Alors qu'une belle journée s'annonçait à l'horizon, que le soleil était plus que présent et illuminait de plus belle sa beauté, son « tendre mari » eut la « merveilleuse » idée de lui rappeler qu'il devait se présenter avec sa merveilleuse épouse aux bras à l'enterrement de son oncle et à l'anniversaire de la cousine, sœur du nouvel empereur. Dire qu'elle espérait des promenades à cheval pour parader, minauder et sûrement chasser le lapin avec son faucon... Il lui arrivait d'avoir de ces idées à son époux... Qu'il aurait mieux fait de garder pour lui et de ne surtout pas l'impliquer dans ses histoires ! Comme si elle avait envie de s'enlaidir pour faussement pleurer un homme qui ne lui avait pas donné son fils mais préférait lui confier son neveu... Bien que le mariage était plutôt réussit et prestigieux, très digne de son rang !, son trophée n'était pas tout aussi prestigieux : un duc... On n'avait rien trouvé de mieux que de l'unir à un duc ! Heureusement qu'il était le cousin de l'empereur parce qu'elle aurait tout fait pour l'évincer plus ou moins légalement avant de se trouver un autre mari ou de recommencer à rôder autour de Gregorist.

Bref ! Là n'était plus la question de toute manière puisqu'elle était mariée à un sang royal et qu'elle était plus proche que jamais du pouvoir impériale donc pour l'instant, faire sa belle, cajoler son mari pour qu'il ne se doute de rien et continue de lui manger dans la main, et vivoter en attendant de trouver la solution pour devenir enfin l'apogée d'elle-même : être l'impératrice de tous les Hommes.

Cependant, l'heure n'était plus aux rêveries et notre petite vipère en jupon devait se préparer et surtout préparer ses bagages pour être parfaitement apprêté pour l'enterrement et la fête d'anniversaire de cette petite princesse en dentelle qu'elle ne supportait pas, la réciproque étant d'ailleurs vrai à son plus grand soulagement (il ne manquerait plus qu'elle ne l'apprécie tiens!). Quoiqu'il en soit, elle se devait d'être irréprochable et pour ça, un passage dans sa pièce contenant sa foule d'armoire remplie jusqu'à l'os de vêtements de toutes matières, formes, couleurs et saisons, n'oublions pas les meubles contenant les accessoires, les chaussures, les bijoux, etc... Ça, au moins, on ne pouvait pas lui tenir rigueur de son manque d'esthétisme et de chic, de perfection même !, et elle devait l'avouer que son mari était pour le moins doué à satisfaire, au moins ses besoins « physiques », mais aussi ses besoins vestimentaires : il n'avait aucune limite pour lui plaire et il était très doué pour ça, atténuant sans la faire grincer des dents l'animosité qu'elle avait à l'encontre de son caractère mollasson et sa position de 'Duc'.

Il était au moins bon pour quelques choses son « cher et tendre » !

Une fois sa multitude de bagages prêts, Valentine prit tout son temps pour se parer, jugeant chaque pli de sa robe bleu nuit, celle qui plaisait tant à Korentin d'ailleurs, défroissant le tissu et arrangeant ses boucles blondes avec art et maintient pour dégager la beauté et la prestance presque elfique de son visage et son cou de cygne, agrémentant sa gorge de saphir et diamant pour illuminer la pâleur de lait de sa peau. Bref, elle semblait parfaite et, lorsque son miroir lui renvoya une image plus que satisfaisante d'elle-même, elle daigna prendre sa fourrure de renard blanc pour s'enrouler les épaules dedans avant de monter dans le fiacre, badinant l'air de rien avec son époux pour la durée du voyage. Il fallait bien qu'elle s'occupe pour ne pas mourir d'ennui tout de même ! Et puis ils arrivèrent à bon port et prirent leurs aises dans les appartements avant d'assister à la cérémonie, la jeune duchesse écrasant une fausse larme de tristesse pendant la cérémonie histoire de faire comme si. De toute façon, dans les hautes sphères du sang bleu, tout était dans le paraître et l'image, la sincérité et la candeur se retrouvait vite dévoré par les charognards qui vivaient dans les hautes strates du pouvoir en ce monde. Et Valentine s'y sentait aussi à l'aise qu'un poisson dans l'eau !

Cependant, elle déchanta bien vite lorsque quelques jours après la fin de la cérémonie, et donc quelques jours avant l'anniversaire de la petite princesse, le nouvel empereur Grégorist vint la trouver discrètement mais pas trop pour qu'on ne se fasse pas d'idée sur ce qu'ils se tramaient entre eux. Au plus grand déplaisir de la dame bien entendu mais bon, on ne pouvait pas avoir tout ce qu'on voulait dans la vie n'est-ce pas ? Bref. Et donc elle déchanta et cessa de minauder en agitant ses parures pour se faire bien voir quand le contenu du flot de parole fleurit s'écoula le long de son tuyau auditif : enlever les images et les ronds de jambes, enlever le froufrou et les diamants pour ne garder que le matériau brut, et vous aurez... Quoi ?! Pardon ?! Comment ça puisqu'elle faisait partit de la famille royale à présent elle se devait de faire l'éducation SEXUELLE d'Esmelda ?! C'était une blague non ?! Évidemment que non ce n'était pas une blague puisque c'était de la bouche même de l'empereur... C'est donc avec l'amer impression d'avoir mangé du poisson pourrit que Valentine ne put que s'incliner gracieusement avec un faux sourire aux lèvres en acceptant avec « bon coeur » la demande de Gregorist.

C'est donc la bouche en cœur et le teint frais, une robe mauve au décolleté pigeonnant et dénudant ses épaules, un chignon complexe de boucles et de boutons de roses, un rubis sur le front et dans le creux de sa gorge, les mains quelque peu moite et surtout un pseudo air pincé : elle ne digérait toujours pas ce qu'il avait osé lui demander ! Elle avait l'impression d'avoir avalé quelque chose d'astringent ou encore d'extrêmement amer qu'elle n'arrivait pas du tout à digérer depuis quelques jours... Et elle n'était pas prête de décolérer de cette histoire ! Inspire, expire... Courage ma petite Valentine ! Elle lissa une dernière fois les plis de sa robe avant de frapper à la porte et d'entrer, un sourire « professionnel » aux lèvres avant de s'incliner devant la princesse pour ensuite prendre place à ses côtés, servant le thé pour ensuite attraper sa tasse et rajouter un peu de sucre, faisant tournoyer sa cuillère dans le liquide chaud et parfumé.

« Et bien princesse, je vous souhaite une nouvelle fois un joyeux anniversaire. Quatorze ans déjà et vous voilà une merveilleuse jeune femme... »

Un sourire faussement maternelle et une mauvaise foi le plus étouffée possible, bien évidemment qu'elle savait que la princesse avait 18 ans depuis peu mais comme elle ne digérait pas ce que Gregorist lui avait demandé de faire avec cette petite peste qu'elle ne supportait pas, alors elle se vengeait comme elle pouvait et en toute diplomatie bien évidemment.

« Je suis envoyée par votre frère parce qu'il juge qu'il est temps pour vous de vous préparer à votre futur vie de couple, afin que vous ne soyez pas démuni lorsque votre nuit de noce arrivera. J'espère que vous comprenez très chère... N'est-ce pas ? »

Bien sûr, Esmelda ne devait pas connaître autre chose que ce que ses nourrices devaient lui avoir confiée, les fameuses métaphores regorgeant de fleurs, de cavernes, d'anguilles, d'abeilles, d'oiseaux, etc... Mais Valentine se ferait une joie aussi immense que la taille de Gloria à lui expliquer les vrais choses de la vie, elle était soucieuse d'autrui n'est-ce pas ? Si charitable non ?

« Avant de vous expliquer le plus clairement et le plus simplement les choses, pourriez-vous je vous prie m'informer ce que l'on vous a raconté sur le sujet ? »

Ce qui permit à Valentine de se rasséréner un peu fut de constater que derrière l'image accueillante de la princesse, cette dernière était « ravie » de la voir elle aussi. Et bien elles étaient deux ! Mais les apparences le voulant, aucune des deux ne fit de simagrées significative pour bafouer les apparences et c'était donc avec dignité qu'elles burent le thé toutes deux leurs tasses de thé et mangèrent leurs petits gâteaux secs. Cependant, étant donné que ce n'était pas dans la bonne volonté de notre vipère en jupon de savoureux les bienfaits de ce liquide chaud et parfumé, Valentine ouvrit donc ses lèvres couleur corail pour lui expliquer les raisons de sa visite, badinant l'air de rien sur sa futur vie de couple et la possible nuit de noce avec son futur époux tout en se forçant tant bien que mal à ne pas vérifier son teint lisse et blanc de porcelaine dans le reflet d'un miroir quand elle se permit de faire une réflexion sur sa crème de riz. Comment cette petite péronnelle osait dire une chose pareille ?! Comment cette petite adolescente qui cachait les affres du vent et du soleil sous une fine poudre d'ocre, de riz et d'or, (alors que c'était tout de même visible!) pouvait se permettre de juger les gens de cette manière ?! Qu'y connaissait-elle en beauté alors qu'elle ressemblait au bébé d'un cygne ?! Dégingandée, à moitié avec ses plumes d'adultes ?!

On respire Valentine, on respire... Tout est dans la respiration et la diplomatie ma chère. De même que c'est une certitude que l'empereur et l'empire soient tout sauf heureux d'apprendre que la duchesse Kohan ait décidé d'égorger la princesse héritière sous le coup d'une saute d'humeur. Bien que la tentation soit grande... Mais la satisfaction fut encore plus présente et jouissive alors qu'Esmelda recracha sa gorgée, fort heureusement non en direction de la jolie blonde, et toussota pour chasser les dernières gouttes de sa trachée alors qu'elle s'imprégna totalement de l'objet de visite de sa belle-cousine. Un spectacle vraiment amusant et relaxant, bien vite notre vipère à jupon oublia rapidement sa frustration pour garder son visage de neutralité faussement bienveillante, un sourire indulgent aux lèvres alors qu'elle continuait de la regarder avec sérénité pendant qu'une servante aidait la princesse impériale. Ah les petites joies du quotidien... Jouissif non ?

Bref, passons : nous avons un cours d'éducation sexuelle à faire n'est-ce pas ? Tiens ? Ah oui ? Alors comme ça la petite Esmelda joue les grandes et pavane ? Et bien nous allons nous amuser, Valentine en frissonnait même d'impatience alors qu'un sourire toujours maternelle et indulgent aux lèvres, un regard calculateur se posant sur la jeune princesse. Sans compter qu'elle était allergique aux amandes...

« Je n'ai pas de discours tout préparé et il est bien évident que je ne parlerais comme les nourrices et autres membres du personnel qui papillonnent autour de vous : les anguilles et les cavernes, les abeilles et les fleurs... Ne soyons pas ridicules et vous avez plus que l'âge de savoir même si vous gagez connaître plus que ce que je crois. De toute façon, que vous sachiez des choses ou non ne me regardent aucunement, jeune princesse : l'empereur, votre frère, m'a mandé en votre compagnie pour que je vous apprenne ce qu'il se passe dans l'intimité entre un homme et son épouse. »

Valentine était d'ailleurs plus que certaine que la jeune Esmelda ne soit guère ravit d'une telle manœuvre de la part de son frère et, pour une fois, cela faisait beaucoup rire intérieurement la magnifique duchesse qui pourtant garda un comportement digne de son rang.

« Mais puisque vous ne souhaitez pas aborder réellement et directement le sujet et la réponse que je vous ai demandé, nous allons donc débuter le sujet depuis le début. Ainsi donc, très chère, vous avez pu remarquer quelques changements chez vous alors que vous grandissiez et vous épanouissiez davantage n'est-ce pas ? Une poitrine qui prend de l'ampleur, un cycle hormonal de plus en plus stable et régulier, je parle bien évidemment de votre lune rouge. Toutes ses preuves indiquent que vous êtes de plus en plus prête à vous marier, à vous unir physiquement avec votre époux et surtout de porter son enfant, un héritier impérial. »

Notre vipère en jupon était d'ailleurs tout aussi convaincu que plus la conversation continuerait dans la thématique imposée et plus la princesse ne se sentirait pas de rester en compagnie de la blonde. En même temps, deux femmes ne pouvant pas s'apprécier et qui étaient obligées de se côtoyer pour parler sexualité n'était peut-être pas de bon ton... Peu importe, plus Valentine pourrait gêner et horrifier Esmelda, plus elle serait heureuse et verrait dans ça une sorte de compensation au fait que Korentin l'ait traîné jusqu'ici...

« Il en est de même pour les hommes ma chère sauf que pour eux cela concerne la voix, la pilosité, les muscles et aussi, surtout l'épicentre de notre conversation : le sexe, ou le pénis... »

Avec une apparence distante, Valentine ressemblait intérieurement à un chat en train de jouer avec une souris agonisante... C'est donc avec une foule de détail et de précision pouvant paraître cru mais étant pourtant l'incarnation même de la vérité et de la réalité que la duchesse expliqua stoïquement et fermement ce qu'une femme et un homme faisait lors de la nuit de noce, ne l'épargnant aucunement alors qu'elle pouvait percevoir les couinements discrets de souris choqués de la part des servantes. Même la mine légèrement blanche de la princesse l'amusait fortement, la faisant jubiler intérieurement : est-ce que notre petite Esmelda nationale était choqué devant l'absence de protocole ou même de diplomatie ou encore de précaution alors qu'elle lui fait la leçon comme demandé.

Valentine fut quand même quelque peu désappointé que la jeune princesse ait tant de maintien et de respect au protocole même si cela concernait un sujet aussi sensible et gênant à souhait comme la sexualité : elle aurait adoré la voir flancher en arborant un joli teint vert et nauséeux... Mais elle devra se contenter de cette simple petite pâleur basique et puis c'est tout. D'ailleurs, elle ne savait pas ce qui la retenait de réprimander les servantes à cause de leurs couinements de souris effarouché : de quoi à la fin ?! Avait-on décidé d'attribuer de jeunes pucelles effarouchées au service d'une princesse tout aussi vierge qu'elles ?! Idée stupide selon son avis... Fort heureusement, sa merveilleuse fille ne lui ressemblerait pas et elle y veillerait personnellement. Toutefois, la blonde fut profondément satisfaite de voir dans quel état elle les mettait toutes les deux : elle ne s'était absolument pas du tout gênée pour entrer très en profondeur dans le sujet de discussion, ajoutant dans un badinage léger et tranquille, l'air de rien, des anecdotes et des détails tous plus croustillants les uns que les autres.

« Allons ma chère enfant, pas de chichi entre nous... »

Que croyait cette pauvre petite dinde ? Que Valentine allait quitter le jeu aussi rapidement alors qu'elle s'amusait comme une vrai petite folle ? Tch, c'était mal connaître notre colombe corrompue qui allait en profiter jusqu'au bout de ce fardeau qu'on l'avait obligé à subir.

« Je n'ai rien de mieux à faire et je vous avoue que je me soucis réellement de votre éducation, princesse Esmelda : il est très important que vous soyez prête la nuit de votre lune de miel. Je serais peinée pour vous de savoir que vous aurez vécu ce moment avec force douleur et larme alors qu'en si prenant correctement cela peut être plus que plaisant pour vous... »

Heureusement qu'on ne voyait pas son vrai visage, de veuve noire psychopathe et sadique à souhait, sinon la brune aurait prit la fuite depuis un petit moment. Seulement, le protocole et les apparences prenaient le pli sur tout, et c'est donc avec une satisfaction jouissive que la duchesse resta bien en place sur le fauteuil, buvant une gorgée de thé au goût de victoire alors qu'elle mirait la jeune femme se rasseoir avec une impression d'avoir avalé du poisson pourrit et bien amer, astringent, qu'elle dissimulait habilement mais pas assez pour Valentine qui était plus que douée dans le jeu des apparences.

« Ne soyez pas gênée mon enfant : c'est une chose tout à fait commune et simple de parler de sexe à votre âge et avec une femme d'expérience, votre frère a eut beaucoup d'esprit en faisant appel à moi pour vous apprendre cette voie-là. »

Un petit rire minaudant et sucré, un ton léger et badin, un gâteau sans amande aux lèvres et hop, un regard pétillant d'une intense satisfaction à faire défriser un mouton : elle s'amusait vraiment beaucoup.

« Puisque vous semblez avoir tout comprit de ce que je viens de vous dire, ma chère, répétez ce que je viens de vous dire voulez-vous ? Et puis nous étudierons certaines situations pour que ce que vous fassiez en réponse soit un réflexe qui vous viendra naturellement le moment venu avec votre époux. Sans oublier que nous réfléchirons ensemble sur ce qu'il se passe avant et après l'acte bien entendu... Vous êtes prête ? »

Ce qu'il y avait de bien c'était qu'au fond, Esmelda n'avait aucune autre possibilité de repli : elle se devait de dire oui et de continuer à discuter en la compagnie de Valentine sous sourciller. Finalement, Grégorist avait bien fait de lui demander : elle s'amusait vraiment beaucoup en cet instant, c'était même très jouissif pour tout avouer...

Jamais prédateur n'aurait pu être profondément heureux en cet instant que notre chère Valentine... Avec une satisfaction grandissante et hautement satisfaite, la blonde l'observa reprendre place à contrecœur, avec un air coincé qui disait clairement qu'elle aurait tout donné pour ne plus être en sa compagnie. Dommage pour notre petite brunette, la duchesse n'allait pas lâcher le morceau avant un bon moment ! Jusqu'à la pousser à la faute à cause d'une exaspération trop poussée à bout... Là, la femme de Valentine aurait eu gain de cause et réparation auprès de l'empereur dû aux mauvaises manières de la jeune princesse qui était encore jeune et dissipée, normal qu'à son âge on se rebelle. Et encore une fois, elle apparaîtrait comme vertueuse et compatissante, une mère et une épouse comme on en rêvait tous d'avoir ! Merveilleux n'est-ce pas ! Raison de plus pour continuer de jouer comme un chat joue avec la souris avant de la manger, encore plus si cela déplaisait à sa petite interlocutrice.

« Pour tout vous avouer ma chère, vu que c'est un ordre de votre frère et de mon empereur, je crains que vous n'ayez pas le choix de continuer à discuter en ma compagnie. Et puis, une fois la gêne passée, vous trouverez ce sujet plus que plaisant, je n'en doute pas une seule seconde ! »

L'enthousiasme et la légèreté qu'elle affichait était tout ce qu'il y avait de plus sincère en cet instant et c'est avec un air profondément victorieux et sadique caché sous un air doux et maternelle, qu'elle se resservit un peu de thé bien chaud et parfumé, l'esprit léger par le plaisir de l'instant : finalement, il y avait du bon à ce que son stupide époux le conduise ici.

« Non non mon enfant, vous n'avez pas tout saisit je le crois bien : j'ai l'autorisation de votre frère pour passer tout l'après-midi s'il le faut pour bien faire votre éducation sur ce sujet-là. Il veille à votre bien-être et votre plaisir lors de votre nuit de noce qui doit vous faire rêver : il lui tient à cœur que ce qui se dit entre nous, ma chère, vous pousse à ressentir un peu plus d'ardeur à choisir un époux parmi la liste si longue de vos prétendants. Et je dois vous avouer que je suis d'accord avec lui : bientôt vous aurez mon âge, déformée par le temps et vieille fille, obligée d'être cloîtrée dans un couvent jusqu'à la fin de votre vie. Une possibilité qui horrifie votre charmant grand-frère si soucieux de votre avenir et qui rêve de vous voir aussi épanouis que je le suis au bras de mon cher et merveilleux mari qu'est Korentin et nos adorables enfants, Nolan et Victoria. »

Bon... Pour Noah et Korentin ça s'arrêtait là... Mais pour Victoria, son trésor aux yeux bleu comme un ciel d'été et des boucles blondes comme les blés, le portrait craché de sa mère ! Elle était tout simplement magnifique, un délice et un cadeau de Dracos ! C'est grâce à son expérience comme le disait cette petite dinde qu'elle a une telle petite merveille dans sa vie ! Alors elle ne lui en tint pas rigueur, sur ce point-là en tout cas.

« Vous avez parfaitement raison mon enfant : une femme de mon âge à beaucoup d'expérience à revendre et comme votre frère l'a aussi comprit, c'est pour cela qu'il est venu à moi pour que je vous pousse à suivre la voie que j'ai moi-même suivit par ma mère, et ma mère par la sienne... Il est du devoir des femmes au sang bleu, comme vous et moi, de faire un bon mariage, que ce soit politique et intime, pour ensuite donner la vie et les élever pour qu'ils soient de grandes personnes et de bonnes personnes une fois adulte. A présent, reprenons... »

C'est donc avec une calme autorité et un discret plaisir, Valentine reprit les thèmes qu'elle voulait qu'elle retravaille toutes les deux, au désespoir grandissant des servantes qui atteignaient des teintes fuchsia jamais encore inégalées et ne pouvaient pas prendre la fuite pour soulager leurs oreilles et leurs esprits. Patiemment et calmement, badinant comme si elle lui parlait chiffon et mode vestimentaire, la blonde reprit certaines situations pour qu'Esmelda réagisse de façon spontanée et naturelle, ainsi que les détails de comment elle devait se préparer au début et à la fin de l'acte, toujours demandant avec sensualité si son époux avait aimé ce qu'elle venait de lui faire.

« Vous ne devez d'ailleurs pas hésiter à flatter son ego en lui racontant comment c'était délicieux et que jamais première fois n'a été aussi magique... Enfin, à condition que vous choisissiez un époux distingué de haut lignage et non un ruffian de bas lignage. Oh et n'hésitez pas non plus à vous isoler un bref instant pour faire le poirier et permettre à la semence de votre époux de rester dans votre ventre afin de vous féconder et réussir à lui faire un enfant, un fils de préférence en premier, dès votre premier soir. Nous devrions peut-être discuter des possibles époux qui vous conviendront le mieux, qu'en dites-vous ? La liste est longue et les choix multiples alors nous devrions pouvoir réussir à trouver quel homme serait le mieux pour vous et l'empire... »

Un modèle de compassion maternel n'est-ce pas ? Tout Valentine ça mais elle était toujours secrètement profondément jubilatoire en cet instant parce que la princesse clignotait comme les étoiles : rouge vif, blanc craie, rouge vif, blanc craie, vert pomme... Tout simplement jouissif. Avait-elle déjà dit à quel point elle était contente que son idiot d'époux et ce stupide empereur l'ont conduite jusqu'à cet entrevue si important et décisif avec la petite princesse ? Valentine ne s'était pas amusée de cette manière depuis un petit moment : les discussions avec les pucelles effarouchées étaient vraiment l'idéal pour garde une peau souple et ferme, un teint frais et une mine bien jeune.

Mais par Dracos tout puissant ! D'où venait cette horrible manière de toujours répondre pour avoir le dernier mot ? Ce que c'était agaçant ! Mais elle veilla bien soigneusement à ne pas laisser transparaître son exaspération sous peine de voir sa peau de lys se fissurer en des rides de colères très hideuses et indignes de son rang et de sa prestance. Tout est une question de patience et de relaxation, de sang-froid et de contrôle... Comme maintenant. Si cela n'avait pas été le cas, il y aurait eu la mort de la princesse à déplorer parce qu'elle aurait cédé à ses instincts : lui sauter dessus et l'étrangler jusqu'à ce que son teint bleu violine jure atrocement avec sa robe et les décors de cette petite pièce ! Hmmm... On est calme, tout va bien... Korentin risque d'être quelque peu fâché si elle mettait fin aux jours de cette exaspérante volaille et peut-être aussi tout le reste du royaume humain... Et son rêve d'accéder au trône impérial n'en sera que plus loin voire carrément inaccessible...

Ne pensons pas à cela ou ce serait la déprime assurée ! Le teint jaune et crayeux en prime ! Ce qu'elle ne souhaitait surtout pas ! Valentine but une gorgée de thé pour se remettre avant de croquer un gâteau sans amande, se ressaisissant comme la duchesse parfaite qu'elle incarnait depuis son mariage.

« Justement : si vous trouvez un époux qui vous convient et que vous aimez, il faut bien que vous soyez prête le jour de votre nuit de noce sinon cela risque d'être un désastre et l'amour que vous ressentirez pour cet homme s'étiolera. De même que, de part votre rang, vous ne pouvez pas vous marier avec n'importe qui : vous êtes la sœur de l'empereur et s'il venait à disparaître, Dracos nous préserve de ce désastre, c'est votre époux qui trônerait avec vous sur le royaume humain. Il vous faut donc, non seulement un homme de très haut lignage et pas n'importe quel comte ou baron, mais aussi qu'il ait bénéficié d'une éducation irréprochable en ce qui concerne le métier de gouvernant. Ce n'est pas n'importe quelle chaussure qui convient à un pied impérial ma chère alors tâchez de vous en souvenir je vous prie. »

Espèce de greluche sans cervelle ! Avait-elle ne serait-ce que la moindre idée de ce que Valentine aurait donné pour être la sœur de l'empereur ?! Si elle avait été à sa place, elle se serait empressée de prendre un époux aussi faible et manipulable que son cher Korentin pour l'influencer au point qu'elle pourrait prendre un jour sa place sans que cela ne choque qui que ce soit ! Une impératrice parfaite ! C'était elle qui devrait être à la place de ces espèces de benêts sans deux sous de jugeote ! Et au lieu de cela, elle est mariée à un duc ! Et voilà que cette pimbêche sans cervelle en remette une couche avec l'amour... L'amour... Chose écœurante et insignifiante, un concept qui ne servait à rien et n'aidait en rien à accéder au trône ! L'amour était pour les faibles et les simples d'esprit, n'occasionnait rien de beau et créait les pires ennuis au monde ! Bercée par les illusions de ses nourrices, voilà la princesse impériale ? Ils auraient dû lui confier son éducation et elle n'en serait pas là aujourd'hui ! Parce que ça allait être du travail de l'en débarrasser de ses mauvais tics de paysanne !

« Ma chère, je sais que l'amour c'est merveilleux et que tout le monde rêve de faire un mariage si féérique. Moi-même j'ai finit par aimer votre cousin avec le temps... C'est un homme tellement merveilleux et si soucieux de sa famille... Je dois avouer que mon père n'aurait pu trouver meilleur partit que mon bien-aimé Korentin et, bien qu'il soit mort, je l'en remercie. Mais vous êtes une princesse impériale et, bien que cela m'accable pour vous, vous devez baser votre mariage sur la politique et la diplomatie pour renforcer la position de votre frère. Et puis qui sait ? Avec tous les conseils que vous recevez de ma part et sûrement d'autres dames tout aussi soucieuses de votre éducation et votre avenir, peut-être que l'affection, la complicité et l'amour naîtra entre vous et ce prétendant qui aura été choisit pour vous. Vous devez rester optimiste et rêveuse comme vous l'êtes à présent, ma chère enfant, mais n'oubliez pas cette ligne directrice qui est la vôtre en tant que princesse impériale. »

L'art des masques... Au cour de son petit énoncé, elle avait été tendre, chaleureuse, maternelle, compatissante, amoureuse, tendre, amusée... Elle enlevait et mettait de nouveaux masques avec une fluidité naturelle et désarmant, en un battement de sourcil : qui pourrait la targuer de mauvaises intentions alors qu'elle était si parfaite et compréhensive envers cette jeune princesse si rêveuse ? Personne et c'était bien là ce qui arrangeait notre petite vipère de Valentine.

Alors, voyons voir... Jehan Kavohan duc d'Alianna, Tancrède Richesei duc de Morgovik, Meneldil Merianwenn comte de MontAlamréä et Valanor duc de Lyssa... Hmmm ce n'était pas très glorieux tout ça... Peut-être Tancrède, oui... Complètement influençable, un mouton pathétique et sans guère de personnalité, subjugué par la beauté de la duchesse Valentine d'Aldaria et premier fils... Il lui permettrait peut-être de contrôler un tant soit peu la princesse Esmelda, peut-être même de l'influencer et de la gagner à sa cause... Eh quoi ! Il est bien permit de rêver non ! Sait-on jamais !

« Et bien, nous pouvons déjà retirer Sire Valanor de la course puisqu'il n'est que le second fils et c'est le premier qui nous intéresse sauf qu'il est déjà engagé auprès d'une autre dame. Sire Meneldil et Jehan... Hmmm je n'ai pas beaucoup de rumeurs positives à leur égard donc je me méfierais si j'étais vous : bien que vous méprisez les rumeurs, elles sont une source d'information non négligeable, ma chère. Quant à Sire Tancrède... Ma foi c'est un gentil garçon, héritier d'une excellente lignée, je n'ai rien à redire à ses manières ni son éducation... Oui, je pense que celui-ci ferait un excellent partit pour vous, ma chère enfant, qu'en dites-vous ? »

« Gloria ne s'est pas faite en un jour » comme on dit mais si elle devait travailler la princesse au corps jusqu'à la nuit des temps pour essayer (sans garantis de réussite s'il vous plaît!) de la gagner à sa cause, de lui apparaître comme un modèle à suivre et à obéir sans discuter. Et puis elle ne cessait de la contredire et c'était tout à fait scandaleux ! Où était le respect que l'on devait avec diligence aux aînés ?! Ses pulsions meurtrières commençaient doucement mais sûrement à chanter en elle alors que par moment ses beaux yeux prenaient des teintes métalliques et tranchantes... On se détend de suite histoire que la princesse pigeon ne se doute de rien ! Et le soleil qui avançait dans le ciel, le temps passant et le dîner non loin... Enfin, au moins aurait-elle posé les bases et il n'y avait plus qu'à croiser les doigts pour que ça bourgeonne... A moins qu'un rituel sombre et discret ne pourrait aider à faire avancer les choses ? Il y avait de vieilles histoires sur le sujet alors bon, peut-être que c'était vrai et possible ? N'y avait-il jamais de fond de vérité dans les légendes ? Ne nous égarons pas...

« Il est vrai ma chère que l'idéal soit que vous l'aimiez mais essayer de comprendre ce qu'implique votre position par Dracos ! Il est plus que normal de souhaiter l'amour et l'épanouissement de votre être en compagnie de l'homme que vous aurez choisit et avec qui vous recevrez cet amour en retour, mais vous êtes une princesse impériale et il est hélas de votre devoir de vous concentrer d'abord sur les avantages politiques que cela pourrait être pour votre frère et son pouvoir. Je sais bien que cela est malheureux et injuste, mais c'est la position de nous les femmes en cette société, et il n'y a rien d'autre à faire pour que le contraire arrive... A part prier Dracos d'être clairvoyant pour vous aider dans le choix ? »

Et de toute évidence, il n'y avait pas qu'elle qui commençait à perdre patience... Avec une joie parfaitement dissimulée, Valentine put l'observer commencer à mettre plus de force et de frustration dans ses propos, c'était relaxant de voir ça.

« Nous ne doutons aucunement de tout ce que vous faites pour l'Empire en tant que princesse, mon enfant, bien au contraire : nous ne pouvons tous que louer votre grâce, votre générosité, votre compassion envers le monde et cela est fort louable de votre part. Mais j'ai l'impression que vous ne comprenez pas ce que cela implique au niveau de votre mariage : vous ne pouvez pas choisir n'importe qui, les traditions séculaires sont profondément engoncées dans notre façon à tous de vivre en société et cela implique la position de la femme et les devoirs d'une princesse impériale. Et aller à l'encontre de ces traditions... Mon enfant vous risquez de tout perdre et de voir votre cœur et votre innocence se briser... »

Elle posa un regard empli d'inquiétude et de peine sur la jeune princesse, en apparence autant soucieuse qu'une mère pour sa fille, alors qu'elle avait la nausée de devoir autant jouer la comédie pour sauvegarder les apparences et continuer d'essayer de la manipuler. Mais il n'y avait pas que les traditions séculaires qui étaient profondément ancrées : cette petite dinde ne démordait pas du tout de ses principes ! Et ça pique avec les paires de chaussures... Nul doute que la princesse la voyait comme une de ces « filles de haut lignage qui par la suite font des encartes à ce qu'elle pense être le bonheur », espèce de dinde ! Ouh mais pourquoi n'avait-elle pas le droit de l'étrangler cette pimbêche qui se croyait si supérieur ! Si c'était Gregorist qui s'était marié avec elle, la princesse aurait filé droit ou serait morte dans son sommeil ou une embuscade ! Qu'elle bénisse sa vie plutôt que de se plaindre ! Elle pouvait même échanger sa condition avec la sienne si elle ne supportait pas d'être princesse impériale ! Espèce de guenon endimanchée !

Hmmm on se calme Valentine, on se calme... Pense à ton teint de rose et ta beauté de rêve, ça risque de se flétrir et de jaunir méchamment et cela garantirait la victoire de cette volaille sans jugeote. Allez hop, une gorgée de ce thé savoureux et un gâteau pour se redonner de l'énergie, gardons le calme et tout ira bien...

« Je doute qu'il m'écoute mais vous n'avez pas tort : il serait bon qu'il commence à chercher autour d'une probable épouse pour avoir des héritiers. Mais je ne suis pas là pour lui faire la morale à lui, je suis là pour vous éclairer et vous conseiller ma chère parce qu'entre femmes il est bon d'avoir ce genre de conversation. Je vous ai d'ailleurs donné mon opinion sur le sujet : pour moi, le jeune Tancrède serait un mari tout à fait idéal et vous devriez vous pencher sérieusement sur la question. Et vous devriez porter écoute à l'occasion des rumeurs parce que vous pourriez apprendre des choses plutôt intéressantes aussi douteuses peuvent être leurs sources. »

La naïveté ne conduirait pas très loin la péronnelle...

« Le temps passant, il me faut hélas cesser cette entrevue dès à présent que j'ai le temps de me préparer et de préparer votre petite cousine, ma Victoria, pour le repas de ce soir. J'en profiterais par ailleurs pour prendre votre frère en aparté et lui exposer mon point de vue sur cette rencontre, à lui de juger si nous nous reverrons ou non mon enfant. Je vous dis donc à tout à l'heure ma chère et puis, qui sait, nous en reparlerons peut-être au dîner... »

Lui offrant un sourire très maternel et affecté, la blonde se releva et s'inclina avant de se diriger gracieusement jusqu'à la porte de sortie, très hautaine et noble, majestueuse voire impériale !, dans ses manières. Plus qu'à espérer que l'empereur récidive sa demande : elle devait travailler la princesse au corps pour avoir une chance de voir aboutir son projet et vu comment cette pimbêche était obtuse à cause de son éducation de paysanne, il y avait beaucoup de travail à faire !