Une écaille pourpre dans la lumière [Pv Verith] TERMINE

--- 22 Avril ---

Il avait réussis à quitter Gloria sans encombre, et ce n’était pas un mince exploit avec tous les alayiens qui s’y réunissaient… Cependant, il avait refusé que Shaynar le rejoigne immédiatement. Avec ce qui s’était passé pour Estelen, il préférait ne pas prendre le risque de le voir approcher la capitale, que cela le vexe ou non. C’était donc sur son destrier elfique qu’il voyageait, évitant les routes humaines et préférant couper par la campagne et les bois dans lesquels il était plus en sûreté. C’était que porter le visage d’un humain, même volontairement, à la longue, ça fatiguait et il préférait autant avoir les os du visage aux bons endroits malgré tout le positif que son déguisement lui avait apporté. C’était fou tout de même, en faisant attention, on pouvait apprendre beaucoup… et c’était d’autant plus utile qu’il était bien difficile de couper court ses pouvoirs. C’était même impossible, en y pensant bien, du moins physiquement impossible. Mais pour le moment ça n’avait plus d’importance, il en avait appris assez et il avait réussis à s’en aller. Maintenant il s’agissait de rentrer en un seul morceau à Aigue-Royale. Mais là encore c’était relativement bien engagé. Il évitait sans grands soucis les attroupements humains et grignotait quelques feuilles et fruits sans se gaver malgré la faim terrible qui sourdait toujours et qui provenait du dérèglement de la magie. Il ne dormait pas beaucoup, cependant, préférant observer la nature en silence pendant des heures, se forçant à vider et contrôler ses réserves d’énergie et à juguler l’angoisse et l’intense dépression qu’il vivait au quotidien. Pulpe des doigts sur le sol, mains de chaque côté de ses genoux, doigts écartés et légèrement courbé, il se ressourçait au contact aimant et neutre de la terre, absorbant les bienfaits de son immobilité comme un assoiffé de l’eau en plein désert.

Parfois, il sentait une vibration plus active que les autres, et devinait un tremblement de terre au loin, parfois extrêmement loin d’ailleurs… Mais cela ne le troublait pas plus que cela. Ce n’était qu’après des heures de cette méditation et de cette écoute qu’il trouvait se sentait ressourcé comme seul le sommeil aurait dû être capable de le faire. Pourtant, il se sentait frais et dispo, et cela lui suffisait. N’aurait-il plus jamais besoin de dormir ? Au moins cela le mettrait à égalité avec les vampires. Même ainsi, il allait plus vite que tout autre voyageur humain lorsqu’il allait de jour, pour la simple raison que sa monture couvrait des distances bien plus longues et bien plus rapidement. Lorsqu’il serait assez loin, il pourrait demander à Shaynar de le ramener enfin. Cependant, il n’était plus pressé que cela, certainement parce que ce temps en solitaire lui permettait de penser plus tranquillement… de se recentrer. Il en avait bien besoin, mais il était clair que rien désormais, ne pourrait retirer le poids qu’il portait et ce qu’il engendrait. Mais il l’avait cherché, après tout alors… il ne pouvait pas réellement se plaindre. Il n’en avait pas le droit, ce serait insulter les autres. Mais au moins, en solitaire, il n’était pas tenté de le faire. Personne ne le verrait, s’il craquait un bon coup. C’était pourtant difficile. Il avait sa retenue et celle-ci lui interdisait de montrer ce qu’il ressentait. Il encaissait, tout simplement. Encore et encore, et encore. Il le fallait, alors il le faisait, tout simplement. Peut-être devrait-il simplement rester à l’écart ? Mais non il ne pouvait pas. Même si ça aurait pu le soulager, il devait aider les autres, resté disponible….

Et ça, il le ressassait en permanence. Il le ressassait encore quand, après deux jours de chevauchée, il fut soudain éblouis par un éclat de soleil se reflétant sur des écailles carmines, juste avant qu’une ombre immense ne dissimule le soleil. Il ne l’avait pas fait exprès, en fait, il était tellement absorbé par ce qu’il considérait intérieurement qu’il n’avait même pas reconnu le dragon qui se tenait là. Il ne l’avait même pas vu en vérité. Une fois qu’il eut compris cependant, il arrêta sa monture avant de lui foncer dans le museau et cligna des yeux en posant son regard dans celui qui lui faisait face. Un moment, il resta parfaitement silencieux, évitant de plonger dans le chant-nom de la créature, puis il se décida à parler « Voilà bien une rencontre à laquelle je ne m’attendais pas…. Salutation à vous, Verith de l’ire. Soyez tranquille, je ne vous dérangerais pas plus et m’excuse de mon intrusion » Il n’allait pas l’empêcher de vaquer à ses occupations…

¤ Le Baptistrel ¤

Le rouge volait çà et là, les paroles de sa dernière discussion avec Ashy tournant toujours dans sa tête mêler à celle de Vie. Cela commençait sérieusement à lui prendre la tête. Pourquoi avait-il suivi Edwyn ? Pourquoi ne l'avait-il tout simplement pas tué à la première occasion. Tout aurait été tellement plus simple. Il n'aurait pas été maudit ! Certes, il n'aurait pas eu autant de connaissance que maintenant, il n'aurait pas vu des choses que peu d'individus pourraient voir dans leur vie. Mais le prix était beaucoup trop lourd ! Et ça le rouge ne l'acceptait pas. Néanmoins, dans son malheur il trouvait un réconfort. Le lien, cette chose misérable avait été créée par le Tarenth. Pas par un esprit ! Mais par un vulgaire bipède ! Le dragon en était rouge de colère. Quelle arrogance démesurée, comment un si petit être pouvait en contenir autant ? Non content de pouvoir se faire obéir à des dragons, ce dernier avait en plus trouvé un moyen de les... de les posséder, de les faire siens au travers du lien. Rien que cette idée donnait envie à l'enfant de l'orage de vomir. Il ne comprenait pas pourquoi ce Tarenth avait osé créer une telle chose ! Une chose qui a causé tant de mal à son peuple. Il était décidément un fléau. Un fléau sans desseins constructif ou libérateur. Il faisait du mal simplement pour faire du mal. Le pire c'est qu'il avait conscience de cela et pourtant il ne s'arrêtait pas ! Ce Tarenth était une véritable malédiction. Et Verith se régalait du jour où il serait enfin libéré et où il pourrait s'attaquer à Edwyn pour lui prendre sa vie ! Même si pour cela il devait payer de la sienne. Il n'en avait cure, réparer l'affront et faire éclater sa rage contre lui serait si enivrant qu'il se moquait bien d'en avoir à payer le prix fort.

Un soupir s'échappa du rouge qui secoua légèrement la tête avant de redresser son vol. Voler le fatiguait plus qu'avant à présent. Du fait de sa cécité, il était obligé d'étendre son esprit pour voir loin toujours plus loin. Certes, il avait chopé le coup depuis longtemps, et même si son esprit s'était renforcé depuis lors, un dragon qui avait toujours appris à voler et à se diriger en se servant de ses yeux ne pouvait pas s'adapter du jour au lendemain sans la moindre difficulté à voler en aveugle. Le soleil avait depuis un bon moment déjà amorcé sa descente. Combien de temps avant que le voile de la nuit enveloppe le ciel et la terre ? Trois heures, peut-être moins. Le rouge allait devoir se trouver un petit endroit pour reposer ses ailes et son esprit. Déployant un peu plus son esprit il remarqua qu'il était dans les environs de Gloria. Certes loin, mais dans le cercle d'influence que ces cafards au verre noir. Il ne pourrait faire qu'une courte pause.

Amorçant lui aussi sa descente, il s'assura que le sol ne présentait pas de force hostile. Une profonde déprime s'empara de lui. Voilà qu'il s'inquiétait si quelque chose pouvait lui faire du mal. Retenant un rugissement, il chassa sa déprime en fulminant contre Vie et Edwyn. Ces deux êtres qui accaparaient l'ire de Verith. Sa malédiction l'avait affaibli. Il ne pouvait plus tuer, il ne pouvait plus blesser sans prendre le risque de souffrir. Il avait l'impression d'avoir régressé au stade de dragonnet tout juste sorti de son oeuf. Cela le rendait malade ! Atterrissant, le rouge regarda s'il n'y avait rien à manger dans le coin. N'importe quoi, de la viande, ou même un fruit, soyons fous ! Les bêtes se faisaient de moins en moins farouches, même si beaucoup fuyaient à son atterrissage, d'autres ne bougeaient pas. Cela signerait leur perte. Tendant le cou avec rapidité, Verith attrapa une famille de marcassin qu'il avala goulument. Voilà qui l'aiderait à reprendre des forces plus rapidement avant de partir. S'allongeant au sol, il laissa ses ailes reposer, les étendant pour chasser toute tension et fatigue. Il se serait bien glissé dans une rivière suffisamment grande pour l'accueillir, mais il n'en repérait pas dans les environs.

Fermant petit à petit son esprit, Verith compta sur sa malédiction pour l’avertir lorsqu’un bipède approcherait. Il ressentirait ces révoltantes émotions auprès de son cœur. Son repos fut en effet troublé par l’arrivée d’une créature dont il reconnut l’odeur aisément. Levant son esprit comme pour se protéger ou du moins atténuer sa malédiction, le colosse grenât se redressa alors que l’elfe arrêtait sa monture pour éviter de lui rentrer dedans. Intérieurement, le rouge sourit. Décidément, le sort s’amusait vraiment à se moquer de lui !

« Voilà bien une rencontre à laquelle je ne m’attendais pas… Salutation à vous, Verith de l’ire. Soyez tranquille, je ne vous dérangerais pas plus et m’excuse de mon intrusion »

Levant ses pattes, Verith les abattit brutalement empêchant le chanteur de passer, avant d’approcher son museau.

« Voyez-vous cela. Le Baptistrel. Comme c’est amusant, il y a quelque temps encore, je t’aurais tué à vue lorsque j’ai appris qu’un misérable elfe allait poser la main sur dévoreuse. Mes écailles se sont hérissées à l’idée qu’un de ces êtres pitoyables puisse poser la main sur une arme capable de faire du mal à ma race. »

Le rouge prit une posture menaçante, comme prêt à lui sauter dessus avant de se raviser.

« Malheureusement pour moi, le sort a fait que je n’ai pu te prendre en chasse pour t’éliminer. Je fus toutefois très surpris que tu l’aies détruit … oui, même si j’étais révulsé par l’idée qu’un bipède pose la main sur cette monstruosité… je fus agréablement surpris en apprenant que celui-ci l’ait détruit. Néanmoins ! Ma surprise fut de courte durée lorsque j’ai appris que tu n’étais pas le seul à avoir mis la main dessus ! Ce ne fut pas une agréable surprise quand j’ai appris que le second bipède était Lorenz Wintel ! Le meurtrier de mon frère ! »

Verith bondit pour se retrouver derrière la monture du chanteur, dévoilant ses crocs.

« Rien que pour cela, l’envie de te réduire en charpie qui démange grandement. Toi qui es pourtant lié à un dragon, tu as laissé un assassin être si proche d’une arme qui aurait permis à ce dernier de commettre encore plus ravage chez les miens. Pourquoi as-tu fait cela !!!? Quelle inconscience a bien pu te pousser à commettre pareille folie !? »

L’écarlate envoya son esprit colérique se presser contre celui du chanteur. Oui il était en colère, mais pour une très bonne raison cette fois. Non pas que les autres fois n’étaient pas légitimes.

Son cheval se cabra en hennissant et l'elfe se pencha dans son assise afin de lui caresser l'encolure en émettant une douce et délicate mélopée pour le calmer et le rassurer, communiquant avec lui comme seul un elfe, et un chanteur, pourrait le faire, faisant passer entre eux l'ultime confiance qui ne pouvait s'établir qu'au travers de l’énoncé d'une vérité que personne ne pouvait contester et que même un animal reconnaissait. Il ne laisserait en aucun cas le dragon manger son compagnon à quatre pattes, et cela ne lui faisait absolument pas peur de s'opposer au rouge. Une fois que le destrier eut reposé les pattes avant à terre et ait reculé légèrement, tandis qu'il continuait de le calmer, il tourna son regard vers la masse rouge, sourcils froncés. Il n'était pas particulièrement impressionné, même s'il ne niait absolument pas que le dragon l'était, mais quelque chose le dérangeait beaucoup dans ce qui émanait du dragon, et pas seulement de ses paroles. Avec précaution, il se permit d'examiner son chant nom et ne tarda pas à comprendre ce qui n'allait pas. « Vous êtes aveugle.... » Fut sa toute première réponse, complètement en incohérence avec la question. Mais s'il s'était apprêté à simplement lui indiqué, et probablement sans trop de délicatesse, qu'il ne tournait pas rond du tout dans son raisonnement, il s'en ravisa. Oh il le lui dirait, mais sur l'instant c'était surtout un choc, de l'incompréhension et de la tristesse qui émanait de lui. Ce fut d'ailleurs sans attendre qu'il mit pied à terre. S'il commençait à pouvoir remettre les points sur les i de certains quand ils étaient en pleine possession de leurs moyens, il ne pouvait pas ignorer la souffrance de quelqu'un, même d'un dragon menaçant et antipathique.

« Oh... Verith... je suis tellement désolé... je n'avais pas remarqué... » Il s'avança vers l'énorme gueule garnie de crocs sans éprouver la moindre peur, simplement un profond sentiment de révolte à l'idée que quelqu'un ait pu s'en prendre à une créature comme celle-là. « Puis-je vous aider en quoi que ce soit ? Me serait-il possible de vous soulager de cette peine ? » Et des autres en vérité. Son cœur se serrant quand le chant-nom laissa paraître le reste de son sort. Il porta une main à ses lèvres, ses yeux s'embuant de larmes sans qu'elles puissent sortir, créant cette sourde douleur à laquelle il s'habituait sans le vouloir. Il arriva finalement tout près de lui et le regarda dans l'oeil, toujours frappé parce qu'il venait d'apprendre. Il soupira profondément, un soupire tremblant et secoua la tête en croisant finalement les bras. « Je comprend que vous puissiez vous en alarmer » fit-il, sincère et plein de sollicitude. « C'est tout à fait naturel, mais il ne pouvait pas me cacher ses intentions, si je n'avais pas été certain de lui je ne lui aurais pas permit d'approcher de Dévoreuse. Je l'aurais su immédiatement, s'il avait voulu commettre des ravages avec. Mais sachez que malgré ses crimes, Lorenz comprenait parfaitement que la menace de dévoreuse dépassait le simple cadre de ses ambitions. Il l'a détruit parce qu'elle était aussi dangereuse pour lui. Si la chevalière avait conduit à la destruction de notre monde, il aurait tout perdu lui aussi. Il est vrai qu'il est votre ennemi, mais parfois, certains buts et vérités communes font en sorte que des ennemis travaillent aux mêmes fins. Je conçois que ça ne soit ni agréable ni simple, mais c'est ainsi... »

Il inspira profondément et se coupa du chant-nom du dragon, ne souhaitant pas en savoir davantage par lui-même. Il lui dirait ce qu'il voulait. « Et si je puis justement vous le faire remarquer, il me semble tout de même étrange de craindre pour votre race parce qu'un baptistrel, lié à un dragon, tient à trouver Dévoreuse. Jamais je ne me laisserais corrompre par un artefact si vain et si inutile. Dévoreuse ne m'était rien sinon du dégoût vous savez... et puis, j'ai aidé aux desseins du dracos concernant le retour des dragons en armanda, et ma famille a aidé la votre de longue date, pourquoi me serais-je détourné de tout cela, pourquoi aurais-je cherché à détruire les joyaux d'armanda alors que je cherche par tous les moyens à permettre à ce monde de refleurir ? » La tristesse engloutit le reste et il reprit d'une voix plus faible. « Cela dit je... je conçois que ce qui s'est passé en mars ne soit absolument pas ce que je cherchais. J'ai failli en cela. Alors si vous voulez me manger, allez-y, je vous demanderais simplement d'attendre que j'ai pu vous soigner, peut-être ? Et si vous pouviez aussi épargner ma monture ? Elle n'a, après tout, rien fait pour être croquée avec moi, c'est simplement un ami qui a accepté de me porter là où Shaynar ne le pouvait »

¤ Celui qui en savait trop ¤

La colère du dragon rouge était là, presque palpable. Colérique en raison du risque inconsidéré, que dire, de la folie qu'avait eu le Baptistrel de laisser Lorenz s'approcher d'un tel artéfact. Pourquoi avait-il fait cela ? Pourquoi s'était-il à la base approcher de Dévoreuse ? Ces sales bipèdes et leurs sales pattes, ainsi que leurs esprits pervertis. Toutefois, peut-être en était-il mieux ainsi. Peut-être était-il mieux qu'il n'ait pas attrapé le Baptistrel avant qu'il ne détruise Dévoreuse. Au moins cette dernière était rayée de la partie maintenant. Il n'avait plus à craindre qu'un bipède ne s'en sert contre sa race. Car là avaient été la plus grande peur et le plus grand intérêt du rouge. L'éloigner de toute chose qui aurait pu s'en servir et la détruire pour préserver sa race. Et à défaut de parvenir à la détruire, il n'aurait eu qu'à détruire toute chose pouvant s'en servir. Drastique ? Monstrueux ? Mais cela dénotait bien de l'amour incommensurable pour sa race. Aller aussi loin pour la défendre, se salir les mains. Certains l'avaient qualifié de fou. Il s'en moquait bien. Il n'avait pas à répondre devant eux, ni devant personne d'ailleurs ! Pas même les esprits ! C'est eux qui avaient permis l'existence de pareille ignominie, qu'ils ne viennent pas se plaindre des conséquences qu'elle pourrait engendrer. Quoi qu'il en soit, cette question était derrière. Mais celui du sort qu'il réservait à l'elfe était encore à débattre.

Ce dernier ne semblait pas impressionner, il s’appliquait à rester calme. Quelle arrogance que cela. Pensait-il qu’il n’avait rien à craindre de lui ? Qu’est-ce qui pouvait lui donner pareille audace ? Le fait qu’il soit lié à un dragon ? Pensait-il que Verith l’épargnerait parce que cela causerait du tort à l’un des siens ? Non ! Pas l’un des siens, à un dragon lié. Foutaise ! Alors était-il serein en raison du passé de sa lignée avec celle du rouge ? Foutaise encore une fois ! Sa mère n’avait plus d’autorité depuis qu’elle avait fait le choix de renier sa propre colère, sa propre haine, sa propre peine en se liant… en se liant à un vampire ! Traitresse ! Tu as élevé ton fils dans l’ire pour mieux lui tourner le dos ensuite ! Vile traitresse. Et …

« Vous êtes aveugle.... »

Les pensées du rouge se dissipèrent soudainement face à la vérité criante que venait dénoncer le Baptistrel. Non ce qu'il le dérangeait était la certitude avec laquelle venait de l'énoncer l'elfe face à lui. Choc, incompréhension, tristesse furent les choses qui vinrent toucher l'esprit du rouge. Les sentiments du dragonnier elfique. Le rouge se braqua comme si on venait de découvrir un secret honteux... c'était un secret honteux. Preuve évidente de sa faiblesse actuelle, de son humiliation passée. Verith leva son esprit et fit trembler l'endroit sous la pression de son esprit, l'emplissant d'une noire colère alors que le chanteur continuant de parler.

« Je ne sais pas ce que tu as fait Elfe, mais ne le refait plus jamais, ne le lis plus jamais en moi, et ne révèle à personne ce que tu viens d'apprendre sous aucun prétexte ou soit certains que je te ferais regretter amèrement. »

Verith parla lentement, d'une placide colère, alors qu'il pressait son esprit contre celui de Merithyn faisait résonner son hurlement à l'intérieur de sa tête. Il espérait avoir été bien clair. Il abattit par la suite lourdement sa patte au sol faisant trembler la terre.

« Je n'ai pas besoin de ton aide. Je n'ai pas besoin de l'aide d'un bipède. Je ne veux pas de l'aide d'un bipède. Je sais ce que cela coûte de faire confiance à un bipède. Le fait que tu sois Baptistrel ne change absolument rien, tout comme le fait que tu sois dragonnier. Je me contrefiche de l'histoire de nos lignées, je ne suis pas ma mère ! Je me contrefiche que tu aies contribué aux desseins du Dracos. Je me contrefiche de ce traitre ! Ce qu'il a fait n'est pas le retour des dragons, mais l'aliénation des nôtres. Il a contribué à la survie du lien malgré les ravages que cette atrocité a causés. Malgré les conflits qu'il a pu occasionner ! Malgré l'aliénation des nôtres ! Il a contribué à la survie d'une des plus abjectes formes de magie. Il a n'a fait qu'aider le Tarenth, fléau de toute chose. »

Verith leva ses griffes et les balança en direction du Baptistrel pour le trancher en deux d'un seul coup. Sa malédiction opéra aussitôt et lui fit changer sa trajectoire. Les griffes d'ébène de dragon de l'ire se plantèrent profondément dans le sol à quelques mètres du sylvain.

« Soit certain que si je pouvais te tuer je le ferais sans la moindre hésitation. Néanmoins je n'en suis pas capable. Je pourrais toutefois te blesser, te mutiler ... mais par égard pour la destruction de Dévoreuse ... malgré la folie dont tu as fait preuve de laisser l'assassin de mon frère approcher cette chose ... je n'en ferais rien.»

Il était resté silencieux tout du long du monologue ronchon du dragon rouge, l'écoutant avec une politesse non feinte qui aurait pourtant pu facilement en vexer quelques uns. Pas lui de toute évidence, ce qui n'était pas une mauvaise chose. Enfin… Verith semblait se vexer de tout sans qu'on ait besoin de l'aider. A le voir aussi furibond, même une pauvre et innocente pierre posée au sol pourrait le vexer et le voir rugir. Il n'était certes pas une agglomération minérale qui n'avait rien demandée à personne, mais il n'était pas plus l'ennemi écervelé que semblait s'imaginer cette imposante créature. Enfin, il se froissait de si peu. Il aurait très bien pu être une souris après tout, vu sa petite taille. Finalement, fronçant légèrement les sourcils, il lui répondit. « Vous savez, ce n'est pas bon pour la santé de lancer des menaces que l'on ne peut pas accomplir… vous vous auto-frustré pour rien. Je ne vous demande absolument rien, ni bonté ni méchanceté, ni bénédiction ni souffrance. Je vous ai dit que vous pouviez me croquer si c'était ce que vous vouliez, je n'aurais de toute façon pas vraiment de quoi vous en empêchez. Vous pouvez aussi me blesser si ça vous amuse, mais je doute que cela vous apporte grand chose » Si l'on admettait que les animaux aboyants le plus fort étaient ceux qui mordaient le moins, celui-ci ne mordrait pas du tout. Cela dit, il se sentait vraiment concerné par l'état de santé du dragon rouge. « Verith… je pense que ce qu'il vous faudrait, c'est un exutoire. Si vous continuez sur cette voie vous allez vous faire du mal et je dois avouer que je ne le souhaite absolument pas »

Il soupira et secoua légèrement la tête. « Ecoutez, je ne fais que vous dire la vérité et vous mettre en lumière la plus simple des logiques. Si vous refusez d'en tenir compte et que vous vous en contrefichez, libre à vous, chacun a le droit de faire ses choix, ses victoires et ses erreurs. Je pense toutefois qu'il serait une erreur de vous braquer contre moi, mais je ne vous oblige à rien » S'il voulait aussi être le dernier des imbéciles, il le pouvait après tout ! « Je ne suis pas là pour débattre de nos points de vue, figurez-vous. D'abord parce que je pense que chacun peut bien voir les choses comme il le veut, comme je vous l'ai dit, et ensuite parce que je me suis simplement trompé de chemin » Il haussa les épaules, simplement, sans avoir l'air plus perturbé que cela par la leçon qu'il servait peu ou prou à un dragon. Mais un dragon plus jeune que lui-même et avec de sacrées tendances masochistes en plus de ça. « Cela dit, mon aide vous ai offerte en dépit de tout le reste. Vous pouvez grogner autant que vous le voulez, n'empêche que vous avez besoin d'aide… Je ne dis pas cela pour vous humilier ou vous placer en position de faiblesse, je n'y gagnerais rien et je déteste quand on se le permet… si je vous le dit, et vous propose mon aide, c'est simplement parce que je considère que ne pas tendre la main pour soulager un être vivant serait contre mes principes. Et puis, vous êtes un dragon, je ne peux franchement pas laissé un dragon ainsi... »

Déjà, un bipède, il aurait eu du mal, alors un dragon ! Il ne fallait pas pousser. « Mais ne vous en faite pas, je n'avais pas vraiment l'intention de colporter votre état au reste du monde. Ça ne concerne que vous. Vous n'aviez franchement pas besoin de me menacer, inutilement d'ailleurs dans votre état, je crains que vous ne puissiez rien me faire regretter du tout… Vous ne le savez peut-être pas, mais je me torture très bien tout seul. Vous avez été bénis d'empathie non ? Alors vous devez déjà le savoir » Ce serait tout de même difficile à rater… Il resta silencieux un moment, l'observant, puis décida que non, il n'allait pas le laisser comme cela. Plus doucement, et avec une réelle sympathie pour lui, il reprit. « Est-ce que ça ne vous manque pas… ? De ne plus voir, j'entends. Si vous le désirez, je peux vous prêter mes yeux un moment. La vision ne sera sans doute pas aussi belle qu'avec vos vrais yeux mais… ce sera déjà un petit quelque chose. J'imagine que cela ne doit pas aider l'humeur, que d'être perpétuellement plongé dans l'obscurité... »

¤ Les individus gentils sont les pires ¤

Oui Verith était furibond, comme toujours d’ailleurs, tout était là pour le mettre en colère, chaque respiration des misérables bipèdes enflammait son ire. Ils avaient fait tant de mal au sien, leur folie avait obligé les dragons à partir, et eux vivaient sans avoir reçu le moindre châtiment. Oui il y avait de quoi être colère ! Non le rouge ne s’enflammait pas d’un rien. Briser le chanteur en petit morceau le calmerait sans aucun doute, malheureusement c’était trop tard, il aurait voulu le déchiqueter bien avant. Et même s’il le voulait, il ne pourrait aller au bout de la chose en raison de sa malédiction. Verith avait donc décidé de ne pas jouer de ses griffes sur le corps du Baptistrel, faisant passer la destruction de Dévoreuse et la satisfaction de ne plus avoir un craindre pareil ennemi pour sa race par-dessus sa colère. Offrant une raison à son animosité de rester enfermé auprès de son cœur. Néanmoins, l’audace de l’elfe ne s’arrêtait pas, se targuant de lui donner des conseils.

« Si ma raison ne m’avait pas retenu Baptistrel, deux dragons seraient déjà morts à l’heure actuelle et la moitié du royaume des hommes serait en proie aux flammes. Si ma mère ne m’avait pas retenu, votre précieux domaine de la Rhapsodie aurait été rasé et l’assassin de mon frère serait mort depuis fort longtemps. Alors modère des paroles bipèdes et apprend à te taire lorsqu’il le faut ! J’ai décidé de ne pas te faire de mal alors, ne me fais pas changer d’avis ! »

La queue du rouge s’abattit au sol le faisant vibrer une fois de plus. Verith tira ensuite ses griffes du sol, laissant de vastes marques de lacération sur la terre.

« Je n’ai pas besoin de tes conseils pour prendre soin de moi. J’ai toujours vécu ainsi, dans la colère et je n’ai pas à me plaindre d’elle. Elle m’a rendu fort, elle m’a fait naître et elle me permettra de faire payer aux bipèdes la douleur qu’ils ont causée à mon peuple ! »

Les mâchoires du dragon claquèrent bruyamment.

« Tant que je suivrais cette colère, je n'aurais rien à craindre. C'est parce que je m'en suis détourné que j'ai été blessé. »

Oui, ce jour-là, il aurait mieux fait d'écouter celle qu'il avait toujours écoutée. Ce jour-là au lieu de venir en aide à Edwyn Ruddy lorsqu'ils avaient vu l'avenir ensemble, il aurait mieux de s'abstenir. Les défenses de son ennemi avaient été totalement baissés, pendant un instant il avait été à sa portée. Il aurait dû le tuer sans attendre, au lieu de lui sauver la vie et de lui proposer son aide.

« Je me méfie de ceux qui prétendent offrir leur aide. Ce sont les créatures les plus fourbes, les plus hypocrites et les plus malsaines qui soient. Je suis peut-être béni d'empathie Baptistrel, mais vos souffrances internes m'indiffèrent. Ce ne sont pas elles qui m'apporteront une quelconque garantie de votre part. J'ai connu une créature qui se disait souffrir d'avoir entrainé le bannissement de sa race, d'avoir provoqué la colère des esprits. Il se disait même d'être le plus vieil ami des dragons. Et c'est à cause de cette créature que je suis aujourd'hui maudit. »

Verith approcha son museau du Baptistrel avant de lui souffler dessus avec ses naseaux.

« Ton offre est tentante elfe, mais tu comprendras que je n'ai aucune confiance à t'accorder, même si je suis gratifié d'empathie. De plus, la prochaine fois que je verrai par des yeux, ce seront les miens. Et ils ne s'ouvriront que pour contempler le cadavre l'être par la faute de qui je me retrouve dans cette situation. »

Le colosse grenat se redressa.

« Quant à voir, cela me manque bien sûr, mais dans mon malheur j'ai trouvé un bon côté. En me plongeant dans l'obscurité, je fus obligé de renforcer mon esprit pour voir par lui. Moi qui délaissais la puissance de ce dernier, laissant cet art que je méprisais au dragon blanc, aujourd'hui je me rencontre de l'erreur que j'avais commise. Cette arme me sera indispensable pour vaincre le bipède qui m'a fait cela. Ma rage grandit de jour en jour et quand le moment sera venu, un ouragan se déchaînera sur le Tarenth. Alors il regretta réellement ce qu'il a fait.»

S'il avait voulu avoir raison absolument, il aurait vertement rétorqué que sa logique à lui n'avait rien eu à faire dans les occasions qu'il mentionner et que croire le contraire était faire preuve d'un ego surdimensionné. Mais c'était sans doute également pour lui, une façon de se rassurer que de se l'affirmer, et il n'avait pas envie de lui ôter ça. Le pauvre avait déjà bien assez souffert, pourquoi le pousser davantage alors qu'au contraire, il lui aurait fallu un peu de douceur et de prévenance pour se remettre ? Non, il ne pensait pas que son ire soit un simple fait naturel… et d'ailleurs, ce n'était pas ce que son chant-nom indiquait. Certes, il avait été colère. Mais le brasier aveugle et intarissable était une création progressive et découlant de ses expériences. Non, cette colère n'était ni naturelle ni enviable… « Verith… je ne peux que comprendre que vous soyez méfiant, et ce n'est pas un mal, je pense. Je ne vous le reprocherais nullement et n'insisterait pas davantage pour vous forcer. Une acceptation de votre part n'aurait de valeur que si elle est franche et de votre fait uniquement » Il ne s'éloigna pas davantage pourtant. « Cependant, et même si cela pourrait sembler vexant… j'ai quelques petites choses à vous dire. Vous savez que je suis lié par la magie, et que je ne peux mentir sans perdre ma raison de vivre. Alors s'il vous plaît, acceptez mes paroles comme la vérité. Aussi frustrante ou laide pourrait-elle sembler pour vous »

Et là, il n'essayait pas de le convaincre, simplement de l'éclairer de certaines choses, dont il ferait ensuite ce qu'il voulait. « Je comprend qu'il vous soit terriblement difficile de faire confiance et encore davantage après ce qui vous est arrivé… Personne de sensé ne s'attendrait à vous voir agir différemment. Mais, je vous en prie, ne vous fermez pas pour autant… Moi aussi, j'ai vécu des malheurs, et même si je ne puis me comparer à vous, je sais que j'aurais eu maintes occasions de me fermer définitivement. Pourtant j'ai bien fait de ne pas le faire, je pense… Je n'aurais sans doute pas eu l'occasion de rencontrer nombres d'individus, dont vous » Il sourit légèrement « Parce que malgré vos menaces de mort et votre mauvais caractère, je suis vraiment ravis de vous revoir » Même s'il se peinait toujours autant pour lui… mais c'était normal, ça. « Vous dites que, tant que vous suivrez votre colère, vous n'aurez rien à craindre. Pensez vous donc avoir à craindre de ce monde et des autres ? Certes, certains sont vils et violents… ou menteurs… mais pas tous, je vous l'assure. Il y a aussi du bon chez les bipèdes. Et j'aurais aimé pour cela vous montrer les miens, je suis certain que vous vous seriez sentit bien, dans ce domaine que vous vouliez réduire en flammes. Il n'y a pas de mensonges, là-bas… » Et ailleurs également.

« Tout ce que je veux dire par là, c'est, simplement, qu'il serait bien triste pour vous de craindre ce monde alors que vous lui apportez tant... » Il soupira en poursuivant plus doucement, mais toujours intelligiblement. « Voilà la première chose que j'avais à dire. La seconde est plus complexe, d'une certaine façon. Mais je doute simplement que tuer soit vraiment la réponse qui conduise à la levée de votre cécité… Je crains que cela n'empire les choses. Je ne peux vous détourner de vos objectifs, mais au moins vous aurais-je prodigué ce conseil » Et puis, quitte à être optimiste, il pouvait bien espérer qu'il le suive effectivement, non ? On ne pouvait jamais vraiment savoir. Il avait bien agressé un esprit après tout, non ? Il l'observa un moment encore avant de terminer. « La troisième chose est… personnelle. Faites-en ce que vous voulez, mais sachez que c'est offert de bon coeur » Il posa justement une main sur son coeur et approcha pour placer sa paume sur une écaille cramoisie, sans peur et sans crainte de l'offusquer. La voix emplie de la magie de la vérité et de la sincérité de sa propre âme, il affirma avec douceur.

« Je jure de ne jamais vous faire de mal, de ne jamais chercher à vous tromper ou à me jouer de vous. Verith, dragon d'ailleurs, dragon de l'ire, dragon maudis, je vous considère comme un amis et si douleur je pouvais porter à votre place, alors je le ferais avec joie. Quoi que puisse receler le futur, je jure que jamais vous n'aurez à craindre de moi » Il retira sa main et s'éloigna un peu avant de s'installer dans l'herbe. Là, il se mit à lui décrire les alentours, comme s'il ne venait pas de le toucher ou d'effectuer un serment qui le liait pieds et poings. Il fit de son mieux pour décrire la nature alentours, usant de tout son talent de baptistrel pour essayer de rendre ce tableau vivant et transmettre la joie qu'il avait toujours ressentit au contact du monde naturel, et même en cet instant dans la canicule… à défaut de lui donner ses yeux, il pouvait bien faire cela pour lui.

¤ Je ne me laisserais pas tromper à nouveau ¤

L'esprit du grand rouge rôdait autour de celui du Baptistrel, portant avec lui la malédiction dont il était affligé. Semblant happer une partie de l'elfe à chaque fois qu'il passait près de lui. Devenant aimant qui volait les tortures que s'infligeait le chanteur. Comment un si petit être pouvait-il autant se torturer pensait Verith ? Edwyn était-il comme lui ? Si petit et si torturé en dedans parce qu'il avait fait. Non, le rouge refusait de le croire, le Tarenth a été, est et restera toujours un être infâme. Et ce blondinet irradiant de chaleur n'y changerait rien. Alors qu'il avait ouvert son esprit à un bipède, alors qu'il avait ouvert sa confiance à une créature que pourtant il méprisait et haïssait. L'écailleux avait fait l'erreur de l'apprécier, que cela soit en le haïssant ou non. Oui, alors qu'il avait fait tout cela, qu'il avait fait un pas, même minuscule, sur une voie qu'il ne pensait jamais emprunter, Verithavait été trahi. Trahi et même blessé. Edwyn lui avait menti ! Ruddy l'avait manipulé ! Si l'enfant de l'orage était méfiant. Bien sûr qu'il l'était ! Il avait toutes les raisons au monde de l'être. Toutes les raisons au monde de s'enfermer. Toutes les raisons au monde de se draper dans sa colère et de s'aveugler.

Lentement Verith inclina le museau donnant l’impression de regarder Merithyn, lui offrant son attention, même si sourcils draconiques froncés ressemblaient plutôt à un avertissement. Il devait accepter ses paroles comme la vérité. La vérité est une bonne chose, dire la vérité est toujours une bonne chose, mais elle n’en reste pas moins dangereuse. Dangereuse à l’instant où celle-ci est dissimulée. Edwyn avait dissimulé la vérité à Verith dès le début et sa révélation avait provoqué des dommages bien plus importants que si elle avait été énoncée à la première seconde. Méfiant, la queue du fils de Skade battit l’air dans son dos alors qu’il écoutait l’elfe chanteur. Le colosse de flammes ne dit moi, serrant simplement les dents, grondant intérieurement des absurdités que pouvait bien lui déblatérer le Shadowsong. Patiemment, il l’écouta jusqu’à ce que ce dernier finisse. Lâchant un grondement désapprobateur quand celui-ci le toucha. L’avorton. Celui-ci se détacha ensuite de lui pour venir s’assoir dans l’herbe et commence à lui décrire le lieu. Comme de rien n’était. Verith bouillit intérieurement et rugit pour l’interrompre. Il était peut-être aveugle, mais son esprit lui suffisait à entrevoir ce qui l’entourait. Ce n’était peut-être pas encore aussi précis, car son esprit n’était pas suffisamment discipliné, mais cela lui suffisait amplement. Il n’avait nul besoin dont lui tienne la patte. Il était peut-être aveugle, mais fier. L’action même issue de bons sentiments, l’insultait en lui rappelant son handicap.

« Tu es un imbécile, elfe. Et tes paroles ne changeront rien. Je suis un combattant, tout ce qui n’est pas moi peut un jour présenter un danger. Si je crains ce monde. Bien sûr ! Car la crainte permet de devenir fort et se préparer à se mesurer à un adversaire. Seules les aliénées ne craignent pas et en définitive ils tombent. Toi qui as décidé de ne pas te fermer, tu souffriras et vivra de nouveau le malheur. Je refuse cela ! Si tu es suffisamment stupide et masochiste alors continue et cours droit vers la perdition. Je me draperais dans mon ire éternelle, elle brûlera ceux qui tenteront de s’en prendre à moi. Elle me guidera comme elle l’a toujours fait. »

Verith gronda de nouveau avant de continuer.

« Ce monde. Armanda, que m’a telle apportée ? J’y ai appris la mort de mon frère, tuer par la folie de sa liée et de l’abomination d’un vampire. Nous sommes partis pour quitter l’hérésie des bipèdes. Notre départ était votre punition, l’abandon de la magie. Certains des nôtres ont laissé des œufs en symbole d’espoir. Mon frère qui fut laissé ici était un de ses espoirs. Et il est mort ! Vous les bipèdes avez craché sur les dragons ! Vous les bipèdes avez craché sur la magie. Malgré notre départ rien n’a changé. Là est la bonté dont tu parles Baptistrel ? Tu penses que je devrais m’ouvrir à pareil monde ? Non ! Je le refuse ! Je le rejette ! »

Le colérique siffla contre le petit elfe assis alors qu’il frappa son esprit avec le sien y déversant des paroles.

« Si tu me laisses faire, Verith Dragon de l'Ire, je peux prouver mes dires en quelques secondes. Laisse-moi entrer et toucher tes écailles brièvement. Si j'ai menti alors mes protections s'abattront et il te sera possible de verser mon sang. J'en fais le serment par tous les Esprits »

Retirant son esprit de celui du chanteur, Verith parla à nouveau.

« Les serments des serviteurs des esprits n’ont plus de valeur à mes yeux. Tu trahiras ta promesse, car cela est dans la nature des bipèdes. Peut-être pas aujourd’hui, peut-être pas demain, mais tu le feras. Garde tes conseils ! Je ne me laisserais pas tromper à nouveau. Je suivrais la voie qui est la mienne, je suivrais ma colère, car elle est l’unique qui ne me trahira, ni ne me trompera pas. Et je détruirais à nouveau. »

Il était difficle de manquer son rugissement, mais il ne s'arrêta pas pour autant, et continua ses descriptions en toute quiétude. Oh évidemment qu'il entendait, simplement, il n'allait pas lui répondre tout de suite. Ce dragon était entièrement tourné vers l'impatience, la violence et l'extrémisme… hors ce monde n'était pas fait ainsi, et il lui fallait bien l'apprendre, comme un enfant. Mais n'était-ce pas encore ce qu'il était au regard de sa race ? Un enfant ? Il ressemblait un peu à sa mère lorsqu'elle était jeune dragonnette, d'après les écrits de son aïeul. Sans doute serait-il plus sage quand il aurait davantage vieillit et vu le monde. On ne pouvait que l'espérer car il allait se faire du mal à continuer ainsi… La vie n'était pas faite que de batailles ou de moments joyeux, la vie était un savant mélange et il fallait l'accepter comme elle venait. Ryle Hira disait son grand-père, un adage devenu maître mot, au sein de l'ordre. Ryle Hira, la vie est ce qu'elle est. Ni bonne ni mauvaise, ni amie ni ennemie. L'attitude du dragon ne brûlerait personne en vérité. Mais elle le rendrait de plus en plus solitaire c'était certain. Il finirait seul et abandonné. A l'écart de tous, car personne je chercherait plus à lui tendre la main. C'était triste et dommage, mais pas incohérent. Personne ne pouvait le forcer. On pouvait lui dire ce que l'on pensait, mais en fin de compte il faisait uniquement ce qu'il voulait… et s'il finissait seul, ce serait de sa faute également, uniquement de sa faute. Quoi qu'il puisse en dire et en penser. Finalement, il conclut sur la beauté d'une très belle fleur aux couleurs chatoyantes, puis releva la tête vers le dragon en souriant. « Vous agissez comme un enfant effrayé, Verith de l'ire… je trouve ça dommage. Vous tournez en rond dans votre discourt, en répétant les mêmes choses sans chercher à entendre et comprendre ce que l'on vous répond en retour. Pas seulement avec moi, mais avec tous en règle général. Pensez-vous qu'en le matraquant à tort et à travers on finisse de guerre lasse par vous agréer ? »

Il y avait fort à parier que non, mais il ne cherchait pas réellement une réponse, en réalité. « Vous pouvez croire et penser ce que vous voulez, moi je sais ce qu'il en est. Et peut-être, quand vous aurez davantage vécu ici, et que vous aurez mûrit, vous comprendrez mieux mes paroles et vous rappellerez de notre rencontre. Et quand vous en aurez vraiment besoin, sachez que je vous serais toujours ouvert pour vous écouter et vous aider » Il se releva enfin, époussetant ses habits. Il avait presque eu envie de lui demander un peu plus de précisions sur le voyageur, mais il était évident que cela ne lui servirait pas beaucoup. Verith était trop obnubilé et renfermé pour cela. Tant pis, la rencontre lui restait malgré tout un honneur. Après tout, c'était un beau dragon. Sa monture revint bientôt vers lui et le poussa du museau, le faisant sourire une fois encore. « Bien… je vais vous laisser à vos sombres pensées, Verith. Je ne puis rien dire de plus qui pourrait vous servir à mon humble avis. Mais j'espère vous revoir à l'avenir, quoi que vous en pensiez, j'apprécie votre compagnie. Ryle Hira, dragon rouge, et que les étoiles veillent sur vous »

HRP : Bon bah c'est naturellement parti en conclusion, on s'arrête là si ça te va ^^

¤ Je refuse ¤

Non il ne le croyait pas, il ne croyait pas ce serviteur des esprits, il ne croyait pas cet elfe qui agissait comme Edwyn à leur première rencontre. Lui dire qu'il n'est pas ennemi, avoir l'impudence de le toucher et de salir ses écailles de ses sales pattes de bipèdes. Venir lui promettre des choses qu'il ne tiendrait jamais. Non ! Verith ne se laisserait pas berner une seconde fois. Jamais. Jamais plus ! Il avait sa voie, il la suivrait. Cette voie le mènerait vers la liberté, il la suivrait jusqu'au bout. La queue du grand rouge fouetta violemment l'air, le claquement résonnant suite aux paroles du petit bipède.

« Prends garde à tes paroles. N’oublie pas à qui tu t’adresses. Je ne suis pas sourd à vos paroles. Elles ne trouvent simplement pas d’échos en moi. Tu me parles de la bonté des bipèdes, mais jusqu’à présent je n’ai rien trouvé venant abonder dans ce sens. Penses-tu que je devrais suivre l’avis de la majorité ? Tout simplement parce que tous les dragons d’Armanda disent qu’il y a du bon dans les bipèdes alors je devrais les croire et faire ami ami avec ? Folie que cela ! Je vois l’horreur des bipèdes, ce qu’ils nous ont fait. Leur guerre. Le déchirement. Tu dis que je suis sourd à vos paroles. Quand est-il de vous ? Vous qui ne savez rien, vous qui n’avez rien appris de notre départ !! »

Verith ouvrit brutalement ses ailes, soulevant une bourrasque, alors qu’il vint bousculer l’esprit du chanteur du sien, venant y déverser la douleur qu’il avait eue en apprenant la mort de son frère.

« Ryle Hira. La vie n’est pas ce qu’elle est. La vie est ce que l’on en fait. Le monde est ce l’on en fait. Tu penses que je vais accepter ce monde dans lequel mon frère est mort ? Ce monde dans lequel les dragons se sont entredéchirés en combattant pour des bipèdes. Je devrais selon toi accepter cela ? Un monde où seule une fraction de bipèdes, comme vous vous échinez à me dire, seraient bons ? »

Le rouge se redressa convenablement, se préparant à prendre son envol.

« Un monde où j’ai été trahi ? Non chanteur, je le rejette. Oui je suis effrayé, par la folie qui y règne. Libre à toi de rester et de subir cette folie. Moi, je refuse. »

Verith sauta avant de battre furieusement de ses ailes pour s’envoler.

[hrpg: Désoler pour avoir mis autant de temps pour répondre Meri.
Je pense que l'onv a conclure en effet ^^.
Merci pour ce rp =) ]

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