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La lisière Elfique est en place à la frontière du 27 octobre au 27 novembre . L'entrée ou la sortie du Royaume Elfique sont donc compliquées entre ces deux dates.
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Loin des ténébres [Corinne]

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MessageSujet: Loin des ténébres [Corinne] Loin des ténébres [Corinne] Icon_minitimeVen 24 Juil 2015 - 11:26

25 Avril

Bain. Soins. Nourriture. Marché Noir. Il reprenait vie à ces rayons de soleil. Cela faisait deux jours qu'il était alité chez Mellila, à l'abri, enfin. Deux jours dans un sommeil forcé par la magie elfique de l'apprenti chanteur, il n'aurait pu s'endormir seul. Morneflamme et sa traque l'avait mis dans un état de stress aiguë qui mettait un terme à toute aubaine de s'endormir véritablement. Or, il en avait excessivement besoin, ne serait-ce que pour calmer ses nerfs. Un sommeil sans cauchemars, veillé tantôt par Corinne, tantôt par Dawan. Il arrivait à l'issue de sa cavale. Bientôt, il reprendrait sa place au sein du Marché Noir et œuvrerait pour les idéaux que la Triade se forgeait et servait. Il ouvrit les yeux sur sa chambre et prit une position assise dans son lit. Il était seul, c'était peut-être tout aussi bien. Il faisait le vide dans son esprit, chassait les barbaries de Morneflamme. Il avait envie de fondre en sanglots, de laisser s'écouler toute l'affliction qu'il avait accumulée et s'évader dans son monde imaginaire un tant soit peu instable à présent, pour oublier et hurler à plein poumons. Mais il n'y parvenait pas.

Il avait échoué. Là où ils auraient du détruire Vraorg, ils l'avaient libéré. Le Dragon Blanc avait dévasté Armanda. Les paysages avaient été ravagés : il ne reconnaissait plus rien. Sa cavale n'avait pas été aisée, il avait su souscrire à l'aide de protégés venus soutenir les évadés. Il ne leur avait pas imposé le poids de sa présence, lui seul était recherché. Rien n'était plus pareil. Peut-être même plus Gloria. L'elfe poussa un soupir. Il cala ses talons contre ses fesses, à genoux dans son lit, les mains posées sur ses cuisses. Il était assez légèrement habillé : pantalon de toile brune et ample chemise blanche, pieds nus. Ses longs cheveux sombres retombaient dans son visage, de manière chaotique. Lui-même avait beaucoup changé. Lentement, il se laissa choir dans une méditation profonde. Il passait en revue les événements de sa vie, sans les remettre en cause, sans les juger, juste... Les accepter tels qu'ils étaient. Il n'avait pas grande alternatives alors, il faisait le premiers pas vers ses faits, vers les choix qu'avaient été les siens. Puis ses pensées se focalisèrent sur Gloria, sur la demeure que la Triade avait quittée à l'annonce de l'arrivée de la Dévoreuse. Une demeure où il se projetait.*

C'était saccagé, pillé. Leur adorable demeure était devenue un taudis sous un amas de poussière. Les étagères de la boutique, vide, était renversées. Le bois était brisé, les araignées avaient fait leur nid, les rats aussi. Il monta à l'étage supérieur, et dans ce salon, immense et aux allures de relique, il revoyait toute la chaleur de leur doux foyer. Il revoyait, ces heures auprès du feu, entre Triade. Eux trois face au reste du monde, ils étaient rois s'ils le croyaient. Son frère et sa sœur lui avaient affreusement manqué ces années à Morneflamme. Retrouver Corinne était d'une félicité fantastique.

Au balcon, il s'avança alors que sous ses yeux à l'émeraude terni se dessinait une Gloria tranchée en deux. Richesse et pauvreté. Le spectacle lui faisait mal au cœur. Le palais était aux effigies de Vraorg et il entendait les ancêtres Kohan hurler au blasphème et poser sur la ville un regard pesant. Il avait passé 400 années ici et son univers avait été détruit. Il ne pouvait que se satisfaire de cette vision, lui, au moins, pouvait encore revenir sur ses pas. Les elfes avaient perdu leur foyer, lui, ne faisait d'entrevoir une partie de leur souffrance sans y être totalement assujetti.

Doucement, le marchand rappela sa projection astrale et reprit conscience de son environnement Calanien. Son visage se dérida à la vision de Corinne qui se dressait là. Elle avait du entrer pendant sa méditation. Un fin sourire était né sur ses lèvres, à peine perceptible, mais sa sœur le verrait. Il saisit les mains de l'humaine dans les siennes. La maigreur de l'évadé aurait fait passer ses dextres pour celles de sa sœur. Il reprendrait sa force de jadis, mais pour le moment, il ressemblait d'avantage à une petite chose fragile à la force pourtant elfique. Il serra prudemment les mains de Corinne et caressa sa peau comme pour tenter de la rassurer sur son état qui devait pourtant être terrifiant.

« Gloria a changé... »

souffla-t-il, peiné par la nouvelle. Il lui indiquait alors où sa projection avait été traîné.

« Ce monde est devenu triste, ténébreux et cruel. Des traîtres... Des traîtres... »

Partout. Wintel, Crissolorio, Vanaël. Tant d'autres. Contraints ou non, il s'en moquait. Des traîtres, partout, il y en avait tant. Son âme était brisée à ces découvertes.

« La Triade a-t-elle seulement encore des alliés ? Avons-nous encore des collaborateurs de confiance comme nous en avions jadis lorsque nous étions à Aigue-Royale ? Si cela semble vrai, si nous sommes encore debout... J'ai pourtant ce sentiment de vices infiltrés de toutes parts, ce monde transpire la malhonnêteté. J'ai voyagé en Théocratie, trois mois durant... Je n'ai vu que des rivalités en matière de cruauté et de perversion. Je n'ai vu que la loi du plus fort. Je n'ai vu que des malheureux capables de tuer pour plaire au Dragon Blanc et quitter leur sordide état. Je n'ai vu que de la terreur et de la désolation. Chère sœur, je n'ai vu que du sang, des pleurs, des sanctions drastiques. Le respect, l'amitié, la tolérance ne sont plus que de vains mots. Il me plaisait pourtant d'y croire et ils sont morts. Et une part de moi avec eux. »

Il peinait à trouver du bonheur dans cet univers. Sûrement, il y en avait, mais son état d'esprit les occultait. Il était blasé, désabusé et affreusement las. Il colla son front aux mains de sa sœur, les yeux clos, y cherchant sa douceur pour apaiser cette vision d'un monde de brutes sans foi ni lois qui lui faisait tant de mal. Il voulait qu'elle rallume la flamme d'un espoir soufflé par son chagrin. Il voulait qu'elle l'éveille à la blancheur infiltrée au sein de ces murs noirs de l'empire de Vraorg. Il voulait qu'elle lui rende son existence défaite. Il voulait l'amour et le soutien de sa sœur, il savait déjà que sa seule présence, à ses côtés, le poussait vers tout cela, sans même prononcer le moindre mot.


* Magie humaine : puissant
[Informations] Projection Astrale
Il permet à l'utilisateur d'entrer dans une profonde méditation afin de réaliser une projection astrale de lui-même où il le souhaite ou presque, tout le monde peut le voir, mais il ne peut ni toucher, ni être touché. Cette forme sert en général à transmettre un message ou veiller sur la personne qu'on aime. Ce sort ne consomme que peu d'énergie, car il nécessite une profonde méditation dans un endroit calme pour être utilisé. Attention, l'utilisateur ne peut pas apparaître dans des endroits qu'il ne connait pas.
Geste clé :Se mettre en tailleur et entamer une profonde méditation dont le Magicien sort une fois la projection achevée



@Corinne Triade


Dernière édition par Aldaron Triade le Jeu 6 Aoû 2015 - 21:54, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Loin des ténébres [Corinne] Loin des ténébres [Corinne] Icon_minitimeJeu 30 Juil 2015 - 22:10


----------Le voyage avait été long, bien plus que ce que la marchande n'avais escompté, mais au moins en avait-il valu la peine ! Enfin elle l'avait retrouvé ! Enfin, elle avait pu s'assurer qu'il soit vivant, libre, et qu'il ait réussit à se libérer de cette maudite fournaise que les théocrates nommaient Morneflamme. Qu'elle ne fut pas sa joie lorsque le regard de Corinne se posa sur son frère elfe. Une joie entaillée profondément par la tristesse qu'elle éprouva en découvrant l'état de santé de son cher frère. Il aurait été allongé qu'on l'aurait cru mort. Mais non, il était bien vivant, dans un état pitoyable certes, qui le faisait alors plus ressembler à un vampire squelettique qu'à un elfe, mais au moins était-il vivant. Et c'était bien là la plus importante des choses. Aldaron Triade était vivant, et de retour chez soi. Presque.

----------Les bras de Corinne l'avait jalousement enlacé, le gardant auprès d'elle de longues heures afin de veiller sur lui. Eawyn avait eu la bonté de le plonger dans un sommeil réparateur, tandis que Dawan, le petit apprentis elfe, il relayait Corinne afin de veiller sur Aldaron. Cela avait beau faire deux personnes auprès desquelles la marchande allait avoir une dette de poids, persistait le fait qu'ils avaient été son assurance vie durant ce voyage, de même qu'ils lui avaient permis de retrouver son frère et de s'assurer qu'il arrive à Caladon en meilleure santé. Quoique pour ce qui était de la dette, même si en effet elle en avait une à leur égard, encore fallait-il qu'ils la réclament. Et en baptistrels qu'ils étaient, peut-être cela ne se produirait-il pas. Après tout, ne sont-ils pas censé œuvrer pour le bien de tous afin que la paix recouvre le continent ?

----------Finalement, Caladon leur avait ouvert ses portes, puis Mellila en avait fait de même avec celles de son humble demeure. Elle leur avait ouvert les bras, les avait accueillis, leur avait permis de trouver un refuge sûr dans cette ville vacillant entre deux frontières. En tant que maillon important, et même vital du marché noir, elle jouait très bien son rôle. La Triade pouvait se féliciter d'avoir trouver telle alliée. Mais ce n'était pas cela qui préoccupait l'humaine en cette période. À vrai dire, ce fut à peine si elle accorda de l'importance aux autres durant tout le voyage qu'elle fit avec son frère et durant le séjour qu'elle passa à Caladon en sa compagnie, aussi bref fut-il. Elle n'avait d'yeux que pour lui, n'agissait que pour lui. Après tout, plus de trois ans avaient passés depuis qu'il était partit, depuis qu'il s'était mis en tête de "sauver le monde". Mais il avait survécu, et c'était bien là l'essentiel, qu'il soit là pour savourer le reste de sa vie, pour être auprès de sa famille et faire grandir leur grand projet de marché noir.

----------Mais avant de penser à faire évoluer les choses, il fallait d'abord prendre soin du corps autant que de l'esprit de ce frère aimé, qui malgré ses longues années d'existences demeurait aux yeux de Corinne un petit frère sur lequel elle devait veiller. Aussi allait-elle régulièrement le voir dans sa chambre, là où il passait la majeure partie de ses journées, soit à dormir, soit à rêvasser. Il n'était qu'une ombre. Présence sans vie que l'on devait abriter de son corps, afin que la lumière de la réalité ne puisse le brûler jusqu'à disparaître. Corinne y œuvrait de son mieux, après tout, ils étaient une famille.
----------Raison pour laquelle elle se rendit dans la chambre qu'occupait son frère afin de passer un peu de temps avec lui et voir comment il allait. Nombreuse étaient les fois où elle arrivait alors qu'il était en train de dormir voire de cauchemarder, mais cela ne l'empêchait pas le moins du monde de rester à son chevet quelques heures en le regardant ou en lui parlant de tout et de rien. Souvent de rien d'ailleurs. Elle tenait après tout à ce qu'il entende les choses importantes qu'elle avait à lui dire, et mieux ne valait pas les répéter trop souvent. Les murs ont des oreilles, même en ces lieux sécurisés.

----------Aldaron était bien là, à genoux, le visage impassible et les yeux fermés. Surement en train de d'explorer par l'esprit un lieu précis. Ce n'était pas la première fois qu'elle le voyait procéder ainsi après tout. Il avait repris un peu de poids durant les quelques semaines passées ensembles, mais il demeurait toujours maigre si l'on comparait à son état de santé d'avant son épopée ridiculement héroïque. Ses cheveux longs en revanche lui allaient bien. Lui qui pourtant prenait soin à les couper auparavant, voilà qu'il avait refuser qu'on lui redonne son apparence d'antan. Ce qui n'était pas au déplaisir de l'humaine, laquelle en profitait pour s'occuper plus longuement de lui. C'était surtout une occasion pour elle de pleurer d'avantage, ainsi qu'elle était en train de le faire à la vue de son frère d'elfe. Son allure était si inquiétante ! Le pire était son visage, sombre et creusé par la douleur, la tristesse. Il évoquait à Corinne un masque de pierre craquelé. Si seulement les larmes qu'elle versait pouvait servir à amollir la dureté de ces traits. Mais le voilà qui se réveillait, ou plutôt, qui émergeait de sa transe, pour sourire légèrement lorsqu'il se rendit compte de la présence de sa sœur.
----------Corinne garda le silence au début, le laissant parler, savourant simplement le contact de leurs mains, ainsi que celui du front d'Aldaron contre les siennes. Ses longues mèches sombre encadrait leurs mains, rideau de jais sur étreinte blanche. L'elfe donnait l'impression de pouvoir se briser si on le touchait un peu trop brusquement. Sa personne était comme éteinte. Une ombre oui, ou un amas de cendre prêt à s'envoler. Pauvre chose..

----------Gloria avait changé ? Oui, ce n'était pas étonnant. Armanda toute entière avait changée, et ses occupants en avaient fait de même. les choses évoluent sans cesse quelle qu'elles soient. Que Gloria ait changée n'était pas une chose étonnante. Mais Corinne se doutait au ton de sa voix qu'Aldaron souhaitait ici souligner l'aspect désastreux de ce changement. Et sa phrase suivante confirma en effet cela. Quant aux traîtres...

"Les traîtres ont toujours été une tare que nous avons essayé d'éviter. On ne peut y échapper, mais seulement les éviter lorsque qu'on se rend compte de leur nature, ou bien les écarter de notre chemin. Ils sont comme une pièce trouée, invisible dans leur tas, inutile pour les autres, mais tout de même présents. Les enlever du tas, ou bien les refondre pour qu'ils y soient de nouveau fidèles."

----------Si la Triade avait encore des alliés ? C'était comme demander à un saumon s'il était encore dans son banc. Et aucun filets n'avaient jusque là capturé la Triade, aucun n'était encore assez grand, assez étroit, assez solide pour capturer ses membres et les empêcher d'étendre leur influence, de consolider leurs antennes. Rien qu'ici, à Caladon, les personnes fidèles au marché noir étaient nombreuses. Le lieu où ils étaient en était la preuve, Mellila représentait l'ancre qu'ils avaient lancés dans la théocratie, celle qui leur permettait d'avoir une accroche à cet empire sombre qu'avait créé le Voleur de Cœur.

"Cette face que tu décris, c'est celle que le Voleur de Cœur a désiré dévoiler. L'autre face est quand a elle moins inquiétante, pour nous en tout cas. Rien qu'ici, nos alliés sont nombreux, Mellila est leur moyen de communiquer avec nous, qui somme situés le plus souvent dans le protectorat. Un marin répondant au nom de "Le batelier" se démarque aussi par ses actions et nous soutiens fermement. Il a des moyens, et ce n'est pas la théocratie qui va l'empêcher de réussir à faire réussir notre projet. Ils sont des ouvriers œuvrant à notre dessein, que.. ce Vraorg ne pourra empêcher de travailler."

----------Corinne marqua alors une pause, pour poser ses lèvres sur le crâne de son frère, qu'elle embrassa délicatement. S'agenouillant, elle glissa sur ses jambes jusqu'à ce que leurs fronts se collent l'un à l'autre, leur regard se mélangeant alors.

"Le retour à la surface des vampires, les batailles que cela a entraîné, l'arrivée de Néant et de ses fanatiques Alayiens, l'apparition des perles de cet esprit corrompu par cet albâtre dragon, le combat d'anthologie qui opposa nos fameux Esprits tant vénérés à ce traître à sa race.. Rien de ceci n'a arrêté ton idée, de faire se développer un marché indépendant, libre, ne répondant qu'à ses seules directives. TU nous a réunis, c'est grâce à TOI que nous avons pu nous retrouver et faire un si long chemin. Ce n'est pas la désolation de quelques landes perdues pour un temps quelconque qui va arrêter ce magnifique projet. Et puis.. Tu n'as pas traversé tout l'Empire, il y a d'autres lieux qui résistent, comme ici, à l'asservissement que Vraorg cherche à faire valoir. Nous ne somme pas seuls. Nous ne l'avons jamais été. Nous ne le serons jamais."

----------Avait-elle encore besoin de souligner le fait qu'ils étaient une fratrie ? Et qu'à l'image du banc de saumon ou de la fourmilière, chaque maillon servait une cause commune et ne se séparait de ce groupe que par la mort. Déliant l'une de ses mains de l'étreinte à laquelle les soumettait son frère, Corinne la posa sur la joue d'Aldaron, le caressant affectueusement.
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MessageSujet: Re: Loin des ténébres [Corinne] Loin des ténébres [Corinne] Icon_minitimeDim 2 Aoû 2015 - 21:23

La magie opérait, la seule présence de cette humaine à ses côtés avait rendu Aldaron plus vivant. Il avait mangé, repris un peu de poids et de la forme. La retrouver à nouveau, seul à seul cette fois, c'était respirer un nouvel air. La douceur de ses mains apaisait son esprit par leur délicat contact avec son front, son nez, ses lèvres, jusqu'à ce qu'il relève sa tête vers elle pour plonger son regard dans la nuit ténébreuse que lui offrait la Triade. D'étoiles bercé, il reconnaissait en elle la délectable tendresse fraternelle. Elle aurait pu lui dire tout ce qu'elle voulait, il n'avait en lui que l'envie de la croire aveuglément. Nul traître en leur rang ? La Triade en était bien capable. Pour avoir monté toute une infiltration via Caladon pour permettre au Protectorat de survivre, assurément les traîtres avaient du être soigneusement écartés, comme jadis lorsqu'il avait fallu ériger Aigue-Royale. Alors pourquoi voulait-il entendre ce dont, à défaut de le savoir, il se doutait ? Pourquoi ne voir que les traîtres lorsque les alliés foisonnent et la résistance s'organise ? Un désespoir de cause, certainement, qu'il avait du étouffer pour ne laisser exploser que l'envie d'avancer, fuir, rester en vie envers et contre cette jungle hostile. Un désespoir de cause, oui, qu'à présent qu'il était ici, en sécurité, il pouvait laisser vivre et blesser son âme : même s'il n'avançait plus, sa sœur le traînerait de force jusqu'aux terres protégées. Alors il pouvait. Il se reposait sur sa bienveillance.

Il ferma les yeux, acceptant ce baiser qui se posait sur son front. Il s'abreuvait de ses paroles comme on engloutit une potion médicinale. Elles lui faisaient du bien, asséchaient ses lamentations comme s'il s'agissait d'une rivière empoisonnée. Son front ne tarda pas à être contre le sien. Il aurait voulu lui montrer ses pensées dévastatrices qui hantaient son esprit. Ces souvenirs macabres, ces reviviscences traumatiques : Morneflamme. Il aurait voulu lui montrer tout cela, non pas pour qu'elle en pâtisse, mais qu'elle comprenne à quel point tous les malheurs qu'elle avait pu imaginer n'arrivaient pas à la cheville même de ce qu'il avait réellement vécu. Dans un même temps, une part de l'elfe refusait de lui offrir cette abrupte description, ne serait-ce que pour la préserver de ce cauchemars qu'il avait vécu. Il avait besoin d'elle. Mais il refusait de la faire souffrir. Il valait mieux qu'elle soit suffisamment forte pour deux. Il sentit la main de Corine caresser sa joue, alors que l'émeraude ténébreuse fixait le sombre océan dont l'écume salée formait une larme dévalant sa joue.

« Tu as fait un travail remarquable. Avec Cercëe. Vous m'avez donné la force de poursuivre, de ne pas défaillir dans cette... Prison. »

Il serait les dents et sous sa main, elle devait sentir combien sa mâchoire pressait sa supérieure. Il mit quelques secondes à calmer cette sinistre pensée, bien trop envahissante.

« Vraorg enfermait ses ennemis. Les nouveaux entrants étaient porteurs de nouvelles, mon oreille était bien plus attentive à la Triade. Il croyait faire sa loi, mais il ne m'envoyait que des fragments d'espoir. Je savais que vous viviez. Je savais que vous œuvriez. Je savais que vous étiez une épine dans le pied de mon bourreau. Tous voyaient le marché noir, ses richesses, ses profits. Au delà de ça, je voyais le réseau, le maillage de plus en plus fin qui me servirait de filet dans lequel m'accrocher une fois dehors. J'avais... Deviné pour Caladon... »

Un sourire en coin se mit à éclaircir son triste visage. Oui, il avait deviné. Sans être dans la Triade, il avait été certain, qu'eu égard des dispositions économiques d'Armanda, de sa géographie, de ses opportunités et contraintes, que le marché avait une antenne ici.

« Et.. Melilla. Je m'en doutais... C'est amusant comme en si peu de temps nous avons réussi à penser les uns comme les autres. »

L'elfe tendit une main pour essuyer cette larme. Lui ne pleurait pas, il le refusait. Il ne voulait pas faire de mal à sa sœur, il était hors de question qu'il concède cette victoire au Dragon Blanc. Non, il tenait bon, mais voir sa sœur souffrir par sa faute lui tordait les entrailles.

« Je suis en vie, Corinne. »

Lui rappela-t-il. Quelle vie. Il était en lambeau, elle devrait se contenter de cela et s'en réjouir. Sa main remonta dans la chevelure d'ébène de la riche demoiselle. Son autre avait rejoint sa taille un bref instant pour l’attraper et l'attirer vers lui lorsqu'il bascula pour se rallonger, l’entraînant, par sa force raciale, à ses côtés. Il resserra son étreinte et en profita pour l'enlacer pleinement dans ses bras, visiblement en manque de tendresse, en tout bien tout honneur. Il cala à nouveau son front contre le sien, les yeux clos. Ça l'apaisait d'être près d'elle, il inspira profondément et souffla, pour relâcher les tensions qui l'habitait.

« Et j'ai envie de vivre. »

Il avait le désir de poursuivre, malgré l'état dans lequel Morneflamme et sa traque l'avait mis, malgré ce qu'il était devenu, malgré l'âme noircie qui sommeillait en lui. Il voulait vivre encore et c'était la créature, son instinct de survie qui s'était exprimé auprès de Corinne.

« Je veux me sentir vivre. »

Et Corinne saurait très bien de quelle façon l'elfe pouvait se sentir vivre : il n'avait jamais été le genre d'oiseau à rester enfermé, en sécurité, dans une belle cage aux barreaux d'or. Le danger avait été son quotidien ces dernières années, depuis Aigue-Royale. La Triade avait porté ses ambitions bien au delà de tous, et Aldaron avait senti ce besoin d'aller bien au delà : l'Aube Rouge à laquelle il avait été mêlé bien malgré lui avait su le combler d'une adrénaline à laquelle il avait pris goût : les perles de Néant, la prophétie des Marcheurs, cette traque. En lui même, il avait tiré partie de cette vie dangereuse et ne saurait se résigner après cela à vivre cloîtré à l'abri entre quatre murs. Même si c'était ce qu'aurait préféré Corinne, il le savait.

« Je veux me battre. Je veux le tuer. »

fit-il entre ses dents, tout son être réclamant vengeance. Il serrait ses poings sur les vêtements de sa soeur, tâchant de calmer ses nerfs.

« Je refuse d'être l'animal qu'il a terrorisé. »

Il l'avait terrorisé, c'était un fait. Mais il le niait. Et il négligait catégoriquement l'idée de ployer sous le joug de cette terreur. Mais c'était une lourde chose qu'il avouait là à sa sœur. Son frère qu'elle venait à peine de retrouver n'avait qu'une envie : aller faire la guerre à Vraorg et se mettre à nouveau en danger.
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MessageSujet: Re: Loin des ténébres [Corinne] Loin des ténébres [Corinne] Icon_minitimeMer 5 Aoû 2015 - 23:52


----------Cette sensation étrange qui fourmillait sous ses doigts, la dureté de la mâchoire de l'elfe contre sa peau, et ce mot si simple, si banal, qui provoquait une telle réaction, une telle aversion. "Prison" ... Corinne l'avait vu revenir après avoir combattu les perles, que ce soit lors de la bataille de l'aube-rouge ou bien après, elle avait vu dans les yeux de son frère la torpeur que lui avait inspiré ces artefacts de Néant, le dégoût qu'il avait ressentit. Mais comparé à ces choses pourtant sorties d'un cauchemar, cette prison semblait être de nombreuses fois plus traumatisantes. Qu'avaient-ils subit là-bas pour en ressortir ainsi ? Quelle atrocités s'y étaient déroulées ? La marchande n'était pas sûre de vouloir le savoir, mais par amour pour son frère, par compassion, et par envie de l'aider à porter ce lourd fardeau, elle l'aurait accepté. Elle aurait été prête à tout pour ses deux frères. Pour sa sœur de sang aussi, mais c'était là une autre histoire et un lien quelque peu différent.

----------Qu'ils aient pu, elle et Cercëe, l'aider à garder espoir et le soutenir par leur actions à survivre et à se battre pour rester entier après cette épreuve rendait Corinne heureuse. Au moins avaient-ils pu l'aider indirectement, c'était déjà ça. La marchande n'en espérait pas autant. Si elle avait su que les captifs de Morneflamme entendaient les échos de ce qui se passait au dehors, ils auraient redoublés d'effort pour leur faire parvenir des messages d'espoir, leur intimer à rester soudé pour survivre là-bas et rester en vie jusqu'à ce qu'un jour ils puissent en sortir. Et même si désormais, Aldaron en était sortit lui, ce n'était pas une raison pour ne pas se comporter de cette manière. Certes, Aldaron était leur frère et méritait toute leur attention et leurs efforts pour l'aider, mais toutes les autres personnes subissant le joug de Vraorg méritaient aussi d'être aidés. Une perte d'argent ? Non, un investissement à long terme pour gagner en popularité et ainsi attirer plus de personnes dans le circuit qui soient fidèles au marché noir. Un moyen noble de se faire une bonne réputation pour augmenter ses profits. Certes, cela rendait aussi plus facile les espion et les traîtres, mais c'était aussi avoir plus de moyens pour écarter ces nuisibles. Était-ce pour autant malsain de penser à faire des profits alors que l'on était sur le point de consoler un frère ? Pour quelles raisons ? Corinne et l'argent ne faisaient qu'un, l'on ne pouvait pas dissocier l'un de l'autre. C'était comme en vouloir à un saumon de vouloir nager à contre-courant une fois par an.

"Nous avons tous les trois fait un travail remarquable. Ce n'est pas parce que tu était dans cet... endroit que nous ne t'avons pas écouté. Là, tu es toujours avec nous." Répondit-elle alors que sa main descendit de la joue d'Aldaron pour venir se poser sur sa propre poitrine, contre son cœur. "C'est ensemble que nous agissons, et si je peux d'une manière ou d'une autre t'aider à porter ce fardeau, je le ferais. Oui, en effet, c'est amusant de voir que nous ne pensons que comme un. Nous sommes plus qu'une simple fratrie après tout.." Elle lui souriait alors, même si son visage lui était toujours marqué du sillage de ses larmes, bien qu'elles ne coulaient plus.


----------Ils étaient frères et sœur oui, mais parce que ce n'était pas un lien de sang, celui-ci était d'autant plus profond et emplit d'amour. Tout chez eux étaient différent dans l'apparence, et pourtant ils pensaient souvent de la même manière, malgré leur différent de race. Ils étaient compagnons, amis.. Pour la petite humaine, il n'y avait assez de mots pour décrire ce qui la liait à Aldaron, ce petit frère si téméraire.
----------Surprise par cet élan soudain, Corinne s'accrocha à Aldaron alors qu'elle se laissait emporter par les bras d'Aldaron, bien plus maigres qu'autrefois mais toujours bien plus puissant qu'un humain, grâce en soit de son sang elfique. Ainsi allongée au dessus de lui, la jeune femme observait le visage clos d'Aldaron, posant son nez sur celui de l'elfe de la même manière qu'il l'avait incité à joindre leur front. Le souffle de sa respiration était contre la peau du visage de cette très jeune grande-sœur un baume rassurant. Oui, il était en vie, elle l'entendait, elle le voyait, elle le sentait. Et elle savait aussi ce qu'il entendait par vouloir se sentir vivre. Malheureusement. D'une certaine manière, elle était heureuse pour lui, heureuse de constater qu'il se plaisait à voyager, découvrir le monde, ses problèmes, à être au plus près des événements majeurs de l'histoire. Un peu comme un adolescent qui désire quitter ses parents, voilà que son petit frère s'émancipait et manifestait une croissante poussée d'héroïsme. C'était peut-être un peu exagérer comme pensée, Corinne n'en était pas tout à fait là. Demeurait que le voir partir de plus en plus souvent pour des quêtes au retour compromis n'avait rien de rassurant, et que pour cette raison l'humaine s'en trouvait bien attristée. Elle l'était aussi par l'état dans lequel revenait son frère d'elfe, toujours de mal en pis.

----------Qu'il veuille se battre, de manière directe comme il l'entendait, et non plus au travers de l'activité du marché noir, cela, elle le comprenait. Jamais elle ne pourrait penser ainsi, parce qu'elle tenait bien trop à sa propre vie pour aller la risquer dans de telles épopées, mais elle comprenait qu'Aldaron puisse penser cela. Elle comprenait le sentiment de frustration que l'on pouvait ressentir en voyant que malgré nos actes et toute la bonne volonté que l'on déployait dans une action, cela n'ai pas autant de répercussions que l'on ne l'escomptait. L'idée farfelue que l'on est jamais mieux servis que par soi même, et ce même en ce qui concerne le destin de tout un continent, Corinne comprenait qu'une telle idée ait pu germer dans l'esprit de l'elfe. Après tout, elle même le pensait, bien qu'elle ne l'appliquait pas de la même manière pour la raison citée plus tôt.

----------Seulement, entre comprendre une chose et l'accepter, la frontière est large, et Corinne ne l'avait pas encore traversée. La tristesse qu'elle avait ressentie lorsqu'elle ne l'avait pas vu revenir de sa quête après l'ascension au pouvoir de Vraorg, Corinne avait de nombreuses fois essayer de la noyer dans de l'alcool. Mais malheureusement, elle était un poison perfide qui revenait et persistait toujours, la faisant alors pleurer durant de longues minutes, voire des heures. Le savoir vivant avait été... une renaissance. Le savoir vivant, avoir la preuve devant ses yeux qu'il l'était, le sentir, pouvoir le toucher, cela avait été réellement... jouissif. Une part d'elle venait d'éclore à nouveau, alors qu'elle s'était fanée à sa disparition.
----------De par cette révélation qu'il lui faisait, Corinne avait l'impression de faner de nouveau. En son for intérieur, elle avait espéré que son expérience a Morneflamme lui ai servit de.. leçon. Mais apparemment, ce n'était pas le cas. Elle allait encore devoir souffrir de son départ, et regarder des nuit durant l'horizon dans l'espoir qu'il montre un signe de vie jusqu'à ce que son corps soit trop fatigué pour le supporter.

"Toute les batailles ne se livrent pas sur le terrain Aldaron. Tu n'es pas obligé d'aller toi même sur le front, rien ne t'y oblige.. Il existe bien d'autres moyens d'agir, c'est ce que nous faisions jusque là d'ailleurs, agir dans l'ombre pour aider les efforts de guerre. C'était la notre première.. mission."

----------Si seulement elle pouvait le persuader de ne pas aller risquer son existence pour cette si noble cause. Mais comment l'aurait-elle pu ? C'était elle la froussarde, elle qui tenait égoïstement à rester en vie et à l'écart du danger. Tirer les ficelles, décider pour d'autres, organiser les missions et les transports de marchandises, parlementer avec les figures du protectorat pour les aider du mieux qu'elle le pouvait. C'était là ce qu'elle savait faire. Sa pls grande prise de risque avait été d'aller elle même chercher Aldaron, et encore, elle était alors entourée d'Eawyn, maître baptistrel, et de son élève Dawan, tout deux de puissants mages. Ses paroles n'avaient pas de convictions, ce n'était qu'une supplique, une prière qu'elle faisait à Aldaron.

" Tu n'a pas à succomber à tes instincts guerriers."

----------Souffla-t-elle alors que sa main droite, celle qui était jusque là sur la joue d'Aldaron, descendit sur son visage pour venir caresser ses lèvres.

" Tu n'es pas cet animal. N'agis pas de la manière à laquelle il s'y attend. Suis ton cœur, tes pensées, pas ton instinct."

----------Se rendait-elle compte que c'était justement son cœur qui le poussait à agir ainsi ? Très certainement oui. Et si c'était en effet cela qui le poussait à agir ainsi, alors elle aurait de nouveau la confirmation qu'Aldaron désirait l'aventure. C'était aussi une manière de lui redemander ce qu'il souhaitait faire, alors que de son côté, Corinne n'arrivait toujours pas à l'accepter. L'entendre le lui répéter l'aiderait peut-être à cela.
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MessageSujet: Re: Loin des ténébres [Corinne] Loin des ténébres [Corinne] Icon_minitimeLun 10 Aoû 2015 - 0:40

« Je suis désolé... »

souffla-t-il alors et réellement, Aldaron l'était. Nul mensonge pour Corinne, jamais une telle opprobre. Sa sincérité était même violente et le contraignait à cet aveu, celui qui le conduirait demain encore sur un champ de bataille. Elle lui réprimait cette nécessité, mais dans son cœur déjà, cette réflexion avait été faite. D'une main levée, il caressait sa joue avec douceur et fermait les yeux au contact de ce sillage encore humide des larmes versées, larmes qui hélas, devraient encore couler.

« Si j'avais l'opportunité de sécher tes larmes pour de bon... Je n'ai nulle promesse à te faire, mais je voudrais tellement que tu saches que la paix reviendra. Les armandéens n'ont que trop vu le sang couler. Ils sont las, leur espoirs sont érodés, les miens plus encore. La paix reviendra, j'en suis même certain... Mais il n'appartient qu'à nous de décider si un tyran sera notre maître ou si nous vaincrons le Blanc avant qu'il ne soit trop tard. Le temps s'écoule. Les cœurs faiblissent. Notre sursis s'écroule. »

Il caressa cette chevelure d'ébène jusque dans son dos et bascula lentement avec elle sur le côté pour pouvoir resserrer son étreinte sur elle, sans pour autant la briser. Toutefois s'il avait pu fusionner avec elle pour lui faire comprendre à quel point il tenait à elle, il l'aurait fait. Sa sœur, chère sœur. Il peinait à réaliser encore combien le bonheur l’inondait de la revoir. Si peine était son fardeau en ce jour heureux, entendre, sentir son souffle aurait fait battre son cœur mille fois trop vite s'il n'y prenait garde. Il n'y avait que peu d'humains qui pouvaient ainsi se targuer d'une affection si vibrante de la part d'Aldaron. Si l'elfe adorait les humains, les ailes déjà brûlées, il avait, avec le temps, pris pour acquis ne ne devoir trop se lier à eux : leur si faible longévité ne faisait pas d'eux des amis éternels. Éphémères ils étaient, mais pour quelques privilégiés il acceptait de se lier et d'avoir, un jour, à pleurer leur perte. C'était le tribu à payer pour quelques années délicieuses, de rêves bercés, et de tourments éloignés. Tendre humaine était-elle alors à ses côtés. Présente malgré le danger. Protecteur, il aurait voulu la confiner, lui dire de l'attendre, mais l'attendre, elle l'avait déjà tant fait. Il s'en jetait le blâme, pour toute ses heures sombres où elle avait du se ronger les ongles, fixer au loin l'horizon sans jamais voir cette silhouette revenir. Mélancoliques jours lui avait-il causés, et de ténébreux encore il lui offrait. Égoïste, il se sentait et pourtant il ne saurait démordre de cette envie brûlante qui le tiraillait sournoisement.

« Je veux œuvrer avec toi et Cercëe au marché noir et faire perdurer ces messages d'espoir. Notre rôle va être celui-là à l'avenir. Faire vivre la révolte, propagande insurgée. Nous devons étendre notre influence sur certaines zones. Caladon est un parfait vivier. Nous devrons être présents. Même si cela est dangereux. La confiance n'est pas possible si la tête d'une organisation se trouve bien à l'abri derrière la barrière des Esprits. Qu'en penseront ceux qui chaque jour risquent leur vie ici ? Nous devons rencontrer ces hommes et ces femmes qui nous suivent. Nous devons leur montrer un visage pour lequel ils ont envie de se battre. La proximité sera notre souveraine, notre sûreté. »

Il avait ouvert ses yeux à nouveau pour lui faire face et lui exprimer ce qu'il voulait voir naître à présent du marché noir. Lourde ambition, mais ce rôle, ils se devaient de l'endosser.

« Nous rentrons bientôt, mais autant que cela sera possible, je veux revenir à Caladon, soutenir Melilla et tout ceux qui ici, besognent pour nous. Tu me donnes l'espoir, j'aimerais t'offrir ce monde où tu n'auras plus à m'attendre désespérément. Je sais que tu as peur, je sais que je te ferai souffrir encore... Corinne, je le sais hélas. Le temps nous est compté. Je refuse que la barrière tombe et que ce monde sombre. Je ne peux l'accepter, je ne peux me contenter de regarder cela, impuissant, dans ma cage dorée. Je... »

L'analogie était lourde, mais elle était ce qu'il ressentait :

« Je n'ai pas quitté une prison pour me retrouver dans une autre. C'est peut-être ce qu'il attend de moi. Et si tel est le cas, je préfère lui concéder cette victoire plutôt que d'autres. J'ai vécu anormalement longuement pour un humain... »

Douce ironie que cela était et son sourire, amusé, se dessina bien que les cassures de ces traits ne soient l'horrible reflet de sa tristesse. Tout elfe qu'il était, sa vie avait été passée près des humains. En cela, l'amalgame n'était pas tant dérangeant :

« Tous les hommes doivent mourir. Aujourd'hui. Demain. Je n'ai plus peur si je sais que mon trépas laissera derrière lui la paix. Une paix où tu devras vivre pour moi. »

Terrorisants propos que voilà et pourtant, il devait la vérité à sa sœur. Lui cacher cela aurait peut-être été pire que ce qu'il lui disait là. Il embrassa son front, sa joue, son cou, pour la consoler de ce deuil auquel il la contraignait, alors qu'un « Je t'aime » à son oreille, il soufflait.
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MessageSujet: Re: Loin des ténébres [Corinne] Loin des ténébres [Corinne] Icon_minitimeLun 17 Aoû 2015 - 15:02


----------Les guerres incessantes usent l'âme, c'est un fait auquel on ne peut échapper, indéniablement. Bien qu'actrice.. extérieur de ces événements, Corinne le percevait. Les guerres avaient débutées alors qu'elle commençait à se lancer dans la plus grand entreprise qu'elle n'avait jamais connu, aussi avait-elle du être confrontée, d'une manière indirecte, aux épreuves que rencontraient les soldats au dehors. Elle avait fait sa part du travail lorsque la rébellion s'était mise en place sous l'ancienne citée de La Romantique, dans les galeries d'Aigue-Royale. À ce moment, elle aussi était une marchande, plus qu'une dirigeante, et elle voyait bien ce que la guerre des bois sombres avait fait subir autant aux humains, qu'aux elfes ou aux vampires. Chaque jour alimentait ses connaissances du désespoir d'autrui et de la noirceur d'âme. Chaque jour qui passait avait était un pas de plus vers un monde obscurcit par la guerre et les répercussions de forces qui dépassaient l'entendement de la jeune humaine. Plus si jeune que ça peut-être, encore que même pour une humaine, elle n'avait toujours que trente ans, et était ainsi dans la fleur de l'âge. Alors finalement, autant dire que d'un avis général, elle était jeune si, très jeune.

----------Les paroles de son frère étaient porteuses de vérité, une vérité si brillante que, pour Corinne, c'était comme si on l'a mettait devant un fer chauffé à blanc. Elle avait l'impression d'être cette petite pièce vierge que l'on s'apprête à marquer pour lui attribuer une valeur, la reconnaissance d'une puissance prônant ses valeurs et ses intérêts. L'impression amère d'avoir voulu durant trop longtemps rester distante et indépendante de tout cela, si bien que désormais, elle s'en mordrait les doigts si elle continuait ainsi. Aldaron parlait crûment, plus que d'ordinaire. Ou du moins, plus qu'il y a trois ans. Mais en effet, après trois ans, les personnes changent, d'autant plus lorsque l'on demeure éloignée d'elles. Une chose que Corinne acceptait encore avec difficulté, et dont la simple idée la faisait déglutir. Le fait de savoir que son frère avait tant changé après son séjour à Morneflamme.. Et pourtant, elle désirait savoir, l'aider, le soutenir. Pour lui, pour Cercëe, elle subirait ce que pour elle jamais elle n'aurait fait.
----------Alors qu'elle s'était laissé entraîner plus encore dans cette étreinte fraternelle, Corinne changea la position de ses bras, afin d'affermir cette étreinte, tandis que ses mains venaient d'une part se poser sur un rein d'Aldaron, et d'autre part sur son omoplate. Si elle avait pu le recouvrir entièrement afin de le protéger contre les dangers qui menaçaient, elle l'aurait fait. Malheureusement, son corps ne permettait pas telle miracle.. Elle allait devoir lui faire ses adieux, une fois de plus. Le plus dur n'était pas vraiment de dire "Au revoir", ou "Adieu", non. Le plus difficile, c'était de continuer, c'était de faire comme si de rien n'était, d'agir comme une personne impassible et ainsi de poursuivre ce projet, cet entreprise. Les rencontres avec les autres commanditaires, les discours sans fin avec ces clients qui pour beaucoup étaient et seraient dans le même cas que la marchande. Des personnes en attente d'un proche. Mais dans son cas, elle ne pouvait pas réellement se permettre de montrer sa faiblesse, à défaut de la voir utilisé contre elle. Aussi devrait-elle garder cette douleur à l'intérieur de soi, essayer de la partager avec le peu de personne qu'elle considérait comme intimes. Son frère vampire, sa sœur de sang, et c'était à peu près tout. Elyonor aussi, le cheval que lui avait prêté Dawan lors de leur venue. Bien que dans ce dernier cas, il était plus un exutoire...

"Nul besoin de promesse non, tu as raison.. ta présence en est une suffisante. J'aimerais trouver en moi ce courage qui te pousse à avancer et à risquer ta vie pour les autres, qui t'as poussé à aller au devant d'un danger dont on ne connaissait rien. Et pourtant, malgré cela, je ne peux m'empêcher de trouver déraisonné d'entrevoir une telle option, que celle de devenir une sorte de martyr servant les rêves de chacun. Et c'est en voyant ce que cette option t'as coûté que les larmes m'en viennent. J'ai peiné à te reconnaître, physiquement tu avais changé oui, mais c'est surtout à ta manière d'agir.. "

----------Un mince sourire vint alors éclairer le visage de l'humaine, tandis que le reste d'une larme en profitait pour disparaître depuis la commissure de ses lèvres.

"Tu as grandi. Avant, tu souhaitait simplement te lancer à l'aventure, découvrir plus encore le monde et ce qui se tramait au dehors. Être au cœur de l'action, par la curiosité de savoir ce que cela procurait comme sentiment. C'était du moins l'impression que tu donnais lorsque tu avais voulu partir défendre nos terres contre ces perles, ou que tu avait décidé de marcher vers l'inconnu clamé par ce voyageur. Mais maintenant... oui, tu me sembles avoir grandi. Et cela m'attriste, car je ne t'ai pas vu grandir, je n'ai pas pu t'aider, te suivre, te soutenir. Enfin, si, mais je ne savais pas que je le faisais."

----------Qu'il entrevoit alors l'idée, certes vraie, que tout homme est mortel et est voué à mourir, de même qu'il s'annonçait heureux s'il pouvait apporter avec sa mort et les actions qu'il aurait fait auparavant une paix relative sur le continent, cela manquait de faire pleurer de nouveau Corinne. La goutte de trop fut lorsqu'il confirma l'idée en précisant qu'elle serait alors seule et devrait vivre pour lui... Vivre sans lui surtout ! Quel romantique effronté lui avait-il mis ces proses dans la tête ? En effet, s'il mourrait, elle serait seule, elle devrait affronter la vie sans pouvoir se consoler auprès de ce petit frère qu'elle appréciait tant. La marchande aurait pu pleurer, elle avait toute les raisons de le faire, et pourtant, elle se contenta de rendre la pareille à Aldaron, l'embrassant sur la joue, le cou, l'autre joue..

"C'est cette douleur que tu éprouve à l'idée de voir quelqu'un mourir avant toi ? De penser que à partir de ce moment, cela risque d'arriver encore, et que rien à part sa propre mort ne pourra l'en empêcher ?"

----------Corinne pensait bien sûr à l'idée qu'elle avait eu, l'envie qu'elle avait, de ne pas mourir par vieillesse alors que ses deux frères resteraient encore des centaines d'années présents. Elle envisageait déjà de prendre une potion de jouvence, mais souhaitait attendre quelques années encore, de peur de se retrouver avec la frimousse d'une gamine de 10 ans. L'on racontait de cette potion qu'elle pouvait aussi bien faire rajeunir de seulement une ou deux années que d'une ou deux dizaines d'années. Prudente marchande qu'elle était, le risque n'était pas permis. Trop jeune, elle aurait perdu toute crédibilité auprès de ses clients. L'autre option résidait en Cercëe. Devenir une vampire était en effet un bon moyen de s'assurer une longévité satisfaisante. L'idée au contraire de nombre d'humains ne l'effrayait pas le moins du monde. Elle vivait avec l'un deux, et ne voyait en cela qu'un moyen de se préserver, plutôt que comme beaucoup le décrivait, une mort et une perversion de l'âme.
----------C'est donc cette idée qui lui était venue en tête lorsque Aldaron avait mentionné le fait qu'elle puisse avoir à vivre sans lui. Corinne avait inévitablement imaginé ce qu'il se passerait si en effet elle était amené à vivre aussi longtemps, et son corps s'était crispé à l'idée que tout comme Aldaron le disait pour lui, d'autres pourraient très bien mourir alors qu'elle même serait encore à la moitié de sa vie, à peine. Terrible perspective. Une solitude bien désolante...

----------Faisant alors une pause, Corinne continua d'embrasser son frère, recouvrant de baisers son visage, son buste. La scène en devenait quelque peu étrange pour une relation que l'on ne décrivait que de fraternelle.. Et pourtant, c'est bien ce qu'ils étaient, malgré le fait qu'ils aient besoin d'exprimer leur affection l'un pour l'autre régulièrement et expressivement. Si Corinne avait pu se souder à Aldaron, elle l'aurait très probablement fait ! À défaut, Corinne enfouit son visage dans le creux que formait l'épaule et la nuque d'Aldaron, le nez s'enivrant du parfum naturel de l'elfe. Les lèvres de l'humaine étaient restés collées à la peau de son frère, prêtes soit à lui faire un suçon, soit à le mordre.. selon les apparences en tout cas.
----------Elle releva finalement la tête au bout d'un certain temps, si bien que leur oreilles se juxtaposaient. Après quoi, la voix délicate de Corinne emplit de nouveau la pièce, brise légère que son frère savait apprécier.

"Puisses-tu réussir à me convaincre de te suivre sur cette route tortueuse. Te savoir mort me tuerait probablement. Jusque là, tes raisons me semblent des plus valables, et il me serait d'une complexité assommante et inutile d'essayer de te faire revenir sur tes idées. Si tu pouvais me convaincre oui.. je te suivrais dès aujourd'hui, mais l'on sait tout deux qu'il faut que nos têtes soient présentes aussi bien ici, à Caladon, qu'au sein même du protectorat. Laisser ce lieu ne serait pas non plus une bonne idée. Seul le futur pourra nous éclairer...
Puis-je toutefois faire quelque chose pour t'aider à me rassurer, pour que je puisse savoir que tu sois bien entouré ?"
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