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| On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] | |
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| Sujet: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Sam 26 Avr 2014 - 22:01 | |
| An II de l’ère Obsidienne, janvier.
C'était déjà l'heure du retour. Lisaë n'avait que trop tardé loin des siens. Et la perspective de laisser trop longtemps ses amours seuls avec leur père l'inquiétait un peu il fallait dire. Même si sa chère mère lui avait promis de passer quand le général elfique était en fonction. Il ne l'était pas toujours. Et il fallait toute la diplomatie d'une mère pour parfois désamorcer le tempérament de son mari dont ses enfants avaient hérité, même si cela était à des degrés différents. Son mari avait tendance à aller un peu trop droit au but, sans chercher à louvoyer dans les problèmes de dialogue prompt aux jeunes adolescents, se heurtant finalement à un mur de silence ou à une nuée de cris finissant dans un claquement de porte et un « personne ne m'aime ou ne me comprend ». Oui, il valait mieux qu'elle rentre et vite.
C'est pour cela qu'elle décida de couper au travers de la foret, accompagné de Dulinn, son brave cheval grisonnant. Et cela malgré les réticences de la garde qui l'accompagnait, qui s'obstinait à suivre un chemin tracé depuis des siècles et des siècles, gravé dans la terre, malgré les saisons qui se succédaient. Les soldats de son mari n'étaient guère enclin à laisser la femme de leur chef partir ainsi, de peur d'en subir les conséquences de leur chef. Mais Lisaë n'était du genre de femme à se laisser faire et encore moins à ne pas suivre la voix qu'elle décidait de suivre. Tant pis pour eux, il fallait la suivre et ne pas s'enfermer dans une routine perpétuelle. Elle avait des enfants à retrouver, un mari à sauver, cela valait bien un changement de chemin. Par tous les esprits.
Le petit chemin plus arpentu et vallonné qu'elle emprunta ne laissait guère place à la lumière sous le toit quasi permanent des feuilles verdoyantes des hauts arbres de la foret. Pas un bruit, le silence hormis le pas du cheval et le bruissement des pierres se cognant contre des sabots. De temps à autre, un oiseau s'envolait rompant la monotonie de la chevauchée. L'odeur des bois humide apportait au charme de l'endroit, même si la fraîcheur dû à l'absence de lumière, rendait l'atmosphère plutôt sombre et un peu terrifiante, mais la jeune elfe ne s'en souciait guère, appréciant le calme ambiant avant de retrouver le tumulte de sa maisonnée. Et chaque descente et montée qui la ramenait vers chez elle effaçait la rudesse et la fatigue d'un voyage non linéaire et obscur. Puis rien ne vaut un peu de tranquillité avant les demandes incessantes de ses trois adolescents oscillant entre le besoin encore vital et nécessaire de leur mère et cette indépendance qui cherchait tant.
Cela faisait bien trois bonnes heures que Lisaë laissait ses pensées vagabonder sur son voyage auprès des chanteurs, au gré des foulées tranquille de sa monture, quand ils arrivèrent à un petit cours d'eau tranquille.
« -Tu mérites bien une pause, mon brave »
L'elfe mit pied à terre et laissa son cheval s'approcher de l'eau afin de se désaltérer un peu. Elle aussi se pressa se prendre de l'eau et un pain elfique rangés dans une des sacoches accrochées à sa selle. Lisaë s'installa un peu plus loin sur un tronc. Elle commença à se restaurer, observant Dulinn en faire autant. Il ne faudrait pas tarder. Mais son vieux cheval avait bien besoin de reprendre des forces. Ce qu'il chercha à trouver en farfouillant dans les quelques rares brins d'herbes de sous bois.
Son cheval redressa la tête au même instant que Lisaë sentit un bruit tranchant avec le calme environnant. Des pas, un froissement de tissu, et les herbes qui bougeaient autrement que par le vent. Quelqu'un venait. La femme se leva et s'approcha de son destrier, attrapant son bâton à la main et allant se cacher derrière un arbre attendant la chose, l'animal ou tout autre chose qui arrivait. Avec l'intrusion alayenne, il valait mieux se méfier. Et elle jouerait du bâton si le besoin s'en ferait sentir. |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Lun 5 Mai 2014 - 17:50 | |
| Cinq mois. Cinq longs mois depuis la fin de la désormais triste et célèbre bataille du Bois des baptistrels. Une bataille qui avait pris de court les négociations, une bataille qui avait vu mille monstruosités, mille peurs et mille morts. Les elfes avaient peut-être repoussé le sinistre envahisseur qui avait voulu leur imposer le Néant en étendard, il n'en restait pas moins qu'on ne pouvait parler de victoire. Loin de là. Les pertes étaient trop nombreuses, les ravages trop grands, trop profonds, que ce soit dans leur noble forêt ou que ce soit dans leurs dignes et fières âmes. Oui, en leurs âmes aussi, les elfes avaient été blessés. Orgueil bafoué. Dignité envolée. Cette bataille leur avait prouvé de façon sanglante que, seuls, ils mourraient. Que, seul, le peuple elfe ne pourrait survivre, comme il avait toujours voulu vivre si longtemps dans sa forêt, seul et en paix. Ce temps était révolu, ce temps où ils pouvaient se glorifier de leur beau et paisible royaume imprenable arrivait à son terme. Le glas de leur grandeur venait de sonner en échos aux lugubres cris sonnés par les cors du Néant. Oui, leur glas venait, inexorablement. Et ils ne pourrait le ralentir, à défaut de l'arrêter, que si, enfin, ils s'alliaient eux aussi. Pleinement, sincèrement, en prenant part à la rébellion en marche. Voilà quels étaient les sombres songes d'un vieil elfe. Etranges songes, quand on pensait qu'il aurait été, quelques décennies auparavant, un des farouches défenseurs du conservatisme inactif et de l'autarcie aveugle, voire de la fuite vers d'autres larges, fuite certes lâche mais destinée à préserver les derniers lambeaux de leur puissance en déchéance. Etrange, oui, de penser qu'il était devenu, dès lors, un farouche défenseur de la prise d'armes et de positions tranchantes, un défenseur de la rébellion et de l'engagement des elfes à part entière dans celle-ci. Même si cela signait la fin des elfes, la fin des elfes tels qu'ils avaient été tout du moins. Cette fin viendrait de toute façon, le pressentait-il, d'une façon ou d'une autre, aujourd'hui, ou demain, ou dans un siècle, mais elle viendrait. Leur peuple se mourrait. Si fin il devait y avoir, qu'elle vienne alors de façon digne et belle, plutôt que souillée par une lâcheté honnie ou une déchéance amère. Lui-même s'étonnait parfois de ce revirement. Pas si soudain, certes, il lui avait fallu près de cent trente années d'exil pour en venir à de telles pensées, et pour avoir ouvert, quelque peu du moins, les yeux. Mais... revirement étrange tout de même, qui devait faire s'horrifier ses ancêtres, si nobles, si dignes, et qui l'horrifiait tout autant lui-même en un certain sens. Malheureusement, du peu qu'il en avait vu, le peuple des elfes, son peuple se morigéna-t-il, s'engluait dans son éternel marasme politique et dans ses immortelles querelles intestines. "Il n'était plus temps pour tous ses jeux-là", avait-il envie de leur dire, de leur crier, de leur rugir même ! Mais tous ses sourds rugissements, conspués du fin fond de la forêt et du plus profond de son âme, n'étaient que vains. Personne ne l'écoutait plus. Personne ne voulait ne serait-ce que l'entendre. Banni, honni, il se devait d'être muselé et de garder silence. Il avait tenté pourtant... en vain. Il avait observé alors, en un triste silence, en une muette prière, hantant la forêt de ses rondes taciturnes, tournant autour des siens comme voulant tracer un cercle protecteur, de son pas feutré et faussement nonchalant. Tel le spectre d'un vieux lion solitaire écarté des siens par d'autres plus forts, plus vigoureux, qui avaient su rugir plus férocement que lui, qui avaient su briser ses crocs et ses griffes antan, le brisant aussi, le chassant... mais qui n'avaient su le tuer. Non ils n'avaient pas su le tuer, ces jeunes lionceaux ambitieux dont la crinière commençait tout juste à s'ébouriffer, ces jeunes fauves alors moins sages peut-être, moins expérimentés, moins aguerris aux nobles combats de la vie. Oui, le vieux lion était encore là, le vieux lion avait survécu. Et il avait observé, pleurant en son for intérieur la lente agonie des siens, de son peuple, de sa troupe. Il avait observé, implorant Dracos et tous les esprits de guider ses anciens paires, de souffler le vent de la sagesse vers eux, de leur insuffler la force d'agir. D'agir, enfin, et de suite. Maintenant. Quand il était encore temps. Mais tous ses pleurs et toutes ses prières semblèrent être ignorés par les puissances d'Armanda. Le temps courrait à vive allure, leur filait entre leurs doigts hésitants, pour mieux se moquer d'eux et de leur lenteur languissante, de leur lente vie, si longue et si courte à la fois. Un temps au bout duquel l'agonie ne semblait prendre fin. Son peuple se mourrait, et lui avec. Non, lui ne mourrait pas ! Non, le vieux lion ne voulait pas mourir. Il ne voulait pas voir son peuple agoniser ainsi. Quand bien même serait-il le dernier, il se battrait jusqu'au bout. Pour son peuple, pour sa troupe, pour ses lionceaux. Oui, il se battrait, et s'il devait mourir, alors il le ferait pour eux, avec eux, dignement, avec honneur. Et se disant, il erra à travers la forêt, ses fières lances dansant dans ses mains. Sa belle Yaajissim, lance ancestrale des Serillëiel, à gauche, et la digne lance légendaire, lance d'absolution, qu'il avait trouvée il y a quelques semaines, à droite. Il dansait, dansait, bondissant d'un fourré à l'autre, fouettant l'air et les branches de ses lames acérées, comme se battant contre des ennemis imaginaires. Ce qui n'était pas loin d'être le cas. Ses ennemis se nommaient alors Hésitation, Doute, Inaction, Peur, Impatience, Aveuglement. Il les fouettaient violemment, les transperçaient de mille et une attaques, les écartait de son chemin à chaque pas. Mais il s'agissait là d'ennemis tenaces et déterminés qui ne semblaient pas vouloir le lâcher. Tournoyant sur lui-même, Yaajissim fusa, et évapora Inaction du bout de sa pointe. Aveuglement tenta de le frapper de dos, mais il tournoya encore dans un mouvement souple et assuré, vieux lion certes éprouvé par les âges mais encore agile, et ce fut cette fois Absolution qui dégaina. Hésitation et Doute contre-attaquèrent, mais ses esquives tout en tournoiement magique les mirent en échec. Son corps n'était plus que courbes souples et agiles, son torse nu arborant fièrement ses vieilles cicatrices, tandis que ses muscles noueux roulaient sous sa peau en sueur, que ses cheveux voletaient dans son sillage et lui fouettaient le visage, menaçant de le balafrer plus encore. Il dansait, dansait, et dansait encore... Tant et si bien qu'il arriva près d'un ruisseau sans prendre garde. Et s'arrêta net quand un baton menaça de lui lancer un sort. Il était alors en position presque accroupi, son corps légèrement ployé vers l'avant, Absolution pointant devant lui, tandis que Yaajissim surveillait ses arrières, tel un fauve prêt à bondir et attaquer. Et enfin, il la vit. Une femme elfe. Pas n'importe laquelle toutefois. Il la reconnut instantanément, la connaissant suffisamment par le passé pour que sa beauté ne puisse être oubliée. Elle aussi semblait prête à attaquer, et son cheval, fier destrier s'ébouriffant, était tout autant aux aguets. Il lâcha alors sur l'instant ses deux lances, ne voulant nullement qu'elle se sente menacée. Non, il ne voulait nul combat. Surtout pas en ces lieux, surtout pas contre l'une des siens. Non, pas de combat. Il darda un court moment un regard nuit des plus troublés vers elle... avant d'enfin réaliser qu'il n'était plus digne de pouvoir dévisager ainsi ses paires. Ses anciens paires. Il se jeta alors presque à genou, offrant la digne révérence que cette noble elfe méritait. Que son regard semblait presque exiger de lui, vil banni, infanticide honni. Et il attendit, en silence, qu'elle daigne lui accorder répit. A défaut de lu accorder à lui aussi pardon et absolution. |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Ven 9 Mai 2014 - 21:44 | |
| Lisaë mit un temps pour comprendre qui se tenait face à elle. Pas un animal, même si elle aurait préféré, encore moins un alayen, là aussi il aurait mieux valu. Non, un des leurs. Enfin, un qui fut de la communauté elfique, mais qui par folie, par cruauté ou par les deux a été bannit bien loin de leur frontière. Même si aux yeux de Lisaë, pour ce genre d'elfe la mort valait mieux. Car oui, devant elle se tenait à genoux, le banni Serillëiel. Le meurtrier. L’infanticide. Rien de pire aux yeux d'une elfe où la vie se fêtait, vu comme un don bénit des esprits. Rien de pire aux yeux d'une mère de trois enfants.
D'un regard de dégoût, la voix murmurant tout le ressentis pour cet homme, Lisaë fit entendre sa voix.
« -Vous ? »
Elle baissa à peine son bâton quand l'homme la salua à genoux. Que faire, que dire, comment réagir face à une telle vermine. En cet instant, la jeune elfe n'avait qu'une envie, vite prévenir son époux et chasser ce malotru de leur belle foret. Comment pouvait-il oser revenir souiller de sa présence l'air et la tranquillité des lieux ?
« -Je m'attendais à tout sauf à vous ! »
Pour dire, elle s'attendait même à tomber nez à nez avec un alayen. Ce banni avait été oublié avec le temps. Loin d'eux, à vivre une vie de paria, loin des siens, auprès des humains. Ceux-ci trop émerveillés par le beau peuple pour comprendre ce qui se cachait sous ces traits féeriques. Comment pouvait-il revenir ici près de ceux qui ne voulait plus de lui ? Quelle vengeance venait-il assouvir. La jeune femme pensa à ses propres enfants. Un fou de cette nature ne pouvait que recommencer. Elle serra sa main sur son bâton prête à en user s'il le fallait pour l'empêcher d'approcher les siens.
« -Je vous croyais parti bien loin de nos contrées et nos bois. »
Et nous débarrasser de votre présence.
« -Comme quoi la guerre bouleverse même le bon entendement. »
Ce qui voulait dire qu'il avait vraiment une case en moins pour croire, imaginer et même ne serait-ce que caresser le doux espoir de se voir pardonner ses faits. Tant qu'elle et son époux graviteraient dans les sphères même lointaines du pouvoir jamais il y aurait de pardon pour cet elfe assassineur d'enfant. Pour elle s'était inconcevable de faire du mal à de tel don des esprits. Et en tant que mère, il n'y avait pas de chose plus horrible que de s'en prendre à l'avenir si fragile de leur race. Elle était mère et cela passait avant tout. Ses enfants passaient avant tout. Et même si la vie de famille n'était pas tous les jours de tout repos avec trois adolescents qui se cherchent, jamais elle ne se verrait atteindre de tel extrémité. Jamais. Car pour tous les cris, les pleurs, les chahuts, il y avait de nombreux sourires, des moments tendres et complices et de l'amour sans fin au cœur de cette famille. Et même si elle se savait parfois un peu trop rigide, soutenu par son époux, cela n'était que pour le bien de leur enfants, de leurs trésors. Pour que plus tard, ils puissent être des elfes accomplis et en harmonie avec ce qu'ils sont. Alors non, jamais elle ne pourrait imaginer qu'elle ou Artaher puisse penser faire une telle chose. Il fallait être fou. Et les assassins n'étaient pas les bienvenus. Et tout dans l'attitude de Lisaë le montrait. De sa voix sèche comme le désert, à son attitude fermé et méprisante face à son aîné. Mais là le respect des âges n'avait plus lieux d'être. Il était un moins que rien, juste bon à ramper sur le sol, comme il semblait si bien le faire, là devant elle.
« -Que faites-vous donc ici, dans ces bois, bien près de là où vous on a dit de partir ? » |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Jeu 22 Mai 2014 - 22:20 | |
| Un lourd silence s'était abattu sur eux. Le vieil elfe attendit, attendit et attendit encore, tentant de garder la pose aussi humblement que possible. Il crut un instant qu'elle allait au mieux le laissa là dans cette position humiliante, au pire l'empaler d'un sort. Rien de tout cela ne vint toutefois.
« -Vous ? »
La voix qu'elle lui offrait était des plus glaciales et bien plus meurtrières peut-être que n'aurait pu l'être un sort. Par ce simple mot, elle lui criait bien mieux toute l'abjection qu'il était pour elle.
Elle ne l'invita nullement à se relever toutefois, bien au contraire. Comme si le voir lui offrir une telle révérence était une douce vengeance, ou il ne savait quoi d'autres, pour elle. Elle, Terendul de nom, elle qui en son temps avait dû lui offrir ce même salut... Oui, peut-être bien une douce vengeance ? Quoique... dans son souvenir, il ne se rappelait pas de l'avoir jamais connu si rancunière ou si vindicative. Ou peut-être était-ce la mère qui parlait là et s'outrageait autant de la présence de l'Infanticide ? Oui, à bien y penser, ce devait être cela.
Il se tut donc, la laissant déverser son venin acide sur lui, et gardant sa position d'humble banni.
« -Que faites-vous donc ici, dans ces bois, bien près de là où vous on a dit de partir ? »
- La guerre comme vous dites, répondit-il enfin, d'une voix empreinte d'un certain sarcasme.
Avant de se rappeler que le sarcasme n'avait pas lieu d'être dans sa situation. En sa qualité de condamné à l'exil, il était au bas de l'échelle, et elle le dominait en tout point en cet instant. Il se contraint donc à contenir son cynisme, et reprit, d'une voix plus calme et moins grondante :
- Autant j'ai pu me rendre utile lors de la guerre contre les vampires, en honorant ainsi l'alliance des elfes avec les humains, autant contre les alayiens, un elfe seul ne peut pas grand chose. Dame Evanealle et le nouvel empereur qu'elle a nommé, Sire Eliwyr Meraennon, ont écouté ce que j'avais à raconter de mes expériences lors de cet exil, et m'ont accordé leur grâce avec la permission de revenir... dans ces bois.
A défaut de vraiment revenir au Royaume. Oh, certes, il aurait pu y revenir aussi s'il l'avait voulu. Et il avait été tenté d'essayer un tel retour. Mais... Mais l'attitude de cette belle Lisae Terendul ne serait rien comparé à ce que la vie là bas lui aurait réservé. Il n'était qu'opprobre, abjection maudite, en ce beau pays qui avait été le sien.
Dans les bois sauvages, cela n'était peut-être pas mieux, mais disons qu'au moins une rencontre avec l'un des siens était plus rare.
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| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Dim 1 Juin 2014 - 21:06 | |
| Donc cet elfe bannit lui apportait encore de l'eau à son moulin de voir d'un mauvais œil la présence d'Eliwyr Meraennon auprès de la belle dame blonde : le nouvel empereur devait avoir une main mise sur son impératrice pour exiger une telle chose d'elle. La présence d'un tel être au cœur de leur foret. Cet homme, ce conseiller arrivait à ses fins en louvoyant dans les méandres de la politique elfique pour arriver à son sommet. Que détenait-il pour faire ployer la plus belle et forte branche de leur royaume ? Le conseil avait donc la main mise sur l'empire elfique et il ne pouvait rien arriver de pire pour les siens. Les elfes déjà affaiblis allaient subir encore plus les méfaits de la politique de ces êtres de l'ombre.
Artaher avait bien fait de claquer la porte au nez du conseil, mais Lisaë le regrettait. Car un homme de poigne pareil pouvait continuer à donner un poids, un appui pour celle qui sera de toute façon toujours son impératrice.
Toujours méprisante, Lisaë rétorqua.
« -Eh bien restez dans vos bois, car même si Dame Galadrielle a perdu l'esprit du fait de la perte de son époux et la naissance de ses jumeaux que tous n'ont pas en mémoire ce que vous avez fait. »
La fatigue de la dame d'or, sa nouvelle fonction épuisante, et elle en savait quelque chose, pouvait être que la solution à cette action complètement désespérée et désespérante.
« -Moi si. Et votre crime est impardonnable. Et le temps n'efface pas tout, la guerre non plus et votre arrogance ou votre pouvoir de persuasion ne fonctionnera pas avec moi. »
La mère elfique n'était pas aussi dupe et fragile que l'impératrice. Non, elle était forte et le serait pour son peuple et sa famille. Et même ses justifications maladroites ne la ferait pas ployer.
« -Honorer l'alliance avec les humains ? Croyez-vous expier vos fautes de cette façon ?
Comme si s'acoquiner avec les humains pourraient changer les choses ? Comme si donner importance à cette race qui oubliait aussi vite que le passage d'un dragon dans le ciel pourrait donner grâce aux yeux du peuple sylvain. Foutaise que cela. Les humains n'avaient d'importance que leur nombre et de tenir à l'écart les vampires de leur foret. Et encore. Ils y parvenaient de moins en moins, et les elfes seraient bientôt obligés de leur montrer comment faire. Cette nouvelle génération d'humains n'était pas fiable du tout. En plus d'être arrogante et imbus d'elle même. Décider de marier une humaine à un elfe. Souillage.
« -Restez loin des nôtres. Quand la folie gagne un homme jamais elle ne le quitte. Comme les animaux vous avez goûté au sang et vous continuerez. Pourquoi ne pas retourner auprès des hommes vu que vous aviez réussi à vous alliez à eux. »
Et eux seront débarrassés d'un danger comme celui là. Tuer sa famille, qu'y avait-il de pire ? Comment oser lever la mains sur les siens, Lisaë ne pouvait le comprendre ni l'accepter et cela se lisait sur son visage. Le mépris et le dégoût que pouvaient lui inspirer cet homme agenouillé devant elle.
« -Il n'y a rien ici pour vous. Rien que la mort. »
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Lun 2 Juin 2014 - 22:11 | |
| Galadrielle ? Perdre la tête ? Comment donc osait-on insulter ainsi la famille impériale ? Comment... comment osait-on ainsi juger des actes de la digne et impériale famille Evanealle ? Qui était donc cette elfe, si ce n'est une Terendul, pour se permettre cela ? Le lion en lui rugissait de colère, tandis qu'il se levait doucement, de façon faussement nonchalante, mais avec dans ses muscles une tension fortement indicatrice de la maitrise qu'il s'infligeait en cet instant. Outre le fait qu'il ne pourrait tenir plus longuement la pause, ses vieux os commençant sérieusement à protester, il ne pouvait laisser Galadrielle se faire insulter ainsi et ne pouvait que s'ériger en défenseur de son Impératrice en cet instant.
- Oui mon crime est impardonnable. Et oui le temps n'efface pas tout, je vous le concède aisément, fit-il d'une voix sombre, dénuée de toute ironie, mais où perçait ce ton du vieux Serillëiel, ce ton qui ne permettait aucune contradiction dans sa dignité outragée. Mais jamais, ô grand jamais, je ne me permettrais de juger, mépriser, ou pire même insulter, quelque membre que ce soit de la noble et digne famille Impériale.
Il inspira fortement, pour ne pas se laisser emporter par sa colère sous-jacente, qui grondait en lui tel un volcan prêt à exploser. Car au delà de l'Impératrice, ou ancienne Impératrice, peu importait ce détail, c'était aussi son amie qu'on insultait. Terendul avait-elle donc oublié le lien profond, unique, qui avait lié Galadrielle et Eliowir ? Tous deux parmi les plus âgés des elfes, tous deux de famille proche, de famille très liée, de famille si ancienne qu'elles avaient connu les bateaux et les longs périples des elfes, la mémoire des elfes portée alors par les Serillëiel depuis leur arrivée en ces terres, tous deux âgés tout juste de deux ans d'écart, tous deux comme frères et soeurs enfin ! Cette Terendul avait-elle donc oublié que ce lien, si fort, si unique, ne permettait aucun mensonge ? aucune duperie ?
N'avait-il pas d'ailleurs prouvé sa fidélité et sa loyauté sans faille vis à vis des Evanealle ? Combien de fois, malgré les idéaux très conservateurs des Serillëiel, dont il s'était ensuite fait l'étendard toute sa vie de conseiller, s'était-il rangé du côté de l'Impératrice quand les différends du Conseil la menaçait ? Un nombre incalculable de fois, dénigrant alors ses propres élans conservateurs, autarciques ou pire même. Un nombre qui pourrait d'ailleurs se résumer en un mot : toujours.
- Je suis peut-être banni, mais mon allégeance envers la famille Impériale n'en est en rien atténuée. Je ne tolérerais jamais que l'on outrage ainsi notre digne Impératrice, quand bien même elle a choisi de passer la main. Entendez-le bien, et surveillez vos mots envers la lignée Impériale, Dame Terendul. Jamais, jamais il ne seront insultés devant moi. Jamais. Quant à Galadrielle en tant que personne... Elle était et restera à jamais mon amie, quelque soit la souillure qu'est la mienne. Et quelque soit ses choix, même si je ne les approuve pas toujours, au fond de moi. Toujours, vous entendez, toujours, elle pourra compter sur mon appui, même si en silence, même si au loin à des milliers de là. Toujours et à jamais.
Et ses choix, souvent il les avait réprouvés. Le pire de tous était sans doute le choix de faire de ce vieil Eliwyr son héritier et le nouvel Empereur. Tout son être se hérissait à cette idée, même si son ancien paire s'était rangé à l'avis de Galadrielle pour lui accorder, à lui le banni, si ce n'est un pardon, du moins une trêve dans son exil.
- Je ne vous demande nullement d'oublier. Personne d'ailleurs n'a oublié, ajouta-t-il, amer, en tournant la tête de côté, fuyant le regard âpre de l'elfe que pourtant il dépassait de toute sa hauteur. Pas même moi. Surtout pas moi.
Se disant, il s'écarta, ramassa sa lance légendaire, Absolution, et sa vieille lance Yaajissim, héritage familial, avec des gestes d'une lenteur savamment calculée, pour qu'ils ne soient pas pris pour une menace ou une attaque.
- La mort... Si vous saviez comme je l'appelle de tous mes voeux. Combien de fois je l'ai appelée, oh oui... combien de fois, fit-il, s'agenouillant près du lac, posant ses lances à ses côtés, et se permettant de s'asperger le visage d'eau.
Peut-être plus pour cacher les larmes qui menaçaient de trahir l'étreinte douloureuse de son coeur, plus que pour réellement se rafraichir de la sueur qui avait coulé sur son visage et sur son torse.
- Mais ce serait trop facile, bien trop facile. Si lâche... Vivre est finalement bien plus difficile. Une bien meilleure torture pour condamner une telle infamie...
Oui, il avait voulu mourir, et le souhaitait encore souvent ardemment. Seule l'idée que cela ne serait que lâcheté l'avait retenu alors. Peut-être était-ce toutefois cela qui l'avait fait plonger dans les guerres récentes ? Plus encore que son envie d'honorer le lien des elfes et des hommes ? Peut-être, oui peut-être... Et ses nombreuses cicatrices, dont celles qui balafraient son visage et celles qui couraient sur son dos et son torse, ces cicatrices qui n'étaient pas là avant son départ et son bannissement, ses nombreuses cicatrices donc en témoignaient sans doute mieux que tous les mots.
- Et la folie... Oui, sans doute suis-je atteint de ce mal. Mais mon geste honni... mon... mon... crime...
Sa voix menaça de trembler, et il dut s'arrêter un instant, la peine menaçant de le submerger de nouveau.
- mon crime ne mérite pas d'être expliqué par une simple folie, ce serait là une excuse bien trop facile. Ils ne méritent pas cela, murmura-t-il en un souffle presque inaudible, son regard nuit se perdant soudain au loin.
Loin, si loin... cent trente années en arrière. En ce jour funeste. Ce jour maudit. Le jour où il s'était maudit lui-même. Ce jour où son fils... sa femme... Il était soudain perdu si loin dans ses sombres souvenirs, qu'il semblait en avoir tout oublié autour de lui, Lisae y compris. Elle aurait pu en cet instant le tuer, comme elle semblait tant le désirer, elle qui lui promettait tant mort et mille maux, elle aurait pu aisément, sans qu'il ne s'en défendit.
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| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Dim 8 Juin 2014 - 18:44 | |
| Mais c'est qu'il osait presque s'en prendre à elle. De quel droit. Il n'en n'avait plus aucun depuis des années, de nombreuses années. Plus aucun sur son peuple. Il pouvait bien faire ce qu'il veut ailleurs qu’importe. Du moment, qu'il fut loin d'eux. Comment pouvait-il prétendre être ami de la belle impératrice des elfes et mère sacré de la foret. Elle la protégeait comme une mère protégeant ses petits. Jamais elle ne permettrait à cet assassin de revenir en son cœur rompre cet équilibre parfait.
Lisaë lui lança un regard assassin en resserrant sa main sur son bâton. L'envie de lui asséner un coup sur le crâne ou de lui clouer le bec se faisait ressentir.
« -Insinuez-vous que je sois capable de le faire ? Et oui, rien n'effacera ce crime !! Alors pourquoi revenir sur les pas de votre abjecte geste. Pour le continuer, sur les vôtres, du moins sur ceux que vous semblez considérez ainsi. Car vous n'êtes plus un elfe. Vous n'êtes rien, un parasite rien de plus. Retournez près des Hommes. Vous avez attiré la sympathie de ces êtres éphémères et impressionnables, grand bien vous fasse. Votre vie est là bas.»
Et pas ici. Sa vie elfique était révolu et le temps ne changerait rien. Parfois immuabilité des elfes avait du bon et là ce serait le cas.
« -Parce que vous doutez de ma fidélité ? De mes attentions envers celle qui nous dirige. Cela prouve que vous n'avez plus rien à faire auprès des nôtres. Et mon inquiétude pour elle est en rien un outrage, à moins que...je comprends mieux alors que la folie vous guette vieil elfe. »
Prétendre qu'elle ou sa famille ne soutenait pas son altesse. C'était comme voire pire que de la considérer comme une humaine. Les Terendul étaient des proches de la couronne, même en claquant la porte du conseil Artaher avait ainsi prouver son respect et son soutient à la Reine des elfes. Remplie d'arrogance et de mépris, la mère Terendul conclut :
« -Mais il est vrai que la vie bien loin du pays elfique ne vous donne plus le loisir de voir quel soutient peut avoir la noble dame aux cheveux dorés. Et la méfiance ne vient pas de notre impératrice, mon cher, mais de son entourage. Et pas que le plus ancien. »
Il n'y avait pas que le passé, ses anciennes relations qui menaçaient l'impératrice. Mais aussi ses proches conseillers et le principal Elywir, futur empereur. Alors que rien ne le désignait. Le jeune Aegnor devait avoir la couronne sur sa tête. Mais bon le sujet n'était pas là. Pour le moment, un vieil elfe assassin remettait en cause sa confiance en sa reine. Cette vermine assassine. Et en plus, il s'apitoyait de son sort, se cherchant presque des excuses. Folie ou pas, il était fou d'un meurtre odieux et intolérable. Même l'esprit noir ne voulait pas de lui, et pourtant il aurait mieux valu que l'elfe soit mort, justice pour cette femme et cet enfant. Là il était libre de ses actes, parcourant le monde, libre, de tout devoir et obligation.
« -Une torture de vivre ?? Vous êtes là, à respirer, à aller à vos occupations, libres, ayant éliminer ce qui vous empêchait de vivre pleinement. Même la mort ne veut pas de vous pour vous offrir justice. Preuve de votre culpabilité. »
Paradoxale, certes mais plausible. Dommage pour elle, l'elfe avait à supporter sa présence et de ses mots, de s'en outrager. Il ne se voyait même pas fou. Conscient il était. Par tous les esprits, c'était horrible. Il savait donc ce qu'il faisait. Quel monstre !
Bien plus véhémente tandis que le vieil elfe lui semblait anéanti, l'archiviste clama avec rage et mépris.
« -Vous aviez conscience de vos moyens... qui peut dire que vous ne reviendrez pas hanter vos souvenirs sur des maisons de renoms, sur un peuple qui dort en harmonie avec le grand ciel de lumières, bercé par la douce lune, nous couvrir d'un linceul de sang. La folie permet de comprendre, mais le raisonnement me fait craindre pour les miens, pour nos jeunes pouces.Notre peuple est décidément parfois trop pacifiste. Retournez d'où vous venez, car une fois que nos chemins se seront séparés, je convoque le conseil pour rejeter votre demande de présence en ces lieux sacrés pour nous. »
Non, mais ils avaient assez à faire avec ces alayens, les vampires et les humains pas capables de régler tout cela. On n'allait pas ajouter un elfe bannit à traîner dans les forets. |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Lun 9 Juin 2014 - 23:03 | |
| "Vous n'êtes plus un elfe, vous n'êtes rien". Que ces mots étaient durs, et âpres. D'autant plus durs qu'ils ne se faisaient, au final, que l'écho de ce que lui-même avait tendance à penser de lui. L'écho du mépris, de la haine même, qu'il pouvait éprouver pour lui-même depuis près de cent trente années. Oui, elle avait raison, aurait-il eu envie de dire. Mais il savait que, quand bien même il se rangerait à son avis, Lisaë Terendul n'écouterait pas ses mots. Le seul point sur lequel elle se trompait, selon le vieil elfe, c'est quand elle affirmait que sa vie était là-bas, au pays des Hommes... Oh oui comme elle se trompait alors ! Ne voyait-elle donc pas ? Ne voyait-elle donc pas que nulle part était sa vie ? Nulle part...
Rien. Le Néant ? Pour un peu, il était à deux doigts de songer à se rendre aux alayiens pour rejoindre les limbes du Néant sous l'étendard du fanatisme. Pour un peu....
Fou, disait-elle ? Oh oui il était fou. Fou à lier. Sa raison battait la campagne depuis quelque temps, il le sentait, plus qu'il ne voulait le savoir.
« -Mais il est vrai que la vie bien loin du pays elfique ne vous donne plus le loisir de voir quel soutient peut avoir la noble dame aux cheveux dorés. Et la méfiance ne vient pas de notre impératrice, mon cher, mais de son entourage. Et pas que le plus ancien. »
Mais de là à ne pas comprendre les arcanes de la politique ? Etait-elle vraiment en train de lui faire un cours d'arts politiques ? A lui, l'un des plus vieux même si ancien conseiller ? Un de ceux qui avaient été formé toute sa vie d'elfe durant pour ca et uniquement pour ça ?
Il ne put alors que rire à gorge déployée, un rire un peu fou, un peu amer, et fort nostalgique soudain, un peu tout à la fois, avant d'enfin se reprendre, avec grand effort, pour répondre d'une voix des plus narquoises :
- Et c'est à moi, un Serillëiel, que vous dîtes cela ? A moi, un Serillëiel ! Un vieil elfe qui n'a été éduqué que pour ça, pour la politique et toutes ses arcanes, quand bien même j'ai détesté tout cela toute ma vie, un elfe issu d'une des plus vieilles familles de conseillers, une famille qui est arrivée en ces terres aux côtés des Evanealle, un elfe issu de cette famille qui, de tout temps, en chaque instant, a été un allié puissant de la noble et digne famille Impériale pour déjouer tout complot politique des plus redoutables ?
Il ne put empêcher un autre ricanement de s'échapper, alors qu'il redressait légèrement la tête, toujours agenouillé près de l'eau toutefois.
- J'ai peut-être été exilé et ai peut-être passé près de cent trente années hors du Royaume des Elfes, celui-ci évolue si lentement qu'il m'a fallu quelques jours à peine, lors des Négociations, pour percevoir tous les soucis, toutes les tensions et surtout tous les dangers guettant et rôdant autour de la famille Impériale. Sans compter que mon exil m'a permis d'acquérir un autre sens politique... des connaissances de la politique des Vampires ou encore de la politique des Hommes. Possiblement même un brin de politique alayienne, ajouta-t-il, toujours ricanant.
Il retrouva toutefois son sérieux, et darda un regard franc et direct sur la belle elfe, avant de reprendre :
- Je ne suis peut-être rien, je ne suis peut-être plus un elfe, je suis peut-être appelé à être dévoré par le Néant dans cette guerre, une guerre que je mènerai contre l'ennemi des elfes et de la magie, quand bien même les elfes et la magie me renieraient, je ne suis peut-être plus qu'un paria, à défaut d'un banni...
Au fur et à mesure des mots, sa voix prenait ampleur, emportée par sa passion de défendre son peuple, envers et contre tout, même contre lui-même, quoiqu'on dise du vieux banni, du vieux paria, qu'il pouvait être.
- Mais je sais au moins une chose : on n'apprend pas au vieux singe à faire la grimace. Mes sept cent quatre-vingt-trois ans m'ont apporté leur lot de connaissances, Dame Terendul, et ce que vous venez de dire ne m'était en rien inconnu. Et n'est en rien inconnu non plus de notre Impératrice Galadrielle. Quant à mourir... Oui, mourir serait trop facile, ajouta-t-il, cette fois détournant la tête pour contempler la surface polie de l'eau, comme espérant y voir le reflet de sa noble amie. Ce ne serait pas leur rendre justice. La mort... serait trop lâche. Un chemin trop doux. Un tel crime ne peut être châtié par un chemin de mort.
Il parvint, à ses mots, qui menaçaient de lui arracher d'autres sanglots désespérés, à relever ses orbes nuit, où si peu de lumière brillait encore, sur l'elfe qui lui faisait face avec toute l'ardeur de ses convictions, les convictions d'une mère :
- Je vous parais peut-être libre, mes gestes vous paraissent peut-être... mais non mes chaines sont invisibles. Elles sont plus dures et plus féroces que les maillons d'une prison. Ma prison est plus inviolable que n'importe quelle magie ne pourrait l'espérer. Mes chaines... sont ma culpabilité. Mes chaines sont ma peine, et ma haine envers moi-même.
Alors qu'il disait cela, il réalisa à cet instant qu'aucun mot ne la convaincrait, aucun mot n'apaiserait les peurs de l'elfe. Rien de ce qu'il pourrait dire ne pourrait être compris et serait sans cesse détourné. Dépité, il poussa alors un lourd soupir. Oh il n'avait que faire de ses menaces de faire appel au Conseil. Celui-ci devait déjà être au courant et avait potentiellement déjà discuter de son cas. Un cas qui était déjà réglé, si ce n'est au grand jour, du moins en secret, dans les alcôves sombres où toutes les décisions politiques étaient réellement prises au final... Au fond de lui, il n'avait que faire qu'elle ne l'aime pas, que faire même qu'elle ne veuille pas de lui en ces terres. Ce n'était, après tout, pas à elle de décider ce genre de choses. Non, de cela, il n'en avait que faire. Mais de la peine, de la peur, qui sourdait en elle à l'idée qu'il pourrait recommencer... Ca oui, il y était sensible, compatissant même et sentait poindre une certaine empathie. C'était ces peurs-là, ces doutes-là qu'il voulait apaiser, autant que faire se pourrait.
Seulement il n'y parviendrait guère avec des mots. Que ne pouvait-il prétendre au serment des Baptistrels en cet instant, ce serment empêchant de mentir ! Elle saurait alors qu'il était sincère et pensait chacun de ses mots. Et alors qu'un certain désespoir l'imprégnait, son regard tomba sur sa lance. Pas la lance de son héritage familiale. Mais l'autre. Absolution de l’esprit de la terre, de son nom légendaire. Une idée lui traversa alors l'esprit.
Il caressa doucement le bois rare, aujourd'hui disparu, qui en forgeait le manche, de sa couleur rougeâtre veiné d’or, sa main glissant doucement mais surement vers la pointe de diamant noir. Il leva un regard vers l'elfe, leva une main en signe d'apaisement et saisit la pointe de sa lance de l'autre. Il espérait par ce geste, qu'elle comprendrait que s'il s'emparait de sa lance, il ne pourrait, en la tenir ainsi, lui faire quelque mal que ce soit. Il tut la douleur qui fulgura dans sa paume alors que la pointe entaillait alors sa peau et que le rouge carmin de son sang goutta le long de la lame jusqu'à terre. Il se contenta de soulever doucement la lance, puis se redressant tout aussi doucement de s'avancer vers l'elfe.
Il s'agenouilla alors devant elle, d'un air des plus cérémoniels, et leva doucement la lance, lame tenue dans sa main ensanglantée pointée vers son propre coeur à lui, et manche qu'il maintenait souplement de son autre main pointé vers Lisaë. Tout du long, il n'avait pas décroché ses perles sombres du doux et beau visage de la jeune elfe, bataillant pour que son lion taise les ardeurs qu'il voulait faire naître en lui.
- Connaissez-vous cette lance, Dame Terendul ? En connaissez-vous la légende ?
Elle la connaissait sans doute, n'est-ce pas ? Lui-même n'avait pas mis longtemps à la reconnaitre... et à en saisir toutes les implications quant au pourquoi du comment elle était tombée entre ses mains à lui. Absolution de l’esprit de la terre. Une lance légendaire de laquelle nombre de récits étaient tirés. On racontait d'elle qu'elle avait été conçue par les elfes au cours de l’âge de bronze, au summum de leur art de la forge vivante, par un roi elfe depuis longtemps oublié. On disait que cette lance avait servi le roi avec loyauté dans les guerres contre les vampires. Représentant le triomphe de la vie sur le mal, elle avait été admirée par tous les soldats elfiques jusqu’au jour où elle fut la cause de la mort d’un dragon. Souillée alors par des mains maudites, elle disparut pendant des années alors que son porteur, le fils du roi, s’enfuyait pour se dissimuler avec sa honte. Cet elfe vécut longtemps comme un exilé, combattant seul dans les terres sauvages, jusqu’au jour où il rencontra un Baptistrel elfique, du temps où l’ordre n’était pas encore uni. Avec son aide, il parvint à se purifier et à laver sa lance du destin qu’elle portait depuis la mort du dragon. Le chanteur utilisa ses dons afin de lui donner un nouveau souffle, la couvrant de végétation vivante destinée à protéger son porteur. A nouveau plein d’espoir, le prince elfe retourna vers les siens et parvint à temps pour sauver son père d’une embuscade. Décidé à assumer ses fautes, il réintégra l’armée. On disait que, depuis son héritage demeurait, et que la lance se transmettait à ceux cherchant l’absolution.
- La reconnaissez-vous ? Essayez donc de la toucher, de vous en saisir.
A priori seul lui pouvait réellement la manipuler, si la légende disait vraie. Si seul ceux voulant absolution pouvaient posséder cette lance.
- Transpercez moi donc le coeur avec même, si cela peut vous apaiser et si cela peut, selon vous, venger et honorer la mort honteuse de ceux que j'ai...
Sa voix dérapa alors, manquant de le faire suffoquer. Il dut prendre une grande inspiration pour parvenir à garder un temps soit peu son calme avant de reprendre, toujours avec une détermination sans faille toutefois :
- de ceux que j'ai tués. Vengez-les, si vous le désirez. En cet instant, vous en avez le pouvoir et sans aucun doute le désir. Tuez-moi, finissez-en de l'abjection que je suis. Transpercez-moi le coeur noir que je suis sans doute à vos yeux avec cette lance légendaire.
"Si la lance vous laisse faire", fut-il toutefois tenté d'ajouter.
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Jeu 12 Juin 2014 - 22:34 | |
| Fou, il était vous, et son rire ne put que renforcer l'idée que la jeune elfe se faisait de lui. La folie le rongeait de part en part, et il se trouvait avec elle dans la foret. Elle devait remonter sur Dulinn et fuir vers son époux et le prévenir de ce qui se cachait dans les bois. Un danger presque plus grand que les alayens eux même.
« -Oui c'est à vous. Un Serillëiel. D'ailleurs ce nom comme le reste n'est plus à vous. Vous avez porté la honte et le désarroi sur cette famille, sur ce nom et ce qu'il représentait. Ce que vous étiez n'est plus aujourd'hui. Même le nom de votre femme est salit par vos mains. Comme votre passé politique. D'autres ont éclos et ont mûri en votre absence. Et ils ont apprit les rouages de la politique sans faille. La seule chose que vous avez apporté et que tous retiennent : la mort et la destruction. Vous chevauchiez au côté des plus grands de ce monde, eh bien j'espère que la chute fut douloureuse. A quoi cela vous sert aujourd'hui : à rien. Car vous n'êtes rien. »
Et en plus, il osait lui reprocher de lui parler ainsi et de le voir comme ce qu'il était. Lui qui avait choisit de quitter la vie des elfes. Et il cherchait presque à se faire plaindre. Et puis quoi encore. Peut être que Lisaë devait le consoler et lui apporter de quoi sécher ses larmes. Bien sûr que sa famille était une des plus nobles, des mieux vus, tournant dans les hautes sphères du pouvoir de père en fils. Haine de la politique et pourtant il osait parler de fidélité envers l'impératrice. Tout sonnait faux dans son discours. En tuant il avait tout perdu, il était temps de le comprendre après cent trente années. Les elfes étaient parfois long à la compréhension mais quand même.
« -Vous avez détesté la politique, vous en voilà exempt, comme du reste. De quoi vous plaignez-vous alors ? »
Lisaë ricanna en se moquant des paroles de l'elfe bannit.
« -La politique des vampires ? Même un enfant la connaît. Violence, haine, destruction, rien d'autres. Les humains ne valent guère mieux. L'arrogance et la manie de tout vouloir sur l'instant en plus. Quand aux alayens, seul compte la destruction de la magie, les moyens importent peu du moment que cela fonctionne. Dans ce cas aller combattre. Retourner avec ces humains que vous connaissez si bien... ou bien les vampires dont vous connaissez la politique. Avec de la chance ils feront de vous un repas, ou un des leurs. Après tout la vie pour eux, qu'est-ce sinon un amusement que de la voir partir. »
Il pouvait chercher à s'excuser, à s'expliquer, il était condamné de toute façon aux yeux clairs de la jeune mère. Un assassin, un meurtrier d'enfant. Et rien, aucune parole, aucune action ne la ferait changer d'avis et de position. Rien.
« -La vie n'est guère meilleure pour vous. Car vous continuez à apporter le malheur autour de vous et des elfes que vous avez trahis. Ce crime ne peux être châtié et punit par rien ni personne, mais la mort auraient rendu justice aux vôtres. Tout est trop doux pour vous. »
L'archiviste écarquilla les yeux en voyant sa lance. Bien sûre qu'elle la connaissait. Elle n'était pas née de la dernière pluie. Les détails, les dessins venus d'autrefois étaient à ses yeux qu'une belle légende, des histoires d'anciens, modifiés au fil des années.
« -Vous me prenez pour une femme stupide. Je ne peux la toucher car je n'en ai nullement le besoin contrairement à vous. Je n'ai besoin de chercher aucune absolution, car je n'ai rien fait qui demande de la retrouver. Pas comme vous. Je me doute que vous la cherchiez. Comme tout criminel. »
La jeune mère lui cracha au visage toute sa haine et son mépris. Croyait-il qu'elle allait s'apitoyer sur son sort ? Que ses sages paroles de criminel s'en voulant rendrait émotive la jeune mère de famille ? Non, il se mettait sa lance dans l’œil et bien profondément. Mais comment se l'était-il procuré ? Un vol ? Une trouvaille ? Normal que la lance vienne à lui. L'absolution des pêchés en tenant cette lance la preuve que. Oui, cela la jeune femme en était sûre qu'il le voulait. Comme beaucoup de criminels, pour revenir dans sa vie d'avant, sans encombres, sans cette gêne qu'il a assassiné. Avant d'un jour retombé dans la folie de la mort.
Mais quand il lui proposa de le transpercer pour prouver ses dires quelque part, Lisaë s'offusqua au plus haut point. Mais pour qui se prenait-il donc ?
« -Vous avez les mains sales, je ne désire pas pervertir mon âme comme la vôtre. Mes mains sont propres, elle. Et vous aimeriez me les salir. Vraiment être abject que vous êtes. Criminel et poussant les autres à le faire. Vous tuez ? De cette façon. Ce serait que vous donner une belle mort et un bon rôle. Sûrement pas. »
Lisaë était presque outragée, terrifiée aussi. Resserrant sa main sur son bâton prête à le neutraliser s'il bougeait d'une oreille, elle le dardait de toute sa hauteur de son regard le plus sombre. Il voulait qu'elle le tue. Elle, jeune elfe, mère de famille, bien intégrée dans la vie elfique. Devenir meurtrière comme un vampire pour quoi ? Un elfe bannit. Il ne valait même pas qu'on se donne la peine de le tuer. Qu'il aille le faire avec ces alayens. |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Lun 16 Juin 2014 - 0:45 | |
| Le honte et le désarroi sur sa famille... Oh oui. D'autant plus qu'il en était le dernier représentant, le dernier héritier. Le dernier Serillëiel, le dernier protecteur de la Mémoire des Elfes. Lui s'éteignant, qui reprendrait alors le flambeau vacillant de ce qui avait été la quête, la mission, de toutes les générations de sa famille ? S'il avait admis il y a peu que les elfes ne devaient pas rester focalisés sur le passé mais aussi regarder vers l'avenir, il restait tout de même persuadé en son for intérieur qu'ils ne devaient jamais oublier le passé, qu'ils devaient en garder la mémoire. Non pas pour l'idolatrer, non pas pour en vouer un culte qui les façonnerait à jamais dans la glaise de leurs forces et faiblesses tout à la fois, sans possibilité d'évolution ou même d'avenir dans un présent qui serait alors figé, mais au contraire pour en apprendre ce qu'ils avaient manqué, pour en comprendre comment ils avaient fauté, et qu'ils tentent de ne pas reproduire ces erreurs passées, parfois erreurs honnies...
Rester ancré dans un passé révolu ne pourrait qu'accélérer le déclin des elfes, avait-il enfin compris, après des siècles à presque prôner le contraire, tel qu'on le lui avait enseigné, seriné, martelé en tête. Oui, martelé en tête : l'éducation stricte des Serillëiel, une éducation d'un autre temps, d'un temps révolu, avait effectivement fait ravage dans son esprit pour en marquer cette ancienne conviction au fer rouge. Il avait réussi il y a peu à effacer un peu cette marque indélébile pour en laisser une autre se dessiner par dessus, plus finement, plus nuancée, une autre conviction qui prenait alors possession de lui. Sa propre conviction cette fois-ci, et non celle qu'on avait cherché à lui imposer. Quel que fut ce "on" d'ailleurs... parents, famille, paires du Conseil, autres elfes qui prenaient appui sur lui et sa famille, sa femme... Qu'importe qui était ce "on". Tout ce qui importait, c'est qu'il soit parvenu à s'en affranchir. Et à se forger une autre opinion, une autre conviction.
Une conviction qui ne pouvait toutefois le pousser à abandonner sa mission de mémoire des elfes. Elle prenait un autre sens, une autre route, une autre voie, mais cette mission de mémoire restait en s'ancrant pleinement dans cette nouvelle conviction même. Là où avant il pensait pouvoir figer le peuple elfe dans un passé pourtant échu, cette conviction le poussait à voir le passé comme un tout et non plus comme un unique. Un tout complémentaire. Un tout venant enrichir le présent pour construire un meilleur avenir, un autre avenir. Mais un tout permettant, cette fois-ci, un réel avenir aux elfes. Un avenir où ce peuple ne serait plus en déclin mais retrouverait force et ardeur, convictions sincères et non plus hypocrites paroles nourries de vieilles rancoeurs en quête d'un vil et utopique pouvoir. Oui, voilà sa conviction nouvelle. Folle conviction peut-être, ne pouvait-il s'empêcher parfois de penser, quand de nouveau il était en proie au doute...
Et oui elle avait raison, d'autres avaient éclos et mûri après lui, après son départ.
- Ainsi va la vie, murmura-t-il presque pour lui-même.
Et même quand elle parla de mort et de destruction qui sillonnait son chemin... Là encore elle ne se trompait pas. Même lors de son exil, mort et destruction l'avaient suivi, voire avaient cheminé de concert, avec lui, là, à ses côtés, tels de vieilles amies en errance. Certes, c'était la guerre, notamment, mais... Non, elle n'avait pas tort en un sens. Et sans doute cela, plus qu'autre chose, le fit alors garder le silence. Un silence presque consentant face à cette autre sentence. Il resta muet face à elle, encaissant ses mots cruels qui le perçaient en plein coeur, tout comme il était resté muet devant le conseil, ne cherchant pas même à se défendre.
Aucun mot ne pouvait d'ailleurs le défendre, selon lui.
Même quand elle se moqua des vampires et de leur possible politique, il se tut. Il n'y a pas longtemps, il avait pensé comme elle, après tout, à leur sujet délicat. Il avait fallu qu'il rencontre un vampire d'exception, un vampire unique en son genre peut-être, pour voir cette vision devenir plus floue, plus... hésitante. Comme si là encore une conviction s'évanouissait pour voir une autre vérité se dessiner. Et quelle vérité alors ! Celle d'un peuple peut-être pas si barbare que cela. D'un peuple qui, contre toute attente, avait aussi des règles, même si des règles violentes, un peuple qui au final ne faisait peut-être que se chercher, se forger... Un peuple qui peut-être faisait partie d'un tout de l'univers ? Oui, nouvelle conviction qui se dessinait, même si encore en tremblotant.
Mais là encore il ne pouvait partager cette conviction avec la jeune elfe. Ne serait-ce que parce que pour lui-même elle n'était pas encore bien ancrée en lui, en son esprit, en sa raison, raison déjà bien vacillante d'ailleurs, pour qu'il puisse se montrer convaincant. Quant à ce qu'il parvienne à se montrer convaincant face à un membre Terendul... Autant attendre que les dragons apprennent à rire et chanter tels les elfes !
Quant aux humains... Là aussi il aurait pu disserter un bon moment à leur sujet. Lisaë n'avait certes pas tort encore une fois. Mais elle ne voyait là que leurs travers, que les pires défauts humains. Mais les humains, heureusement, pouvaient compter quelques qualités. Il fallait certes bien gratter derrière le vernis terni et sanglant dont ils aimaient tant s'affubler, mais ils en avaient. Certains êtres plus que d'autres d'ailleurs, pensa-t-il en se remémorant une certaine princesse dont la fougue un peu juvénile faisait soudain écho à la fougue de la jeune elfe. Comparaison qu'il se garda bien de révéler à ladite elfe... Fou peut-être, mais pas suicidaire. Pas totalement, du moins.
Il se tut donc, laissant les mots tout de haine et de mépris le noyer sous leur coléreuse avalanche. Aucun mot ne pourrait la convaincre. Il aurait alors espéré que des gestes, des actes... Mais là encore quand elle se récria en voyant la lance, il fut des plus déçus. Et il comprit, que, quoiqu'il puisse faire, il ne pourrait convaincre l'entêtement presque aveugle d'une mère apeurée.
- Non je ne cherche en rien à vous avilir, répondit-il alors, tout en reprenant doucement la lance par le manche.
Puisqu'elle ne voulait en faire usage...
Il se releva alors doucement, aussi souplement que ses articulations martyrisées par l'exercice le lui permettaient, et se détourna quelque peu. Faisant fi de sa main saignant alors, ses gouttes carmin entachant le sol sous lui.
- Je sais. Je ne suis qu'abjection, malédiction honnie, et tout ce que vous voudrez. Je le conçois aisément, et les mots que vous m'offrez ne sont au final rien, comparés à ceux que je m'offre en mon for intérieur.
Ou aux mots que d'autres voix lui offraient... Mais il tairait ce point-là aussi. Pas besoin de donner plus d'arguments à ceux qui le traitaient déjà de fou.
- Et vous avez raison également en affirmant que rien ni personne ne pourront chatier mes... crimes. Peut-être est-ce pour cela...
Il figea un instant ses mots, comme les retenant dans l'air qui vibrait entre eux d'une impatience étrange. Soudain songeur, il leva la lance au niveau de ses yeux, la contemplant sous les éclats que le soleil renvoyait de la belle lame noire.
- Peut-être est-ce pour cela qu'elle m'est arrivée. Qu'elle m'a été... donnée ? Offerte ? Confiée ? Qu'en sais-je... Savez-vous où je l'ai trouvée ? Fit-il, s'adressant à Lisaë dans son dos, autant qu'à lui-même. Je l'ai trouvée dans une étrange caverne, alors que j'étais perdu, sans arme, à dix pieds sous terre, aux prises avec un alayien enragé. Etrange découverte alors, même si sur le coup, je m'en étais juste emparé en désespoir de cause pour me défendre et chasser autant que faire se pouvait l'intrus de nos belles forêts... Et quand ensuite j'ai vu qui elle était...
Oui, il disait "elle" pour sa lance. Car pour lui, en un sens, elle était presque une personnalité à part entière. C'était presque, en tout cas, comme si elle avait sa propre volonté. Cela était étrange à avouer, mais tels étaient ses déroutants sentiments.
- Mais je vous ennuie avec mon verbiage, soudain. J'en suis profondément désolé et ne puis que vous prier de bien vouloir excuser cet étalage malvenu. Même si pardon ne peut sans doute être mon lot.
Il se tourna lentement vers elle, fichant la lance dans le sol, pour se désarmer de nouveau et lui montrer, une fois encore, qu'il n'avait aucune intention de l'attaquer.
- Je ne cherche ni votre compréhension, ni votre pardon, ni quoique ce soit de ce genre, Dame Terendul. Je cherchais simplement à vous... rassurer. A vous assurer que je ne cherche aucunement à perpétuer d'autres... crimes... quelqu'ils soient.
Il ne put réprimer une lueur de douleur qui vrilla son regard nuit.
- Je ne cherche nullement à vous faire peur non plus. Mais je crois comprendre votre.. appréhension.
Il n'allait pas l'insulter en parlant de terreur, tout de même. Ce serait là faire montre d'un manque de tact flagrant !
- L'appréhension d'une mère. Jeune mère d'ailleurs. Vous devez avoir... si mes souvenirs sont bons...
Et ils l'étaient souvent, manqua-t-il de peu de se targuer.
- Dans les deux cents ans. Un peu plus. Deux cent dix... deux cent onze ans peut-être. Et vos enfants n'étaient pas nés quand je suis parti. Vous étiez certes déjà proche de notre Général Terendul... Mais... Cent trente ans... Comme cela passe si vite et si lentement à la fois, ajouta-t-il soudain songeur.
Et plus que nostalgique. Tout dans son attitude montrait la perte qui était la sienne, en ayant vécu si loin de son peuple plus de cent ans durant. Il était rare que des elfes bannis vivent si longtemps hors de leur royaume. Des elfes exilés volontairement oui, mais des bannis... non. Très rarement. S'était-ce seulement jamais vu d'ailleurs ?
- En tout cas, que votre appréhension ne prenne racine, Dame Terendul, ajouta-t-il vivement. Je pense, si j'obtiens les accords d'instances plus importantes que vous et moi, que je serai bientôt parti. Il vous faudra vivre avec mon mauvais souvenir errant dans la forêt encore quelques... semaines. Guère plus si tout se passe bien.
Et peut-être qu'elle pourrait l'aider à ce que "tout se passe bien" d'ailleurs...
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Jeu 19 Juin 2014 - 23:11 | |
| L'elfe fit un pas en arrière, car montait en elle une colère de moins en moins sourde oscillant et dansant entre l'envie de fuir à tout jamais de son pire cauchemar et l'envie de l'épingler contre un arbre. Mais les pauvres pins et autres chênes ne méritaient pas un tel châtiment.
« -Ce qui me répugne le plus c'est que vous aillez en plus pleinement conscience de vos actes et semblez en être détaché. En votre fond intérieur ? Vous êtes là, auprès des vôtres alors qu'on ne veut plus de vous à vivre libre avec des chaînes dont vous ne comprenez l'importance. Cela rend votre crime impuni et la mort de ces deux êtres comme un détail de votre passé. »
Et en plus, il semblait vouloir chercher une forme de compassion à son histoire ou de compréhension de la part de la jeune femme. Cela frisait le ridicule absolu.
« -Étalage mal venu ? Du vol de cette arme ? De vos délires, de votre folie ? Je sais que vous chercher à me faire peur. Ou à chercher que je vous pardonne comme vous semblez le croire. Du moins l'espérer. Mais il n'en sera rien. Vous êtes un meurtrier. Point. Rien ne changera ça. Pas même une lance, votre pardon, ou votre peine. »
Roo non, même toutes les magies possible ne pourrait lui enlever cette idée de la tête : assassin, voleur de vie, voleur tout court et bien pire encore. Le Dracos pouvait bien dire ce qu'il voulait, Lisaë ne changerait pas d'avis pour autant.
« -Et que connaissez-vous de moi ??? L'appréhension d'une mère ? Face à un assassin d'enfant. Je pense que cela est légitime pour toute personne dotée d'un sens de la famille. »
La jeune mère monta sur ses grands chevaux et s'offusqua, acerbe et ne supportant pas qu'il mentionne sa famille, son époux, ses enfants, elle lui cracha au visage (enfin pas littéralement). Que pouvait-il savoir d'une famille unie. Oh pas sans défaut, certes, mais unie et qui s'aimait et se respectait quoiqu'on en dise. Lisaë savait que si jamais un seul de sa famille subissait une épreuve, ils se soutiendraient tous.
« -Ne cherchez pas à m'analyser, à chercher à comprendre ma vie. Ce n'est pas comme cela que ça changera mon opinion de vous. Votre intérêt n'a à mes yeux que le venin qui coule en vous. Et ne chercher pas à comprendre l'histoire de notre famille. Elle n'est en rien similaire à la votre. Mon époux n'a rien à voir avec vous. Ses enfants sont tout pour lui, sa famille est tout pour lui. Que la vie apporte la tempête ou le beau temps. La vie, nos enfants sont notre moteur, notre vie. »
Pas comme lui, pas comme ce monstre qui a tué la vie futur. Un être sans défense. Il aurait dû aller au bout et se tuer aussi après.
« -Oh mais je n’attendrai pas une semaine ou un jour de plus. Les instances dont vous parlez ne pourront que écouter et prendre en compte mes craintes. Et votre souvenir partira bien vite. Et cela se passera bien, croyez-moi, vous serez raccompagner avec l'escorte qu'il faut au delà de nos frontière. »
Toujours insensible aux paroles et au regard de l'elfe, Lisaë continua en lui assurant, le ton sec et déterminé.
« -Dès mon retour, je foulerai les marches du palais pour en quérir notre empereur. Qu'il fasse de vous ce qu'on attend d'un bannissement à vie. Cent trente ans, ce n'est rien, rien pour nos mémoires. »
Lisaë se rapprocha de Dulinn sans quitter des yeux le meurtrier. La main sur son bâton, il bougeait, elle en faisait usage. |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Ven 27 Juin 2014 - 0:18 | |
| Il avait l'impression que parler avec la jeune elfe était comme parler à un mur. Elle restait sourde à toute raison, à toute autre argument que les siens, et aucun mot que pourrait lui servir le vieux lion n'y ferait rien, comprit-il, non sans une certaine amertume. Oh, certes, ce que les autres pensaient de lui, il le savait, le devinait, et essayait tant bien que possible de composer avec, à défaut de parvenir à y être totalement indifférent. Mais qu'on ait si peur de lui ! Qu'on le considère comme un tel danger !
Que ses actes paraissent abjectes, que son crime paraisse abomination, et que son nom soit devenu maudit et honni, soit. Mais qu'on le craigne autant... Qu'on ait peur qu'il ne devienne un danger pour son peuple, pour les autres elfes... Qu'on craigne surtout qu'il puisse, ne serait-ce qu'un instant, recommencer... Non, cela lui paraissait bien âpre à encaisser. Il avait beau essayer de se caparaçonner, tel un destrier de guerre, derrière une armure de fausse assurance arrogante, de fierté toute Serillëiel, et d'indifférence nonchalante, il était au plus profond de lui blessé de cette attitude que ses anciens paires lui offraient. De cette peur dont ils semblaient se nourrir le concernant. Tel un mythe incarnant une abjecte honte ou une horrible tare, que l'on érigeait en exemple à fuir en toute circonstance aux nouvelles générations. De ces mythes, qui, au final, l'avaient nourri lui-même étant jeune, qu'on lui chantait si souvent pour l'enjoindre à suivre la "bonne voie". Un peu comme ce mythe du vampire et de sa faim-sans-fin lancée sur l'un de ses ancêtres... Oui, un peu de ce genre-là.
Au final, peut-être était-ce pour cela qu'il s'était senti si attiré par ce sire Achroma ? Devenu mythe à son tour, devenu pareille abjection à honnir, à maudire pour les milles générations à venir, il incarnait presque le mal absolu, comme avait pu l'incarner le vampire millénaire dans son imagination de jeune elfe... Oui, peut-être était-ce pour cela qu'il s'était senti si proche du beau dragonnier soudain ? Peut-être était-ce pour cela que le millénaire semblait si bien le comprendre ? Peut-être... Etaient-ils destinés alors à plus que simplement se comprendre ? Etait-ce pour cela que sans cesse Eliowir pensait à lui, jusque dans ses rêves ? Etait-ce...
Tout à ses pensées, il était resté un instant comme figé, le regard perdu dans le vague, n'entendant que d'une oreille les propos acides et blessants de la jeune elfe. Il dut se rabrouer intérieurement pour se tirer de cette soudaine léthargie et pour écarter ses pensées malvenues.
"Malvenues, vraiment ?" siffla une petite voix moqueuse, qu'il tenta de chasser bien vite. Tout en agitant une main devant lui comme pour chasser une mouche. Il réalisa alors, trop tard, que son geste pourrait être mal interprété : là où il ne faisait que chasser pensées agaçantes et voix intérieure particulièrement pénible, Lisaë pourrait bien voir un geste impoli tentant d'écarter, ou pire de dénigrer, ses dires.
Cette énième pensée ne fit que lui arracher un lourd soupir de dépit teinté d'un certain désespoir. "De toute façon, quoique tu fasses, elle l'interprétera toujours mal. Quoique tu dises, tes propos seront détournés. Quoique tu tentes, tes gestes seront pris comme un danger", susurra une autre voix. Sa voix de la raison.. si raison il avait encore. Mais cette fois-ci, il n'eut le coeur à la chasser. Chasser quoi d'ailleurs ? La vérité ? Même si elle n'était que venin empoisonnant son coeur et paralysant dans l'oeuf tous ses minces espoirs... Non, cette fois, il ne la chasserait pas. Il ne se voilerait pas la face.
Il attendit toutefois que Lisaë ait fini de cracher ce qu'elle avait à lui dire, avant d'enfin se décider à bouger. Faisant fi d'ailleurs de la menace qu'elle tentait d'ériger contre lui avec son baton. Qu'elle l'attaque donc, si elle l'osait, ne put-il s'empêcher de penser mesquinement pour lui-même. Il était après tout bien plus puissant qu'elle, tous deux le savaient. En un geste, en une clé, il pourrait aisément la maitriser s'il le voulait. Sans même qu'elle n'ait le temps de riposter. Sans compter d'ailleurs l'expérience qu'il avait et dont elle était, quant à elle, dépourvue... Non, elle n'avait aucune chance si elle l'attaquait, sauf à l'avoir par surprise. Et encore. Il était sans cesse sur le qui-vive, ses nombreuses années d'errance lui ayant au moins apporté cet apprentissage là...
Quand enfin le flot ininterrompu de reproches en tout genre et d'insultes éhontées se tarit, il reprit sa lance, la fit tournoyer nonchalamment, tout en tournant le dos à la jeune elfe. Sans pour autant relâcher son attention, tous ses autres sens aux aguets, son ouïe notamment entièrement tournée vers chaque bruissement émis par Lisaë et son cheval.
- Faites ce que vous jugez juste et utile de faire. Le Conseil avisera à son tour ce qu'il juge importun de faire, tout comme l'Empereur décidera aussi de ce qui doit être décidé, fit-il d'une voix parfaitement neutre.
Savamment étudiée, tel le digne ancien Conseiller qu'il était, pour ne rien laisser filtrer de ce qu'il pouvait bien penser réellement. En digne Serilleiel qu'il était, son ancien moi d'antan semblant soudain ressurgir.
- Et comme il y a cent trente années, je me plierai à leur décision commune. Tout comme vous devrez vous y plier aussi, quand bien même votre demande serait déboutée.
Et elle le serait, assurément, Eliowir le savait pertinemment bien. Le Conseil avait déjà pris sa décision, même si officieusement. Eliwyr y avait veillé. Et même s'il savait quelque dissension se créer, le jeune Aegnor semblant soudain se réveiller pour prendre son rôle à coeur en digne héritier Evanealle qu'il aurait dû être, il était quasiment convaincu que le jeune elfe se rangerait à l'arrangement déjà décidé. Ne serait-ce que parce que cet arrangement avait été souhaité par sa tante Galadrielle... Donc non, au fond de lui, Eliowir ne craignait rien de cette possible demande. Que la jeune elfe s'amuse donc à faire toute demande qu'elle jugeait utile, si cela la rassurait. Mais elle risquait fort d'être alors bien dépitée...
- Et ne me parlez pas de mémoire. Je pense que vous n'êtes pas la mieux placée pour me faire la leçon à ce sujet, claqua-t-il d'une voix un peu plus péremptoire qu'il ne l'aurait voulu.
Mais sur ce point- là, il n'avait pu cacher son agacement outragé. Après tout, il était un Serillëiel, de cette famille qui se targuait d'être la mémoire des elfes. Ils avaient été les créateurs de Consciencia entre autres. Ils avaient été ceux qui avaient toujours cherché à protéger et entretenir la mémoire des elfes... Ce serait bien la forêt qui se moquerait du bois si cette jeune elfe impétueuse osait croire lui apprendre ce qu'était la Mémoire !
- Quant à être voleur...
Son ton se radoucit quelque peu. Il arrêta le mouvement de sa lance, et la maintint lame vers le sol, tout en se tournant lentement vers le petit lac, offrant ainsi son profil à la jeune elfe et faisant mine d'observer son propre reflet dans le miroitement de l'eau.
- Je suis bien des choses, jeune elfe, et vous avez raison en me traitant d'assassin, de meurtrier. Mais je ne suis pas un voleur. Cette lance n'a pas été volée. Elle m'a été... offerte... donnée... comme si...
Sa voix semblait tout doucement se mourir, alors qu'il retournait dans ses pensées, et qu'il se mit à conclure, en un sourd murmure tout juste audible :
- Comme si elle m'accordait de chercher l'absolution. Absolution... Est-ce seulement possible....
Puis se reprenant, se rappelant qu'il n'était pas seul, il ajouta, sa voix se raffermissant, même si son regard continuait à se perdre dans les méandres de l'eau claire :
- Et non, je ne cherchais ni à vous faire peur, ni à vous menacer et encore moins à vous réclamer de me pardonner. Un tel pardon ne vous appartient pas de toute façon. Les personnes qui en auraient le droit sont...
Il déglutit difficilement, avant de parvenir à finir sa phrase.
- Mortes. Tuées. Par moi-même.
Et soudain, une question lui vint. Une question sans doute mal placée, mais une question qui l'avait hanté si souvent...
- Est-ce que... Est-ce qu'au moins on leur rend honneur ? Est-ce que des elfes... viennent chanter leur peine et leur douleur et viennent leur rendre hommage dans leur... dernière demeure ? J'espère...
Et cette fois sa voix se brisa véritablement tandis que les larmes traitresses lui échappaient et que sa gorge se nouait en un long et grave sanglot. Il se laissa doucement tomber à genou devant l'eau, sans pour autant lâcher sa précieuse lance, sa précieuse Absolution. Sa main libre vint toutefois caresser la surface de l'eau, comme cherchant à toucher un reflet imaginaire que seul lui voyait. Le reflet de son passé... leur reflet à eux... décédés... si aimés... un reflet soudain déchiré quand sa main crut pouvoir les atteindre, les étreindre, une dernière fois encore.
Il eut toutes les peines du monde à reprendre la parole, sa voix rauque trahissant la peine et la douleur qu'il tentait de ravaler.
- J'espère qu'on les honore et qu'on ne les oublie pas. J'aurais tellement aimé... au moins une fois...
"aller leur rendre honneur moi-même", finit-il en silence en son for intérieur. Mais tout son être parlait sans doute pour lui.
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Sam 28 Juin 2014 - 15:28 | |
| « -La langue de bois ne me fera guère changer d'avis. Mais votre cas ne peut être vu et souligner auprès des sages de l'empire. Un jugement ne peux se briser de cette façon. Miséricorde, regret ou bien pardon. »
Un politicien, cela se sentait. Il avait dû en berner du monde en son jeune temps. Mais ce passé était révolu.
« -Ma demande déboutée ??? Vous êtes bien trop sûr de vous Bannit. Bien trop. A moins que ce conseil aussi vous l'avez embobiné avec vos paroles de rédempteur. Mais je ne suis pas dupe et je porterai mes paroles, vos actes auprès de toutes les mères de l'empire s'il faut, de tous les parents, pour vous voir repartir bien loin d'ici. Il n'y a nul pardon et nul deuxième chance pour les assassins. »
Il ne fallait pas qu'il se voit là trop sûr de lui. Le conseil ira dans le sens de son peuple, bien plus que d'un nom omis depuis des siècles. Lisaë avait un certain poids auprès des siens. Pas celui d'une grande oratrice dans les organes de la politique, mais auprès des siens, du peuple, des familles. Et ce poids valait bien plus que tous les autres.
Mais l'elfe changea de sujet pour revenir sur la lance, objet d'une beauté magique et matérielle. Mais pas une preuve. Il a été jugé, il est coupable. Rien ne changera ce fait.
« -Offerte, donnée, qu'importe, elle ne vous donne pas plus de droit de vivre dans cette foret et ne change pas l'opinion que l'on porte sur vous et vos actes. L'absolution ne s'offre pas, ne se donne pas, il se gagne. Et pour vous, cela est cause perdu. Définitivement. Irrémédiablement. »
Quoiqu'il puisse penser de lui, ou chercher à faire changer les mentalités plus jeunes. Comme si le passé avait effacé les choses, laissant la jeune génération penser à autre chose, et ne panserait plus les vieilles blessures. C'était utopique et illusoire.
« -Et oui, pour avoir votre pardon, c'est trop tard, il fallait réfléchir avant d'agir. Mais la folie ou la cupidité d'un homme ne permet une telle chose. Vous serez donc à vie cet homme bannit, loin des vôtres et non accepter ici. Repartez, cela vaut mieux pour tous. Surtout pour nous. Car la peur me fait peut être parler, mais la raison prime. »
Et dire qu'il osait se sentir blesser, triste par ses actes. Ne les avaient-ils pas commis ? Il fallait s'en prendre qu'à lui. Et sa peine il se l'était infligé seul. La réflexion amenait bien plus que l'action au final. Et il pouvait pleurer, avoir toutes les lances absolutrices offertes par les Esprits, rien ne changerait : il avait tué sa femme, et son enfant. Point. Rien ne changerait ça, pas même ses mots, pas même sa mascarade de la rédemption. Non, Lisaë ne serait pas dupe de ce genre de personnage.
« -Bien sûr qu'ils ont l'honneur qu'ils méritent. Toute mère vient au moins une fois rendre hommage à celle qui fut assassiné, chaque parent vient voir cet enfant tuer dans la fleur de l'âge, qui aurait pu être un elfe de valeur, de courage, un grand elfe digne de son peuple. Ce que vous n'avez pu faire, nous le faisons avec dignité et respect. »
Eux. Comme pour ne pas oublier ce qu'un des leur à pu faire. Peuple pacifiste, solidaire, vivant en harmonie, en paix, malgré les luttes internes, rien de semblables aux attitudes humaines ou vampiriques. La voix, la sagesse, le nom, voilà ce qui faisait qu'on vous écoutait. Et des crimes de ce genre peut être communs aux autres races ne l'était pas chez eux.
« -Non, notre peuple est marqué par votre crime. Nous ne pouvons oublier la folie assassine d'un elfe. Même au bout de temps d'années. Votre crime reste dans les mémoires et les mères pleurent l'une des leurs. Tué par un époux cupide. Quand à ce que vous voulez. Il se trouve loin d'ici. Ici, il n'y a rien, plus rien ni personne pour vous. Vous voilà prévenu. »
Lisae, en selle, garda son bâton à la main, reprenant ses rênes. Fière et droite sur son destrier, elle lança un regard plein de haine à cet homme à terre pleurant sur son passé révolu.
« -S'il vous reste une once d'intelligence et de jugeote, faites demi-tour et repartez auprès des Hommes. Eux vous tolère. Sinon, vos jours sont comptés ici. »
Une menace. Oui, et à demie voilée. La jeune elfe ne s'en cachait pas le moindre du monde. Et qu'il tente quelque chose contre elle, Lisaë ne se gênerait pas pour lui montrer que le pacifisme des elfes avait une certaines limites. |
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| Sujet: Re: On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs [Elio] Ven 11 Juil 2014 - 23:51 | |
| Il ne répondit pas même quand elle affirma son assurance quant au Conseil et autres paires décideurs en ce royaume elfique. Elle avait beau être sûre d'être écoutée, il était aussi sûr de lui qu'il ne serait pas de nouveau chassé. Et quand bien même viendrait l'idée au Conseil de fermement l'inviter à repartir hors du royaume, il avait déjà décidé, décision affermie en cet instant même par cette rencontre des plus amères, qu'il leur couperait l'herbe sous le pied et partirait de lui-même. En elfe libre. Et non plus en elfe banni. Une liberté qui avait toutefois un goût de cendres et de sang sur ses lèvres. Sang qu'il réalisa soudain être le sien, alors qu'il s'était visiblement mordu les lèvres pour étrangler ses lourds sanglots de douleur. Il entendit à peine les accusations éhontées qu'elle lui offrit au sujet de sa lance. De sa belle et noble Absolution, si chère alors en son coeur agonisant et saignant plus durement encore que sa lèvre meurtrie. Non, oh non, il ne l'avait pas volée. N'est-il pas ? Elle lui avait été offerte, n'est-ce pas ? Oui, offerte. Donnée. Elle t'attendait même. Elle te tendait les doigts. Seul toi peux d'ailleurs la toucher, n'est-ce pas là un signe. Non, nous ne l'avons pas volée. Non, nous ne sommes pas des voleurs. Cause perdue était-il alors ? Absolution ne lui serait-elle jamais accordée ? L'elfe chanteur lui avait pourtant dit le contraire... Oui, l'elfe chanteur t'avait pourtant enjoint à y croire, n'est-ce pas ? Ne te reprochait-il pas de te morfondre dans ta douleur, dans ta honte et ta culpabilité ? Et elle, elfe dans toute sa splendeur, elle te reproche justement de ne pas t'y morfondre ? Qui croire ? Qui suivre ? Qui écouter ? Ne les écoute pas. Ni l'un ni l'autre. Tous des menteurs. Non, pas l'elfe chanteur. Tous des manipulateurs. Ils veulent tous quelque chose de toi. Que tu restes, que tu partes, que tu te battes pour eux, que tu combattes pour eux, leur sécurité, leur petite vie étriquée, que tu meurs ou que tu vives. Ne les écoute pas. Non, ne les écoute pas, écoute nous. Oui, écoute nous, suis nous... Suiiiiss nouusss
Suis nous...Et Eliowir les aurait bien suivi. Dans cette douce et si belle folie. Seule la voix âpre et dure de l'elfe à ses côtés, sur son beau destrier, le fit revenir quelque peu à la froide réalité. « - Toute mère vient au moins une fois rendre hommage à celle qui fut assassiné, chaque parent vient voir cet enfant tuer dans la fleur de l'âge, qui aurait pu être un elfe de valeur, de courage, un grand elfe digne de son peuple. Ce que vous n'avez pu faire, nous le faisons avec dignité et respect. »L'avait-il assassinée ? Avait-il aussi assassinée sa femme, sa belle épouse ? Pas forcément son aimée, mais sa tendre moitié... L'avait-il assassinée ? Il la revoyait baignant elle aussi dans ce sang, âcre sang au goût de cendres, mais... était-ce lui qui avait porté le coup ? Non, elle s'est suicidée, tu le sais bien. Suicidée... mais au final, n'était-ce pas un peu lui aussi qui avait porté le coup fatal ? Pas physiquement... mais... Peut-être l'as-tu tuée oui. mais pas assassinée. Pas vraiment. Non, pas vraiment. Mais un peu quand même... Pouvait-on assassinée un peu ? « - Votre crime reste dans les mémoires et les mères pleurent l'une des leurs. »Et c'est à lui qu'elle parlait mémoire ? S'il n'était pas si ancré dans sa douleur, sans doute en aurait-il ricané. Mais au lieu de cela, il se contenta d'abaisser la main dans l'eau, effritant l'image de son reflet, et faisant courir mille ondes à la surface du petit lac, telles les ondes des milles sentiments qui faisaient ondoyer son coeur, menaçant de le noyer. « -S'il vous reste une once d'intelligence et de jugeote, faites demi-tour et repartez auprès des Hommes. Eux vous tolère. Sinon, vos jours sont comptés ici. »- Comme je vous l'ai déjà dit, nulle crainte. Mon départ ne saurait tarder, quand l'Empereur m'en aura donné son assentiment plein et entier. Quant aux Hommes... non, ce n'est sans doute pas eux que j'irais rejoindre. Pas vraiment. Ni aucun peuple véritablement. Mais tous et aucuns, unis en une seule cause, un seul but : la Rebellion, qui tente de nous sauver, nous, êtres de magie, et de sauver notre si belle Armanda par le même temps. Oui, tous et aucuns... unis sous une même bannière, une même cause... une même oeuvre. Sa belle utopie, songea-t-il. Et enfin, il se releva, doucement mais avec une étrange assurance, comme si ses simples mots, cette simple promesse, et non pas menace, l'avait soudain rasséréné. - Faites ce que vous jugez bon de faire, Dame Terendul, et je ferai de même. Que votre coeur s'apaise et n'aie aucune crainte me concernant, ces bois ne connaitront sans doute bientôt plus trace de moi.Et se disant, ils e détourna à son tour, et s'en alla, d'un pas souple et digne, de cette dignité blessée, mais de cette dignité qui était toujours la sienne, envers et contre tout. La fierté balafrée s'éloignait, il l'espérait, vers son destin, ou son avenir. Vers un certain millénaire aussi, se surprit-il à penser. [Terminé]
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