Il n'aurait jamais crut que sa situation irait de mal en pis avec autant de cynisme. A croire que le monde avait décidé qu'il était coupable d'un délit de sale gueule carabiné... Il avait à peine réussit à se tirer des griffes de Lyra, la démente qui servait de générale à l'armée du néant avec ses deux frères dégénérés qu'il tombait sur les vampires et se retrouvait leurs prisonnier. Et si ça ne suffisait pas, il avait réussit à se mettre Lorenz Wintel à dos personnellement. Bon d'accord, il avait bien contribué à cela en se servant de lui comme d'un tremplin mais si il avait put prévoir que donner le nom de Roëric à la place du sien déclencherait une telle réaction il se serait bien garder d'ouvrir la bouche, quitte à en mourir. Il ne savait pas exactement ce qui s'était passé entre ces deux là et d'ailleurs il n'était pas certain de s'y intéresser... tout ce qui importait, c'était que ces damnés vampires l'avait conduit droit là où il ne voulait pas aller, à l'antichambre de la pire des tortures : le domaine des Baptistrels.

Non mais on avait pas idée de venir se perdre dans un endroit pareil ! Non seulement on l'obligeait à jurer de n'agresser personne ( et Dracos seul savait qu'il en avait une furieuse envie ) mais en plus on lui prenait ses armes...Certes il n'y avait pas accès avec ses geôliers mais il avait toujours caressé l'idée de les récupérer d'une façon ou d'une autre, car après tout il disposait de quelques avantages bien à lui pour filer rapidement et en toute discrétion. En attendant il était donc soit disant libre sur ce fichu domaine, sans autorisation de sortir, sans armes et condamner à devoir subir les miaulements des elfes et l'aigre des vampires à tout bout de champ. Que pouvait-il y avoir de pire que cela, surtout pour lui qui avait les elfes et la majorité des vampires en horreur ? Vicieuse cette torture... vraiment, il n'avait pas imaginé qu'on lui ferait un coup pareil. Et il ne s'en accommodait absolument pas, affichant une mauvaise humeur orageuse en permanence, s'isolant le plus possible pour s'épargner leurs présences à tous. Même les humains lui donnaient envie de tempêter ou de s'enfermer définitivement dans un silence tombale... Des sudistes, corrompu et mollasson pour la grande majorité, qu'y avait-il de glorieux là dedans, ou même d'agréable ? Il préférait rester seul oui, loin, très loin d'eux tous...

Il n'y avait pas que cela d'ailleurs, le temps était affreusement resplendissant, toujours en été, toujours chaud... pour un nordique ce n'était pas l'idéal, et il n'en avait plus l'habitude. Cela ne l'aidait pas à sortir de son marasme, mais il aurait préféré se faire haché menu que de l'avouer à qui que ce soit, ou même le montrer... et il s'isolait donc encore plus. Au moins, lorsqu'il était seul, il ne risquait pas d'être dérangé par qui que ce soit, ou quoi que ce soit d'ailleurs. Il n'avait simplement rien à faire ici et rien à faire de ces négociations, alors autant rester loin... Et puis ainsi il aurait peut-être l'occasion de trouver une faiblesse dans cette satanée muraille histoire de s'enfuir sans qu'on le remarque. Ils étaient tous les un après les autres, ne faisant pas attention à lui, c'était l'occasion rêvée et il n'en aurait peut-être pas d'autres avant longtemps. Il fallait qu'il essaye, avant de devenir dément à rester enfermer là. Alors, comme tout les jours depuis leurs arrivée, il faisait sa petite inspection des murailles magiques ( Mais pourquoi fallait-il qu'on utilise la magie à toute les sauces ? Ils en étaient complètement drogués ) pour chercher une ouverture quelconque....

Une ouverture qu'il ne trouverait probablement pas, mais ça ne l'empêchait pas de s'entêter. Sauf que cette fois, il était suivit, et que cela l'agaçait prodigieusement... Pourquoi donc cet espèce de crétin aux oreilles en parabole le suivait-il ? Qu'avait-il fait cette fois ? Il avait marché sur une fougère des esprits ?! Impossible de faire trois pas sans risquer d'offenser quelqu'un, frustrant au possible... Oh il essayait de le semer, vraiment. Mais cette carne semblait être capable de réapparaître n'importe où, n'importe quand sans le moindre problème. Ça aussi c'était agaçant... mais c'était un elfe, il était agaçant par nature. Alors il allait, en essayant de faire abstraction de cette ombre jusqu'à ce qu'il ai achevé sa petite balade. C'était relativement difficile puisqu'il semblait le diriger loin des abords les plus reculés de cette large plaine... tant et si bien d'ailleurs qu'il finit par s'arrêter, inspirer profondément et lui jeter un regard froid. Ah il voulait le suivre partout et l'empêcher de s'en aller se perdre n'importe où ? Fort bien, ils allaient voir si il pouvait vraiment jouer à ça longtemps... Bifurquant il se dirigea vers un autre coin du domaine. Pendant une heure, puis deux puis trois, il continua de le balader en décrivant de magnifiques octogones dans la plaine ( et diantre l'autre continuait de le suivre … ) jusqu'à noter la présence d'une vague forme au loin sur lequel il fonça sans attendre.

Au fur et à mesure que la silhouette se dessinait il commença à regretter son choix. Un dragon... il n'aimait pas plus les dragons que les vampires, mais un brin plus que les elfes. Ce serait sans doute un mal pour un autre. Il le fallait cependant. Rien que pour que l'autre lui lâche un peu les talons. Il s'arrêta cependant quand la seconde ombre devint plus nette... Il s'arrêta d'un seul coup, immobile comme une statue de glace, nez à nez avec l'individu qu'il avait recherché pendant si longtemps. Il ouvrit la bouche et la referma immédiatement, ne sachant pas quoi dire devant cette rencontre aussi impromptue que surprenante.... ahurissante même.

Le monde était définitivement petit. D'abord Eliowir, maintenant Roëric ? Devait-il se considérer comme chanceux ou non ? D'instinct, il n'aurait parié ni sur l'un, ni sur l'autre... En fait, la vie semblait bondir de blague en blague avec une ironie sans doute trop mordante pour qu'il y goûte pleinement. Pendant des années, il avait tenté de retrouver ce vampire auquel il s'était, dans sa jeunesse, attaché avec détermination, comme un crustacé à son rocher. A chaque été qui lui été attribué pour chasser, il s'octroyait le droit de fouiner de droite et de gauche pour tenter d'avoir des nouvelles du Maître-Lame, quitte à user d'un peu de persuasion auprès des suceurs de sang ayant le malheur de lui tomber sous la main... Non, il n'avait jamais crut Roëric mort, loin de là, l'épéiste était exactement le genre de carne qui résisterait à tout et toujours... donc il n'avait put que disparaître, et donc, fatalement, il avait été quelque part en Armanda, à moins qu'il ne lui soit subitement poussé des branchies et qu'il ai décidé de rejoindre les octopodes sous les mers. Et ça, il n'y croyait pas plus qu'à sa mort.

Jusqu'à présent cependant il n'avait rien obtenu de concret, quant bien même il n'avait pas ménagé ses efforts. Hors subitement, il était là, devant lui, bien vivant, et apparemment en bonne santé. Certes c'était parfait... mais c'était également ahurissant de penser que, pour une fois qu'il ne le cherchait pas, il lui tombait dessus... et qu'il l'interpelle comme ça, comme si il n'avait pas disparut un beau matin sans prévenir. Lui en coller une le démangea un bref instant à cette idée, et pourtant ce n'était rien comparé à l'océan de perplexité et de surprise qui l'avait saisit soudainement.... Qu'est-ce qu'il faisait là exactement ? Et en compagnie de cette... créature à écailles. Un dragon ? Pourquoi un dragon, à moins que, parmi tout les Armandéens, cette chose ai décidé de se lier avec son presque père ? Ironie, ironie... toujours ironie. Il détestait cordialement les dragons, mais le vampire c'était une autre histoire... C'était Roëric, et pour tout le temps qu'il l'avait observé, il ne pouvait lui cracher dessus, impossible. Il le respectait beaucoup trop pour ça...

« Seize »

Un unique mot lâché à retardement comme à son habitude. Étrangement, cela ne le dérangeait pas plus de se voir appelé gamin par le vampire... il était des centaines de fois plus vieux que lui après tout, et puis bon... ce n'était pas comme si ils ne s'étaient pas réellement connu quand il était un gamin. Mais plus que cela, il ne savait plus comment réagir, face à lui... c'était trop inattendu. Et pourtant, il ne pouvait le laisser filer sans rien dire ! Il ne l'avait pas vu avec la délégation vampirique, il n'était de toutes évidences pas un affin de l'autre malade mental. Et si il avait bien comprit, les dragonniers avaient été prévenu en même temps que les souverains de la réunion, pourtant il voyait mal Roëric avec Gregorist Kohan ou même la végétarienne... il ne se souvenait jamais de son nom, mais ça n'avait pas d'importance, ces elfes avaient tous des noms semblables et feuillus. Donc il avait forcément été prévenu par une autre source... Et comme il n'avait pas l'intention de lui sauter à la gorge pour lui demander où par Dracos était-il passé toutes ses années et pourquoi l'avait-il planté sur place, il fallait bien qu'il trouve une alternative.

«  Ça va. Je suis prisonnier » Oui bon d'accord dit comme ça c'était légèrement paradoxale. Oui oui tout va bien je suis enfermé dans un domaine elfique, avec des vampires me prenant pour ton descendant, et sur le point de devenir chèvre... rien d'insurmontable ! j'ai l'habitude ! Ça serait pas pire qu'avec Kedrildan ! «  Toi ? » Il se tourna légèrement vers le dragon, l'observant avec circonspection, et une méfiance plus qu'évidente. «  Ton dragon... » C'était moins une question qu'une affirmation. Les dragons prenaient rarement le thé avec les bipèdes, donc ça ne pouvait être que cela... et pour continuer sur cette lancée il affirma de sa voix peu usitée «  Tu n'es pas venu pour leurs négociations.... »

Un dragon. Non… une dragonne. Roëric avait dit « ma liée » et pas « mon lié ».. Dragonne donc, encore pire pour lui. C’était une dragonne qui s’en était prise à sa lignée, à son ancêtre… il n’aimait pas les dragons et encore moins les dragonnes. Pouvait-il seulement apprécier, un tant soit peu, cette créature-ci ? Juste parce qu’elle était liée à son mentor, au seul vampire qu’il appréciait et ne tuerait pas ? Il ne s’y connaissait pas bien en dragon, sans doute encore moins que les sudistes puisqu’au nord l’on se méfiait plus de ces géants ailés qu’on ne les adorait… ils étaient dangereux, égoïstes et arrogants, voyant les bipèdes comme des inférieurs. Des inférieurs ! Comment pouvait-on oser ! Ils étaient eux-mêmes loin d’être blanc comme neige ! Mais s’il n’aimait pas les dragons et qu’il était du genre franc, il n’était pas non plus stupide.

« Isyndar… je suppose que je devrais être enchanté »

Il devrait, mais ne l’était pas vraiment. Le seul point positif qu’il y avait sans doute à sa présence était le fait qu’en effet les bouffeurs de fougères risquaient de ne rien refuser à un dragon… si même quelqu’un d’autre que son surveillant se souvenait qu’il existait. Repartir avec Roëric ? Voilà une riche idée. Ça lui plaisait, au moins à court terme. A long terme il devrait obligatoirement retrouver son armée et mener les batailles contre les alayiens… si les autres seigneurs étaient tous capables de le remplacer, cela restait son devoir et un gage de son honneur et de sa fierté. Il ne pouvait simplement abandonner les siens, quand bien même on semblait soudain lui offrir la réalisation de son souhait le plus cher : repartir vaquer dans les terres sauvages en compagnie du vampire. Il l’avait souvent voulut ces dernières années, en particulier après la mort de sa femme… sans jamais le réaliser.

« Si je peux quitter cet asile de fou, ce sera avec plaisir »

Il s’arrêta. L’affirmation était sortie toute seule. Il n’avait pas voulu dire ça, mais ça correspondait parfaitement à ce qu’il pensait…. Alors tant pis. Il prenait vraiment cet endroit pour un asile de fous de toute façon. Il avait largement eut le temps de le constater… Il préférait de loin partir avec le vampire. Au moins il savait ce qu’il l’attendait et ça lui allait parfaitement. Il ne le voyait guère participer aux négociations d’ailleurs, aussi apprendre qu’il n’était pas là pour ça et n’était donc pas tombé sur la tête, était une bonne chose et un intense soulagement. Si même le Maître-Lame se mettait à marcher sur la tête où le monde allait-il hein ?

« Oui, c’est au sujet des Alayiens, mais tu ne rates rien. Ils perdent leur temps »

Et le sien avec, ce qui était criminel. Il avait une armée sur le feu et une guerre à gagner, nom de dracos ! Il était censé diriger les nordiques depuis ces bois ? Bien sûr que non ! ils se fichaient de ce qu’il pouvait avoir envie de faire, ou de ce qu’il devait faire, tout ce qui importait c’était cette farce ridicule au sujet d’une alliance… répugnant de bons sentiments, de mièvrerie et surtout d’imbécilité. Bon certes les alayiens étaient un sérieux problème et il se sentait concerné, lui, contrairement au vampire, mais l’idée d’un alliance avec les elfes et les vampires lui était proprement intolérable. Silencieux, il écouta la suite et s’assombrit un bref instant avant d’affecter un sourire de loup carnassier…

«Misérable oui. Je n’ai jamais aimé les chaînes… » Roëric avait tapé là où ça faisait mal, mais le loup savait qu’il avait parfaitement raison, ayant eu les mêmes pensées. « J’étais à la tête du nord jusqu’à récemment. Quelques jours en fait. Nous étions venu pour soulager l’armée impériale face aux alayiens…. J’ai mené dix milles soldats jusqu’à Gloria… Ils poursuivent mes ordres là-bas. J’effectuais une mission spéciale en prenant contact avec les Alayiens près de la forêt elfique lorsque je suis tombé sur des éclaireurs vampiriques. Ils ont tués les deux hommes qui m’accompagnaient, et je tenais à leur rendre la pareille… »

Le souvenir restait relativement amusant, après coup « Malheureusement leur prince n’est pas particulièrement doué pour faire la serpillière, et encore moins pour faire le tremplin. Il a assez mal prit que j’en fasse l’essai. J’ai été capturé et je me suis servis de ton nom à la place du mien… l’autre malade m’a pris pour ton descendant et voulait me faire jouer l’appât jusqu’à ce que l’un de ces végétariens décide de soulager sa conscience en exigeant qu’on laisse les prisonniers aller comme bon leur semblent sur le domaine… » Il haussa les épaules « C’est à peu près tout. Trois fois rien comme tu vois. Je n’ai pas vu ton employeur, mais je peux sans doute te guider si ça t’intéresse… je commence hélas à avoir fait le tour du propriétaire »

Il surveillait toujours la bête écaillée du coin de l’œil, cachant à peine sa méfiance sans se soucier le moins du monde de vexer quelqu’un. Et puis la dragonne était la liée de Roëric elle devait avoir l’habitude d’être traité de cette manière. Lui faisait avec, elle pouvait bien faire de même. Cependant, au vu de son comportement des plus passif, il acceptait, certes de mauvaise grâce, de se détendre quelque peu. Au moins elle ne puait pas l’arrogance à des centaines de lieux comme certaines autres, quoi qu’étant dragonne elle le cachait peut-être simplement mieux que ses confrères. Il écoutait cependant d’une oreille très attentive ce que racontait son hémoglophage de mentor. Certes, ça correspondait très bien à Wintel, cette citation, quoi qu’il ne lui fasse pas particulièrement peur… Non, le prince vampirique si puissant qu’il fut était si suintant d’un tas de complexes attendu et usités qu’il en était presque pathétique. Et puis c’était un mage, il ne pouvait guère respecter ou craindre un mage. Mais il était un cas à part il fallait l’avouer, et les pauvres troupiers de l’armée impériale qui attendaient d’être protégés par leurs mages avaient toutes les raisons du monde de le craindre, tout comme les paysans des campagnes humaines… Et puis, quel général et guerrier n’avait pas usé d’un tel outil au moins une fois dans sa vie ? Qu’on lui affirme qu’un seul d’entre eux ne se jouait pas d’intimidation, et il leur attacherait un boulet au pied avant de les lancer dans l’océan de peur qu’ils soient devenu complètement cinglés. Il y avait bien assez de malades mentaux courant joyeusement les bois sans qu’on en rajoute. Mais mieux valait ne pas dire tout cela trop haut, à tout coup il allait encore vexer quelqu’un… probablement pas le couple qu’il avait sous le nez, mais quelqu’un. On finissait toujours par vexer quelqu’un ici de toute façon, en marchant sur un buisson sacré par exemple… De quoi abandonner le bon sens pour la folie.

Ils avaient tous les deux fait du chemin, il fallait le croire, mais hélas il n’avait pas tort, ce vampire… Il avait effectivement eut une autre idée en tête, simplement celle d’échapper aux alayiens qui essayaient d’en faire l’un des leurs, mais il n’avait pas eut de meilleur plan sur l’instant que de se faire capturer. Bon si ça avait put être des humains il n’aurait pas dédaigné le confort, mais tant pis, le passé était le passé et il n’avait nullement l’intention de recommencer ce genre de petites blagues pour le moment. Une fois suffisait amplement, d’autant qu’il allait enfin pouvoir s’en aller, en compagnie de Roêric qui plus est. Ce n’était pas une stratégie à proprement parlé, mais c’était le plus proche qu’on lui avait offert à l’instant et il ne rechignait pas à avouer que faire du trempoline sur un vampire était une expérience à faire au moins une fois dans sa vie… De nouveau, il hocha la tête pour signifier son accord. C’était presque amusant de voir qu’il lui faisait la leçon même après tout ce temps, et même si il savait déjà ce que le maître lame lui indiquait, il ne manquait pas de priser le fait qu’il dépense sa salive pour lui. « Oh j’aurais pourtant juré le contraire » Certes, il faisait dans l’ironie. Il avait cru comprendre de façon fort… profonde, que Wintel n’appréciait pas son mentor. Il avait des arguments frappant pour convaincre les sceptiques. Tant pis pour le soit disant prince, ça lui ferait les pieds que de perdre une ou deux fois. Se tournant vers la dragonne il fit un effort pour éviter de la fusiller du regard… « C’est pour le mieux… et bien venez »

Sans un mot de plus, il leur fit signe de le suivre et se dirigea vers le sanctuaire de l’air, où logeait les humains. Il ne savait pas vraiment pourquoi Roëric voulait aller là au lieu du sanctuaire du feu et des vampires, enfin si, il cherchait probablement un humain, pourquoi il ne le savait pas encore mais bon. La marche était relativement longue, ils se trouvaient dans le coin le plus reculé de la bordure des plaines après tout… « Ton employeur est marié à une humaine ? Parce que si c’est le cas, je ne suis pas certain que tu trouves ton bonheur avec la délégation. Les seules femmes humaines qu’il y a ici ce sont les dames de compagnies de la princesse Kohan et leur maîtresse…. » Il s’arrêta de nouveau en lui lançant un regard acéré. Non tout de même pas… ? « … c’est elle ? »

Il le mirait avec insistance, attendant la réponse avec patience. Oh elle l’intéressait, précisément, elle l’intéressait énormément. Cela déterminerait si il devait causer un incident diplomatique sur le domaine ou pas. Et il était tout prêt à le faire si besoin, se fichant bien de ce que les autres pourraient en penser ou s’en offusquer. S’il avait dû prendre en compte la délicatesse de chacun en agissant, il n’aurait vraisemblablement jamais rien fait. Non, il vivait très bien en sachant qu’il froissait régulièrement le reste du monde. Les plus sensibles pouvaient s’en aller loin de lui sans retour, il n’allait pas s’en lamenter. Quand à ceux qui restaient, ils devaient être assez solides pour supporter sa façon d’être. Il y eut un instant de flottement clair cependant, durant lequel il étrécit ses yeux, ne laissant que deux pointes luisantes et inquisitrices ; Et bien ? Cette réponse ? Elle venait ou il devait aller la cherche lui-même ? Elle vint… juste à temps devrait-il dire. Et il se détendit légèrement, l’examinant sans se cacher. Certes, ce qu’il disait n’était pas dénué de sens, mais il en avait assez vu par ailleurs pour savoir que les couples de toutes natures existaient bels et bien et dans toutes les couches de la population ou presque… et puis, il avait hésité avant de lui répondre. Hors si vraiment il se faisait des idées, il n’y avait aucune raison d’hésiter à renvoyer la balle. Non ? Son instinct flairait l’embrouille, mais il respectait au demeurant trop Roëric pour le traiter de menteur. Si vraiment il lui cachait quelque chose, c’était qu’il avait une raison de le faire, et il préférait l’obtenir avant de faire quoi que ce soit.

Il n’insista pas, les conduisant effectivement au sanctuaire de l’air et leur faisant faire le tour du propriétaire, leur laissant le loisir de chercher et trouver ce qu’ils désiraient, en vain, apparemment. Lui-même rendait les regards de mépris que les humains lançaient à son mentor, non qu’il le défendit, Roëric était assez grand pour le faire lui-même, mais c’était des sudistes mollasson qui réagissaient comme des animaux. Il n’avait aucun respect pour ce genre d’individus. Et il fut presque aussi ravis de quitter les lieux que d’avoir laissé le chanteur elfique derrière lui. Ils se concertèrent alors quelques instants, et si Havard aurait bien préféré rester avec le vampire il avait effectivement en tête d’examiner les lieux avec soin, il devait réunir autant d’informations que possibles avant de prendre la poudre d’escampette… Il devait également convaincre les chanteurs de le laisser partir, chose qui ne serait pas bien difficile. Aussi, il regarda simplement le vampire s’éloigner, en silence, avant de lancer un dernier regard à la dragonne et partir de son coté….