Il n’aurait pas dû s’inquiéter autant. Il le savait. Mais il s’inquiétait malgré toute raison…au premier plan de ses soucis se situaient Roëric, qui se trouvait au cœur des affrontements de la galerie principale, Korentin, dans la seconde galerie et évidemment Eliowir, son tout jeune fils, qu’il avait dû laissé dans la plus totale précipitation lorsque les combats avaient débutés. Ils étaient tous loin de lui, hors de sa portée, il ne pouvait les protéger et devait s’en remettre à leurs capacités. Il ne pouvait qu’espérer qu’ils s’en sortent. Il n’y avait rien d’autre à faire et lui-même devait absolument se défaire de ses craintes, ou il risquait plus encore la mort. C’était pourtant affreusement difficile et un moment, alors que Silarae se précipitait dans la ruée à la suite de Lorenz et de la garde princière, il regretta ses liens, regretta de porter ce fardeau… il le détournait du combat qui l’attendait. Mais cette pensée fut vite chassée, elle était stupide. Elle était… oui vampire, d’une certaine façon. Il lui fallait simplement leur faire confiance. Encore une bien étrange chose que celle-là. L’esprit de Silarae vint bousculer le sien avec une rudesse sèche mais bienvenue. Non effectivement, ce n’était pas le moment de se mettre à penser philosophie. Il se devait d’accepter certaines réalités, comme le fait qu’il leur faisait confiance. Ils survivraient à cet affrontement, ou il irait jusque chez Mort pour les récupérer ! Serrant les dents sur un sourire amer dissimulé par son casque, il évita un stalactite se rapprochant un peu trop de lui dans la hâte de sa liée d’avancer et se plaqua un peu plus contre sa selle, serrant la faux dans sa main gantée. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas porté une armure complète comme celle-ci, pourtant elle ne semblait rien peser, si ce n’était le poids et la présence implacable de la bataille. Les plaques d’os peintes d’un blanc argenté étaient articulées de façon à lui laisser sa liberté de mouvement, et le heaume anonyme qui couvrait son visage lui laissait une vision relativement bonne, malgré l’inconfort que toute cette quincaillerie provoquait. Il se sentait plus soldat que mage en l’instant. Tant pis, si ça lui permettait de survivre.

Enfin, il les vit, et serra plus encore son arme. Des Alayiens d’élites, les meilleurs vétérans, les meilleurs armes… Une grande offensive. Le combat allait s’avérer intense, et pourtant, au contraire de sa dernière escapade en solitaire, il ne ressentait aucune exaltation à la perspective de la bataille. Seulement un mortel sérieux. *ça ne va pas être simple…* Il tourna son regard brillant sur Lorenz, attendant de savoir ce qu’il désirait d’eux. Ce qui ne tarda pas. Il hocha simplement la tête, encouragea la dragonne vers l’avant et, alors qu’ils arrivaient au point le plus propice, il vida la selle, se rattrapa lourdement à terre aux côtés de sa liée avant de faucher d’un coup l’alayien le plus proche, dont l’armure se gondola horriblement sous l’impact dont le vampire la gratifia. L’homme était mort, il le savait, sa cage thoracique ne pouvait soutenir un tel choc. Laissant à la dragonne le soin de purifier par le feu les alentours, lui choisit d’offrir un beau choc thermique à ses invités et en appela à un impact du gel. Les alentours se couvrirent immédiatement d’une large couche de glace luisante, l’air se faisant plus froid… de plus en plus froid, terriblement froid. Et le froid atteignait les êtres alentours, du moins ceux capables de le sentir. Sans sourciller, il abattit un nouvel alayien après quelques passes d’armes et enchaîna sur une couronne de l’hiver qui créa une barrière de chaque côté de la dragonne en plein combat. D’énormes stalagmites de gel, semblables à des lances ou des piquets de tranchées, s’élancèrent à la rencontre des corps proches, transformant une partie de la galerie, côté alayien, en un labyrinthe glacial et dangereux qui ralentirait l’apport de troupes fraiches. Ceux qui parviendraient à se frayer un chemin se retrouveraient obligés de faire face à sa liée qui, protégée par son armure, faisait un bouclier impressionnant. Et l’inverse était également vrai, les combattants déjà sur les lieux ne pourraient pas reculer.

Il vit distinctement plusieurs arbalétriers proches visant Silarae, et fronça les sourcils sans que le geste puisse se distinguer. Levant une main gantée il pointa deux doigts vers eux et dans un cliquètement discret de gantelet, il resserra le poing, à l’instant où les carreaux quittaient leurs encoches. Une pression d’énergie sur la hampe de bois éparpilla la plupart des projectiles. Deux virent tinter, l’un sur sa faux, l’autre sur la carapace de Silarae qu’il se félicita d’avoir récupérée. Ne désirant pas qu’ils puissent retenter de les transformer, lui et sa belle, en boules d’épingles, il créa une vapeur toxique sur leurs positions et d’une série de murs de pierre, les enferma dans un étroit cube mortel assez haut pour qu’ils ne s’en échappent pas. Cet interlude lui permit de repérer enfin le prêcheur. *Pourquoi ça ne m’étonne pas ?* Inconscient d’avoir parlé aussi bien pour lui-même que pour sa dragonne, il observa du coin de l’œil le serviteur du néant qui, de toute évidence, l’avait repéré en amont… Fort heureusement, il était un peu occupé sur l’instant et lui savait à présent qu’il était là. Il était là… Il commandait cette troupe, cette créature qu’il méprisait profondément. La suite s’imposait de façon logique. Il se devait de le combattre, n’était-ce pas l’intention de l’autre de toute façon ? Il n’était pas venu vers lui pour rien. Ou pas d’ailleurs. Ah tien, Lorenz était-là ? Il l’en avait totalement oublié, avec cette bataille. Doute… devait-il laisser l’alayien au prince ? Il n’en avait guère envie en vérité, mais tant que cet imbécile en chasuble s’ingéniait à matraquer inutilement dans la direction de l’autre vampire, lui avait le champ libre pour faire tourner la bataille à l’avantage de son camp. Il ne pouvait pas laisser passer une telle chance. *Tant pis, j’aurais le plaisir de lui taper dessus plus tard…*

Il étendit sa tentaculaire puissance magique aux alentours et en toucha la totalité des armes laissées à terre par les défenseurs rebelles morts ou en retraite. Se passer de geste clef était délicat, mais il parvint sans trop de mal à un résultat satisfaisant, pendant que sa dragonne le protégeait, dans son immobilité. Une moment plus tard, les armes vibraient et s’élevaient, la plupart pour frapper dans les points faibles des armures, sur les jointures, au visage… Il ne retint pas le sortilège cependant, l’effet de surprise permit à de nombreux petits groupes de rebelles de reprendre la haute main. C’était suffisant. Empoignant sa faux, il engagea un duo d’adversaires qui lui causèrent quelques soucis, mais dont il finit par se débarrasser en frôlant plus d’une fois la mort. Haletant légèrement, plus par habitude qu’autre chose, il se colla contre l’un de ses pics de glace et inspira à fond avant d’observer les environs. Les vampires étaient les combattants majoritaires, du côté des défenseurs… Il invoqua un brouillard qui tomba sur la zone sans prévenir. Son peuple n’aurait aucun mal à s’y faire, les elfes pourraient sans doute également se trouver un certain confort, les humains en revanche auraient plus de mal. Volontairement, il attira l’attention d’un groupe d’alayien qui s’opposait à des humains, justement, et reproduisit son petit tour d’avec les arbalétriers, les enfermant dans un cube fermé de terre le temps de les empoisonner avec une vapeur toxique. « Vous, vous venez avec moi » Il entraîna le petit groupe avec lui, le plaçant près du mur de pics gelés, de sorte à attirer les alayiens qui passaient par là sur les pals, ou dans ses crocs, puisqu’il ne voulait pas trop s’éloigner de Silarae.

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Citation :

L'arrivée soudaine des renforts d'élite Alayiens avaient mis Aegnor en très mauvaise posture, il a été sauvé par Eliwyr mais à quel prix ! Le Meraennon est mort en brave... Ainsi libéré, Aegnor est forcé de reculer en même temps que les autres défenseurs complétement débordés par les Alayiens. Du coin de l'oeil, il aperçoit le Prêcheur qui a été rejoint par une estafette, elle lui porte un message... Bonnes ou mauvaises nouvelles pour les rebelles ? Il ne peut pas le savoir, ce qu'il sait, c'est qu'ils sont en train de perdre la galerie !

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Un frisson lui parcourut l’échine alors que le cor résonnait, le son se répercutant en écho dans la galerie. Serrant les crocs à les sentir crisser, il se retourna vers l’origine de ce son exécrable et observant avec intensité. Des renforts… Et de dangereux renforts, pensait-il en observant les boucliers luisant, intact avec le déchainement de feu qu’ils avaient subis. Intactes… cela ne présageait rien de bon en vérité, rien de bon du tout. Et l’avertissement de la dragonne ne vint que renforcer le sentiment qui montait en lui. Pinçant les lèvres de contrariété, il serra davantage sa faux et rassembla les humains venus se battre à ses côtés, les faisant reculer derrière lui. Il préférait être en première ligne, au besoin. Autour d’eux, d’autres tentaient leurs chances, mais aucune magie ne semblait à même de passer ces armures-là… Un bref instant, il songea à faire s’écrouler la galerie sur eux, mais ils risquaient, eux les rebelles, d’y rester aussi. Ils furent lentement contraints à la retraite, se battant comme ils pouvaient pour ne pas simplement briser les rangs devant la pression de ces hommes-scarabées. Même les coups physiques étaient moins efficaces, contre ces coques de métal et de verre noir. Soudain, une douleur aigüe lui vrilla l’omoplate et il gronda sourdement en se ramassant sensiblement sur lui-même. Il lui fallut quelques instants pour comprendre que la douleur ne venait pas de lui, mais de sa dragonne, des instants durant lesquels il aurait sans doute été tué si un des humains ne s’était pas occupé de le couvrir. Il se reprit bien vite, et entreprit de soigner l’aile de la blanche. Fort heureusement, la pointe n’était pas restée fichée…

Le sol glissant de sang failli le trahir, alors qu’il détachait du plafond un gros morceau de roche pour écraser plusieurs alayiens en coquilles, et il planta un instant la pointe de sa faux dans le sol. La retraite était inévitable, pourtant elle lui laissait un goût amer dans la bouche. Il ne fallait pas tant reculer, ils allaient finir par être piégés. Pourtant, ils n’avaient guère le choix. Ils reculaient en ordre, mais la pression des envahisseurs était de plus en plus forte, et à plusieurs reprises, il fut contraint de faire s’affaisser des morceaux de galeries pour piéger les combattants d’obsidienne et permettre aux défenseurs proches de lui de s’en tirer. Il tentait autant que possible d’empêcher les soldats autour de lui de briser les rangs et d’ajouter à la débandade générale. C’était majoritairement des humains, et il semblait effectivement qu’il parvenait à leur faire garder un peu de discipline, même s’il épuisait une partie de ses réserves d’énergie à soigner leurs blessures et à dévier des attaques qu’ils ne voyaient pas venir. Il n’aurait pas dû se gaspiller autant, il se savait une meilleure arme qu’eux. Et pourtant, c’était ce qu’il faisait, ne pouvant tout simplement se résoudre à les abandonner. Il se refusait à les abandonner, tant qu’il pourrait soutenir le choc. ‘Ses’ hommes, formaient un petit ilot dans cette marée à contre-courant, malgré leur recule. Rapidement, il trouva une certaine utilité aux elfes qu’il avait récupérés, et plus particulièrement à leur sortilège de glissade. Les lourdes armures n’étaient franchement pas idéales pour garder son équilibre, quand on patinait sur une surface glissante et huileuse, et nombre de guerriers s’en allaient embrasser le sol plus ou moins violemment.

Bientôt, la jonction avec la seconde galerie principale approcha. Elle était déjà occupée, mais il ne prit pas du tout le temps de savoir par qui une fois qu’il fut certain que ce n’était pas Korentin. Il s’approcha de Lorenz, suivit par son petit essaim personnel qui semblait décidé à s’accrocher à lui mordicus. Ça ne le dérangeait pas foncièrement, il commençait à savoir qui pouvait faire quoi avec eux. Il ne prit que le temps d’écouter les consignes, eu une signe de tête sec à l’égard du prince et l’abandonna là sans plus de cérémonie. Ce n’était pas le moment pour des niaiseries. Il récupéra une partie des troupes d’élite vampirique, ainsi que tous les fuyards elfiques et humains qu’il pouvait trouver, et se dirigea vers son nouveau poste de combat, la tête fourmillant littéralement. Une fois qu’il fut arrivé à l’emplacement idéal, il organisa tout ce beau monde, Silarae en tête et utilisa la même tactique que lors de sa mission de sauvetage, il changea l’optique du passage pour donner l’illusion qu’il était seul avec sa dragonne. Lorsque les alayiens arrivèrent et commencèrent à avancer, il les laissa venir. Fort heureusement, peu d’entre eux parvinrent jusque-là. Sur des sections bien définies en avance, des murs de pierre s’élevèrent soudain, bloquant de petits groupes de soldats ennemis qui se trouvèrent en proie à un ennemi qu’ils n’auraient pas autant d’aisance à abattre : le poison. Ils pouvaient avoir les meilleurs armes et armures du monde, il n’en restait pas moins qu’elles devaient leur permettre de respirer, nécessité absolue des mortels. Et respirer, cela signifiait forcément inhaler le poison…

Ceux qui n’étaient pas enfermés tombèrent successivement sur des runes de terre se déclenchant sous eux, les faisant tomber dans de profonds trous, ou sur des glissades qui permettaient aux guerriers d’élites vampiriques de les immobiliser et de les dépiauter à leur façon. Et ceux qui passaient encore avaient alors affaire à la blanche… Ceux qui ne pouvaient aider à cette tactique renforçaient leur position pour l’instant où ils ne pourraient plus tenir le rythme. Parce que le moment viendrait forcément. A moins bien entendu qu’il ne décide vraiment de faire s’effondrer le plafond sur eux tous.