avant de s’éteindre tel un soupir.
Voilà que la pluie venait de naître dans ces yeux verdoyants face à ce spectacle écarlate.
Déracinée
1376 – 1751
Il en avait fallu de peu pour que Mort enlace deux nouvelles âmes. Rapidement, Aranwë avait stabilisé leur état avant de requérir l’aide de Merithyn pour soigner son épouse et son enfant. Toutes les deux s’en remettraient. Les ecchymoses disparaitraient, les os se reformeraient et les plaies guériraient. Au final, il y avait eu plus de peur que de mal.
L’incompréhension régnait. Comment une elfette qui semblait avoir tout pour elle pouvait avoir un cœur aussi lourd au point de désirer s’enlever la vie et ainsi écourter son temps? Pour certains, c’était simplement révoltant! Non seulement c’était une disgrâce, mais en plus, elle avait failli emporter avec elle la petite Rose et Dracos sait à quel point les enfants étaient importants pour les elfes. Pour d’autres, cela fut plutôt considéré comme un cri à l’aide. Si Kälyna était prête à se suicider, c’était qu’il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond chez elle. En effet, un diagnostic fut posé par Merithyn : instabilité, dépression et mal de vivre. De plus, il fut confirmé que ça n’avait jamais été son intention de blesser Mëryl.
Séparés entre la volonté de la voir bannie pour cet affront et la volonté de lui venir en aide, les elfes optèrent finalement pour que Kälyna reste parmi eux. Il fallut cependant l’influence des Vallaël et d’Aranwë pour s’assurer que la balance penche vers cette décision. Dans cette histoire, son époux n’arrivait pas à concevoir comment elle avait pu arriver à une tel acte extrémiste. Il était frustré contre elle et frustré contre lui-même de ne rien avoir vu venir. Il lui en voulait et il avait eu si peur pour sa fille. La réalité le frappa enfin de plein fouet lorsqu’il réalisa que son épouse ne serait jamais l’elfette de sa vie et plus rien ne serait jamais pareil entre eux. Malgré le dur constat, il ne put se résoudre à la détester.
Malgré tous les soins et l’aide qui furent apportés à la Rose Épineuse par la suite, son cœur refusa de guérir. Toutefois, elle promit de ne jamais retenter de s’enlever la vie. Durant ces années, Kälyna devint l’ombre d’elle-même et elle ne devint jamais conseillère. Elle devint la déception de son mari et de sa famille. Bien que la mort ne l’effrayait plus, elle ne se permit pas de s’enlever la vie. Elle se changea les idées en dessinant, en jouant de la musique, en passant des heures et des heures dans la grande bibliothèque et à se concentrer sur sa magie.
Si on lui demandait comment la Rose Épineuse allait, elle répondait qu’elle allait bien. À quoi bon dire le contraire de ce que les gens voulaient entendre? Avec le temps, elle devint impassible et nonchalante, cachant sa tristesse et son désarroi à quiconque. Même qu’elle devint maître dans l’art des faux sourires et des faux discours. Certains furent même assez dupes pour croire qu’elle était sincère, à l’exception de ses proches et amis. D’ailleurs, elle fut grandement peinée lorsqu’Eliowir Serillëiel perdit son enfant et qu’il fut châtié à l’exil. Elle usa de ses talents de diplomate pour parler en la faveur de son ami, mais ce fut en vain. Son passé jouait malheureusement contre elle.
Inséparable
1752
Chaos que furent ces années. Angoisses et exaltations. Voilà que les dragons venaient de revenir sur Armanda et que les vampires quittaient leurs souterrains après tant d’années d’emprisonnement. La magie renaissait sur ce continent qui en avait été affaibli depuis si longtemps et les esprits retournaient sur Armanda. Ils ne se liaient pas seulement aux Humains, mais également à toutes les races.
Voilà que la vérité se formait sous le regard curieux de Kälyna tandis qu’un Esprit Totem apparaissait face à elle. Son époux avait eu la chance de rencontrer un âne et maintenant, c’était à son tour de découvrir ce qui se cachait en elle. Qu’est-ce qu’il était beau avec toutes ses couleurs! Mais qu’était-ce? Elle ne put s’empêcher d’écarquiller les yeux tandis qu’elle réalisait ce que représentait l’oiseau. Un hurlement s’échappa de sa gorge, alertant les elfes non loin qui s’attendaient au pire la concernant.
Inséparables, source de joie et de bonheur pour les deux êtres les portant. Mais au singulier, l'oiseau unique prenait la forme de cauchemars, de tourments et de vide. La vérité, c’était que l’elfette ne pouvait aimer nul autre que sa douce moitié et que sans celle-ci, elle était incomplète. Rien d’étonnant qu’elle n’avait jamais pu aimer d’Amour Aranwë malgré tous ses efforts et qu’elle n’avait que sombrée davantage au fil de leur relation.
La vérité, c’était que Kälyna ne serait jamais entière puisque sa moitié n’existait pas. Elle aurait dû la ressentir, mais ce n’était pas le cas. Il n’y avait personne pour faire battre son cœur.
Elle était une Inséparable, synonyme d’aberration et d’unique.
Mauvaises herbes
1753 à l’année 2 de l'ère d'Obsidienne
Brisée face à cette réalité, Kälyna en avait voulu à tous les esprits qui existaient. Cet endroit qu’elle considérait comme étant chez elle ne faisait que lui rappeler continuellement qu’elle serait indéfiniment malheureuse. Ainsi, elle avait alors fui le confort de sa forêt elfique, prenant son cheval sans savoir où elle irait. N’importe où lui semblait être un meilleur endroit. Sa curiosité la mena dans l’empire humain où elle découvrit la façon dont cette race étrange vivait. Certes, ce n’était pas la première fois qu’elle voyait des humains, mais c’était la première fois qu’elle pouvait les voir interagir avec leur environnement. Elle fit de nombreuses rencontres, parfois bonnes, parfois mauvaises, mais souvent bien intéressantes.
Lorsque les Alayiens marchèrent sur le continent, Kälyna n’eut d’autres choix que de dissimuler sa présence au risque d’être tuée sur le champ. Face à la présence de ces envahisseurs, elle chercha à retourner chez elle. Elle était une mauvaise mère et une piètre épouse, mais leur sort lui importait. Elle assista à l’impossible : elfes, humains et vampires s’alliaient contre leur nouvel ennemi. Elle participa même aux négociations, élevant la voix afin de faire valoir son point de vue : il fallait mettre de côté les tempêtes d’hier. La forêt trembla, la magie devint un souffle, la barrière magique tomba et le chaos prit naissance en ce lieu verdoyant.
La victoire sembla de courte durée, car déjà le peuple elfique devait quitter leurs arbres qui avaient été engloutis par une force monstrueuse. Un nouveau voyage débuta où finalement le peuple elfique s’engouffra dans les cavernes souterraines d’une cité rebelle. Loin de la verdure, ce moment ne lui parut pas aussi éprouvant que pour les autres elfes. Après tout, Kälyna n’avait plus d’attentes envers le monde dans lequel elle vivait. Elle n’était devenue qu’une spectatrice, imperturbable face à ce qui se déroulait sous ses yeux. Ses yeux dorés qui virent bientôt une aube se peindre en rouge dans les tréfonds de la cité cachée. Parmi les civils, elle aurait pu s’avancer face aux ennemis afin de mettre fin à sa vie. Mais liée à une promesse qu’elle avait jadis faite, elle puisa plutôt dans ses forces magiques pour défier ces envahisseurs. Ce ne fut pas sans conséquences, mais un corps blessé se répare toujours plus facilement qu’un cœur cassé.
Vraoryna
Année 3 de l'ère d'Obsidienne
Euphorie, bien-être et joie. Voilà ce que le cœur de Kälyna s’écriait tandis qu’elle posait son regard doré sur cet être en blanc que tous semblaient détester. Mais son cœur n’était pas de cet avis. Il battait la chamade comme jamais il ne l’avait fait auparavant. Une vague d’émotions l’envahie. Jamais elle ne s’était sentie aussi bien qu’en ce moment même. Était-ce cela que l’on appelait « Amour »? Elle ne savait pas, mais elle aimait ce qu’elle ressentait. Sans hésiter, elle plia l’échine et se soumit à lui.
Mais déjà elle s’éloignait de lui et avec la distance, son mal revenait. Le vide qu’elle connaissait si bien était toujours présent en elle et seul Vraorg semblait être capable de le combler. À partir de cet instant, une seule pensée existait, celle de tout faire pour le revoir à nouveau. Elle cherchait à lui plaire. Elle voulait qu’il la remarque. Elle faisait tout pour lui et plus rien d’autre n’avait d’importance à ses yeux.
Chaque rencontre était un délice et chaque séparation creusait un gouffre plus profond. Pour l’aberration qu’elle était, Vraorg devint synonyme de drogue, de maître et d’amour.
Dame Blanche
Années 4 et 5 de l'ère d'Obsidienne
Fixée sur cet objectif de devenir importante pour Vraorg, Kälyna avait œuvré nuits et jours pour se tailler une place à ses côtés. Cela n’avait pas été facile dans ce milieu où le Blanc n’avait d’yeux que pour les vampires. D’ailleurs, elle avait su lire le dégoût dans son regard lorsqu’il l’avait regardée, ce qui l’avait poussée à se peindre de blanc. Mieux valait un regard amusé que dégoûté. Tout ce qu’elle voulait, c’était d’être aimée même si ce n’était qu’une infime partie de tout l’amour qu’elle avait pour lui.
La Dame Blanche lui avait voué un culte sans pareil et elle entraîna les autres Théocrates, de gré ou de force, dans le culte de son bien-aimé. Faisant preuve d’ingéniosité et de détermination, elle s’était élevée dans la haute sphère de la Théocratie et elle devint la dame d’Althaïa.
Joie et tristesse que cette position. Heureuse que Vraorg avait su reconnaître son talent, mais son cœur criait d’être aussi loin de lui. Toutefois, désirant se montrer digne de la confiance que lui accordait son maître, elle dirigea Althaïa la Terrible d’une main de fer.
Elle attendit impatiemment l’occasion de retourner à Gloria et de se rapprocher ainsi du Dragon Blanc. Cette occasion se présenta sous la forme d’un évadé de Morneflamme et de son compagnon protégé. Ils regrettèrent longuement l’idée d'avoir voulu passer près de sa cité et s’ils avaient connu la souffrance, ce n’était rien à comparer à ce qu’elle leur fit subir. Malheureusement pour eux, ils n’auraient pas la délivrance de rejoindre Mort. C’est vivant qu’elle les enverrait à Vraorg et c'est personnellement qu'elle s'assurerait qu'ils arrivent à destination.