Des bagarres... Des tensions. Lorenz s'était attendu à tout cela, il savait que les vampires n'étaient pas des créatures faites pour vivre toutes ensembles et pour avoir une vie sociale. Il leur était très difficile de ne pas s'entretuer lorsqu'ils devenaient nombreux, ça avait été la raison de leur défaite il y avait de cela bien longtemps. Et à présent, les tensions renaissaient, cela ne l'étonnait pas car après tout ils étaient sur le point de doubler leur nombre. Il ne doutait pas de parvenir à maintenir le calme et à gérer ce genre de chose, mais Dracos ce que c'était ennuyeux !
Pour la troisième fois de la nuit, il avait dû sortir rapidement de sa tente pour calmer deux acharnés qui avaient la ferme intention de s'entretuer mutuellement. Son apparition avait instantanément ramené le calme mais il savait qu'à la première occasion, la dispute reprendrait. Pourtant ce n'était pas faute pour eux de manquer d'occupation... Ils passaient leur temps à lancer des raids sur le villages humains, il fallait croire que ce n'était pas suffisant.

Ruminant sa colère, l'ancestral reprit le chemin de sa tente. Plus vite qu'il ne l'aurait cru d'ailleurs, le problème s'était réglé rapidement et c'était tant mieux car il avait laissé tout son travail stratégique en place en partant. Il allait avoir du mal à s'y remettre et pourtant il fallait bien qu'il décide des prochaines cibles que les vampires allaient attaquer et du meilleur moyen pour eux d'éviter les patrouilles impériales !
C'est à ces patrouilles qu'il pensait et à la position qu'occupait actuellement le gros de l'armée de l'empereur Kohan lorsqu'il arriva devant son antre. Il tomba aussitôt en arrêt devant le garde, détruit ? Non... Endormi...
Qui pouvait bien oser visiter sa tente ainsi ? Et pour quelle raison ? Les plans qu'il avait laissé sur la table peut-être... Oui, il ne voyait que cela. Et bien l'intrus n'aurait pas le temps de vraiment en profiter ou d'analyser ce qu'il avait vu, foi de Lorenz ! Et les vampires en charge de la garde du camps allait en entendre parler, comment diable un intrus avait-il pu se glisser dans le campement ? C'était d'autant plus grave qu'il n'était peut-être pas seul et qu'il était possible qu'il ai envoyé un messager appeler l'armée humaine pour raser ce camps stratégique. Le temps pressait...

Il laissa le garde à terre, ne souhaitant pas prendre le risque d'alerter l'intrus en le réveillant. De même il n'appela personne, sachant qu'il serait largement de taille à faire passer un sale quart d'heure à son espion. Il serait temps de faire bouger tous le monde et de déplacer le camps dès que l'autre serait mort. A pas de loup, il pénétra dans la semi obscurité, s'y fondant comme l'ombre qu'il était... Ses yeux nyctalopes crevant le noir sans effort, il n'eut pas de mal à trouver son adversaire qui se tenait de dos. En moins de quelques secondes et dans un silence de mort, il se faufila derrière lui. Il le tenait à sa merci... Sans doute mu par son instinct, l'autre se retourna... L'elfe !

« Il semblerait que je soit forcé à la clandestinité pour une simple visite, on m'a éconduit lorsque j'ai émit le souhait de vous parler Y Blewidr aussi ai je décidé de m'autoriser moi même à entrer à défaut d'avoir une explication ».

Silence... Le vampire fixe son intrus. Est-il fou ? N'a-il pas compris à quel point sa situation au sein des vampires est précaire ? Ne sent-il pas la haine féroce que lui voue Lorenz rien que pour son appartenance au peuple elfique et au clan baptistrel ? Ne comprend-t-il pas qu'il pourrait le tuer, là... Oubliant toute retenue et tous ses plans rien que pour une seconde, rien que pour le plaisir de plonger les mains dans ce sang détesté ? Pourtant, l'ancestral ne bouge pas. Faisant preuve une nouvelle fois d'une maitrise extraordinaire et attendant d'en entendre plus avant de prendre une quelconque décision. Ses yeux d'ordinaire si inexpressif brillèrent d'un certain dédain lorsque l'autre continua, avait-il bien compris ? L'autre était-il là vraiment pour en savoir plus sur lui ? Il cherchait à... Le connaître ? Lui ? Décidément, sa première impression avait été la bonne : cet elfe était fou à lier.

Un geste... Un mouvement. L'autre a pensé fugitivement à s'approcher, mais instinctivement le vampire s'est figé en une attitude défensive. Il est sur son territoire, et la violation de territoire est une chose grave pour de telle créature, de même que pour Lorenz la violation de son esprit est la pire de toutes les fautes. Comment pourrait-il supporter qu'un être quel qu'il soit tente d'en apprendre plus sur lui, sur son passé, sur sa façon de penser ? Le tuer là ? Tout de suite ? C'est sans doute le mieux, le meilleur moyen de calmer la hargne profonde qu'il ressent en voyant ces oreilles pointues, ce teint pâle, cette silhouette aérienne. Un elfe... Rien que pour cela, il n'avait pas le droit de vivre. Il serait si simple... Si simple d'appeler sa magie, brusquement et sans prévenir. De faire apparaître ses lames, lames elfiques pour un cœur elfique qu'il percerait sans remords. Mais ce n'était pas possible, pas encore... Il avait trop attendu pour prendre le risque de ruiner tous ses plans maintenant, il avait besoin de Eliow. Cet elfe payerait son impudence à un moment ou à un autre, en attendant il devait jouer finement...

Il cachait sa haine avec talent, se jouant de ses sentiments et disciplinant son visage de par sa longue expérience et son entrainement de tous les instants. Il n'était pas un brillant politicien pour rien, et c'est donc avec prudence qu'il parla :

« Tu es bien imprudent Baptistrel, et tu connais bien peu les vampires pour penser que tu peux t'infiltrer ainsi chez eux sans risquer de le payer cher. N'as-tu jamais entendu parler de l'instinct du territoire chez mon peuple ? Je n'empêcherais pas mes créatures de te tuer si tu oses les provoquer ainsi, ce ne sera que justice et Eliow lui-même aurait bien du mal à trouver les arguments pour s'y opposer... »

Une voix calme et sans timbre, il se contrôlait mieux encore qu'il ne l'aurait espéré. Décidé sur sa ligne de conduite, il se glissa souplement vers la table où étaient encore étalées toutes ses cartes, les roulant hors de la vue de l'elfe sans chercher à cacher sa méfiance. Son regard d'acier se perdit ensuite dans la pièce et tomba sur l'objet de métal que tenait l'elfe et qu'il avait cherché. Ses sourcils se froncèrent, cette note n'avait aucune importance en elle-même mais il détestait voir ainsi un être tier pénétrer sans son intimité. Un souvenir diffus l'effleura, le craquement d'une branche, le sifflement pervers d'une dizaine de flèche et la douleur insupportable, plus mentale que physique... Sa haine pour l'elfe remonta furtivement en lui, il dû réprimer son envie de dévoiler ses crocs et parla pour faire diversion :

« Je quoi ? Tu connais l'histoire de ton peuple baptistrel, tu n'as pas besoin de connaître la mienne pour savoir que nous avons toutes les raisons du monde de vous haïr. Nos deux peuples sont des ennemis naturels, c'est ainsi. Avant de chercher à nous connaître, tu devrais déjà penser à ce que nous serions capables de te faire si tu n'étais pas sous la protection d'un dragonnier. Tu ne peux rien contre l'animosité instinctive qui lie les elfes et les vampires, tu la subiras un jour ou l'autre. C'est ainsi... »

Ou comment expliquer sans expliquer, il excellait dans ce genre de pirouette diplomatique. Il donnait une raison valable à l'autre pour expliquer sa haine, pour autant il ne se découvrait pas. Personne jamais, ne connaitrait son histoire. Elle était enfermée au fin fond de son coeur mort, une douleur que le temps n'éteint pas et que le sang seul peut encore rassasier. Un souvenir encore... Un visage... La douleur...

« Et toi elfe ? Pourquoi ce questionnement ? Pourquoi ne pas simplement suivre tes instincts et tenir loin de nous tous ? Aimer un vampire pour un elfe... Cela relève de la fiction, peut-être même de l'automutilation... »

S'intéresse-t-il à l'autre ? Pas vraiment... Il veut simplement faire diversion et porter l'attention sur son interlocuteur plutôt que sur lui-même. Encore une stratégie, encore son expérience. Les êtres aiment parler d'eux même, le meilleur moyen de ne pas parler de soi-même reste encore de faire semblant de s'intéresser à l'autre. Et puis, il est tout de même curieux. Connaître son adversaire était une autre stratégie qui pouvait s'avérer payante...

Un discours... Aussi long que les monologues plus ou moins enflammé qu'il avait l'habitude de faire devant le conseil, se jouant de leurs arguments, brisant leurs défenses, retournant les situations... Cet elfe savait parler lui aussi, dommage qu'il soit si ennuyeux...
L'ancestral s'autorisa un demi sourire ironique, le détruire vraiment ? C'est ce qu'il avait voulu ? Sans doute aurait-il mieux fait de tenter directement, cela aurait au moins donné une bonne raison à Lorenz de débarrasser la planète de son infecte présence. Dommage qu'il ai changé d'avis...
La suite l'agaça, c'était typique des baptistrels que de chercher à tout instant des excuses aux agissements de chacun, des raisons à tout et à n'importe quoi, la douceur là où il n'y avait que dureté et ressentiment. Il lui jeta un regard furieux, mécontent de voir que malgré tout ses efforts pour le dégoûter, l'autre ne reculait pas et continuait de chercher à en savoir plus sur lui et sur son passé, sur les raisons de sa haine... Apparemment l'explication sur l'animosité naturelle entre les vampires et les elfes ne lui avait pas suffit, Dracos ce qu'il était ennuyeux !
Et apparemment il n'avait pas encore atteint son niveau maximal... Il n'eut pas le temps de réagir, que déjà l'elfe s'était approché et avait posé la main sur son épaule, sa chaleur interne consuma littéralement le vampire dans sa propre rage. Comment osait-il ?

« Ne comprenez vous pas... ne voyez vous pas.... pourquoi sir, pourquoi cela... si seulement vous pouviez voir... ne vous souvenez vous donc pas de tout nos chants... »

Si il se souvenait ? L'autre ne croyait pas être si loin de la vérité, contrairement à la majorité des vampires, Lorenz connaissait son passé. Il avait eu bien assez de temps pour retrouver toute sa mémoire perdue lors de la transformation et il lui avait de toute façon fallu faire des recherches afin de comprendre d'où lui venait la douleur, lorsqu'il était encore un jeune vampire. A aucun moment il n'avait oublié cette douleur, à aucun moment il n'avait oublié le visage, SON visage. Et en très peu de temps, il était parvenu à se rappeler de tout de façon très exacte, en particulier de ses derniers instants en tant qu'elfe. Oh que non, il n'était pas près d'oublier et sa réponse fut presque un grondement inhumain :

«Je n'ai rien oublié, j'ai tout mes souvenirs. »

Réponse laconique qu'il ne chercha pas à éclaircir plus que cela, il n'avait pas besoin de raconter sa vie ou sa non vie à ce gars là, d'ailleurs il ne voyait pas en quoi sa longue quête pour retrouver tout son passé pouvait être vraiment intéressant, pour tout dire cela avait été plutôt ennuyeux comme travail. Un long labeur plutôt douloureux qu'il préférait oublier, paradoxalement.

L'autre s'était mis à chanter, au grand désespoir de Lorenz qui ne supportait absolument pas les chants en particulier baptistrels. Beaucoup de bruit pour pas grand chose, il détestait le bruit. Et les larmes... Alors ça c'était le summum de ce qu'il pouvait détester, quoi de plus inutile que les larmes franchement ? Quoi de plus pitoyable ? Une nouvelle fois, il pensa à le tuer sur place, pensant ironiquement qu'il ferait peut-être preuve de pitié en mettant un terme à ses souffrances. Non mais franchement, il ne pouvait pas choisir un autre être qu'un vampire pour aller pleurer comme un nourrisson ? Et surtout, mais alors surtout pas leur prince. C'était d'un ridicule franchement...
Et lui ? Avait-il déjà pleuré ? La question était intéressante... Il était difficile d'imaginer Lorenz perdant le contrôle de ses émotions, c'était presque... Inconvenant.
Mais pourtant oui, comme tout être en ce monde sans doute, il avait déjà senti les larmes couler sur ses joues. Très peu en fait, car dès sa plus tendre enfance il avait appris à se forger cette carapace indestructible qui le caractérisait et même dans les pires moments, il avait toujours réussi à contenir le bouillonnement parfois terribles de ses émotions. Même à ce moment là... Même dans cette terrible seconde où les flèches avaient transpercé son aimé et ou le venin avait brulé son sang, il n'avait pas craqué. C'est à ce moment là qu'il avait apprit le secret, cette méthode parfaite pour ne jamais se laisser aller à la faiblesse : la haine... La haine le soutenait et rendait la souffrance moins puissante. Oh, pas supportable bien sur... Cela ne se pouvait, mais acceptable. Sans sa haine et ses projets de vengeances, il n'aurait eu aucune raison de se hisser là où il était aujourd'hui.
Il s'était tellement plongé dans sa réflexion et dans ses souvenirs, qu'il en avait quasiment oublié l'elfe. Il retomba sur terre brusquement, replongeant ses yeux d'acier dans ceux pleins de larmes de l'autre :

« Laissez moi le voir.... laissez moi voir ce qui vous a fait si mal je vous en supplie, je ne suis pas votre ennemi, je ne suis pas là pour vous menacer, tout ce qui m'importe c'est de faire mon devoir... vous êtes un enfant du monde vous aussi, la terre pleure sous vous pas, elle pleure de voir son fils tombé dans les ténèbres... elle vous aime, autant qu'elle aime tout ce qui est d'elle... »

Que disait-il ? Encore un peu déconcerté par tout ceci, l'ancestral n'avait pas tellement suivi. Il lui fallu un instant pour réaliser où il était et dans quelle position. L'elfe lui glissa l'objet de métal dans la main, et il senti à nouveau la chaleur de son corps, de son sang, il entendit les battements de son coeur et se souvint brusquement que le temps de la forêt était depuis longtemps révolu. Il était un vampire, avec tout ce que cela impliquait et il ferait payer les elfes de tous leurs méfaits, à commencer par le meurtre de... Il ne voulait pas prononcer son nom, il ne l'avait pas prononcé depuis sa transformation, depuis la mort et la douleur... Depuis très exactement huit-cent dix année et trois mois... Si il ne s'en empêchait pas il serait sans doute capable de compter les jours... Mais il ne devait pas se laisser aller à de telles faiblesses, elle lui avait demandé vengeance elle-même, elle serait vengé. Même si cela devait prendre encore huit-cent autres années, huit cent mille ne suffirait pas à faire tomber sa rancoeur. Il réalisa qu'à nouveau, il s'était laissé aller à ses pensées et à ses noirs souvenirs. Il répondit avec dureté :

«Il n'y a rien à voir, le peuple elfique payera pour ses crimes et sa détestable arrogance, quiconque s'y opposera subira ma colère. Quand à la terre elle peut pleurer, elle ne s'est pas opposé aux actes des elfes, pourquoi s'opposerait-elle aux miens ? Le vent fini toujours par tourner et les elfes vont l'apprendre à leurs dépends, leur âge d'or est passé, le prochain sera celui des vampires. J'y veillerais. »

Il se tut, persuadé d'avoir tout dit et se détourna pour ranger le morceau de métal qu'il tenait toujours à la main. L'autre allait partir à présent, que pouvait-il ajouter à cela ? Rien sans doute... Il ne connaitrait jamais l'histoire de l'ancestral, celui-ci l'avait enfermé bien trop profondément dans son conscience et rares étaient ceux qui s'en souvenaient encore. Il ne l'oublierait pas bien sur, mais au moins il éviterait de raviver la douleur... La vengeance serait un baume apaisant pour ses cicatrices...

Il fallait qu'il retombe sur terre, son égarement était dangereux. Il le sentait, l'autre cherchait à en savoir plus et pouvait peut-être même utiliser ses pouvoirs, il fallait qu'il cesse de se laisser aller à ses souvenirs. En fait il valait mieux qu'il le congédie, d'ailleurs il ne comprenait pas pourquoi il ne l'avait pas déjà fait. Que faisait-il à le toucher ainsi ? Etait-t-il fou ? L'ancestral était trop abasourdi pour vraiment réagir, il en était à se demander jusqu'où l'autre irait et jusqu'où lui même pourrait se contenir avant de faire exploser tout le campement rien que par la force de sa fureur.
Il allait lui dire, lui ordonner de quitter ce lieu. Pourquoi ne pas l'avoir déjà fait ? Mais l'autre repris la parole avant, comment osait-il l'appeler frère ? Lui qui faisait partie de cette race ennemie de la sienne, cette race qui était son ennemi personnel ? Il ouvrit la bouche à nouveau pour le couper mais l'autre se tût de lui-même, il semblait avoir un malaise. L'ancestral se figea, ne sachant trop qu'en penser. Il semblait si fragile cet elfe... Ridiculement fragile, allait-il mourir là ? Serais-ce une bonne chose ? Il n'en était plus si certain, et puis d'abord comment expliquerait-il cela à son dragonnier hein ? Déjà si il l'avait tué lui-même ça aurait été compliqué mais alors le convaincre qu'il était entré dans son antre et était mort sans qu'il ne l'ai touché... Carrément improbable. On ne le croirait jamais... Cette situation était décidément des plus insolites.
Puis ce regard brillant... Et le coup de massue. Il savait... Il devait mourir.

« Aimer un vampire pour un elfe cela relève de la fiction avait vous dit... sauf pour ceux qui l'ont vécu n'est ce pas... vous n'êtes pas si différent de moi au fond, j'ai l'impression de voir un reflet en négatif... Une femme ou un homme sir ? Vous avez été transformé de votre plein grès ? Quoi qu'il en soit je croit que je comprend mieux votre vendetta contre notre peuple... »

Immobile comme une pierre, il luttait pour discipliner son esprit et son corps. Et l'autre qui parlait encore et encore, chacune de ses paroles étaient comme un venin pour un vampire qui s'était bien trop éloigné de toute forme de douceur pour être encore capable de la supporter. Il parlait, parlait, et ne s'arrêtait pas. Ses mots n'avaient pas de sens dans l'esprit de Lorenz en ébullition, satané Baptistrel... Il maudissait leur ordre devant tous les esprits inférieurs et supérieurs réunis.

Voilà qu'il s'approchait maintenant, qu'il levait la main... Les muscles du vampire étaient durs comme de la pierre, il était prêt à tuer à la seconde où la chair vivante l'effleurerait. Qu'il ose seulement et il ne resterait de lui que cendre et poussière... Mais la main retomba, tiens... Il y avait des limites à sa folie... Il y en avait aussi à sa patience, cette fois il avait été trop loin. Les êtres connaissant son histoire était très peu nombreux sur cette terre, la plupart étaient morts de vieillesses, d'autres sous sa main. Une chose était certaine, il ne tolérerait pas qu'on en sache autant sur lui sans mourir. Sa décision fut prise en une seule seconde, dans la suivante ses dagues apparaissait dans ses mains, avant la fin de cette deuxième seconde il les tenaient sous la gorge de l'elfe...

«  Je... Je suis prêt à... Je suis prêt à porter votre haine si vous le souhaitez. Je n'ai pas peur de souffrir... pour Eliow, pour ceux qui peuvent être laisser en vie, ce n'est pas cher payé.... pour vous aussi sir, si vous le souhaitez.... »

Qu'avait-il dit ? Il avait été trop concentré sur son geste pour écouter ce que l'autre lui disait juste avant l'apparition des dagues elfiques. Avant d'entendre ces mots, il avait été sur le point de trancher directement la carotide sans plus de réflexion. Mais à présent que l'autre s'offrait en sacrifice de façon aussi idiote... Paradoxalement, cela bloqua son geste.
Une ombre passa dans son regard tandis qu'il fixait sa proie, la jaugeant en silence. Jamais il n'avait autant douté de toute sa vie, il n'aimait pas douter... Ce n'était pas une chose qui lui ressemblait, et c'était désagréable.

Sa mâchoire se serra, un mince filet de sang coula de la gorge de l'elfe lorsqu'il appuya lómë contre elle. Pourquoi cette hésitation ? Il ne devait rien à cette créature, et elle connaissait son secret... Enelya... C'est ainsi qu'elle s'appelait. Le souvenir était douloureux, cet elfe méritait toute sa haine pour avoir osé raviver ce souvenir brûlant. Qu'aurait-elle fait dans ce genre de situation ? Qu'aurait-elle voulu ? Il ne le savait plus... Pourtant, il l'avait toujours su.
« Laisse moi te donner les armes pour leur faire payer. », ça avait été sa dernière phrase. Elle l'avait rendu fort, et c'était par cette force qu'il comptait la venger. Pourtant à cet instant... Ce n'était tout simplement pas possible...

« Dehors... Ne m'approche plus jamais ou je serais obligé de te tuer. »

Les lames s'écartèrent, le regard acier se détourna de la marque sanglante sur la peau pâle. Il avait parlé avec calme comme toujours, mais pas du même calme maitrisé dont il avait l'habitude. Cette fois, il l'était véritablement, il n'avait jamais été aussi calme.

« Tu ne peux rien pour moi, mon mal est au delà de tout remède. Concentres toi sur Eliow, peut-être que votre lien échappera à l'inévitable. Je vous le souhaites, mais je ne changerais pas mes objectifs. »

Il le fixa à nouveau sans détour, cette fois il ne permettrait pas une nouvelle discussion. Il attendait que l'autre sorte et il ne ferait pas disparaître ses armes avant cela, il attendit d'avoir vu son interlocuteur reculer avant de conclure :

«Et si tu parles de ce que tu as ressenti ici, tu meures... »