18 août de l’an 7
En soirée,

Orfraie avait prévu un petit tête à tête avec Firindal, la soirée s’annonçait donc particulièrement agréable. Le temps était clair, il n’y avait pas de nuages dans le ciel. Cela promettait une voûte céleste des plus magnifique lorsque le soleil ce serait couché. Orfraie aimait observer les étoiles et le petit dragon également. Ils faisaient des théories ensemble et la Liée de Feu lui apprenait ce qu’elle savait. Maintenant qu’elle avait retrouvé ses souvenirs, elle avait tout le loisir de lui expliquer ce qu’elle avait notamment apprit auprès des Baptistrels. Bien entendu, elle avait également partagé ses souvenirs des Dragons avec Firindal, ce dernier pouvant ainsi admirer ses ancêtres… En vérité, elle lui avait tout montré. Elle n’avait pas de secret pour sa demie-âme.

Firindal tranquillement juché sur ses épaules, Orfraie se dirigeait vers un coin tranquille de l’Aile des Lames Écarlates. Ceux qu’elle croisait sur son regard dévisageait le Dragon de Jade et sa Liée, le plus souvent avec un sourire aux lèvres. Un nouveau dragonnier signifiait la consolidation de la magie, mais aussi deux êtres puissants pouvant grandement aider à l’avenir. L’Ancestrale avait fini par s’habituer aux regards et aux rumeurs. Si autrefois celles-ci portaient sur sa condition d’Immortelle et de princesse déchue, aujourd’hui elle entendait davantage « Liée », « Dragonnière », « Dragon » et ce genre de chose. Pour son plus grand plaisir.

La Liée ouvrit une porte et arriva sur un balcon. Il s’y trouvait désormais une table et deux chaises, installés là par Orfraie elle-même. Le lierre qui parcourait les mur faisait de ce balcon un écrin de verdure, calme et apaisant. Ses propres quartier n’étaient pas loin mais personne ne venait ici généralement, sauf Enetari qu’elle avait déjà croisé. Firindal sauta sur la barrière de pierre sculptée et la vampire le câlina longuement, posa son front contre le sien tandis qu’elle grattouillait le dessous de sa tête du bout des doigts. A travers leur lien, elle lui envoya une vague d’amour pur avant de s’écarter. Elle plongea alors la main dans la sacoche qu’elle avait à la taille et en sortit deux objets : un calice doré et une réserve de sang. Elle versa le contenu de celle-ci dans le calice et en huma le parfum. Elle n’y toucha pas, car elle n’avait pas fini ses préparatifs. En effet, la Liée de Feu sortit une troisième chose de sa sacoche. Elle le posa devant Firindal et laissa se dernier découvrir ce que le petit paquet contenait : des morceaux de la meilleure viande.

# Bon appétit, mon amour. # lui envoya t-elle au travers du lien, déposant au passage un baiser sur sa tête écailleuse. Elle lui sourit avec amour avant de porter son calice à ses lèvres, savourant le goût du sang dans sa bouche.

Orfraie sourit. Du coin de l’œil, elle observait Firindal manger tranquillement sa viande. Effectivement, les cuisines avaient pour habitude de garder l'un des meilleurs morceaux pour le dragonnet. A chaque fois qu'elle y descendaient, les cuisinières ne manquaient pas de demander à la vampire quand pourraient-elles voir le dragon de Jade. Jusqu'ici, la dragonnière avait souhaité garder ce lieux secret mais l'insistance de ses femmes et la curiosité de Firindal – qu'elle sentait très bien – avait fini par avoir raison de ses résolutions.

# Demain nous irons ensemble te choisir les meilleurs morceaux. Il faudra également que tu apprenne à chasser par toi même. Quand tu seras plus grand les cuisines ne pourront plus te fournir de quoi manger, tu auras besoin de telles quantités qu'il n'en resterait plus pour les Humains. # Expliqua la Liée de Feu en souriant au Jade.

Elle porta de nouveau la coupe à ses lèvres, ce sourire flottant toujours sur ses lèvres charnues. Le sang dans sa bouche était un délice pour ses papilles vampirique et lorsqu'il coulait dans sa gorge, il apaisait le feu qui y régnait. Elle soupira d'aise, heureuse d'être en compagnie de son Lié pour ce repas. Elle réfléchissait encore à comment ils allaient occuper leur soirée lorsqu'elle vit Firindal se redresser sensiblement. La vampire avait tant été absorbée par ses pensées qu'elle n'avait pas entendu les bruits de pas. Via le Lien, Orfraie pu comprendre de qui il s'agissait. Deux Elfes… Et bien plus encore.

# Mon amour… Ce sont… Ma famille ... #

Quelques jours plus tôt, la vampire n'aurait pas réagit. Mais à présent elle savait qu'il s'agissait ni plus ni moins de sa mère et de son neveu. Comment devait-elle agir ?! Son esprit marchait à cent à l'heure. Orfraie sentait la colère affluer. Elle n'oubliait pas qu'elle avait été bannie, reniée par sa famille, par son peuple. Mais le ton de sa mère…. L'immortelle ressentait toute sa souffrance… Mais la Liée avait envie de les faire souffrir tout les deux pour l'avoir abandonné, pour avoir accepté de la déchoir, de ne plus la considérer comme l'une des leurs après tout ce qu'elle avait fait ! Elle avait donné sa vie pour son peuple … et en retour ils l'avaient reniés, tous autant qu'ils étaient ! Si la colère d'Orfraie s'était apaisée ces dernières semaines, revoir Aegnor et Nerwende ravivait celle-ci.
Imperceptiblement, la Liée de Feu tourna son regard vers Firindal. Ce dernier l'observait, plus que conscient des émotions de sa dragonnière.

Lentement, Orfraie expira puis se tourna d'un bloc, son calice à la main. Elle scruta les deux Elfes, remarquant bien entendu la façon dont sa mère s'accrochait à son neveu, comme si elle avait peur de tomber sous la douleur. La vampire avait envie de les prendre tout deux dans ses bras, comme elle avait prit Aramis contre elle, comme elle avait longuement étreint Harthea… Mais de l'autre, sa colère se ravivait. Elle voulait qu'ils souffrent. Elle voulait qu'Aegnor souffre, car c'était lui qui – au final – avait décidé qu'elle n'était plus Princesse, ni Générale, ni même Elfe. Le bleu royal de ses yeux était froid tandis qu'elle portait son calice à ses lèvres sans quitter les deux sylvains du regard. Elle but longuement devant eux, sentant leur malaise grandir à mesure qu'elle vidait sa coupe.

Lorsqu'elle eut terminé celle-ci, la vampire déposa l'objet sur la balustrade. Son regard croisa celui de Firindal et la Liée vint caresser ses douces écailles, comme pour chercher son courage. Puis elle soupira et releva son regard, un regard vide et lointain, vers les deux Elfes.

« Je devrais ? » mentit-elle en regardant sa mère droit dans les yeux, haussant même un sourcil pour marquer son interrogation.

La réaction de Nerwende fut immédiate et Orfraie sentit son cœur se serrer alors qu'elle regardait sa mère éclater en sanglot, s’agrippant au bras de l'Empereur pour ne pas tomber. Le regard vide et froid de la vampire glissa ensuite vers Aegnor. « Que me voulez vous ? » Lui demanda t-elle, sa voix vibrant d'une froide colère qu'elle peinait à contenir.

Orfraie avait été cruelle envers sa mère, elle le savait. Elle était en colère et c’était Nerwende qui avait tout encaissé. La vérité, pourtant, était que l’ancienne princesse était touchée de voir sa mère, sincèrement heureuse même. Le visage de Nerwende avait été l’unique chose dont elle s’était souvenu lors de sa renaissance. Sa mère restait à une place bien spécifique dans son cœur, tout proche de Firindal. Et pourtant, l’ancestrale l’avait blessé, elle n’avait eu aucune pitié. Et l’intervention de Firindal n’y changea rien. Le mal était fait, Orfraie avait blessé sa mère plus que de raison. La réaction de Nerwende fut donc plus que légitime et l’Ataliel sentit quelque chose de briser lorsque sa mère prit la fuite. La vampire fit un pas dans sa direction, prête à la poursuivre, mais se ravisa… Elle préférait lui laisser du temps… Elle irait la voir plus tard… après son entrevue avec Aegnor. L’immortelle déglutit alors difficilement et reporta son attention sur Aegnor et son lié, ces derniers échangeant ensemble. À travers le lien, Orfraie put voir ce que son neveu montrait à son jade.

Lorsqu’ils eurent fini, le regard volcanique de l’Empereur se posa sur sa tante. Celle-ci soutint son regard, une pointe d’arrogance au fond des yeux. Il lui rappela alors son passé de Baptistrelle et le fait qu’elle était une piète monteuse. Cela tira un sourire triste à l’ancienne princesse. Pour lui et son totem, peut-être, mais pour Nerwende… Orfraie avait su être convaincante pour elle. L’elfe poursuit, révélant qu’il savait qu’elle se souvenait sans en savoir la cause. Ainsi, Aramis ne lui avait rien dit… ?

L’immortelle demeura impassible tout le long de son discours. Elle sentait toujours la rage et la colère bouillonner. Il voulait lui faire croire qu’il savait comment elle se sentait . Mais il ne savait rien ! Il n’était pas à sa place ! il n’avait pas été là lorsque Orfraie avait massacré des gens pour se nourrir, arrachant des gorges à coups de crocs. Il n’avait pas souffert avec elle. L’Ancestrale se détourna de son neveu, s’approchant de la barrière. Ses poings étaient si fortement fermés que ses jointures étaient plus blanches que la craie. Du coin de l’œil, elle le vit lui tendre la main. Une partie d’Orfraie avait envie de s’en saisir, l’autre voulait l’arracher.

L’Ancestrale lui tournait toujours le dos lorsqu’elle lui répondit enfin, après un long et lourd silence.

« Je me souviens. Je me souviens de tout. Je me souviens quitter la forêt lorsque j’avais cent ans, y revenir après avoir brisé mon serment, servir mon peuple au Conseil pendant plus de trois cents ans, prendre les armes pour combattre les vampires, puis les Alayiens, puis Vraorg… Je me souviens pourchasser l’assassin qui a tenté de te tuer, je me souviens traquer Wintel… Et je me souviens mourir pour mon peuple. » l’Ataliel se tut, la vision soudainement troublée par de l’écarlate. L’émotion avait été palpable dans sa voix et menaçait de faire couler des larmes de sang. L’ancienne princesse prit le temps de les chasser de son regard avant de poursuivre, se tournant cette fois-ci vers son neveu. « J’ai tout sacrifié pour eux, Aegnor. Je leur ai donné ma vie et en échange, au moment où j’avais besoin de mon peuple, il m’a tourné le dos ! » S’écria cette fois Orfraie, incapable de garder son calme plus longtemps. Elle poursuivit, déversant cette fois toute sa rage et sa colère sur l’Empereur… lui qui pourtant n’avait rien pu faire pour empêcher son peuple de haïr l’ancienne princesse. « ET JE NE LE PARDONNERAI NI NE L’OUBLIERAI JAMAIS ! POUR L’ETERNITE ! »

Avec la plus grande violence, le poing de du vampire s’abattit sur la rambarde de pierre alors qu’elle se détournait vivement, dans un tourbillon de cheveux flamboyants. La pierre se fendit sous la force du coup alors que la vampire restait légèrement penchée en avant, haletante. L'émotion l'étreignait avec une force rare...

Orfraie, d’ordinaire si désespérément calme, venait de hurler. Pour Aegnor, ce devait être la première fois qu’il la voyait dans un tel état. La colère froide de l’elfe avait laissé place à une rage aussi flamboyante que sa chevelure.

La rage pulsait dans ses veines. L’Ataliel sentait le venin dans sa bouche et l’envie de mordre Aegnor s’insinuer dans son esprit. Sous le coup d’une rage si forte, le self-control de la jeune vampire menaçait de céder. Elle en vint même à se demander quel goût le sang d’Aegnor pouvait avoir…
Firindal, sentant sa Liée sur le point de perdre pied, vola jusqu’à elle et vint s’enrouler autour de son cou, comme il en avait très souvent l’habitude. Dans sa rage, Orfraie n’avait pas fait attention à la présence de Nerwende. Elle était trop concentrée pour tenter de refouler ses instincts, pour reprendre le contrôle sur la soif de sang qu’elle sentait poindre au fond de sa gorge. Le Liée de Jade fit alors quelque chose dont l’Ataliel ne le pensait pas encore capable : servir de passerelle entre les esprits des deux elfes et de la vampire. Cela eut le don de calmer instantanément l’immortelle, celle-ci désormais capable de ressentir tout l’amour d’Aegnor et de sa mère pour elle, mais également leurs craintes …Eux-mêmes pouvaient ressentir toutes les émotions contradictoires qui virevoltaient dans le cœur de l’ancienne princesse.

L’effort avait épuisé le très jeune dragon et Orfraie sentit celui-ci se détendre sur ses épaules. Désormais calmée, la vampiresse prit le temps de ramener Firindal au creux de ses bras – commet l’on pouvait porter un nouveau-né – et le couva d’un regard doux et emplit d’amour. La colère avait quitté les saphirs d’Orfraie, ces derniers ne reflétant plus que son calme habituel. # Merci, mon doux lié. Reposes-toi… Je t’aime. # Lui dit-elle avec une grande douceur. Elle lui transmit ensuite tout son amour via leur lien avant de déposer ses lèvres sur le sommet de son crâne écailleux, ses longues mèches flamboyantes dissimulant en partie son visage aux deux elfes.

Cette scène emplit de tendresse ne sembla guère perturber Aegnor, dont la voix teintée de tristesse résonna. L’Ataliel se redressa doucement et tourna son regard bleu roi vers son neveu, désormais bien plus calme. Elle savait l’avoir aimé, d’un amour fort et sincère, mais aujourd’hui elle ne ressentait plus vraiment cet amour. Elle savait que son ancienne elle tenait plus que tout à sa famille mais la nouvelle Orfraie ne pouvait qu’effleurer du doigt tout cela. Elle le savait, mais ne pouvait le ressentir. C’était très perturbant.
Dans les propos de l’Empereur, Orfraie décela une pointe d’ironie, mais également une crainte réelle. Devenir le nouveau Wintel. Non, bien sûr que non. Cela n’avait jamais été le but d’Orfraie. Combien même elle était très en colère contre son peuple, elle ne souhaitait pas sa destruction, loin de là. L’Éclair poursuivit, semblant se raviser. La colère de l’Ataliel était justifiée, mais d’un autre côté celle-ci comprenait également la haine que les elfes lui vouaient à présent. Elle n’avait, simplement, pas encore voulu y faire face. Elle avait eu envie être un peu égoïste, pour une fois, et penser à elle.

Les derniers mots prononcés par Aegnor eurent raison du peu de rancœur qu’il restait à Orfraie. Elle ne pouvait pas continuait à être en colère contre lui ou contre Nerwende. Lorsque la vampiresse répondit enfin à son neveu, sa voix s’était parée d’une tristesse et d’une lassitude nouvelle. « Je ne peux pas considérer Estëllin comme ma maison, Aegnor. Je ne le pourrais plus. Pas avant de nombreux siècles… Combien même mon peuple s’y trouve, je n’en fais plus partie. Je n’y serais pas la bienvenue et je n’y serais pas heureuse. Suis-je donc condamnée à donner sans rien avoir en retour si ce n’est de la souffrance ? » Lui demanda-t-elle, son regard s’attardant quelques instants sur Firindal. « J’ai déjà eu l’occasion de revoir de nombreux elfes, ici à Aldaria, depuis que j’ai retrouvé mes souvenirs. Certains sont heureux de me revoir, d’autres me haïssent, d’autres sont plus mitigés… Mais si je n’ai pas de dague entre les cotes c’est en grande partie grâce à Firindal. Personne ne s’en prendra à moi au risque de le tuer lui. » exposa la princesse avec tristesse. Elle aurait aimé qu’il en soit autrement, qu’elle soit acceptée malgré sa nouvelle nature. Certain l’avait fait, après tout, tel Harthea ou Lomion. « Mais lui ressent toute ma souffrance, toute ma tristesse et ma colère. Je ne veux pas lui imposer d’aller là-bas en sachant qu’il y sera forcément malheureux car moi-même je le serais. » Expliqua Orfraie en s’approchant de son neveu, transvasant le dragonnet quasiment endormit sur son seul bras gauche. « Mon seul réconfort serait de vous avoir, vous, ma famille. » Conclu cette fois-ci l’Ataliel avec douceur, levant doucement sa main droite pour la poser – avec délicatesse – sur la joue délicieusement chaude de son neveu. Elle-même, grâce au collier qu’elle avait autour du cou et dont le pendentif en rubis brillait faiblement, avait la peau agréablement chaude, ce qui pouvait surprendre. « Mais… Devant leur haine je ne sais pas si je serais capable de rester maîtresse de mes émotions. J’ai perdu le contrôle de moi-même devant toi et j’étais à deux doigts de plonger mes crocs dans ta gorge. » Avoua l’Ancestrale sans détour, laissant ses doigts caresser la joue de l’Empereur avant de passer sa main dans son cou pour détacher le collier qui s’y trouvait. Elle le glissa ensuite dans une poche de sa tunique. Ses doigts – désormais glacés - vinrent alors trouver la main d’Aegnor, qu’elle pressa doucement. « Tu ferais entrer le loup dans la bergerie et si je perds le contrôle ils auront alors raison. » Le regard de l’ancestrale, pourtant empli d’une grande tendresse, se voila dès qu’elle reprit. « Et lorsque je perds le contrôle… Cela se finit indubitablement en bain de sang. J’ai massacré des hommes lorsque ma soif était trop grande et sur l’instant j’ai trouvé cette sensation totalement grisante. J’ai pris plaisir à les voir se vider sous mes yeux … et même si je ne traque que des bandits pour qui un avis de recherche a été émis… Je prends plaisir à les chasser et à les vider de leur sang pour m’en nourrir. » L’Ataliel ne passait aucun détail, aucune sensation sous silence. Elle voulait qu’Aegnor comprenne à quel point il prenait un risque en l’invitant à retourner à Estëllin. « Comprends-tu as quel point tu feras courir un risque à ton peuple ? Quel monstre tu es prêt à laisser entrer dans ta cité ? » Conclut Orfraie, pour de bon, l’air particulièrement grave. Elle ne considérait pas sa nature comme une erreur de la nature, mais pour faire comprendre les risques à son neveu elle se devait de grossir les traits.

Orfraie avait volontairement grossi les trais, rendant sa nature plus sombre qu'elle l'était en réalité. Elle tenait à ce que Aegnor comprenne le risque qu'elle représentait, même si elle arrivait désormais à se contrôler, du moins temps que quelqu'un n'avait pas l'excellente idée de faire couler son sang. L'Ataliel avait une confiance très limitée en ses capacités à se contrôler s'il y devait y avoir un accident… Mais Firindal, dans toute sa sagesse, intervint à cet instant pour rassurer sa Liée. Celle-ci posa sur lui un regard empli de tendresse, délaissant la main de son neveu pour caresser le front de son Lié. Elle n'eut besoin d'aucun mots pour lui répondre, y préférant les sentiments. A travers leur lien, qui se renforçait de jour en jour, la princesse des ombres lui transmis tout son amour et sa reconnaissance. Le dragon de jade restait son plus grand soutient face à ses démons.

Les mots de l'Evanealle retentirent une nouvelle fois, tirant Orfraie de sa contemplation. Celle-ci posa ses glaciers sur lui, l'observant et l'écoutant. Il semblait si optimiste, il semblait avoir tant foi en son peuple… la princesse des ombres souhaitait également avoir foi en son peuple, mais elle doutait tellement… Ce fut cet instant que choisi Nerwende pour réapparaître. L'Elfe se tint dans l'embrasure de la porte, les mains jointes devant elle. Son regard était aussi intense que celui de sa fille, bien qu'il ne fût pas de la même couleur.

« Nous serrons là. Nous te soutiendrons comme nous l'avons toujours fait. »

Le regard de l'immortelle se posa sur sa mère. Leur échange visuel fut intense, si intense qu'on aurait pu croire qu'elles se parlaient par télépathie. Bien entendu, ce n'était pas le cas, mais elles avaient toujours étaient ainsi : prompte à se comprendre au-delà des mots… Et si la Orfraie mortelle était morte pour laissait sa place à une vampire, celle-ci n'avait pas perdu cette faculté de comprendre sa mère sans avoir besoin de parler. Comment avait-elle pu oser la blesser comme elle l'avait fait ?
Firindal sur son bras gauche, l'Ataliel s'avança enfin vers sa mère sans briser leur échange visuel. Lorsqu'elle fut à quelques mètres, Orfraie se jeta contre elle, presque avec violence, nichant son visage contre son cou. Le petit Jade se retrouvait entre elles, à l'abri dans les bras de sa Lié qui le maintenait contre sa poitrine pour ne pas l'écraser. Sa main libre, l'ancienne princesse la passa autour du cou de Nerwende, qui elle-même referma ses bras dans le dos de sa fille. Elles restèrent un moment ainsi. La plus âgée savourait la présence de sa fille qu'elle pensait perdue à jamais, tandis que la plus jeune savourait cette présence qu'elle n'avait jamais oublié, même devenue immortelle. « Je ne t'ai jamais oublié. Lorsque je me suis réveillée Immortelle, ton visage et ta voix étaient gravés dans ma mémoire… Tout ce qu'il me restait de mon ancienne vie, c'était toi. Mais je ne l'ai compris qu'à l'instant où Aramis à chanté mon chant-nom. » Murmura la vampiresse contre le cou de sa mère. Une odeur iodé emplit alors l'atmosphère, indiquant à la Lame que sa mère pleurait. « J'ai eu si peur, si mal. Avec ta sœur, tu es mon bien le plus précieux. » Répondit la plus âgée en resserrant son étreinte. « Pardonne-moi. Je ne te mérite pas. »

Il y eu un léger silence. « Sssh... » Nerwende rompit l'étreinte de façon à pouvoir regarder dans les yeux. « Il n'y a rien à pardonner. Je comprends ta colère et la réaction qui en a découlé. » Conclue la plus âgée en souriant tendrement. Elle porta sa main à la joue glacée d'Orfraie et la caressa doucement. La vampiresse se sentit immédiatement apaisée par ce geste, fermant les yeux pour mieux l’apprécier. De toutes les personnes qu'elle avait connues durant sa vie de mortelle, Nerwende était la seule dont le souvenir était intact, intact dans le sens où l'Ataliel ressentait l'amour qu'elle avait autrefois eut pour elle. C'était quelque peu troublant.

# Qu'en penses tu, mon doux lié ? # Fis mentalement Orfraie à l'adresse de Firindal, ajoutant à ses mots une bonne dose d'amour.

« J'ai envie de croire que les Elfes sont toujours mon peuple. Toutefois, pour l'heure je réserve mon jugement, et nous verrons qui ils sont vraiment. » Fit Orfraie en tournant son regard vers Aegnor. « Si Luna accepte de me laisser vous accompagner, ce n'est pas un retour définitif pour autant. À l'instant où s'en sera trop, à l'instant où je le déciderais, si tel est mon souhait, vous me laisserez partir. » Son regard se reporta sur sa mère, puis sur Firindal. « Même si je considère les Elfes comme mon peuple, je ne suis plus vraiment, et je ne me considère pas comme du peuple vampirique : je suis dragonnière, je suis libre et je le resterais. Sommes-nous d'accord ? » Conclu la vampiresse en haussant un sourcil, son regard allant de Nerwende à Aegnor.