Naissance
21 décembre de l’an 1287
Naquit, il y a précisément quatre cent soixante-treize ans, Arya Vallaël. Fille cadette de Triniël et Zardän Vallaël, jeune sœur de Kalÿna Vallaël. Les enfants étaient, pour les Elfes, une chose précieuse qu’il fallait chérir et fêter. C’est pourquoi la naissance de la jeune Arya, bien qu’elle suscitât quelques rumeurs déplacées, fut longuement fêtée par le peuple tout entier.
Pourquoi des rumeurs ? Parce que la petite elfette avait, contrairement à toute sa famille, une magnifique chevelure de neige, un blanc platine impossible à manquer ou à dissimuler. Triniël était pourtant un modèle de vertu. Il était impensable pour un elfe de tromper ainsi son époux, mais il l’était encore plus pour elle. Ce mystère ne fut jamais éclairci. Peut-être cette coloration hors du commun était dû à la magie – au peu qu’il restait - ou aux Esprits ? Personne ne savait et, au fil du temps, plus personne n’évoqua le sujet.
Si, durant une bonne partie de sa vie, Arya grandit dans l’ombre de sa sœur aînée, les semaines qui suivirent sa naissance furent pour elle, surtout les sept premiers jours où son nom était sur toutes les lèvres.
Arya était promise à une vie quasi parfaite. Fille de noble, elle pouvait avoir tout ce que la société Elfique pouvait lui offrir. Les premiers mois de son existence, elle fut même relativement gâtée par ses semblables. Elle était admiratrice de la beauté et de l’intelligence de sa sœur aînée, qu’elle aimait profondément, et s’en fit rapidement un modèle dans de nombreux domaines. Toutefois, en grandissant, Arya se rendit compte que l’attention de ses parents était davantage tournée vers son ainée. Etait-elle délaissé pour autant ? Non, mais ses parents ne voyaient pas du tout le même destin pour leur cadette et s’occupaient un peu moins d’elle, ne lui apprenaient pas forcément les mêmes choses. La fillette se sentit—elle délaissé ? Pas vraiment. Ses parents la veillaient moins et mettaient bien moins de pression sur ses frêles épaules, si peu en vérité qu’elle put jouer avec qui elle voulait et faire bien plus de bêtises qu’il était permis de le faire.
L’éducation de la jeune Vallaël fut donc confiée à des précepteurs. Ses parents prirent, bien entendu, le temps de choisir les meilleurs afin d’offrir à leur fille la meilleure éducation possible. S’ils se concentraient sur Kälyna, ils ne délaissèrent pas leur fille pour autant, cela aurait été particulièrement mal vu surtout pour une famille noble ! Ainsi, différents Elfes furent chargés d’enseigner les choses de la vie à la jeune Arya. A lire, écrire, compter. A parler, que ce soit l’Elfique ou la langue commune. L’histoire également, bien qu’elle fît de nombreuses fois le mur. Son cours préféré restait celui où un maître d’armes lui apprenait à se battre. La dague, pour commencer, puis l’épée ainsi que le corps-à-corps. Mais l’elfette était tout juste moyenne et ne brillait pas vraiment. Et elle voulait briller, rendre ses parents fiers pour quelque chose de bien différent de sa grande sœur. Elle voulait, une fois au moins, voir leurs yeux briller lorsqu’ils la regarderaient.
C’est ainsi qu’elle fit la rencontre d’Elryndïr durant son adolescence. Il était bien plus âgé, mais cela ne dérangeait aucunement les deux Elfes. Ils s’entendirent immédiatement et la jeune Arya vit, au fond des magnifiques yeux bleus de cet elfe, cette lueur qu’elle espérait tant voir chez ses parents. Ils devinrent amis et le jeune homme proposa à la jeune Vallaël de lui enseigner quelque chose de peu commun chez les Elfes, mais qui allait dans la continuité de ce qu’elle aimait. C’est ainsi qu’il devint son mentor, lui enseignant le maniement de la faux. Les deux êtres devinrent rapidement bien plus que des amis. Toutefois, les choses n’allaient pas être si simples. Les parents d’Arya étaient si peu attentionnés envers elle qu’ils ne se rendirent pas compte de son idylle avec le jeune homme et promirent leur fille au frère de celui-ci, Undil Anarenen. L’Elfette vécu cela comme une trahison, comme un abondons. Elle en voulu terriblement à ses parents. ! la nouvelle eut l’effet d’un coup de massue sur la jeune femme, qui tomba de chagrin, en voulant au monde entier. Pendant un certain temps, elle songea à s’enfuir avec son aimé, mais abandonna rapidement cette idée. Elle ne pouvait pas fuir, quitter tout ce qu’elle connaissait… Mais elle ne comptait pas abandonner sa relation pour autant. Couverte par sa Kälyna, elle entreprit donc de voir Elryndïr en secret tandis qu’elle s’affichait avec le frère de celui-ci. C’était une situation particulièrement tendu, mais les deux amants s’aimaient trop pour tout arrêter.
Et la jeune Elfette n’oubliait donc pas sa soeur adorée. Ainsi, en 1358, si ses parents ne se rendirent pas compte du malaise naissant chez Kälyna, ce ne fut pas le cas d’Arya. Les deux sœurs étaient trop proches pour que la blanche loupe cela. Celle-ci se rendit donc compte du manque d’enthousiasme de sa sœur pour son mariage. La joie qui aurait dû être la sienne n’était pas au rendez-vous et si elle tentait de la cacher, la cadette se rendit compte. C’est pourquoi, naïvement, elle vint un soir proposer à sa sœur de s’enfuir avec elle loin des siens. Etait-elle sérieuse ? Probablement. Arya était un esprit sauvage, prompt à bouger, combattif. Elle aurait fait cela pour sa sœur, si c’est ce que Kälyna avait voulu. Mais l’aînée Vallaël avait promis d’épouse Aranwë et tint sa promesse. L’époux était un homme bon, aimant envers sa sœur… Mais Arya ne pouvait se résoudre à apprécier réellement cet homme qui, quelque part, enchaînait sa sœur à un destin dont elle ne voulait pas.
1368 fut l’année de grands évènements. Peu avant son propre anniversaire, Arya eut droit à un merveilleux cadeau de sa sœur : une nièce. Mëryl, de son prénom. Mais quelque chose clochait. Lorsque Aranwë présenta la petite elfe sans sa mère, la cadette comprit que quelque chose n’était pas normal. Quoi ? Elle ne pouvait pas le dire, mais elle sentait qu’il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Elle se promit de découvrir quoi et d’aider sa sœur.
Toutefois, peu de temps après, ce fut au tour d’Arya d’épouser son promis. Contrairement à sa sœur, elle fut capable de masquer sa tristesse bien mieux que cette dernière. Peut-être sa sœur s’en serait-elle rendu compte si elle avait elle-même…
Car Arya ne reconnaissait plus sa sœur. Elle la voyait s'éloigner, brisant quelque chose entre elles. La Blanche tenait beaucoup à elle et vécue particulièrement mal cet éloignement qu'elle ne comprenait pas. Kälyna avait tout pour être heureuse, alors pourquoi semblait-elle si vide ? On aurait dit une coquille, creuse et sans âme. L'Elfette tenta de venir en aide à sa sœur, mais celle-ci ne la laissait pas faire. Après moults essais infructueux, elle décida de laisser tomber. Pour un temps seulement. Sa sœur avait peut être uniquement besoin de temps ?
Ce temps récupéré, Arya le donna à son époux et à son amant. Elle jouait à un jeu dangereux et n'avait plus Kälyna pour la couvrir, bien que sa sœur ne vint jamais trahir son secret. Ce temps, elle l'offrit également à sa nièce lorsque sa mère était introuvable.
Puis un jour, on vint apprendre à Arya ce qu'avait fait sa sœur. Elle se trouvait avec son époux à ce moment là et ce fut cet homme qui la réconforta. C'était-elle attendu à un tel geste ? Probablement pas. Comprenait-elle ? Peut être bien. En tout cas, Arya se plaça du côté de sa sœur, défendant cette dernière au côté de sa famille pour qu'elle demeure parmi eux.
Un soir, la cadette vint trouver sa sœur. Elle voulait lui parler, tenter de comprendre, apporter un réconfort quelconque. Y parvint-elle ? Pas vraiment. Mais Kälyna lui prouva qu'elle l'aimait toujours – à sa façon – en lui promettant de ne plus jamais tenter de s'enlever la vie. Cette nuit là, en retournant chez elle, Arya pleura longuement. Etait-elle déçue par sa sœur ? Non, même si elle ne comprenait pas vraiment, elle l'aimait et l'aimerait toujours. Là où sa famille la vit comme une honte, la cadette décida de ne pas l’abandonner. Jamais. Comme un espoir fou. C'est pourquoi elle couvrit souvent sa nièce lorsque celle-ci chercha à voir sa mère. Elle ne pouvait retirer cela à Mëryl.
Des changements, il y en eut. Arya avait perdu, en quelque sort, sa sœur mais avait gagné une famille. Si elle ne parvenait pas à aimer d’un amour pur et sincère son époux, cela n’empêcha pas l’elfette de donner naissance à une fille en 1407, un enfant qu’elle prénomme Auriëlle. La venue au monde de cet enfant sembla effacer quelque peu les actes de Kälyna et, au grand damne d’Arya, pousser ses parents à reporter tous leurs espoirs sur elles. Déjà, depuis l’incident, elle était devenu en quelque sort le centre de leurs attentions, mais cela ne fit qu’empirer. Arya conseillère ? La bonne blague. Si le père voulait donner à sa fille cadette ce qu’il avait voulu pour son aînée, cela n’allait pas fonctionner. Pendant trop longtemps, il avait laissé la Blanche faire ce qu’elle voulait, se lancer dans la voie qu’elle souhaitait. Espérer un retour en arrière était utopiste, et cela, elle le lui fit bien comprendre.
Ainsi, Arya entra dans l’armée plutôt que la politique, délaissant les espoirs de son père, les jetant et les piétinants. En voulait-elle à ses parents de se préoccuper soudainement d’elle à présent que Kälyna n’était plus que l’ombre d’elle-même ? Oui. Et elle leur fit comprendre. Comment ? En déclenchant, plus ou moins malgré elle, une véritable polémique qui mit la réputation des familles Vallaël et Anarenen à mal.
En effet, la liaison entre Elryndïr et Arya fut découverte suite à une bête erreur de la part de cette dernière. Ce genre de situation, particulièrement rare, se réglait d’une seule et unique façon : par un duel entre l’époux et l’amant. Un duel entre deux frères qu’Arya voulu à tout prix éviter, aider – à sa grande surprise – par sa sœur. Ce duel prit une tournure cauchemardesque lorsque Undil, par un coup bien – ou mal selon le point de vue – fit chuter son frère qui se brisa la nuque. Mort sur le coup, le hurlement puis les pleurs d’Arya furent audibles par tous.
« JE VOUS HAIS ! »
Furent ses dernières paroles pour ses parents, pour Undil. S’ils avaient regardé un peu plus leur fille quelques années plus tôt, ils se seraient rendu compte, bien avant le mariage, qu’Arya et Elryndïr étaient amoureux l’un de l’autre. Cela aurait donné une magnifique union, à n’en pas douter, et la suite de cette histoire aurait été totalement différente. Comme quoi, l’indifférence peut avoir des conséquences plus que dramatiques…
Esseulée, Arya quitta son peuple. Reviendrait-elle ? elle l’ignorait, mais elle avait besoin d’être seule. Elle avait besoin de temps et eu toutes les peines du monde à empêcher sa fille de la suivre.
La tristesse d’Arya était grande, mais sa colère encore plus. Deux personnes empêchaient l’elfette de se détourner totalement de son peuple : sa fille et sa sœur.
Les années passèrent et l’elfe en armure décida de prêter sa faux à quiconque payait suffisamment pour lui permettre de vivre. Avec son heaume qui dissimulait son identité, elle parvenait à passer pour une Nordique lorsqu’elle prenait la peine de revêtir une longue cape par-dessus son armure.
Puis l’an 1750 arriva. Ces années furent un chaos sans nom avec le retour des dragons et des vampires. Si l’un fut synonyme d’un renouveau tant espéré, l’autre ramena la guerre en Armanda. Pendant un long moment, Arya ne sut que faire. Devait-elle combattre ? Protéger les siens ? Elle ne pouvait pas encore le pardonner, de plus ils étaient à l’abri dans la forêt. Alors elle décida d’éviter les combats et de s’y joindre si on lui offrait suffisamment d’or. C’était une pensée particulièrement égoïste, mais la douce Arya avait disparu depuis longtemps. La colère rongeait son être, elle avait perdu foi en l’humanité.
Son combat sembla redevenir juste avec l’arrivée Alayienne. Ces êtres qui voulaient détruire tout ce qui était magie. Elle fut présente lors du traité entre les peuples, voyant avec la plus grande incrédulité ces races s’unirent contre un ennemi commun. Elle combattit à la bataille des Bois Sombre.
Puis elle s’éloigna. Elle n’était pas prête. Elle suivit son peuple de loin, fauchant leurs ennemis pour les aider sans jamais vraiment réapparaître.
Choix
An 2 à An 5 d’obsidienne
L’avènement de Vraorg. La logique et le bon sens voulaient qu’Arya rejoigne les Protégés, alors pourquoi demeura-t-elle en théocratie ?
Parce qu’en tentant de suivre son peuple, elle tomba sur un corps. Un petit corps qu’elle reconnut. Un petit corps qu’elle prit dans ses bras, le berçant en sanglotant, sa voix brisée incapable de hurler sa peine. Elle tenait sa fille, morte, au creux de ses bras. Son père avait été incapable de veiller sur elle, lui qui avait promis de donner sa vie pour elle si cela était nécessaire. En balayant les environs du regard, Arya se rendit vite compte que le corps d’Undil n’était pas là. Oh, elle aurait pu s’en vouloir à elle-même, mais cela ne lui vint pas à l’esprit. Elle avait confié leur enfant à son père et ce père avait failli à sa tâche. Le peuple elfique tout entier, pour qui les jeunes étaient si importants, avait failli.
La colère et le désespoir peuvent pousser à faire des choses horribles et c’est pourquoi Arya choisis alors de demeurer sur le territoire du Blanc. Dans un empire où les vampires avaient la part belle, la vie était compliquée. Très compliquée. C’est à cette époque que la guerrière se fit tatouer, ouvrant sa chair pour glisser sous celle-ci poudre et encres, dissimulant des cicatrices indélébiles par ces artifices, choisissant de donner une nouvelle image d’elle également. Sa faux fut au service du Blanc jusqu’à Sandur, fauchant Hommes, Elfes et Vampires rebelles sans distinction. Son désir de rester au sein de la Théocratie fut encore plus intense lorsqu’elle reconnut Kälyna en la Dame Blanche d’Althaïa. Elle aurait voulu l’approcher, mais cela était bien compliqué pour une simple guerrière comme elle…
Durant la bataille de Sandur, la vengeance de la Faucheuse fut à son paroxysme lorsque la lame de sa faux vint rencontrer la chair d’Undil, qu’elle prit en duel. Avec la magie de son arme, elle attirer le corps de l’Elfe à elle, plaça la lame sur la trajectoire et … « Shling ». Le corps de l’elfe retomba en deux parfaits morceau, l’armure légère n’ayant pu le protéger. La boucle était bouclée, Elrÿndir et Auriëlle étaient vengés.
Après la mort du Blanc, à la fin de la Bataille qui vit la mort des Esprits, Arya parvint à éviter le courroux des Protégés en prenant la fuite. Lâcheté qui lui sauva la vie, sans le moindre doute… Mais blessée, elle s’effondra dans le désert, de nuit. Sa survie, elle la doit à un homme, ancien protégé : Alford Gorder. Elle ne sut sur quel pied danser et malgré l’accueil peu chaleureux qu’elle réserva au guerrier, celui-ci l’aida à se remettre sur pied. Bonne âme, naïve sans le moindre doute, mais bonne.
Que pouvait-elle faire à présent ? Elle croyait sa sœur morte, seule famille qu’elle avait envie de revoir. Était-ce le début d’une nouvelle exile ? Le début d’une vie vouée à la solitude ?
Solitude
An 5 – Temps actuel
Ces deux années, Arya les utilisa pour se faire oublier. Seule, elle s’isola, tentant de croiser le moins possible près des grandes villes. Elle n’avait été qu’un pion pour le Blanc et ne risquait donc pas beaucoup, mais il lui sembla judicieux de rester discrète. Se faire oublier et utiliser sa faux pour avoir de quoi vivre en pleine nature, par routes et par chemin.
Le mariage de l’Empereur Elfique ? Des rumeurs pour elle et un sourire quand elle apprit qu’il avait manqué d’y passer. Dommage que le vampire de Lorenz ce soit louper.
Mais une autre rumeur, alors qu’elle se trouvait près de Fortuna, vint ramener un peu de vie dans ses yeux tristes. Kälyna Vallaël, la Prêtresse Blanche, avait été aperçue ?!