Pénétrer dans la cité assiégée n'avait pas été une mince affaire, heureusement pour elle, un siège n'était jamais imperméable pour une personne seule et malgré les postes de gardes de l'armée assiégeante il n'y avait jamais trop de difficulté à traverser en pleine nuit pour une vampire seule, les changements de ronde ou tout simplement égorger discrètement les gardes les uns après les autres étaient une des multiples solutions disponibles pour ce genre d'actions. Le plus dur avait été de passer les murailles qui étaient bien entendu beaucoup mieux gardées et plus longues à traverser de par leur nécessité à être escaladées. Mais au final tout s'était relativement bien passé, et voilà maintenant une paire de jour qu'elle avait repris du service sous le nom de Sylira.

Le patron d'une des tavernes des bas quartiers n'avait pas eut beaucoup de mal à l'embaucher une fois qu'elle eut finit avec lui, séduire un mâle n'avait jamais été d'une difficulté terrible grâce à son corps et d'autant plus facilité par l'aura qui se dégageait d'elle ce qui faisait que généralement elle n'avait pas besoin d'utiliser de la magie pour y parvenir. La nouvelle de son retour à l'activité dans les bas quartiers, ou tout du moins dans celle liée à la "compagnie et la prostitution" ne devraient pas mettre plus d'une semaine à faire son chemin, et bien qu'elle ne soit pas des plus prisée, elle restait un renouvellement quelque peu "exotiques" et aux méthodes parfois étranges et souvent appréciée par la gente masculine qui voyaient une nouvelle fille que celles qu'ils avaient habituellement.

Malheureusement, elle n'était pas dans l'humeur et elle préférait majoritairement les tavernes ou seule la compagnie était demandée, ou plutôt, cette dernière était laissée aux choix des serveuses qui pouvaient souhaiter mettre un peu de viande dans leur soupe et ainsi cette taverne était l'emplacement idéal. Discret et bourrée d'informations sur l'avancement des combats et des derniers ragots politiques.

Une jeune femme, chose plutôt rare, commanda une boisson qu'elle lui apporta le plus rapidement possible. Cette dernière avait osé se présenter au milieu de la nuit à une heure ou le moindre poivrot de base pouvait devenir le dragueur lourd violent que tout le monde connaissait et qui se faisait souvent jeter dehors par les tenanciers s'ils dépassaient trop les bornes. C'était d'ailleurs ce qui venait de tomber sur la pauvre femme qu'elle avait reconnue : une des tenancières d'une des maisons closes ou elle avait déjà travaillé auparavant.

"Votre vin."

Elle avait posé la choppe en s'interposant entre l'homme et la femme, faisant claquer sèchement le bois de cette dernière sur la table pour séparer les deux "tourtereaux." Puis doucement elle se permit de passer un de ses doigts le long du menton de la cliente avant de continuer d’une voix bien plus douce, destinée généralement à faire craquer les mâles devant ce genre d'appel purement sexuel.

"Ne t'inquiète pas très chère, tu aura ce pourquoi tu m'as payée et cette nuit te sera mémorable." Elle jeta un regard curieux au poivrot "Il ne comprends juste pas qu'il n'a aucune chance avec toi."

Elle finit par s'écarter en lançant un regard dédaigneux à ce dernier pour lui faire comprendre les tendances des deux demoiselles et à quel genre de penchants elles pouvaient s'adonner. En public, ce genre de pratique ne plaisait que rarement, bien que certains mâles apprécient. Heureusement pour elles ce ne fut pas le cas de ce dernier qui ne se gêna pas pour repartir difficilement vers le bar et reprendre ce dont il avait besoin pour se finir tout seul.
La gérante de la maison close était maintenant libérée du léger dragueur lourd, bien que les ennuis ne feraient certainement que commencer pour elle. Après, elle n'avait également qu'à rappeler la serveuse qu'était Sylira ce jour là si elle avait besoin d'autre chose vu que cette dernière ne s'était éloignée que de quelques pas.

L'effet de surprise avait aussi bien fonctionné sur la tenancière de la maison close que sur le maraud ivre bien que ce ne soit pas la peur mais plus la surprise qui avait dicté les réactions des deux humains. Aussi, une fois l'effet passé, l'humaine se leva pour la rejoindre, l'interceptant entre deux services et deux esquives de pinçage de fesses par quelques clients plus qu'ivres qui arrivaient à peine à aligner deux mots sans bafouiller à cause de leur langue engourdie par le trop plein d'alcool. Contre toute attente, l'humaine la remercia, pour une fois qu'un membre de cet espèce mettait son égo de côté pour reconnaitre, ou tout du moins faisait semblant de le faire ! Elle lui sourit poliment en guise de réponse, un sourire fin et discret comme elle avait l'habitude afin de ne pas révéler sa nature.

Mais certainement que le véritable sujet n'était pas là, après tout la vampire avait déjà "travaillé" pour cette femme en tant que "dame de compagnie", et il n'était pas rare que les matrones n'hésitent pas à venir récupérer leurs filles si elles essayaient de travailler ailleurs. Et la question qui suivit fut le premier pas dans ce sens. Cette dernière fut accueillie avec un sourire malicieux, comme si la matrone ne la connaissait pas assez pour savoir que la vampire, ou plutôt l'humaine qu'elle pensait qu'elle était, n'arrivait pas à rester en place trop longtemps au même endroit comme si elle avait peur du train-train quotidien ou qu'elle fuyait quelque chose.

"Tu sais comment je suis." reprit-elle avec un sourire taquin. "Devinera-tu ?"

Le sourire ne l'avait pas quitté, et elle s'était comme mise à tourner autour de la matrone, laissant ses mains la frôler avec douceur et agilité comme pour s'amuser. En fait non, elle semblait s'amuser, comme elle le faisait à chaque fois avec les clients pour leur soutirer un peu plus d'argent ou obtenir ce qu'elle voulait. Elle savait que la matrone n'y était pas insensible donc elle en profitait certainement comme si elle souhaitait la faire tourner en bourrique. Chacun des rôles que la tenancière l'avait vu prendre étaient des centaines de méthodes pour pouvoir plaire aux clients ou les éconduire rendant la prostituée encore plus dure en cerner qu'elle ne pouvait l'être en réalité.

Elle s'esquiva avant même que la matrone n'ait pu tenter de répondre quoi que ce soit, se faufilant entre les tables pour ramener la prochaine commande à un groupe d'homme presque autant avinés que celui qui avait tenté de draguer la tenancière. La suivrait-elle dans ce petit jeu de piste ?

La petite matrone avait bien tenté de la suivre quelques instants avant de s'apercevoir du ridicule de la situation, répondant plus que favorablement au petit jeu de la vampire et se laissant quelque peu mener par le bout du nez par cette dernière. Elle passait donc le "test" avec le plus grand succès ! Car oui, pour qu'elle insiste ainsi cela voulait clairement dire que cette dernière était plus qu'intéressée par ses prestations, ou tout du moins l'apparence de celles-ci. Pour la vampire jouer ce rôle n'était rien d'autre que de lui offrir une belle planque discrète afin de recueillir des débuts d'informations et des pistes à suivre ultérieurement. Dans tous les cas le résultat était strictement pour la matrone : elle avait une fille de plus.

L'humaine attendit patiemment la fermeture de la taverne et que les derniers poivrots finissent par oublier comment il fallait faire pour marcher. Si ces derniers ne réapprenaient pas par eux mêmes ils seraient d'ailleurs chassés à grand coup d'eau de "nettoyage" usagée pour leur faire comprendre d'aller dormir de leur saoul dans un autre endroit que sur la table de la taverne. Maintenant que l'activité était moindre et que la serveuse du moment avait un peu plus de temps pour se reposer, ou tout du moins faire semblant de, la tenancière légèrement avinée après avoir bu quelques godets finit par se manifester de nouveau auprès de la vampire d'une manière peu habituelle.

Si elle avait réellement été un problème, la pauvre humaine ne serait plus vraiment là pour en parler, la vampire aurait eut toute possibilité d'en faire un de ses repas potentiels voire même de la laisser devenir comme elle. Aussi lui sourit-elle simplement en guise de début de réponse.

"Je peux t'assurer que nous aurions eut à avoir un différend, tu aurais été la première informée." dit-elle sur le même registre que la première devinette.

Son regard semblait lire au travers de l'humaine, comme dans un livre ouvert. En apparence elles avaient le même age, "Sylira" étant morte vers sa vingtaine d'années humaines et la matrone devant les approcher également. Chacune avait son expérience mais les deux avaient passé beaucoup de temps avec des clients, et l'une plus que l'autre !
La serveuse s'assit sur la table qu'elle venait d'essuyer, croisant d'abord les jambes, puis lentement elle les décroisa pour les écartes et y placer entre ses deux mains pour se pencher vers l'avant s'approchant d'un peu trop près de l'humaine au point que cette dernière pouvait sentir le souffle discret et régulier de la serveuse comme si cette dernière avait un peu de mal à respirer dans une tenue trop serrée.

"Et quel genre d'activité me proposes-tu ?"

Le ton ne laissait pas vraiment de place au doute sur les activités qui seraient tournées autour de la prostitution ou de la "fille de compagnie" mais il pouvait y avoir bien d'autres choses cachées derrières quand l'on jouait certains jeux que la vampire pratiquait régulièrement et auxquels la matrone ne semblait pas indifférente. Après tout cette dernière pouvait lui proposer une relation toute particulière en échange de certains privilèges ou autre !
Ensuite, tout dépendait également du type de client, et en ces périodes il s'agissait majoritairement des soldats occupés à la défense de la ville assiégée par les Alayiens, ces derniers constamment sous pression se révélaient être des clients quelque peu brutaux qui n'étaient pas vraiment l'idéal pour n'importe quelle prostituée. Alors pour une vampire ! La qualité des clients était donc une des questions silencieuses inclue dans la première.

Dans tous les cas ce serait à cette dernière d'être convaincante pour récupérer la "serveuse", peut-être pas immédiatement mais au moins se la réserver pour sa prochaine reprise d'activité quand elle l'aurait décidé ! Cet esprit indépendant n'était pas forcément au gout de tous, mais la vampire savait séduire dans tous les sens du terme pour arriver à ses fins.

La matrone en venait directement au but, elle avait besoin d'une fille de plus pour "ne pas laisser les lits seuls", ou une manière détournée pour dire qu'elle cherchait à compléter ses effectifs pour que toutes ses chambres soient occupées afin de satisfaire certains besoins primaires d'une partie de la gente masculine qui désirait payer pour ça. Bien entendu elle précisait à la serveuse que cette dernière n'aurait pas besoin de monter systématiquement avec le client, en quelque sorte pour la rassurer qu'elle n'aurait pas forcément besoin de le faire si elle n'en avait pas du tout envie. Sauf que forcément, elle n'en avait pas envie ! Et seules les obligations pour avoir des informations de certains clients "importants" que l'on ne trouverait pas dans une maison close des bas quartiers de la ville et ou les tavernes miteuses apportaient exactement la même chose sans devoir s'occuper physiquement d'une brute qu'elle aurait préféré égorger pour la vider de son sang plutôt que de lui vider autre chose.

Puis elle en vint au sujet, celui des clients violents qui parsemaient la profession de leurs mauvaises expériences. Pour la vampire ce genre de souvenir était directement lié à sa renaissance, on ne pouvait pas dire que c'était un bon ou un mauvais. Un mauvais flou pour l'expérience d'être maltraitée et un très bon pour la vengeance qu'elle put prendre, d'ailleurs cette expérience quasi-oubliée se faisant ressentir dans les types de proies sélectionnées et ce quasi-involontairement, les choisissant avec soin par rapport à leur manière d'être. Mais en dehors de ça, l’égoïsme vampirique est tel que ce qui peut arriver à d'autres "proies" ne peut pas vraiment émouvoir le cœur mort d'un vampire. D'ailleurs elle ne sembla pas vraiment s'en émouvoir, comme n'importe quelle prostituée ayant un tant soit peu d'expérience

"C'est certain que proposer des filles avec des traces de coups sur tout le corps n'aide pas à attirer la clientèle." dit-elle pensivement.

Quel client irait accepter une femme recouverte de bleus et avec les yeux pochés ? Car les plus grosses brutes n'hésitaient pas vraiment à frapper au niveau du visage et à faire preuve d'une certaine cruauté. Le problème était que les filles avaient beaucoup de mal à se défendre que ce soit par méconnaissance ou crainte de se retrouver directement à la rue, donc au final celles qui n'hésitaient pas à broyer les bijoux de familles de ces fameux clients n'étaient pas bien nombreuses !

"Pourtant leur broyer ce à quoi ils tiennent tant est très efficace pour ne pas les faire revenir." reprit-elle pensivement, il était clair qu'elle avait déjà pratiqué ce genre de méthodes et peut-être bien même qu'elle y avait pris un certain plaisir !

Elle se retint de proposer les services de deux trois personnes pour effacer les clients gênants, la matrone n'étant pas de ce genre de personnes, même si ça fonctionnait souvent ainsi dans les bas quartiers, les comptes ne se réglaient absolument pas avec la garde impériale mais avec une dague plantée entre les omoplates pour faire taire les témoins gênants ou les personnes qui par leur présence avaient le don de vous agacer ou de déranger vos petites affaires, et pour vivre dans certains quartiers de la ville il fallait souvent être aussi dangereux que les autres. D'ailleurs, les prostituées plus ou moins indépendantes n'avaient jamais trop de mal fricoter avec ce genre d'individus. Bien entendu, là l'offre était toute autre, la vampire ne se présentant que comme la messagère alors qu'elle serait l'exécutante ! Autant joindre l'utile à l'agréable !

Mais comme ce n'était pas ainsi que fonctionnait cette humaine, elle allait devoir faire en sorte de s'y prendre autrement !

"Pour l'instant je me suis engagée à remplacer la serveuse du tenancier de cette taverne le temps qu'elle revienne." informa-t-elle avant d'approcher doucement ses lèvres de la joue et de l'oreille de l'humaine avant de reprendre à voix basse, d'une manière presque envoutante. "A moins que tu ne me proposes quelque chose ui puisse me faire changer d'avis."

Elle continuait le petit jeu de l’appât, comme elle le faisait avec les clients après ce petit passage froid qu'elle avait eut. Faire courir le chaud et le froid dans les discussions était souvent son petit jeu favoris, comme pour s'amuser des réactions humaines mais également obtenir ce qu'elle voulait. Beaucoup étaient de bons joueurs et suivaient de bon cœur !

L'humaine tentait de la prendre par les sentiments, le coup classique qui fonctionnait tout le temps sur les hommes ou ceux qui avaient la culpabilité facile. Il ne manquait plus que le regard de chien battu et le tableau serait parfait ! Elle essayer de jouer au même jeu que la vampire pour obtenir ce qu'elle voulait, après tout elle avait beau être "morte" depuis des dizaines d'années, une femme restait une femme surtout si elle avait quelques pulsions manipulatrices. Mais parfois la manipulation ne fonctionne pas vraiment, comme la tenancière allait en faire les frais.

"Oh, mais je ne préfère pas cette taverne. Même si je me satisfais de peu..."

Elle avait prononcé les derniers mots d'une manière assez pensive, comme si d'anciens souvenirs remontaient à la surface. Oui elle n'avait pas vraiment eut une "enfance" vampirique confortable avec son "maitre" qui n'avait cessé de la torturer dans les pires conditions qu'il soit pour qu'elle se contrôle le plus rapidement possible et redevienne comme humaine par la même occasion pour mieux vivre parmi eux. Mais malgré tout, une petite parcelle de ses désirs avait résisté à cette annihilation qui faisait que parfois elle décidait pour elle-même si un endroit était plus confortable qu'un autre. Et son confort actuel serait de ne pas être obligée de passer par les chambres et des clients qui n'étaient parfois pas des plus agréables, après tout qui disait qu'une vampire aimait coucher avec des humains ?

"Mais en ce moment je ne suis pas vraiment d'humeur à vendre mon corps. Et ici ils ne font que regarder, parler et parfois oser toucher." reprit-elle calmement. "Même si parfois certains ont besoin d'une bonne correction."

La bonne correction, elle sourit a ces propos, elle aimait faire tourner en bourrique les humains et surtout les tourner en ridicule alors qu'ils se croyaient plus malins que les autres. Surtout en étant ivres morts ! Mais le sujet n'en était pas là, la matrone voulait la récupérer et elle venait clairement de lui faire comprendre que pour le moment elle n'était pas disponible en plus de ne pas en avoir envie, et une femme qui n'a pas envie de faire quelque chose, en particulier cette femme là... Et bien elle ne le fait, donc autant dire que le bras de fer engagé était perdu d'avance. Néanmoins les négociations pouvaient se faire pour plus tard ! Il était bon de toujours se faire désirer, et dans quelques mois, la place l'intéresserait certainement afin de se fondre de nouveau dans la masse après avoir vu le résultat du siège et de la guerre.

"Mais disons que ton offre n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde ayant mauvaise mémoire." dit-elle pensivement. "Je pense quitter la ville une fois le siège levé, mais à mon retour si tu as une place de libre, les choses pourraient s'arranger plus facilement." Il ne fallait jamais oublier une seule opportunité, et se garder les contacts était la meilleure chose qu'il soit. "Je peux par contre te payer en nature pour que tu ne m'oublies pas."

Oh, le sourire qu'elle lui adressa voulait en dire long et ne laissait aucun doute sur le moment que lui ferait passer la prostituée pour ne pas qu'elle l'oublie et que si l'offre était sincère elle serait bien payées aux vues de la prestation !