10 janvier de l'An 7

La journée touchait à sa fin et, lentement, le soleil commençait à décliner dans le ciel. Bientôt, il laisserait sa place à la lune, qui veillerait sur les noctambules.

Après avoir passé la journée à Estëllin, la princesse Ataliel devait se rendre au corps des gardes, étant de service pour la nuit. Celle-ci quitta donc le Palais Impérial en toute discrétion grâce aux galeries, connues uniquement des Rôdeurs, afin de se rendre rapidement où elle le souhaitait. Arphen, son fidèle compagnon, se trouvait sur ses talons.
Se rendre au corps des gardes demandait tout de même un certain temps, celui-ci se trouvant bien en dehors d'Estëllin. Toutefois, avec la neige qui s'était accumulée à la surface, passer au travers de la montagne était bien plus pratique. Le rythme d'Orfraie ne tarda guère, par ailleurs, à s'accélérer jusqu'à ce qu'elle se mette à courir, l'husky suivant la cadence sans mal. Le chemin menant au corps des gardes était en perpétuel descente, celui-ci se trouvant bien plus bas que le troisième étage d'Estëllin, mais la pente restait douce et en une quinzaine de minutes, la Princesse parvint à destination

Soudainement, Orfraie vit la lumière au bout du tunnel. Sachant qu'elle était arrivée, l'Elfette ralentit, sa respiration retrouvant un rythme normal. Ce n'était, toutefois, pas le cas d'Arphen dont la langue pendouillant prouvait qu'il avait chaud, sous son épais pelage blanc. Celui-ci émit un joyeux jappement lorsqu'il croisa le regard amusé de sa maîtresse, la gemme de vivacité solidement accroché à son collier rendant ce genre de comportement "humanisant" possible. Le bruit alerta les Rôdeurs présents, qui saluèrent leur Générale à son arrivée. Celle-ci leur rendit très volontiers leurs sourires et échangea également sur leur journée respective, notamment pour s'assurer qu'il n'y avait aucun problème sur le territoire. Les Rôdeurs prenaient tous très à cœur la protection des frontières, c'était un grand honneur de veiller sur elles… même si cela passait parfois par le simple fait de faire la circulation sur la Voie Royale.

Orfraie rejoignit ensuite une petite pièce où elle avait laissé son armure le matin même. D'ordinaire, elle remontait jusqu'à ses appartements avec elle sur le dos, mais avait étrangement changé son habitude pour cette fois. Arphen alla s'allonger près de la porte tandis que l'Elfette retirait ses vêtements pour s'équiper de son armure d'Everelle. La Générale fixa ensuite le fourreau de son épée à sa hanche gauche, puis celui de sa dague dans son dos. Enfin, elle passa Palantir en bandoulière juste après avoir fixé son carquois dans son dos.

La Générale quitta ensuite le corps des gardes avec Arphen, s'enfonçant silencieusement dans les bois, notamment grâce aux bracelets de chevilles qu'elle portait. Sans eux, il était certain que la neige aurait crissé sous ses pieds. Les frontières du Royaume étaient particulièrement bien gardées, truffée de pièges par endroit, la Rôdeuse ne pensait donc pas devoir se servir de son équipement ce soir…

Après une petite heure de marche, la Rôdeuse déchanta lorsque l'écho lointain de plusieurs voix lui parvint. Elle s'était naturellement dirigée vers le Domaine Baptistral et longeait à présent sa frontière tout en se tenant à l'écart de celle-ci de plusieurs centaines de mètres. Il n'était pas tard et les Baptistrels pouvaient se trouver dans les bois, toutefois l'instinct d'Orfraie lui murmurait "prudence". D'une pensée, l'Elfette disparue, devant invisible grâce à son armure, puis se dirigea vers la source des voix, Arphen sur ses talons.

" …. Des Baptistrels parcourent ces bois, y compris la nuit."

" Ils sont des cibles faciles. "

" Fais gaffe. C'est parce qu'ils n'ont pas d'armes qu'ils ne peuvent pas te faire mordre la poussière. "

Les voix qui lui parvenaient permirent à Orfraie de compter trois personnes. Aidé par son totem, elle écouta longuement afin de repérer une potentielle quatrième personne, sans résultat. L'Elfette sentit son poing droit se serrer de lui-même. La Rôdeuse ressentait une forte colère, autant envers elle et ses Rôdeurs qu'envers ces bandits. Il y avait vraisemblablement une faille dans la surveillance du territoire, une faille qu'elle aller devoir colmater au plus vite…

Orfraie se mit au niveau d'Arphen pour lui chuchoter des ordres en Elfique, puis elle grimpa agilement dans l'arbre derrière lequel elle s'était postée pour écouter. En équilibre entre deux grosses branches, elle saisit Palantir et encocha une flèche. L'husky, pour sa part, sortit de l'ombre des arbres en grognant, attirant ainsi l'attention des intrus. Cela permit à Orfraie de décocher un premier trais, qui vint trouver le mollet droit du bandit qui lui semblait être le chef. Le cri de douleur alerta ses comparses, bien entendu, mais une seconde flèche fusa et trouva le mollet gauche d'un second. Le troisième homme s'enfuit dans les bois avant que l'Elfe ait le temps d'encocher sa troisième flèche mais Arphen le prit rapidement en chasse, jappant tout en le talonnant de près.

La Rôdeuse attendit quelques instants, perchée dans son arbre, afin de s'assurer qu'aucun renfort n'allait surgir de l'obscurité, puis elle se laissa tomber en bas de celui-ci. Redevenant visible, elle fit quelques pas dans la neige, jusqu'à être à moins d'un mètre du premier homme qu'elle avait cloué au sol. Celui-ci tenait fermement sa jambe, transpercée de part en part par la flèche Elfique. L'Elfette alla desarmer son compagnon avant de revenir s'accroupir à côté de lui en prrnant soin de la priver de ses armes, jetant son épée et sa dague loin de lui, puis son regard bleu glacier se posa sur son visage. Au même moment, une nuée de luciole s'échappa de l'anneau qu'elle portait à la main droite, éclairant ainsi les alentours.

" Vous êtes en territoire Elfique, à la frontière avec le domaine Baptistral, et avec l'intention de vous en prendre à ceux qui parcourent ces bois." Enonça doucement la Générale, penchée au dessus de l'homme. " Par où avez-vous pénétré dans ce royaume ? " questionna Orfraie d'une voix glacée.

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Objets utilisés:

Son chant résonnait autour d’elle, en harmonie avec les vibrations qui accompagnaient l’élément de la terre. Ses petites notes n’étaient pas audibles du plus lointain de la forêt, la chanteciel tâchait de ne pas déranger ceux qui pourraient d’y trouver à cette heure tardive. Les oiseaux ne chantaient pas dans le froid de janvier, mais les renards et les loups n’hibernaient pas, ils avaient tout autant le droit qu’elle de dormir, droit qu’elle ne prenait pas, en cette soirée. Comment être en harmonie avec les étoiles si l’on devait dormir lorsqu’elles ornaient le ciel? Aléria préférait sacrifier quelques heures de sommeil pour une promenade en compagnie de son élément. Bien que sa journée ait été bien remplie, elle avait encore de l’énergie pour marcher.

Une mélodie familière raisonna à ses oreilles, lorsqu’elle s’avança, de plus en plus près du royaume elfique. La baptistrelle se précipita à sa cacher lorsqu’elle sentit un mouvement s’approcher et entendit le craquement furtif des branches. Un homme défila devant elle, semblant fuir quelque chose, elle comprit ce qui se passait lorsqu’elle vit le chien courir derrière lui. Mais le canidé fila trop rapidement et l’humain devant lui pour qu’elle ne puisse tenter une intervention. La Chanteciel s’avança vers les vibrations qu’elle reconnaissait, perdant leur sensations quelques fois, jusqu’à ce qu’elle retrouve le chantier et un spectacle qui la laissa muette.
Ses yeux figèrent sur la scène, puis, lentement, remontèrent vers Orfraie et ses prunelles claires. Toutes sortes de choses pouvaient se lire sur son visage. L’incompréhension, l’inquiétude, la peur…Elle ne comprit pas l’excès de violence, les deux blessés, le sang. La guerre était terminée, rien ne servait de faire des victimes à nouveau. Son amante, la princesse Ataliel, la femme pour qui elle avait admiration et passion, avait blessés ses hommes. Celle qui avait vu la guerre avec elle, les batailles et les litres de sang versés inutilement. Les viols commis directement devant elle. Comment pouvait-elle encore avoir recours à la violence alors qu’il y avait beaucoup d’autres solutions?


''Orfraie’’ Chuchota-t-elle, doucement, mais d’une manière peu rassurante. Elle fronça les sourcils, sa respiration s’accélérant devant une scène aussi violente…Elle avait vu du sang et des blessés, ce qui la touchait réellement, c’était que sa princesse en était la cause et pas n’importe quel militaire qui n’obéissait qu’aux ordres. Orfraie savait désobéir, Aléria le savait. Un pied reculant, puis un autre, et son torse reculait également pour fuir les explications possibles de l’elfe. Elle s’approcha des blessés encore à terre, des quels elle brisa les flèches avant de les retirer, telle était la procédure pour ne pas faire d’avantage de dommages.


-Étais-ce vraiment nécessaire de tirer tes flèches? Il y a plusieurs manières d’immobiliser quelqu’un sans lui faire de mal.

Penchée au-dessus de sa victime, Orfraie attendait que celle-ci veuille bien se mettre à table. Le brigand tenait fermement son mollet percé d'une flèche, grimaçant de douleur mais bien conscient. Pourtant, de l'extérieur, la scène n'était pas aussi sanglante qu'elle pouvait l'être. En effet, tout autour de l'Elfette, des dizaines de lucioles voletées doucement afin d'éclairer la zone, rendant la scène presque irréelle …

Malheureusement, le regard d'Orfraie n'avait rien de sympathique en cet instant. Il était froid et distant, à des années lumières de son état d'esprit habituel. La générale avait très à cœur la protection du Royaume, une tâche qu'elle menait à bien avec zèle. Les personnes qui osaient passer les frontières Elfique avec de mauvaises intentions avaient généralement très peu de chance de s'en sortir indemne. Mais, ce genre d'arrestation restait rare.

La blessure qu'elle avait infligée à l'homme n'était pas fatale, mais une trop longue exposition au froid pouvait avoir des conséquences peu sympathiques… La Rôdeuse allait rajouter quelques choses lorsque son ouïe capta le bruit caractéristique de pas dans la neige meuble. A l'instant où la Chanteciel qui faisait battre son cœur émergeait des bois, le regard d'Orfraie se leva vers elle. Aussitôt, son expression jusqu'alors fermé se mua en quelque chose bien différent : la peur. "Aléria…" fit-elle avec son accent Elfique...

Toutefois, cette peur disparue rapidement lorsque la Générale se reconstitua un masque. Se relevant totalement, la neige recouvrant peu à peu sa chevelure lie-de-vin, Orfraie observa la baptistrelle s'approcher des brigands, chacun à leur tour, puis briser la hampe en bois des flèches que qu'elle avait tiré. Comment devait-elle réagir ? L'esprit d'Orfraie l'ignorait, elle ne s'était jamais trouvée face à telle situation. Finalement, elle opta pour rester professionnelle…

" Je n'ai pas à justifier mes méthodes auprès de toi, Aléria. " Lui répondit-elle, son ton retrouvant toutefois une certaine chaleur lorsqu'elle s'adressa à son aimée. Elle ne pouvait définitivement pas se montrer aussi froide envers elle, qu'elle pouvait l'être envers les malfrats qu'elle avait mis au sol.

Arphen revint à cet instant précis, émergeant des ombres, la langue pendante. Il s'approcha de sa maitresse et vint toucher sa main de son museau. Celle-ci se tourna vers lui, l'espace d'un instant. " Va chercher des renforts. " Lui dit-elle en Elfique.

L'husky fila aussi vite qu'il était arrivé, obéissant à l'ordre de sa maîtresse. Seule la pierre de vivacité scellée dans son collier lui permettait de comprendre d'obéir à un tel ordre. Le regard d'Orfraie revint se poser sur Aléria. " Arphen va revenir avec d'autres Rôdeurs. Ils emmèneront ces hommes pour qu'ils répondent à mes questions. " Expliqua la princesse en s'approchant de son amante. " Mais peux m'aider à obtenir rapidement ces réponses avant que mes hommes arrivent et ces bandits seront simplement raccompagnés à la frontière. " Enonça doucement Orfraie, son regard passant des bandits à la Baptistrelle. Celle-ci pouvait fouiller leurs chants-nom, même si la Princesse savait que ce n'était pas quelque chose que les Cawr faisaient ainsi … " La surveillance de nos frontières est mon devoir. Je veux savoir par qu'elle brèche ils sont entré." Ajouta t-elle, son regard se durcissant lorsqu'elle croisa celui de l'homme allongé dans la neige. Celui-ci n'hésite pas à cracher en direction de l'Elfe, à défaut de pouvoir atteindre son visage. Le regard aigue-marine de celle-ci se fit aussitôt polaire. Toutefois, Orfraie demeura parfaitement calme et se tourna plutôt vers Aléria.

" M'aideras-tu ? " Lui demanda t-elle, sa voix retrouvant une certaine douceur en s'adressant à son aimée.

La baptistrelle sentit son sang bouillir à l’intérieur de ses veines, il était difficile de la mettre en colère, mais c’était encore plus décevant lorsqu’il s’agissait d’une personne dont elle était proche…et pour laquelle ses sentiments étaient aussi tendres. Elle reçut la remarque comme une claque au visage, son cœur se serra sur les mots trop durs pour être ceux de son aimé. Elle ne répondit pas tout de suite, baissant la tête, les larmes au bout des lèvres qui se retenaient de trembler. Elle aurait dû savoir, elle était une guerrière, une générale. Et elle s’était attendue à de la violence de sa part, mais pas à voir ses vibrations dissonantes, tordues par la princesse. Mais Aléria savait se contenir, bien que son regard, voilé d’un tissu sombre, ne puisse rendre la tendresse à son amante.

-Je vois. J’ai cru que … Tu serais assez proche de moi pour ne pas me blesser.

Sa voix restait douce, alors qu’elle regardait la scène, suivant le chien des yeux avant de le voir disparaître. La Chanteciel gardait une certaine distance entre elle et la rodeuse, ayant un mouvement de recul lorsqu’elle s’approcha. Tout en elle devenait distant, de son visage fermé à ses pas qui se voulaient fuyants. Aléria souligna l’effort de pacifisme de l’elfette, craignant que celui-ci soit probablement dû à sa présence. Elle était arrivée au mauvais endroit au mauvais moment. Orfraie n’aurait pas fait cela si elle avait su sa présence et cela, Aléria pouvait le rationnaliser, mais il y avait une différence entre savoir quelque chose et le voir…Le sentir tout autour de soi dans une désharmonie tordue. Les blessés avaient encore mal et elle ne pouvait pas les guérir au risque de les voir prendre la fuite et mettre en danger d’autres personnes, ainsi que ses frères et sœurs. L’ordre baptistral, qui savait très bien se défendre, mais n’importe quel apprenti qui n’était pas assez expérimenté pouvait se retrouver à la merci de ces bandits et risquer de perdre leurs pouvoirs pour se défendre…

Elle répondit à Orfraie d’un soupire, laissant son visage s’ouvrir un peu plus sur un regard triste. Aléria leur fit faire serment* de ne pas s’enfuir, à condition qu’Orfraie ne les blesse pas à nouveau, à l’aide de la magie baptistrale. Elle montra à chacun comment prononcer la formule après avoir chanté son incantation, lorsque chacun eut terminé, la Chanteciel daigna guérir les blessés. Aléria se dirigea vers l’un des deux hommes, le regardant dans les yeux en sondant son chant nom. Cette partie des vibrations avait toujours été celle dont elle avait le plus de difficulté à écouter…Elle avait préféré se spécialiser en soin, aidant les gens plutôt que de connaître leurs moindre pensées et secrets. Aléria avait vu des baptistrels qui n’en pouvaient plus des mensonges, à en devenir froids et parfois colériques.

-Allons, dites-moi, par où êtes-vous entrés? Ce sera plus simple ainsi et cela m’évitera de vagabonder dans vos vibrations trop intimes.

Elle n’eut pas besoin de réponse, à voix haute, bien que le bandit souhaitait se taire, prononcer la question faisait surgir la réponse parmi les maintes vibrations présentes. La baptistrelle tourna la tête vers la rodeuse pour s’adresser à elle.


-Ils viennent de Fortuna... Et sont parvenus à rejoindre les montagnes, dans l’intention de piller les passants. Elle ricana doucement, remarquant l’ironie de la situation.
Au fond, ils ont pris la brèche la moins attendue : L’entrée principale. Tes rôdeurs ont bien fait leur travail, mais ils ont besoin de reconnaître un menteur. Ils se sont fait passer pour des voyageurs…

Spoiler:

Le regard de la princesse s’était rarement fait aussi froid. Ce n’était pas dans son habitude, mais elle ne tolérait pas un tel manque de respect, que ce soit envers elle ou qui que ce soit d’autres. Et le bandit venait malencontreusement de dépasser les limites, même si celles-ci étaient grandes.

Cela, couplé au fait qu’elle avait délibérément bléssée Aléria n’aidait pas la Rôdeuse, qui se sentait tout de même coupable. Elle savait son chant nom totalement dissonant en cette instant, il ne pouvait en être autrement devant cette violence… Mais voir les larmes dans le regard de son amante avait tout de même heurté Orfraie, qui se sentait particulièrement mal. La voir reculer alors qu’elle s’approchait écrasa son cœur, mais tout était de sa faute… Elle ne pouvait en vouloir qu’à elle.
La Générale se composa donc un masque froid et distant, le temps qu’elle soit seule avec Aléria. A celle-ci, elle ne pouvait rien cacher, mais elle ne tenait pas à paraitre faible devant les bandits. S’ils la voyaient dans un moment de faiblesse, il serait plus difficile de les convaincre de ne pas revenir sur le territoire Elfe.

Malgré tout, la Baptistrelle accepta de l’aider à en savoir plus. Orfraie se tint donc à distance raisonnable afin de ne pas forcer Aléria à s’éloigner davantage, observant celle-ci faire prêter serment aux deux bandits. Toutefois, l’Elfe dû également participer en promettant de ne pas les blesser de nouveau, ce qu’elle jura sur son honneur.
En observant son amante sonder le chant nom de l’un des deux hommes, la Rôdeuse se remémora le temps où elle-même était capable de le faire. Elle savait que l’exercice n’avait rien de particulièrement agréable et était donc reconnaissante envers Aléria, qui acceptait de le faire malgré tout. La Générale imaginait, toutefois, sans mal que la Cawr avait été poussée à le faire pour épargner aux bandits un passage dans les geôles des Rôdeurs, ce qui n’avait rien d’agréable.
Aléria revint rapidement vers Orfraie avec une réponse. Toujours accroupie face au bandits incapable de bouger, elle n’avait eu qu’à poser sa question pour en obtenir la réponse à partir du chant nom. Le simple fait d’y penser avait permis à la Baptistrelle d’obtenir les réponses cherchées par la Générale. Ainsi, ils avaient bel et bien l’attention de piller les passants, mais ce qui frustra véritablement Orfraie fut la fin de la réponse apportée par Aléria. Ces bandits étaient passés par l’entrée principale, se faisant passer pour des voyageurs. La princesse savait que la Voie Royale consistait en la première brèche, la première entrée pour le Royaume des Elfes. Les Rôdeurs surveillaient, bien évidemment, cette route mais il était impossible de savoir qui étaient sincères et qui ne l’étaient pas, lors des contrôles opérés par le corps d’Elite. A moins d’avoir un totem hiboux ou un Baptistrel sous la main, la tâche était ardue… C’était en partie la raison pour laquelle les Rôdeurs parcouraient le Royaume à la recherche d’intrus.

Les bras croisés sur sa poitrine, Orfraie observait les deux bandits, pensive, jusqu’à ce que de légers bruits de pas l’interpelle. Avant même que Arphen et les renforts qu’il était allé quérir émergent du bois, la Rôdeuse s’était tournée vers la lisière, témoignant d’une ouïe très fine. En plus de l’husky, trois Elfes en armures noires s’approchèrent de leur Générale, qu’ils saluèrent comme le demandait son rang. Ils saluèrent également la Baptistrelle puis vinrent relever les deux bandits.

« Arphen en a attrapé un autre, il vous conduira à lui. Emmenez-les ensuite à la frontière et laissez-les partir. » Ordonna la Générale d’une voix ferme. Elle posa ensuite son regard sur les deux intrus. « Si nous vous retrouvons sur ces terres, soyez certain que je ne serais pas aussi clémente. » Les avertis Orfraie de cette voix froide qu’elle avait déjà empruntée plus tôt. Cet avertissement pouvait être compris de bien des façons, mais il n’était pas question de les tuer s’ils revenaient, mais seulement de les emprisonner dans les geôles d’Estëllin pour le restant de leurs jours, telles étaient les ordres de l’Empereur. Un sort qui restait peu enviable…

Les guerriers acquiescèrent aux ordres de leur Générale, puis relevèrent les deux hommes de force et les forcèrent à les suivre. Soignés par Aléria, ils n’auraient aucuns problèmes pour marcher. Orfraie les observa disparaitre dans les bois, guidés par Arphen, puis posa son regard sur son amante. Désormais seules, elle avait très envie de l’embrasser, de la serrer dans ses bras et de lui dire qu’elle l’aimait… Mais elle ne pouvait pas, pas avec ce qu’elle lui avait dit, avec ce qu’elle avait fait, même si cela était son devoir. Ses doutes et ses craintes flottaient à la surface de son chant nom, sans qu’elle n’ose réellement bouger. Son regard, désormais radoucit, laissait filtrer une pointe de tristesse. Elle ne s’excuserait pas d’avoir fait son travail, mais s’en voulait d’avoir été gratuitement blessante.

« Goheno nin (pardonnes moi), je n’avais pas le droit de te parler ainsi. » Fit-elle avec douceur et sincérité.

Elle se fit plus réservée, croisant les bras, portant ses mains sur ses épaules et détournant le visage. Elle n’était pas en colère, elle était déçue, dérangée par l’idée qu’une personne qu’elle aimait autant puisse être aussi violente. Pas Orfraie, sa Orfraie, celle qui avait bercée ses aurores et comblé ses nuits. Peut-être étaient-elles trop différentes finalement…Elles se rejoignaient sur la magie, était-ce suffisant ? L’ancienne baptistrelle avait-elle oublié la douleur lorsque les vibrations se faisaient dissonantes?
Aléria ne connaissait pas l’elfique et avait du mal à comprendre lorsque son amante glissait quelques mots dans sa langue maternelle. Mais elle avait côtoyé des élèves qui parlaient beaucoup de ce langage et ce mot, elle le connaissait, l’ayant entendu plusieurs fois en tant qu’enseignante et demandé sa signification. La bourgeoise avait appris que lorsqu’on faisait une erreur, valait mieux s’excuser courtement que de chercher des raisons à sa faute et c’est ce qu’elle demandait à ses élèves. Orfraie lui demandait pardon, d’une formule qui n’était peut-être pas significative. Étais-ce sincère ou une autre convenance comme le ‘’s’il vous plait’’. Peu de gens savaient ce qu’ils demandaient réellement lorsqu’ils prononçaient ces mots. Le pardon, cette chose précieuse et importante.

La femme resta fermée, elle baissait la tête, distante, mais elle ne cachait plus sa tristesse. Elle eût envie de se blottir contre la princesse pour lui demander réconfort, mais elle était la source même de sa douleur. Et elle savait pourtant que cette étreinte serait suffisante à la faire sentir mieux, à lui faire oublier cette déception. Ce qu’elle n’aimait pas, c’était l’idée de s’ouvrir à elle après ce qu’elle venait tout juste de faire.

-Tu avais le droit. Rien ne te l’interdit…

Un dernier soupir, puis le silence retomba, elle recula légèrement pour s’appuyer contre un tronc d’arbre. Sa tête se redressa alors qu’elle la tournait, l’appuyant aussi, ses paupières se fermant lentement. Son expression était calme, jusqu’à ce que cette idée revienne à son esprit : trop différentes, éloignées. Son visage se crispa dans une expression mélancolique, puis elle baissa la tête dans un souffle saccadé qui retenait ses larmes. Non, elle refusait cette vérité, elle ne pouvait les séparer.

-Je n’aurais pas dû arriver à ce moment, je sais que tu ne l’aurais pas fait devant-moi si tu avais su que j’étais là, tu ne m’aurais pas blessé…intentionnellement. Je savais…je m’y attendais mais ça m’a happé en plein visage...Et tu as raison, tu ne me dois rien...Mais tu aurais pu en décider.

Elle prit une respiration, laissant la princesse dans le silence une nouvelle fois afin de prendre le temps de se contenir.

-Orfraie…Je peux te pardonner, mais…Je ne veux pas te demander de changer. Alors où allons-nous, si nous devons rester en désaccord. Je ne pourrai qu’être ton amante…dans une vie qui te fera vieillir d’à peine quelques années physiquement, je serai déjà vielle et je quitterai ce monde et je te laisserai seule…

Les elfes n’aimaient qu’une fois et elle avait déjà atteint la quarantaine, cela lui avait donné un sacré coup de le réaliser. Compter les années, quelque chose de bien étrange. Ses paroles étaient certainement dures, remettant en question toute leur relation, sa raison d’être. Mais elle ne voulait pas blesser la princesse…Et se blesser elle-même.

-Veux-tu vraiment continuer ainsi?

Les guerriers d'Orfraie parties, les deux femmes furent seules, dans le froid et la neige. Quelques flocons tombaient du ciel et venaient se déposer sur la chevelure de la princesse, qui était attachées en de multiple tresses et contribuaient à lui donner cette beauté guerrière qui la caractérisait. Son regard bleu-glacier, tout aussi singulier que sa chevelure, était posé sur son amante. Celle-ci était réservée et ses bras, qu'elle avait croisés, en disaient long sur son état d'esprit. Aléria n'osait même pas la regarder et c'est cela qui était le plus douloureux… Accepterait-elle de lui pardonner ses mots ?

Son amante ne cachait plus sa tristesse. La tête baissée, Orfraie supposait qu'elle tentait de cacher ses yeux beaucoup trop humides… Puis Aléria prononça enfin quelques mots. En réponse, un sourire triste de dessina sur les lèvres de la Rôdeuse, qui se contenta alors de soupirer. " Mes principes et mes sentiments me l'interdisent. " Répondit-elle, la voix éteinte.
Le silence retomba sur la petite clairière, toujours illuminée par les lucioles d'Orfraie. Aléria alla s'appuyer contre un arbre tandis que la guerrière restait immobile, seule au milieu de la clairière et de la neige tachée de sang. Elle observait son amante, le regard voilé. Elle devinait sa peine et le tumulte de ses pensées…Son amour brisa alors le silence, sa voix faisant quelques trémolos. Non, elle n'aurait pas dû arriver à cet instant, elle n'aurait jamais dû voir cela. Par Dracos, jamais Orfraie aurait fait une telle chose devant Aléria. Le silence retomba bien trop tôt tandis que la princesse sentait l'angoisse enserrer son cœur, le plaçant dans un étau. Elle inspira et expira longuement afin de maîtriser ce sentiment… Jusqu'à ce qu'Aléria reprenne la parole.

L'humaine mettait le doigt sur une chose à laquelle Orfraie n'avait aucune réponse, ou rien de précis. Combien de nuits avait-elle déjà passé à se demander ce qu'elle allait faire lorsqu'Aléria la quitterait pour toujours ? D'innombrables… Elle avait même tenté de trouver conseil auprès de sa meilleure amie, Aramis, qui fut autrefois la mentor d'Aléria. Celle-ci lui avait dit que l'amour nécessitait parfois quelques sacrifices pour être conservé… Et elle n'avait pas tort. Sans sacrifices de la part d'Orfraie et d'Aléria, leur amour risquait de leur faire plus de mal que de bien.

"Viens, marchons." L'invita Orfraie avait de quitter la clairière après s'être assurée que son amante suivait. Elle ne marchait pas trop vite pour que l'humaine puisse se tenir à ses côtés. Sous la protection des arbres, leur chemin était éclairé par les lucioles que la princesse avait fait apparaître… La Rôdeuse semblait prendre un chemin quelconque, mais elle savait en vérité où elle se dirigeait. Dans le silence, elle emmena Aléria jusqu'à un promontoire de roc. Depuis ce point, les deux femmes pouvaient observer Armanda à leurs pieds et deviner Estëllin et le Domaine derrière elles. Orfraie s'avança alors jusqu'au bord, les mains jointes dans le dos.

" J'ai passé de nombreuses nuits à me demander si tout ceci en valait la peine, si tu en valais la peine, si ce que je ressentais pour toi en valait la peine. J'ai passé 671 ans de ma vie seule et je me suis demandais pourquoi ne pas continuer ainsi, seule. " Fit Orfraie, tournant toujours le dos à son amante. "Ensuite, j'ai repensais à ce que je ressentais lorsque j'étais avec toi, lorsque je pensais à toi. Tu vas vieillir, tu vas mourir … et moi aussi. Ou alors peut être vais-je mourir demain, et toi dans dix jours, ou dix ans. Qui sait ? Qui sait de quoi demain est fait ? " Demanda la princesse en se retournant vers son amante, les bras légèrement écartés de son corps face à cette question. " Je refuse de me passer de cet amour, de me passer de toi, sous prétexte que j'en souffrirais dans vingt ou trente ans. Je préfère vivre au jour le jour, comme je l'ai toujours fait." Poursuivit Orfraie avec une certaine ferveur, tout en s'approchant de son amante. " Mais comme me l'a dit Aramis, nous devrons faire des sacrifices pour que cette relation soit harmonieuse. Nous devons composer avec les similitudes et les différences de l'autres… " Fit-elle en levant sa main droite pour venir, doucement, caresser la joue d'Aléria du bout des doigts. " Gerich veleth nîn (tu es mon amour). Et je me battrai pour cela." Termina la Princesse, prononçant des mots qu'elle avait dit une seule fois jusqu'alors, mais dont Aléria ne pouvait oublier toute la portée et la signification.

Tristesse disparut, la baptistrelle se reprit, se contenant à nouveau en levant enfin les yeux vers son amante. Elle ne perdait pas cette espèce…d’autorité, ferme, à laquelle la femme n’arrivait pas à désobéir, à défier. Un jour arriverait probablement où elle devrait lui dire non…Elle avait été heureuse que la princesse ne lui demande pas de garder le secret de leur relation…Aléria aimait certainement beaucoup l’elfette, mais être forcée à choisir entre elle et l’ordre baptistral, c’était probablement la frontière du beaucoup trop. Elle ne savait même pas si elle choisirait son amante ou son métier, préférant ne pas s’adonner à cette réflexion trop difficile.

Elle suivit les pas de sa douce, acceptant silencieusement son invitation. Sa distance lui faisait mal, mais elle ne pouvait que comprendre, ayant fait la même chose il n’y avait pas plus de quelques minutes. Orfraie avait raison et Aléria n’avait pas vu les choses sous cet angle, Orfraie pouvait elle aussi mourir avant l’humaine, les elfes avaient une certaine longévité mais pas l’immortalité. Aléria s’était dit que, les blessures seraient plus faciles à guérir, à panser si elle s’en allait maintenant, mais aurait elle aussi mal, lorsqu’elle mourrait? La douleur d’une mort était-elle plus triste que celle d’une vie sans amour, à cracher sur le temps qu’elles auraient pu avoir, bien que petit.

Elle ferma doucement les yeux, frissonnant sous la douce caresse de son amante. Jamais un contact physique ne lui avait fait autant de bien que celui d’Orfraie, comme des milliers d’étoiles entre leurs peau, une aura entourait la princesse. Son odeur, sucrée, sa présence rassurante et ses regards qui la faisaient rougir, qui faisaient battre son cœur. Elles étaient différentes, certes, mais cela en valait la peine, rien que pour cette douce sensation, chaque fois qu’elles se touchaient, chaque fois qu’elle était là, près d’elle. ''Orfraie…’’ souffla-t-elle avant d’esquisser un sourire ''Je ne comprends pas l’elfique. ''

Elle vint doucement poser ses mains de chaque côté de la tête de la femme, caressant doucement ses tempes, ses joues, ses cheveux qu’elle aimait toucher, avec lesquels elle aimait jouer. ''J’ai froid… '' Chuchota-t-elle, cette habitude qu’ils avaient pris de parler tout bas dans ces moments précieux où il n’y avait qu’intimité. ''Prend moi contre toi, s’il te plait…’’ Elle soupira doucement '' Je suis désolée…C’est difficile de tout remettre en question ainsi, mais je ne peux m’empêcher d’y penser, je comprends que ça ait occupé tes nuits, bien plus que les miennes. Je ne veux pas te blesser…J’ai peur de te faire mal. Mais tu as raison, ce serait bien dommage d’abandonner maintenant. Si nous avons trente ans, ce sera déjà trente ans, et si nous en avons dix, ce sera plus que de se quitter maintenant. ''

Orfraie avait été la plus sincère qui soit, révélant les tenants et aboutissants de ses pensées à son amante. Bien sûr, il ne pouvait en être autrement, car Aléria l'aurait aussitôt découvert, mais l'Elfette n'avait jamais souhaité lui cacher quoi que ce soit. Désormais toutes proches, Orfraie attendait la réponse de son amante, qui ne tarda pas à arriver. Cela l'amusa, tout d'abord. Il était vrai qu'elle ne comprenait pas l'Elfique et plus d'une fois, la princesse avait songé à lui en apprendre les rudiments. Un léger sourire naquit donc que les lèvres de la Générale. " Je peux t'enseigner les rudiments de la langue, si tu te sens de l'apprendre." Proposa donc celle-ci.

Avec une infini douceur, la Baptistrelle vint poser ses mains de chaque côté du visage d'Orfraie, qui ne put que fermer les yeux sous ce contact. Elle savait qu'Aléria aimait jouer avec ses cheveux, elle le lui avait démontré à ne nombreuses reprises … En cet instant, l'Elfette se sentait particulièrement apaisée et protégée. Toutefois, à la demande de son amante, la Rôdeuse obéit. Ses paupières se soulevèrent et croisèrent son regard, puis Orfraie passa un bras autour de la taille de l'humaine et l'attira doucement contre elle, puis elle entoura ses épaules de son autre bas afin de lui tenir chaud. Malheureusement, l'armure de la guerrière était froide et ne permettait donc pas à l'Elfe de partager efficacement sa chaleur. Celle-ci referma donc davantage ses bras autour du corps de son amante.

Orfraie ne pouvait qu'être d'accord avec les mots de son aimée. Il n'était pas dans sa nature d'être défaitiste. Au contraire, l'Elfette voyait généralement le verre à moitié plein. Dès l'instant où elles avaient mutuellement accepté leur sentiment, la Rôdeuse savait comment tout cela allait probablement se terminer, si elles survivaient à Vraorg du moins. Et elles avaient survécu, combattant ensemble lors de la bataille finale …

" Je n'ai pas voulu te blesser, moi non plus. J'espère que tu pourras me pardonner. " Fit doucement Orfraie en venant embrasser le sommet de son crâne, en un geste protecteur. Elle prit également le temps de respirer le parfum de son amante avant de poursuivre. " Tu peux entendre mon chant nom, ce qui te permet de savoir comment je vais même en étant loin de moi. Pour ma part, je n'en suis plus capable, mais j'aimerais pouvoir garder un œil sur toi, afin de m'assurer que tu vas bien même lorsque nous ne sommes pas ensemble. " Commença doucement la Rôdeuse, murmurant pour ne pas briser cet instant. " J-j'ai un Nexus de cœur, mais il ne fonctionnera pas sans ta participation. " Poursuivit-elle, doutant de la façon dont elle s'y était prise pour formuler sa requête. Elle décida donc de se reprendre. " J'ai besoin de ton sang. Si tu acceptes, bien entendu. " Il y eut un petit instant de flottement, puis Orfraie conclu, sa voix chargée d'une pointe de luxure. " Mais je l'ai laissé dans mes appartements…"

Elle aimait ces notes, cette mélodie paisible, calme, austère et noble qu’était celle d’Orfraie. Elle aimait les vibrations d’affections qui planaient entre elles, au-dessus de leurs têtes et tout autre chose qui vibrait du creux de leur ventre à leur cœur. Certains les appelaient des papillons, peut-être à cause de cette sensation qui donnait l’impression de voler, de planer par moments. Cette impression de liberté et de légèreté par rapport à…tout le reste, sans rien à exclure, tout ce qui prenait de l’importance était les mouvements des ailes, ceux qu’on donnait pour le chemin que l’on voulait faire ensemble, le sens qu’on voulait lui donner. Un sourire, il ne s’éteignait pas, pas en sa présence. La princesse avait cet effet sur Aléria, la détendant complètement, mais faisant s’affoler son cœur et tourner son esprit.
''Je ressens l’affection dans les vibrations lorsque tu me parles en elfique, j’aimerais connaître plus précisément…ce qu’ils signifient, ce que tu me dis. ''

Elle avait souvent tenté de prononcer ces mots qu’Orfraie lui répétait avec douceur, lorsqu’elle était seule dans son lit, rougissant en s’imaginant leur signification. Elle aimait laisser son imagination faire les choses, penser à elle ainsi la faisait sentir moins seules dans les froides nuit où Orfraie n’était pas entre ses draps. La baptistrelle eut d’ailleurs les joues rosies, tant par le froid que par l’étreinte protectrice de son amante. Elle appréciait ces petits gestes qui prouvaient son amour, peut-être un peu son importance à ses yeux. ''Je te pardonne, Orfraie’’ souffla-t-elle si faiblement dans son murmure. Elle aurait pu lui en vouloir quelques temps, mais elle ne savait pas rester fâchée très longtemps, surtout lorsqu’elle se retrouvait tout contre elle, blottie contre la tendresse, il n’y avait que réconfort entre ses bras. La femme posa sa tête contre le torse de l’elfe, bien que les plaques d’armures ne fussent pas ce qu’il y ait de plus doux, la savoir près d’elle lui suffisait à être heureuse.

-Je ne peux pas…vraiment entendre ton chant nom à distance. Mais je comprends tes inquiétudes, je sais la valeur d’un pareil bijou, je ne te laisserai pas gâcher ce montant pour une goutte de sang…Si tu veux, je pourrai acheter un objet magique permettant la communication, afin que tu puisses me parler si tu t’inquiètes pour moi, ou si tu as simplement besoin d’entendre ma voix…

La vie d’un baptistrel nécessitait des voyages et Aléria savait qu’elle serait séparée de son aimée plus d’une fois et pas que pour quelques jours. Elle aussi, ressentirait le besoin d’une pensée, quelques mots, sa présence bien que non palpable, simplement savoir qu’elle était toujours là, vivante et qu’elle l’attendait.

-Allons chercher ce nexus dans tes appartements, alors.

La Chanteciel ne semblait pas sous-entendre quoi que ce soit, son sourire se voulait paisible, un peu poli mais pas enjôleur. Avec les années au domaine, elle oubliait parfois les jeux d’esprits et prenait les choses au pied de la lettre. Aléria prit délicatement la main de son amante, passant quelques doigts entre les siens et caressant au passage la paume, puis elle se mit à marcher, dans les bois en direction d’estellin. ''Ce que tu m’as dit tout à l’heure…Gerich…Veleth…Nin…’’ la prononciation de la baptistrelle laissait à désirer, elle tentait d’imiter l’elfette au meilleur de ses capacités. ''Qu’est-ce que ça signifie? '' C’était assez comique, d’apprendre les rudiments de l’elfique en commençant par les mots d’amour. Si on lui demandait ce qu’elle connaissait de cette langue en situation diplomatique, ce serait bien gênant. Après un certain temps, elles arrivèrent à s’infiltrer dans la chambre de la princesse, en douce et le plus discrètement possible…ce qui n’était pas tout à fait aisé.

Orfraie était pardonné et cela lui permit de se détendre davantage tandis qu'elle resserrait son étreinte autour de la taille de son amante. Elle prenait toutefois garde à ne pas rendre cela inconfortable à cause de son armure ou même de ses armes.
Aléria acceptait de lui offrir une goutte de son sang, acceptant de ce fait qu'Orfraie veille toujours sur elle, désormais. La princesse nicha son visage dans la chevelure brune de la Baptistrelle, inspirant son parfum. " Ce serait plaisant, mais je connais le prix de tels objets. Ne te ruine pas. " répondit la princesse à la proposition de son amante. Une pierre de communication permettrait effectivement aux deux femmes de toujours garder contact, même d'un bout à l'autre d'Armanda, mais Orfraie ne voulait pas voir Aléria se ruiner. L'humaine ne devait pas rouler sur l'or, de par son statut de Baptistrelle.

Par la suite, la Chanteciel accepta de suivre la guerrière jusqu'au Palais sans remarquer les quelques notes de luxures dans la voix de la Princesse. Celle-ci rendit son sourire à son aimée, puis se laissa guider par celle-ci lorsqu'elle noua leurs doigts. Elles commencèrent à marcher côte à côte dans les bois, en silence, jusqu'à ce que la Cawr le brise. Sa prononciation de l'Elfique laissait grandement à désirer et Orfraie ne put retenir un froncement de sourcils amusée. Aléria lui rappelait un enfant apprenant à parler, ayant des difficultés à prononcer les mots Elfique… Il était vrai que cette langue n'avait rien de facile, que ce soit par son vocabulaire riche ou par sa prononciation, ses accents.

Orfraie serra doucement les doigts fins de son amante, puis posa brièvement son regard sur elle. " Gerich veleth nîn " Prononça parfaitement Orfraie, prenant le temps de le faire lentement pour permettre à Aléria de retenir ces mots et la façon de les dire. " Cela signifie littéralement " Tu es mon Amour. " C'est… Cela est l'équivalant du " Je t'aime " des Hommes. " Expliqua Orfraie. C'était la première fois qu'elle le lui disait clairement, de façon à ce qu'elle le comprenne, il y avait donc une petite appréhension dans sa voix.

A l'approche d'Estëllin, la Générale bifurqua et ne rejoignit pas la porte principale, mais préféra une entrée dérobée, secrète et connue de seuls les Rôdeurs… et d'Aléria. De toute façon, celle-ci pouvait lire dans son chant nom l'emplacement de ces issues, alors lui cacher était inutile. De plus, Orfraie avait parfaitement confiance en son amante. Se rendre discrètement jusqu'à ses appartements fut donc assez simple, la princesse connaissant parfaitement les rondes des gardes…

Une fois la porte refermée derrière elle, la Rôdeuse se détendit tout de même davantage. Personne ne viendrait les surprendre, ici. Orfraie commença donc à défaire les attaches de son armure, retirant les plaques une à une. Elle retira également sa ceinture dans le processus et posa ses armes sur un râtelier, prévu à cet effet. Sous le plastron de son armure, elle portait une chemise sombre qui allait parfaitement avec le pantalon noir qu'elle portait déjà, celui-ci moulant d'ailleurs les muscles de ses jambes. Tout en ouvrant la porte qui menait à sa chambre, Orfraie défit avec son index les lassés qui maintenaient fermés le col de sa chemise, offrant donc sans vraiment y faire attention une charmante vue sur la naissance de ses seins.

Lorsqu'elle revint vers Aléria, la princesse tenait la chaîne du Nexus dans son poing fermé. Elle ouvrit celui-ci face à son amante et saisit la chaîne entre son pouce et son index, levant le bijou au niveau de ses yeux pour qu'elle puisse l'observer. " Le voici. " Pour sa part, Orfraie l'avait déjà longuement observé et le posa donc finalement sur la table qui se trouvait juste à côté du couple. La Princesse vint ensuite se placer derrière son amante, entourant sa taille de ses bras. Quelque part, ce Nexus représentait pour elle une sorte d'engagement … Le lier à la Cawr revêtait une certaine symbolique.

" Comment veux-tu procéder ? " Demanda doucement Orfraie après quelques instants, en se penchant légèrement vers l'oreille d'Aléria. La princesse possédait suffisamment de lames dans ses appartements pour faire couler une goutte de sang, mais si Aléria avait une meilleure façon de procéder…

Qui aurait dit qu’elle se serait serrée contre le torse armuré d’une millitaire elfique, il y a quelques années? Une baptistrelle et une générale, la relation qu’entretenaient les deux femmes était antithétique, elles étaient opposées l’une à l’autre et rien ne se privait de leur rappeler, ce serait-ce que le contact froid des plaques d’Orfraie. La princesse marquait un point, par son statut elle avait plus accès à des pièces d’or que la bourgeoise. L’humaine avait assez de talents magiques pour entrer en contact avec sa princesse par projection astrale, bien que cela lui nécessitait beaucoup d’énergie…mais ce n’était pas vraiment du gaspillage, puisqu’il ne fallait pas que son elfette oublie le son de sa voix, non? C’était important pour elle, mais aléria se voyait bien devoir être raisonnable et faire attention à ne pas entrer en contact trop souvent avec son amante.
La femme rougit, un léger sourire s’étirant sur ses lèvres, elle aimait la manière dont Orfraie lui disait cela…Comme si elle lui annonçait son amour. Elle espérait que son aimée arrive encore à lui dire ''Je t’aime’’ comme la première fois, même après les années passées ensemble. Peut-être l’écart racial entre elles avait-il cette qualité? Le temps était perçu bien différemment et la passion s’éteignait beaucoup plus lentement que la manière dont les humains doivent constamment raviver la flamme. ''Je t’aime aussi…’’ murmura-t-elle, la tête se baissant un peu comme s’il s’agissait d’une confession.

Elles passèrent, comme Aléria s’y attendait, par leur entrée secrète. L’elfette se mit à retirer des pièces d’armures, ce qui arracha un sourire à la Chanteciel qui souffla un ''besoin d’aide? '' en voyant la princesse qui semblait soulagée de ne plus avoir ce poids sur ses épaules. Il y avait des femmes qui s’arrachaient le corset en arrivant dans leurs appartements, Orfraie, elle, défaisait les sangles de son armure.

La baptistrelle n’eût pas l’occasion d’enlever plus de pièces d’armures, la générale avait retiré jusqu’à ses armes. Elle leva les yeux, croisant la jolie pierre du nexus. Ce bijou devait être somptueux lorsqu’il prenait les couleurs des sentiments de la personne visée. Elle se laissa enlacer, se blottissant un peu contre son amante en reculant légèrement, sa tête venant se poser dans le cou de l’elfette. Aléria tournait légèrement la tête, sentant les longs cheveux se mêler aux siens et effleurer son visage. Elle ferma les yeux un instant, la Cawr n’avait pas vraiment envie de s’occuper du nexus pour l’instant, une tout autre préoccupation à l’esprit...Elle sentait l’étreinte de sa princesse contre elle et avait envie de faire durer ce moment. L’elfette lui manquait souvent, dans ses leçons, dans ses longs moments de solitude entre les dolmens et sur le toît de l’observatoire restreint aux Chanteciels. Aléria tentait de ne pas laisser entrer dans son esprit l’idée d’Orfraie au domaine en présence d’autres baptistrels, pas pour leurs mentir…Elle n’avait rien à cacher, mais certaines pensées pouvaient se faire indiscrètes, trop intimes.

Aléria huma le parfum de son amante, appréciant le doux silence qui les entourait. Elle ne voulait pas le briser, pas tout de suite. La femme posa ses mains sur les bras de son amante, glissant jusqu’à ses mains, de caresses si douces qu’elles n’étaient presqu’effleurement. Elle voulait rester contre elle, ainsi, plus longtemps, plus souvent… ''Apporte moi une lame…petite…s’il te plait. '' Souffla-t-elle enfin, à contrecœur. Pas qu’elle avait peur d’une petite coupure, mais s’arracher à ses bras était un peu difficile, quand elle avait attendu pour s’y retrouver. ''Tu peux le faire? Tu n’as qu’à piquer mon doigt. '' Elle faisait confiance à sa princesse quant à la force de sa lame.

Orfraie enserrait toujours la taille de son amante, observant le bijou tout en attendant la réponse d'Aléria. Même sans la goutte de sang nécessaire pour le faire fonctionner, le Nexus restait magnifique. C'était réellement un ouvrage d'une grande beauté qui ne jurerait jamais avec les diverses tenues qu'Orfraie était susceptible de porter, évitant ainsi les questions indiscrètes sur la provenance du bijoux… À moi qu'un observateur averti remarque les changements de couleurs, bien entendu. Toutefois, cela ne faisait pas vraiment peur à la princesse, qui avait déjà passé la chaine du bijoux entour de son cou. Elle savait que celui-ci tombait presque entre ses seins et le dissimulait donc aux regards, à moins qu'elle souhaite le contraire.

Pour l'heure, un silence confortable s'était instauré entre les deux femmes, chacune d'elle plongée dans ses pensées. Orfraie pouvait rester des heures ainsi, avec Aléria dans ses bras. Sa chaleur, son odeur, sa présence… Tout cela avait le don d'apaiser la Princesse, de faire battre son cœur un peu plus rapidement. La guerrière vint poser son menton sur le sommet du crâne d'Aléria, puis ferma les yeux afin de profiter davantage encore de sa présence. Sa main droite remonta le long de son corps et vint caresser le bras de l'humaine, distraitement. La présence de son amante lui manquait et Orfraie donnerait beaucoup pour avoir celle-ci près d'elle au jour le jour, comme cela pouvait être le cas pour n'importe quel autres couples… Mais les deux femmes n'étaient pas et ne serait jamais "n'importe quel autre couple".

Au bout d'un moment, Aléria brisa le silence. Une petite lame, ce n'était pas cela qui manquait à Orfraie. À contre cœur, celle-ci se détacha de sa campane – non sans embrasser son front – et s'éloigna en directement du râtelier où elle avait posé ses armes précédemment. La Princesse ne possédait pas vraiment de "petites lames" et saisi donc sa dague, celle dont le manche en ébène était sculpté et représentait la tête d'un dragon. D'un geste vif, Orfraie ôta la lame de son fourreau et "joua" avec celle-ci, ne manquant pas d'agilité.

" Je n'ai pas vraiment plus petit sous la main. Toutefois, tu peux compter sur moi pour faire attention. " Dit Orfraie en revenant auprès de son amante. Elle lui prit alors la main et l'attira près de la table, mais également contre son corps. Là, elle laissa ses doigts glisser le long de son bras avant de, délicatement, prendre sa main dans la sienne. Il lui suffisait de piquer le bout de son doigt, rien de très compliqué. " Je te rassure, il n'y a rien d'imprégner sur cette lame. Elle est propre. " Révéla Orfraie, jugeant cela opportun. " Prête ? " Demanda-t-elle ensuite tout en piquant très rapidement – et très précisément – l'index de la Baptistrelle. Elle guida ensuite le doigt de celle-ci et laissa la goute vermeille tomber sur le Nexus, qui émit une faible lueur avant de changer doucement de couleur, passant de sa couleur d'origine – une multitude donc – à un jaune très clair.
Toutefois, avant de porter plus d'attention au bijoux, Orfraie chantonna quelques notes Elfiques afin de refermer la petite coupure qu'elle venait de faire à son amante. C'était une chose qu'Aléria aurait pu faire elle-même, mais la princesse y tenait. Ses doigts vinrent ensuite se refermer sur les siens tandis qu'elle lui offrait un sourire.

" Merci. " Lui dit-elle en se penchant sur ses lèvres, lui offrant un doux baiser. Toutefois, elle se recula après quelques secondes pour reporter son attention sur le Nexus, dont la pierre avait toujours cette nuance de jaune pâle, presque blanc. " Le jaune signifie la bonne humeur, le bonheur et la sérénité. S'il est si pale, c'est qu'il y a une touche de blanc, qui correspond à un esprit vif et alerte. " Traduisit la Princesse en saisissant le bijou, levant celui-ci au niveau de ses yeux. " J'en déduis que tu vas bien et que tu es heureuse d'être avec moi. " Conclu Orfraie en souriant. " Tu veux bien m'aider à le mettre ? " Demanda-t-elle finalement, tandis qu'elle posait ses fesses sur la table afin d'être davantage à la hauteur de son amante.

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[Soin] Soins
Referme les blessures à condition qu'elles ne soient pas trop graves, répare les os. Marche aussi sur les végétaux et animaux.

Geste clé : Chant elfique.

Elle profitait du contact de son amante en frissonnant un peu, la sentir près d’elle était toujours agréable, et elle ne pouvait se passer de ces gestes particulièrement affectueux qui n’appartenaient qu’à elles deux, maintenant. La baptistrelle n’était pas sotte, elle savait qu’il y avait eu d’autres femmes, mais depuis un moment, la princesse lui était plus fidèle. Étaient-elles devenues plus que des amantes? Elles s’étaient certainement rapprochés, sans vraiment se le dire ou officialiser quoi que ce soit, la possibilité n’y étant pas de toutes manières, elles étaient tombées amoureuses, plus profondément l’une de l’autre. Elle regarda l’Elfette jouer un peu avec sa dague, un sourire en coin aux lèvres, paisible et posée. Elle n’avait pas peur d’une lame, ni d’une goutte de sang. Ses journées en tant que guérisseuse avaient toujours été très écarlates. ''Je te fais confiance tu sais. '' Elle ne s’était jamais imaginée que son amante voudrait l’empoisonner ou lui refiler une maladie. Si cela devait arriver par accident, elle le saurait, aussi était-elle une guérisseuse, les infections n’étaient pas un problème…sauf dans des cas isolés, comme le jour où néant avait pris possession de son corps.

Elle hocha la tête et garda ses prunelles dans les yeux azurs de sa princesse qui étaient tellement appliqués à la tâche, concentrés sur la lame, puis le sang qui devait se retrouver sur le nexus. Aléria ne regarda pas la couleur très claire que pris le bijou, puisque ce qu’il y avait devant ses yeux était beaucoup plus intéressant. Elle apprécia l’attention que portait son amante à soigner la coupure pourtant si petite, ce n’était pas nécessaire d’utiliser la magie pour cela, mais c’était attentionné et…un peu mignon. La Chanteciel ferma doucement les yeux en caressant les doigts de sa belle, la tendresse de ces moments était précieuse. ''Bien sûr que je suis heureuse. Je t’aime Orfraie. '' Souffla-t-elle simplement, avant de sourire et de prendre délicatement la chaine entre ses doigts. Elle se dirigea derrière l’elfette, à regrets de quitter son étreinte et déplaça doucement ses cheveux au-devant de sa poitrine avant de déposer un baiser sur sa nuque. La chaine passa autour du coup de la princesse, ainsi que les mains de l’humaine, avant de s’attacher derrière son cou. Puis ses cheveux retrouvèrent leur position initiale, alors qu’Aléria profitait de ce contact physique pour effleurer la peau de son amante, et la caresser par moment. Elle resta derrière elle et glissa ses mains jusqu’à sa taille. Puis ses lèvres, craquant sous le désir, se plaquèrent tendrement sur les siennes.

Leurs souffles se faisaient plus chauds,
Une dernière caresse avant de céder à la tentation,
Elle était certaine, à présent, que rien ne pouvait être mal dans cette étreinte
Puisque leurs corps étaient si proches, et leurs âmes vibrantes
Au rythme de leurs cœur