20 Novembre de l’an 7 de l’âge d’obsidienne


Après avoir finalement intégré la Caste des Dragonniers aux cotés de Lewyn, je remontais finalement vers le Nord pour rendre visite à l’impératrice des Elfes ainsi qu’à, je l’espérais du moins, une amie qui devait être de retour de voyage. Je dois bien avouer qu’avec ce changement radical dans ma vie, j’avais cessé un temps de penser à Sinestra, partie régler une dette pour sa famille. Si je m’en tenais à ce qu’elle m’avait annoncé, elle devait être à présent de retour. Ou du moins, elle le serait quand j’arriverais dans la cité Elfique. Il était plaisant d’à présent voyager dans un but précis, et non plus d’errer au grès des vents. Au début, j’avais pensé que rejoindre la Caste de Dragonniers m’aurait ôté une certaine forme de liberté mais je n’avais pas cette sensation. Au contraire, même.

J’avais donc décidé de faire un crochet par Gloria. Je devais récupérer là-bas quelques affaires que j’avais laissées lors de ma visite pour rencontrer le Régent et, finalement, c’était l’occasion. En réalité, j’avais encore un peu de mal quand il était question de rester trop longtemps dans les grandes villes. Je ne m’étais guère habitué à cet aspect et mon esprit aventurier refusait de se sédentariser. A peine arrivé dans la grande cité Glorienne, je me languissais déjà de repartir. J’avais encore beaucoup de choses à faire, et certains endroits n’étaient de toute façon pas réputés pour être particulièrement bien fréquentés. Il allait, de toute façon, falloir que je m’habitue à cette vie où je n’irais pas toujours où je voulais. C’était nouveau, et un tournant radical dans ma vie, surtout au vu de ce que j’avais pratiquement toujours connu.

Après avoir récupéré mes affaires, je fis vérifier mon équipement une nouvelle fois par un ami d’Alvis. La lance bien particulière que le forgeron m’avait confiée était encore complexe à manier, mais le reste de mon équipement, c’est-à-dire mon armure et mes bâtons, s’adaptaient plus facilement. En fait, ma nouvelle carapace de cuir était plutôt similaire à celle que je portais jusqu’alors et, mis à part la couleur, je ne sentais pas vraiment de différence notable. A part le puissant enchantement, bien sûr. En ce qui concernait ma nouvelle arme, j’avais réussi à l’enchanter selon l’ancienne volonté de Laurelin et, même si je ne doutais pas que ça puisse me servir à l’avenir, je me demandais tout de même si son maniement serait aussi instinctif pour moi qu’Alvis me l’avait dit.

Récupérant mon équipement, et sortant de mes pensées, je prenais la route de la sortie, et je quittais Gloria. Prenant la route principale, je bifurquais au bout de quelques heures à travers une légère forêt. Non pas que je voulais que mon comportement soit suspect, c’était surtout et avant tout par une habitude instinctive. Je marchais alors parmi les arbres, savourant fraichement ce petit raccourci tranquille, quand soudain, mon oreille capta en frémissant un bruit. Même si ces sons étaient légions dans les territoires boisés et sauvages, je sentais que celui-ci était différent. J’avais une drôle de sensation, mais je faisais mine de ne rien avoir entendu, les muscles tendus, et prêt à dégainer Ahavarion, attaché dans mon dos.

Il y avait de quoi se sentir observé quand on pénètre dans une forêt, même clairsemé. La vie y régnant à l'ombre des seigneurs de ces bois, aussi bien de jour comme de nuit. Chaque animal occupait un espace et un moment de la journée qui lui était propre, comme le voulait l'ordre naturel. Mais pour un Elfe, un proche de ce genre de nature là, il était aisé de percevoir ce qui dérangeait ce qui devait normalement s'y trouver. Plus encore quand on pensait être le seul bipède pensant dans les parages.

Un regard perçant s'était posé sur lui depuis que l'Oreille Longue s'était engouffré sous l'ombre des hauts feuillage. Le regard d'un rapace. Il s'était contenté de le fixer, de le détailler, avant de se rendre compte qu'il se dirigeait ver l'emplacement où campait temporairement sa ''maîtresse''. Sans attendre, il déploya ses ailes profilées et poussa un petit cri perçant, toujours en regardant l'Elfe. Sans attendre, il prit son envol et se faufila avec adresse entre les branches. Si Seö avait eu le temps de le détailler, il aura sans nul doute reconnu l'espèce, qui n'était pas un habitant habituel de cet environnement boisé. Et plus encore, malgré la dextérité de l'oiseau à s'envoler promptement : un harnais sur son fin poitrail. Un signe d'apprivoisement ?

Un calme étrange mais serein régnait désormais. L'épervier n'était plus là, mais quelque chose clochait en effet. Juste le temps d'entendre une corde se tendre quelque part dans un environnement très proche. La corde d'un arc qui grinçait avec douceur, soutenant une flèche. . Puis une voix féminine mais forte retentit :

''Vous êtes bien loin des montagnes, Messire Elfe''

Une haute silhouette humaine sortit doucement de l'ombre que provoquaient quelques épais arbustes. Une femme, d'une taille un peu supérieure au standard humain, avait un arc en main, flèche prête à être libéré de sa corde, mas pointée vers le bas. La femme, à la chevelure blonde lui tombant sur les épaules, regardait avec méfiance l'Elfe. Depuis qu'elle avait était partie à l'Ouest, elle restait plus prudente.

Elle fixait l'Elfe, guettant déjà sa réponse. Ou plutôt sa réaction, car elle n'avait pas vraiment posé de questions quand à sa présence ici.

Je ressentais toujours ce genre de pression dont je ne connaissais pas encore l’origine. Mes yeux se baladaient, concentrés, sur les différentes formes de la forêt. J’essayais d’en distinguer une plus particulière, moins commune, et surtout qui dénotait un peu avec le reste de la forêt. Pourtant, la présence, si toutefois présence il y avait, restait pour l’instant discrète, sans faire aucune faute. Il restait à déterminer ses intentions probables. Le problème, c’était qu’à partir du moment où quelqu’un vous observe en cachette, il est difficile de lui faire confiance. C’était un peu le sentiment que je ressentais. Soudain, j’entendis une corde se tendre. Je me figeais, entendant une voix féminine derrière moi. Nul doute qu’elle m’avait mis en joue, et son ton ne me disait rien qui vaille. Je levais les bras, lui montrant que je ne saisissais pas mon arme et que je n’en tenais aucune, avant de me tourner vers elle.

Elle était plutôt grande, blonde, avec de longs cheveux qui descendaient sur ses épaules. Son ton était plutôt agressif, sans sympathie, et ses yeux, vert émeraude, me dévisageaient avec méfiance. La phrase qu’elle avait utilisée était souvent employée comme une moquerie par les bandits et, même si elle n’en avait pas l’air, je ne pouvais pas exclure cette possibilité. J’évaluais alors mes chances. Elle avait l’air plutôt costaud et athlétique, elle était également un peu plus grande que moi. De plus, elle avait l’initiative du combat et, le temps que je puisse dégainer le Chante-Acier, elle m’aurait abattu deux fois. Je tentais de lui sourire, avant de lui répondre, sur un ton plutôt doux et calme.

« Et bien… Je ne savais pas qu’il était si mal vu de se balader en forêt… Vous accueillez chaque voyageur avec la même verve ? » Dis-je, lui souriant légèrement, les bras toujours levés. « Si vous en avez après… Mon argent ou d’éventuels bijoux, je vous les lègue de bonne grâce. » C’était un coup de bluff. Je n’avais pas suffisamment d’argent ni de bijoux sur moi. Je portais doucement la main à ma ceinture, la regardant et lui indiquant de ne pas tirer, pour capter son intention et détacher son regard de mon autre main. A l’aide de cette dernière, je captais les rayons du soleil dans mon poing, pour canaliser mon hypnos. Puis, soudain, je dirigeais brusquement mon poing vers ses yeux avant de rouler sur le côté pour éviter son probable tir, tout en dégainant Ahavarion. Profitant de son éventuelle confusion, je tachais de combler la distance qui nous séparait avant qu’elle n’ait le temps de tirer à nouveau.

Sort et Arme a écrit:

Sort utilisé : Hypnos de lumière – Correct
Ce sort génère des lueurs de couleurs changeantes qui attirent l'attention des personnes présentes dans la zone d’effet, allant de la simple distraction momentanée à la réelle fascination : en effet les personnes ayant une faible volonté mentale ou moins puissante que le mage peuvent être affectées au point de ne plus prendre garde à ce qui les entoure. Les créatures aveugles sont immunisées contre ce sort.

Geste clé : lever le poing vers le soleil et le fermer comme si l'on voulait en emprisonner les rayons lumineux, puis diriger son poing vers la ou les cibles en l'ouvrant, libérant alors les différentes lueurs ainsi créées.

Arme dégainée : Ahavarion, le Chante-Acier
Arme d'hast unique
Une arme étrange, composée d’un manche et de deux lames légèrement incurvées situées à chacune de ses extrémités. Le manche est en bois blanc, et le tissu qui le recouvre est beige.
Enchantement : Efficacité - Draconique [+1 à la maitrise de l'arme]
Enchantement : Résonance - Draconique [L’acier des deux lames de la lance produit des vibrations conséquentes dans les armes et armures en acier des individus ayant été en contact avec la lance. La résonance vient gêner les déplacements et leur maniement, leur apportant un malus (jusqu'à -5 en intrigue) à leur utilisation. La résonance n’a effet que sur les armures et armes métalliques. L'effet se dissipe quelques minutes après avoir touché la lance (1 tour d'intrigue) et peut se réappliquer si le contact se fait à nouveau]

Petite image ici

C'était qu'il paraissait se moquer d'elle celui-ci ! Mais les Elfes pouvaient avoir un humour bien à eux, quelque soit les circonstances. Chose certaine était qu'elle restait prête à user de son arc pour décocher sa flèche. Elle n'aurait qu'à lever ses mains pour l'abattre sur place. Mais fallait-il savoir s'il était dangereux ou pas.

''Je ne suis pas un brigand. Mais votre venue m'a surprise. Surtout que...''

Le subterfuge de l'Elfe fonctionna et elle fut éblouie par le sort qu'il venait d'user. Elle recula de quelques pas, cherchant à se mettre d'office hors de portée d'une possible attaque, brandissant sa flèche vers là où se tenait l'Elfe quelques secondes avant. Les yeux clignaient sans cesse pour chasser les effets de l'éblouissement. Mais cela ne sera pas suffisant. Et avec un tel acte, elle pourrait le flécher sans rien lui demander de plus. Après tout, elle défendait sa vie non !

Le temps qu'elle retrouve un semblant de vue, comme si elle se trouvait dans une phase irréelle. L'inconnu elfique était en train de se diriger vers elle, son drôle de double-lame fendant les airs. Elle, elle sentait ses doigts se crisper sur la corde de son arc, prête à la lâche pour libérer la flèche et planter son adversaire avant qu'il ne l'entaille. Et dans cet instant qui paraissait se découler au ralenti, on entendit le cri perçant d'un oiseau de proie furieux.

L'épervier venait d'entrer en scène lui aussi et passa comme une flèche couverte de plumes sous les yeux de l'Elfe. Un autre cri perçant retentit sous les feuillage et il repassa à l'action, frôlant le visage de l'elfe. Avec l'agilité propre à ces rapaces, une serre entailla le tissu qui couvrait les épaules de l'attaquant. Un bruit fin d'un tissu se déchirant se fit entendre, mais très très finement.

'' 'Cha ! Assez ! ''

L'épervier poussa un cri de protestation et s'envola dans les frondaisons. Sighild avait sa flèche pointée vers l'Elfe. Elle avait profité de l'assaut de son ami à plumes pour reprendre la main.

''Il y a méprise, homme des bois. Une véritable méprise. En plus... si j'étais un bandit, je ne crois pas que j'aurai perdu de temps à faire un brin de causette...''

Elle détendit son arc, montrant qu'elle n'était pas là pour le dépouiller comme l'elfe l'aurait cru.

''Ca va mieux comme cela, ou alors il faut que je vous assomme et que je vous attache par la suite pour savoir ce que vous faites ici ? ''

[HRP : si soucis, hésite pas à me mp ]

Je n’avais effectivement pas vraiment écouté la réponse de l’inconnue alors que je tentais de la faire tomber dans mon piège. Ce dernier fonctionna d’ailleurs et, profitant de l’instant que m’offrait la petite diversion que j’avais mise en place, je me ruais en avant, faisant tournoyer Ahavarion. Je n’avais pas en tête de tuer ni même de blesser mon adversaire, mais je voulais simplement la mettre dans une position ou continuer le combat serait vain pour elle, tout en gardant en tête le fait qu’il puisse y avoir ses compagnons dissimulés non loin. Ma ruée aurait fonctionné sans encombre sans l’intervention d’un oiseau de proie. J’avais été négligeant, et n’avais pas prévu cette possibilité. Je parvenais de justesse à esquiver l’assaut de l’oiseau qui visait mon visage, et ses serres ne rencontrèrent que le haut de ma cape, qu’il déchira légèrement.

Cette esquive m’avait de toute façon faire perdre l’avantage que je m’étais constitué. J’allais l’atteindre au moment où elle pouvait décocher sa flèche, et il était bien difficile de savoir qui allait pouvoir s’en tirer sans encombre. De toute façon, je n’avais plus vraiment le choix. Aussi, après une rapide roulade en avant, j’arrivais à sa hauteur, sa flèche pointée sur ma tête, et l’une de mes lames frôlant, quant à elle, sa cuisse. Nous nous stoppâmes ainsi, marquant la fin de notre fulgurant échange. Son cri pour stopper son oiseau me fit comprendre que je m’étais probablement fourvoyé quant à ses intentions. Aussi, au même moment où elle abaissait son arc, j’abaissais moi aussi ma lance, puis je la fixais dans mon dos, avant de détendre mes muscles et offrant un sourire à l’immense femme devant moi.

« Oh. Excusez-moi. A vrai dire, certains bandits sont plus que loquaces et aiment bien fanfaronner avant de commettre leurs méfaits, et je dois dire que votre phrase m’a fait penser à certaines de leurs tirades. De plus, il n’est guère engageant de voir un arc braqué sur soi lors d’une première rencontre. » Mon ton et mon attitude avaient changé du tout au tout. Je reconnaissais avoir commis un assez gros impair et je ne souhaitais pas plus que cela continuer dans mon erreur. Je n’avais finalement aucune raison d’en vouloir à la jeune femme. Je lui tendis alors amicalement la main, toujours souriant, montrant clairement que je ne tenais plus compte de ce qui s’était passé plus tôt et que j’espérais qu’il en aille de même pour elle.

« Je me nomme Seö. Seö Wënmimeril. Et ma présence dans ses bois est surement due au fait qu’il s’agisse d’un raccourci qui risque de m’aider dans mon voyage. Et vous, que faites-vous seule au milieu des bois ? Il est assez rare de croiser une glacernoise dans cette région. » Il était évident qu’elle était originaire du peuple du Nord. Sa taille, ses cheveux clairs et ses yeux bleus trahissaient ses origines.

Au moins, l'elfe ne paraissait pas dénué de raison et avait vite compris qu'il n'était pas tombé sur de la vermine. Sighild hésitait encore quelques secondes à remettre son arc à son épaule. Des Elfes fourbes, il en existait malheureusement. Mais au vue de son changement spontané de ton et d'attitude. Mais elle finit par le mettre à sa place, en travers de son dos, corde toujours en place. On ne savait jamais ce qui pouvait encore se trouver dans les bois.

Elle avait manqué de sourire quand à sa manière de causer. Elle parler comme ces rustres de bandits ? Il faut dire qu'elle se mettait à ce niveau là pour le premier inconnu potentiellement dangereux qu'elle croisait, histoire de bien se faire comprendre. Mais maintenant que l'étranger était identifié et considéré comme non dangereux, elle pouvait se détendre. Et lui aussi d'ailleurs.

''Je ne me voyais pas faire la causette de rencontre avec un parler digne des cours de nobliaux. Et il est vrai que de croiser une autre personne armée ne donne pas l'impression immédiate qu'elle soit pacifique. Mais en ces temps troublés, je prends mes précautions. L'essentiel est que nous nous sommes pas étripés l'un et l'autre. On était bien parti, hein ?''

L'elfe avait tendu la main, qu'elle attrapa pour la lui rendre en une poigne digne des Nordiques. Pas trop serré non plus, elle pourrait lui broyer la main et lui faire croire qu'elle lui en voudrait de l'avoir attaquée. Et elle se présenta à son tour, avec un sourire plus léger que Seö.

''Enchanté. Je me nomme Sighild Arnbjorn, Fille d'Alberich. Pour ma part, je tentais de chasser. Même si je suis originaire des montagnes, les forêts ne me sont pas inconnues. Chasser pour me nourrir et de quoi vendre un peu sur le marché. Il faut gagner sa croûte. Un raccourci dites-vous ? A travers les bois hors des sentiers ? Alors vous n'êtes pas à votre premier voyage pour traverser ces lieux en toute confiance ? ''

A moins que l'Elfe ne soit fier comme un paon et ne voulait pas avouer s'être perdu. Mais s'il avait un côté un peu arrogant comme cela, il aurait pris la Nordique sur un ton et un air un peu différent de ceux qu'il affichait.

''Où vous rendez vous, Messire Wënmimeril ? Une question sans doute un peu indiscrète de la part d'une Nordique rarissime au milieu de ces bois. ''

Elle ne put s'empêcher de rire à sa propre réplique.

La glacernoise sembla hésiter un instant, puis rangea finalement son arc. Visiblement, si mon ton semblait l’avoir surprise au premier abord, elle n’était, comme moi, pas du genre à tenir rigueur de ce qu’il venait de se passer. J’avais commis une erreur, et elle ne m’en tenait visiblement pas plus rigueur que cela. C’était quelque chose que j’appréciais, indéniablement. Et puis, elle paraissait à présent bien plus amicale. Lorsqu’elle se saisit de ma main tendue pour la serrer, je devais bien avouer m’attendre à une poigne bien plus ferme et solide. Elle devait sans doute prendre soin de ne pas me faire perdre ma main tout de suite, ce qui m’arracha un léger sourire. Je lui répondais alors, son nom sonnant comme s’il était déjà connu à mes oreilles.

« Vous avez raison, Sighild, si vous permettez que je vous appelle ainsi. Quand à mon parlé de nobliau, je dois bien vous avouer que vous me prêtez un statut bien loin de celui qui est le mien. Je ne suis pas du tout issu de la noblesse, et je dois dire que j’ai presque passé plus de temps avec les humains qu’avec les miens… » Je lui souriais, avant de reprendre. « En revanche, votre nom ne m’est pas inconnu… Je me serais souvenu si nous avions déjà combattu côte à côte… » Mon ton était pensif, à mesure que je réfléchissais. Pour ne pas la faire attendre, je mis mes interrogations dans un coin de ma tête avant de poursuivre.

« Oh, et bien, c’est en quelque sorte un raccourci qui n’en est pas un. Disons que le chemin que j’emprunte n’est pas le plus court mais surement le plus agréable, si on exclut toutefois les attaques de rapaces qui peuvent survenir… » Dis-je sur un ton amusé.

Quant à où je me rendais, je ne savais pas vraiment si j’avais le droit d’en parler. A vrai dire, c’était ma première réelle mission pour la Caste et Lewyn était resté assez évasif quant à sa confidentialité. Lewyn… Sighild… Je me souvins d’où j’avais entendu ce nom. Je ne pus m’empêcher de sourire devant cette ironie du sort, avant de reprendre.

« Oh mais bien sûr ! Je savais bien que j’avais entendu votre nom quelque part ! Vous êtes la compagne de Lewyn Viladric ! » M’exclamais-je avec enthousiasme. « Il m’a longuement parlé de vous. Je suis l’un de ses amis et j’appartiens, comme lui, à la Caste. » Je souriais tranquillement à Sighild, étonné de pouvoir rencontrer l’aimée dont mon ami et collègue m’avait tant parlé dans des circonstances aussi particulières

La tension qui avait vu le jour entre les deux individus s'était vite résorbée pour ne laisser place qu'à la sérénité. Comme quoi, même devant l'inconnu, on savait maintenir la raison près de soi pour éviter des effusions de sang.

Sighild avait hoché la tête avec un léger sourire, pour lui permettre de directement l'appeler par son prénom. Elle avait haussé un sourcil quand au fait que son nom n'était pas connu aux oreilles pointues du nouveau venu.

''Peut être au sein des Protégés il y a quelques années. Car si je vous avais eu vraiment à mes côtés, physiquement parlant, je vous aurai reconnu, au lieu de vous pointer de ma flèche. Par contre, vous parlez quand même bien pour un Elfe qui passe beaucoup de temps parmi les Hommes. Mais au moins, vous n'êtes pas un nobliau. Rassurez-vous, je tolère très bien les nobliaux quand ils ne s'amusent pas à me prendre de haut. ''

Si cela n'était pas affiché un des traits de caractères nordiques. Sighild avait déjà eu affaire à des gens prétendument de haut rang.

''Un raccourci qui aurait pu vous faire tomber sur des mauvaises rencontres, même si elles sont plus rares au fur et à mesure qu'on s'enfonce dans les bois. Mais à voir votre prompte réaction, je ne doute pas un seul instant que les malveillants auraient passé un sale quart d'heure en votre compagnie. Quand aux attaques de rapace...''

Elle avait levé la tête, juste à l'instant où son épervier poussa un cri de protestation.

''On dirait que cela n'est pas du goût de 'Cha. Je vous rassure, les éperviers n'attaquent pas comme cela. Du moins les plus sauvages.''

Puis elle manqua d'écarquiller des yeux devant l'exclamation de Sëo. Puis son sourire s'élargit à l'évocation du nom de Lewyn.

''Cela explique mieux pourquoi mon nom ne vous était pas inconnu. Ainsi donc, vous êtes de la Caste vous aussi ? J'ai eu de la chance de pas vous avoir fléché. Alors dites-moi, que vous a-t-il raconté donc ? A vous entendre, c'est plus qu'une joie pour vous de me croiser. ''

Je ne pus m’empêcher de sourire concernant la prétendue relation entre Sighild et les nobles qu’elle avait pu croiser. J’étais très loin d’en être un, mais j’avais appris à faire bonne figure, surtout lorsque je croisais un inconnu, et surtout depuis que j’avais intégré la Caste de manière officielle. Maintenant que je savais qui était la protagoniste en face de moi, je n’avais effectivement plus trop de raison de respecter un quelconque protocole. Surtout que, finalement, elle paraissait plutôt sympathique.

« Oh, je n’ai pas vraiment de problèmes avec les nobles non plus, bien que nous soyons assez différents. Je tâche juste d’être courtois avec les étrangers, car on ne sait jamais trop sur qui on peut tomber… » Je fis un léger clin d’œil à Sighild, soulignant l’ironie de notre rencontre.

En parlant de cette ironique rencontre, sa remarque me fit sourire, même si elle était légèrement faussée. J’avais tout de même commis une erreur et puis, si elle avait réellement eu des intentions belliqueuses, j’y aurais sans doute laissé quelques plumes. Voir même plus que ça.

« Je dois bien avouer que, si vous aviez réellement voulu me causer du tort, j’aurais tout de même eu du mal à m’en sortir indemne au vu de vos réflexes. Une chance pour nous deux que nous ne soyons pas allés plus loin… » Je lui souriais, avant de reprendre. « Quand à Cha’, puisque c’est son nom, je me doute qu’elle ne m’aurait pas attaqué si je ne m’en étais pas pris à sa maitresse. Ça doit d’ailleurs être assez rassurant d’avoir une telle protection proche de vous. »

Lorsque je parlais de Lewyn, le visage de la glacernoise sembla s’illuminer, preuve, s’il en fallait encore, de l’affection qu’elle vouait au dragonnier. Je ne pus m’empêcher de sourire en voyant ça, avant de lui répondre, sur un ton légèrement amusé.

« Et bien, malgré les circonstances originales de notre rencontre, je suis en effet très heureux de vous voir et de savoir qui vous êtes. Lewyn est un ami très proche et fait partie des origines de mon entrée dans la Caste, aussi, je suis plutôt content de voir avec qui il partage des sentiments aussi forts, ce qui est normal. Quand à vous décrire, j’aurais du mal à en restituer la totalité, mais je vais effectivement pouvoir réellement l’embêter avec la différence de taille dont il m’avait parlé » Lançais-je sur un ton amusé. Leur différence de taille était effectivement flagrante mais je ne trouvais pas vraiment ça gênant, j’appréciais toujours de lancer quelques piques au vampire, puisqu’il ne se privait pas de le faire lui-même.

Elle sourit.

''Au moins, nous partageons un point en commun. Et je suis tout à fait d'accord avec vous. On ne sait jamais sur qui on peut tomber. Mais quand le voile est retiré et qu'on sait à qui on s'adresse, les choses vont largement mieux n'est ce pas ? ''

Chose certaine était que si l'affrontement avait eu lieu, les dégâts auraient été pour eux d'eux. La Nordique ne doutait pas des capacités de son interlocuteur elfique. Quand elle avait contemplé sa vitesse de réaction, elle était sûre et certaine que malgré le tir réussi d'une de ses flèches, il aurait eu assez d'élan et de rapidité pour sévèrement la toucher de son arme.

''Je pense que je n'en serai pas ressortie non plus indemne. Vous êtes rapide en votre genre. Peut être qu'en se causant du tort mutuellement, en fait, on se serait entre tué. Belle perspective que celle-ci. Mourir en même temps à cause d'une dissension bête et ridicule. De quoi alimenter le répertoire des troubadours et des conteurs. On serait passé à postérité...''

Elle fit semblant d'être songeuse, replaçant une mèche de cheveux rebelle derrière son oreille.

''Quoique... pour peu qu'on n'aurait retrouvé nos corps. Mais passons ! Nous ne nous somme pas étripés et nous sommes là justement à en rire. Pour mon épervier... hum, méfiez-vous. Les rapaces ont leur caractère. Même s'il n'y paraît pas, ils peuvent être redoutables. Par contre pour la protection, je tiens plus à sa survie qu'à faire usage pour ma propre protection. 'Cha me sert pour autre chose que l'attaque. Elle a des serres acérées, mais elle n'est pas taillée pour se battre comme vous et moi. Elle a agi de sa propre initiative ce coup ci. Vous avez de la chance d'avoir encore vos deux yeux. ''

Son rapace n'agissait que s'il était sûr de son coup. Comme la plupart des oiseaux de proie. Et puis, par habitude, Sighild et 'Cha savaient se synchroniser sans avoir à communiquer par les cris ou l'usage de la parole -dans le cas de la Nordique.

Puis elle avait écouté avec un grand sourire les mots de Seö. On sentait son enthousiasme et elle comprit rapidement que Lewyn et lui étaient aussi de très bons amis.

''Le bougre ne m'a pas parlé de vous. Sans doute que vous vous êtes croisé bien après. Au moins, je vois qu'il est tombé sur un très ami. Je ne serai pas étonnée que vous êtes aussi rigolard et joyeux que lui quand il est de bonne humeur, me trompai-je ? Et si je vous escortais pendant que nous continuerons de parler ? ''

Elle n’avait final pas tort. Nul doute que, si nous avions poursuivi cet assaut mutuel, chacun d’entre nous y aurait laissé quelques plumes. Mais c’était hors de propos, maintenant que le malentendu était dissipé. Je souriais donc à mon interlocutrice, avant de lui répondre.

« La perspective de rester dans les mémoires communes pourrait m’aller mais… » Je m’interrompais, semblant songeur mais volontairement amusé, démontrant de mon ton plaisantin. « Peut être autrement finalement. Et puis, je pense qu’effectivement Lewyn m’en aurait voulu d’abimer sa chère et tendre, même si je l’avais payé de ma vie un instant plus tard. » Je fis alors un clin d’œil à Sighild, avant de reprendre.

« Je vois… » Dis-je à propos de l’oiseau vorace qui avait bien failli m’éborgner. « J’imagine qu’effectivement, un compagnon comme le vôtre ne dois pas être réellement fait pour la guerre. Une chance pour ma vue d’un côté, car votre rapace est incroyablement rapide. J’ose d’ailleurs espérer qu’elle ne m’en veuille pas trop pour cette rencontre plutôt… mouvementée dirons-nous. » Je conservais mon ton enfantin, une certaine sérénité retrouvée. J’appréciais la glacernoise mais, finalement, ça n’était pas si étonnant. Lewyn était mon ami et je ne doutais pas le moins du monde du bienfondé de ses choix. Si elle était son âme sœur, il n’y avait nul doute sur le fait que je sache l’apprécier. Je répondais donc favorablement à sa demande de m’accompagner, lui souriant toujours.

« Je ferais avec plaisir quelques pas en votre compagnie, si ça ne vous écarte pas trop de votre route. Effectivement, j’ai rencontré Lewyn finalement assez récemment, à Caladon, alors qu’il venait faire ajuster sa nouvelle armure. Je ne suis pas forgeron mais un très bon ami à moi l’est, et je lui rendais justement visite. Enfin, toujours est-il qu’après une petite discussion, nous avons échangé quelques passes d’armes et nous sommes allés flâner dans la ville. Voilà, grosso modo, les termes de notre rencontre. » Je lui souriais, repensant au solide affrontement qui nous avait opposé.

Quant à être aussi jovial que Lewyn, je ne m’étais jamais vraiment posé la question. Il était vrai que nos comportements allaient plutôt bien ensemble et que je n’étais pas quelqu’un de particulièrement réservé. Je poursuivais alors pour mon interlocutrice.

Sighild avait bien ri pour certains des propos de l'Elfe.

''Tout dépend si nous ne nous serions pas tués mutuellement. Là, je ne vois pas comment Lewyn aurait pu réagir contre vous... hum, en vous exposant en trophée dans sa chambre peut être ? ''

C'était un peu glauque dit comme cela, mais la Nordique, tout comme le reste de son peuple, avait un humour bien particulier à certains moments. Au moins, cela démontrait qu'elle se sentait plus à l'aise avec l'Elfe que précédemment. Et c'était bon signe ! Le peuple glacernois était réputé pour être assez renfermé sur lui-même vis à vis des relations avec les autres espèces bipèdes.

'Cha sentant qu'on parlait d'elle, fixait le duo de bipèdes. Elle étira ses ailes un instant, toujours ses yeux perçants fixés sur eux. Elle claqua le bec et décida de faire la toilette de ses longues plumes alaires. Sighild la regarda un instant et adressa un sourire rassurant à l'égard de l'Elfe.

''On dirait que non. Mais les rapaces ne connaissent pas la rancoeur. Donc vos yeux seront épargnés maintenant qu'elle a vu que nous causions. Quand à participer dans des conflits.... Elle fait le choix ou pas de me suivre. Je ne la force pas à se battre quand son instinct la pousse à aller vers des cieux plus cléments. Mais là, vous allez être honoré de ma présence et de la sienne. Elle aussi participera à votre escorte. N'est ce pas 'Cha ? ''

En entendant son surnom, l'épervier leva la tête. Elle poussa un bref glapissement et prit gracieusement son envol, disparaissant au dessus des sommets verts des arbres de la forêt.

''Et voilà, une escorte terrestre et une autre aérienne. Lewyn risque d'être envieux en entendant cela quand je le croiserai. Ne vous inquiétez pas pour le détour, rien n'urge pour mes affaires. Ainsi donc, après l'aide pour l'armure, vous avez échangé quelques passes martiales. Le connaissant, il a dû retenir ses coups non ? ''

Il était un vampire, doté d'une force supérieure. Quoiqu'en en y repensant, Seö devait être aussi fort que Lewyn.

''Une rencontre classique, mais qui a porté des fruits excellents. Une bonne chose. NOus, notre rencontre est totalement à l'opposé de celle-ci. ''

Je souriais à la glacernoise lorsqu’elle évoqua l’idée que le vampire m’accroche en trophée dans sa chambre. Il était vrai que j’avais déjà croisé des Glacernois et leur franc parlé m’avait toujours beaucoup amusé. Ils pouvaient parfois passer pour des rustres, mais, si on s’intéressait un tout petit peu plus à eux, c’était bien loin d’être la vérité.

« Et bien… J’imagine qu’il serait de mauvais ton d’exposer une tête d’elfe dans sa chambre, et spécialement si l’exposant est un vampire, vous ne pensez pas ? Je pense que Lewyn aurait conservé toute sa lucidité pour ne pas commettre une erreur, doublée d’une faute de gout, aussi flagrante. » Répliquais-je sur un ton amusé.

J’observais alors le rapace qui semblait s’être désintéressé de nous pour un moment. Je n’avais bien évidemment nulle rancune envers l’animal et je ne le craignais pas particulièrement, mais je devais bien avouer que son efficacité pouvait être redoutable, sans nécessairement parler de combat. J’étais bien loin d’être de ceux qui avaient vocation à entraîner des animaux pour les faire combattre à leur place. Je répondais alors à mon interlocutrice.

« Je comprends, je ne suis de toute façon pas moi-même très favorable quant au fait de faire se battre des animaux. Je dois vous avouer que j’ai déjà du mal à considérer qu’en dresser un est une mauvaise idée alors… Je suppose que c’est une habitude que j’ai héritée de mon peuple. Il en fallait bien une, de toute manière. » Rétorquais-je sur un ton amusé.

Je ne pus m’empêcher de laisser échapper un petit rire en entendant les propos de la jeune femme. Lewyn ? Y être allé de main morte ? Finalement, bien que nous nous battions tous les deux avec des armes factices, nous n’avions nullement fait de cadeaux à l’autre. Il était ressorti de ce combat un bon lot d’ecchymoses et de blessures légères en tout genre, ce qui, en y repensant, nous amusait beaucoup.

« Et bien… Si vous voulez tout savoir, mis à part le fait que nous étions équipés d’armes factices qui n’étaient pas directement offensives, je dois bien avouer que nous ne nous sommes pas épargnés, bien loin de là. Enfin, pour ma part, je ne l’ai jamais vu se battre au sommet de toutes ses capacités, et, comme je vous l’ai dit, je n’ai pas non plus utilisé tout mon arsenal. Après tout, j’ai peut-être aussi du mal à vraiment définir ses capacités, nous n’avons échangé qu’un seul assaut et quelques passes d’armes… » Je souriais à Sighild, avant de poursuivre. « Et vous alors ? Culturellement, je sais que votre peuple ne porte pas le peuple de la nuit dans son cœur, cela ne vous a pas causé du tort ? »

Elle avait fait mine de le regarder avec un drôle d'air, jouant un faux début de dégoût.

''Non, finalement, non... Cela aurait été de mauvais goût en effet. et le pauvre... A devoir se réveiller en voyant vos yeux fixes le regarder et de donner l'impression de le suivre du regard... Non. ''

Et avant même qu'il n'ait une mine déconfite à cette idée, elle se mit à rire.

''Allez, je plaisante. Entre nous, nous sommes loin d'être des sanguinaires et d'arriver à de telles extrémités. Heureusement que ce n'était qu'une simple plaisanterie... de mauvais goût. Qui vient de moi d'ailleurs. Désolé si cela vous a un peu froissé. Par contre, je suis tout à fait d'accord avec vous quand à votre avis du dressage imposé pour tuer... Ce n'est pas une mauvais habitude, cela en est même une bonne je trouve. Le Peuple Elfique a des notions qui font défaut à bien des Armandéens je trouve. ''

C'était là un bien étrange aveu de la bouche de la Nordique. Son peuple n'était pas réputé pour être ouvert mais de là à apporter un avis positif sur quelques points d'un autre peuple, voir même d'une autre race... il y avait de quoi tomber des nues. Mais la paix permettait l'ouverture des esprits, même ceux un peu récalcitrants au changement. Et puis, si Seö était devenu ami avec Lewyn, c'est que lui-même était capable d'ouverture d'esprit.

Puis quand à la rencontre entre le vampire et l'elfe, elle parut déçue quand Seö avoua avori fait usage d'armes factices.

''Pas de vraies armes ? Bon en même temps, le but était de s'éprouver, pas de vous massacrer... Mais avec des armes plus réelles, le peu d'échange que vous avez faits tous les deux aurait été plus intéressant. ''

Elle n'était pas parue très offusquée quand son compagnon de route évoquait la haine que les Nordiques avaient longuement éprouvée envers les vampires. C'était un fait bien connu, onne pouvait le cacher. Et pourquoi le faire ?

''On peut dire que si. Mon peuple a toujours chassé les vampires. Nous avions même un rite de passage qui consistait à chasser des vampires pour ne plus être considéré comme un enfant... pour devenir un homme ou une femme adulte. Maintenant que Glacern n'est plus, bien des choses ont changé. Certains des miens n'accepteront jamais qu'il puisse y avoir de bons vampires. J'ai eu moins de difficulté à m'adapter pour la part. Mon père, qui n'était pas Glacernois, m'a enseigné bien des choses... qui m'aident bien aujourd'hui. Mais qui serait une hérésie pour certains que je connais encore. ''

Et pendant qu'ils conversaient, ils continuaient de progresser dans la forêt.

''Si on tombe sur une taverne à la sortie des bois, je vous paie un verre ? ''