Alauwyr enrageait. Tout cela parce que la veille, son groupe avait été pris à parti par un groupe de Protégés qui avaient réussi à reprendre dans leurs mains deux captifs. Une catastrophe minime en soi, puisque guère de perte dans les rangs, mais lui et d'autres soldats avaient été quitte à aller fouiner dans les environs, donc un petit village campagnarde d'ordinaire sans histoire... Il aurait pu être lui-même être plus réactif si le hasard ne lui avait pas mis Christan sur son chemin. Revoir son ancien ami l'avait plus bouleversé que prévu. La preuve était qu'il avait été incapable de le neutraliser, s'étant contenté la veille à stopper sa poursuite. Indécis, il l'avait, on pouvait dire, laisser fuir... A quoi bon quand Christan s'était avéré être un ancien compagnon d'armes ?

En plein milieu de la nuit, cela le travaillait encore. Il vociférait intérieurement sur ce qui l'avait retenu. Pourquoi n'avait-il pas réussi à se battre pleinement contre lui, connaissant justement sa manière de réagir dans un combat ? Pourquoi ? Plusieurs questions avaient leur réponse, mais il les refusait. Jusqu'ici, il ne s'était jamais réellement attaché à des liens amicaux... Mais revoir Christan Weren l'avait réellement perturbé. Heureusement que son ancien ami ne l'avait pas reconnu. Trois années en arrière, ils avaient eu tous les deux une conversation sur ce qui risquerait de se produire s'ils venaient à s'affronter dans deux camps différents. La réponse de Christan avait été clair, pas de pitié pour les traîtres. Indirectement, aux premiers abords, Alauwyr était un traître aux yeux de son propre peuple, en servant Vraorg....Mais lui ne comptait que sur l'importance de sa propre survie, même si cela imposait de sacrifier quelques doctrines...

Donc ce soir il maugréait et pour cette longue nuit de fouille, chaque maison était passée au peigne fin. Il était en plus de mauvais poil car il n'avait pas eu le temps de dormir quelques heures convenablement. Là où les autres cherchaient dans les masures et autres chaumières, lui décida de chercher dans une vieille étable, qui sentait fortement le fumier frais.... Des bêtes étaient donc à l'intérieur. Peu lui importait, il ne serait pas à une odeur de plus sur sa cuirasse de cuir. Doucement, il ouvrit la porte de l'étable, qui grinça faute de bonne graisse sur les gonds. Alauwyr grimaça de ce bruit parasite. Même s'il n'était pas certain de tomber sur les fuyards de la veille, la discrétion était de mise. Oui les fuyards de la précédente escarmouche avaient des chevaux, les traces l'avaient révélés. Donc pour nourrir ces bêtes, le mieux serait de passer par des villages environnants... L'idée des supérieurs que voilà. Selon Alauwyr, ce genre de pensée était stupide. Quand on avait des captifs libérés, on cherchait à fuir le plus loin possible et non à traîner dans la zone !

La porte fut ouverte et l'intérieur était sombre. Les quelques bovidés qui sommeillaient à l'intérieur beuglèrent à peine, remuant dans leur stalle. Alauwyr grimaça. Il faisait trop sombre à l'intérieur. Le plus furtivement possible, il se glissa le long des murs en planche, laissant son armure de traqueur le fondre dans les ombres présentes et bien obscures des lieux.

Son voyage, ou plus exactement sa traque, durait déjà depuis plusieurs semaines. Il en était fatigué mais il était heureux d’être toujours envie depuis tout ce temps. Certes il avait eu affaire à des Théocrates mais pour le moment rien d’insurmontable, le seul gros problème était venu d’Alford mais ça c’était déjà une autre histoire. Les autres traqueurs n’avaient pas été du même acabit, sans doute parce que la prime promise par Vraorg pour sa tête avait attiré beaucoup de monde et que beaucoup d’entre eux n’étaient clairement pas à la hauteur de la tâche. Pour le coup il n’avait eu aucun problème ni remord à se débarrassé d’eux suppliques ou provocations n’avaient rien changé au sors de ce tombé entre ses mains et trop faible pour s’en sortir. Personne n’aurait eu de pitié avec lui, pourquoi en aurait il eu pour eux ? C’était là un comportement compréhensible après trois années de long et dur internement même s’il ne l’assumait ni le supportait pas totalement.

Mais avait il vraiment le choix ? Que pouvait il faire à part cela pour rester en vie ? Il n’avait qu’un seul moyen pour s’en sortir, il devait combattre et élimer chaque menace qui se présentait à lui quel que soit sa forme, quelque soit sa puissance.

Au cours de ces dernières heures de marche il avait entendu parler d’un combat entre rebelles et théocrates pour la sauvegarde d’échappé de Morneflamme. De ce fait il se doutait bien que des ennemis étaient proche de lui et qu’il devait, par conséquent, trouver un moyen de laisser le temps passer et se planquer. Qu’avait il comme choix ? Non loin se trouvait un village, peut être arriverait il à se cacher dans l’un de ses granges en se gardant une marche pour s’échapper si des ennemis venaient le visiter ou établir leurs quartiers.

Quoi qu’il en soit il profita de la nuit tombante pour se faufiler à l’intérieur d’une grande et profiter de quelques instants de calme pour se reposer. Le village, d’un calme plat en ce moment de l’année, était traversé par un petit court d’eau tout en étant bordé d’un petit bois qui serait parfait dans le cadre d’une évacuation du village. Bref, le petit village semblait être un petit coin de tranquillité dans un monde de folie et malfaisance. Ce coin lui permettrait il de prendre enfin le repos mérité ? Après tout, tout était possible par les temps qui courraient.

Il pénétra donc délicatement et silencieusement dans la première grange qu’il vit et tomba nez à nez avec des vaches… Au moins il aurait de la compagnie pour la nuit se dit il à ce moment là. Il monta sur les hauteurs de la grange, histoire de garder un œil sur l’entrée de celle-ci et de se garder une marge s’il avait besoin de fuir rapidement.

Profitant d’un instant de calme il se posa contre une botte de foin bien entamée posée non loin de lui. Espérant enfin profiter d’un repos réparateur dans un lieu ou personne ne viendrait le déranger. Mais ça c’était sans compter l’arriver d’un Théocrate quelques temps après sa propre arrivé. Il observant l’homme dans la faible lueur de la nuit et se rendit compte qu’il s’agissait bien d’un traqueur, peut être un de ceux qui s’était battu avec les protégés dernièrement ? Il n’avait pas vraiment envie de le savoir. Alors il se mit en route pour sortir de la grange par la fenêtre de celle-ci, espérant ne pas faire trop de bruit pour ne pas se faire remarquer.

Hélas ce ne fut pas le cas et dans un juron il répondit aux questions de l’homme qui venait d’entrer dans la grange. Sortant de cette dernière, il se mit à courir vers le petit bois qu’il avait repéré plus tôt… Tout ce qu’il espérait c’était semer l’homme qui le pourchassait déjà.

Les ruminants tendaient bêtement la tête vers Alauwyr, sentant sa présence par son odeur. Un instant, Alauwyr s'était immobilisé sous le couvert des ombres, guettant le moindre bruit suspect. Il s'apprêtait à décrété que cette grange n'abritait pas de fuyard quand il entendit un bruit. S'arrêtant presque de respirer, il tourna la tête vers la source de ce bruit et dans un frottement qui s'en suivit, il crut entendre un juron soufflé. Le bruit qu'il avait entendu en premier fut déjà identifiée : la fenêtre ! Quelqu'un prenait la fuite à sa présence en passant par la fenêtre !

Sans attendre, il se précipita vers la sortie improvisée du fuyard et tenant le rebord à pleines mains, Alauwyr se tendit, prêt à sauter à son tour. Malgré la nuit, dans la très pâle lueur offerte par les astres, il réussit à distinguer une forme qui s'éloignait de plus en plus et rapidement. Qui partait comme un voleur, même en dehors d'une grange, avait des choses à se reprocher. L'Alayien passa par la fenêtre à son tour et se mit lui aussi à courir. La masse sombre qui s'offrait encore plus loin apparut comme étant une petite forêt. S'il perdait ce fugitif dans les ténèbres de ces bois, il peinera à le retrouver ! Ses pas s'allongèrent plus rapidement encore à cette perspective et il regretta de pas avoir crié l'alarme. Les autres militaires l'auraient alors rejoint et ils auraient pris les mesures nécessaires pour encercler la zone. Mais maintenant qu'il était à sa poursuite... trop tard en somme.

La course poursuite fut rapide et ponctué par les pas courants des deux hommes. Mais une fois à l'orée du petit bois, les choses prirent une autre tournure. Ne sachant pas à qui il avait réellement à faire, Alauwyr tenta de prendre l'individu qu'il poursuivait sur le côté, pénétrant dans l'orée du petit bois donc par un autre chemin. Celui qui tentait de lui échapper n'ira pas bien de toute façon. Prenant les coins les plus abyssaux de l'ombre des arbres environnants, Alauwyr se fondit en partie dans ces ténèbres. Puis il cessa de marcher, guettant le moindre signe... car dans les bois, outre l'humus et les feuilles moisissant au sol, il y avait quantité de déchets de bois... La moindre brindille, la moindre branche morte qui supporterait le poids d'un homme se briserait en émettant un bruit craquant. Alauwyr escomptait entendre une maladresse de ce genre de la part de celui qu'il chassait désormais.

Doucement, scrutant les parages ténébreux du sous-bois et les oreilles aux aguets, il porta sa main gantée vers la garde de son épée... Qui sait si l'inconnu était armé ou pas. Face à ce manque de détails, l'Alayien s'assurait d'avoir les meilleurs arguments pour attaquer ou se défendre.

Il avait été stupide, il s’en voulait mais il n’avait pas le temps de s’en vouloir plus que ça. Maintenant qu’il était pourchassé par un Théocrate ou ce qui semblait en être un, il devait se bouger les fesses. Il n’avait de toute manière pas le choix, sa seule option était de tenter d’atteindre le petit bois pour espérer semer son adversaire ou, au moins, l’empêcher d’appeler à l’aide histoire que le combat soit un peu plus égalitaire que les précédents qu’il avait dû mener. Après tout, ce n’était pas parce qu’il fuyait qu’il devait toujours être en difficulté… Même si ce cas de figure était le plus classique.

Il traversa le petit cours d’eau aussi vite qu’il le pu et se retourna pour se rendre compte que l’autre ne le lâchait pas d’une semelle. Mais pour qui le prenait-il ? Un simple voleur ? Une gueuse ? S’il continuait ainsi il allait avoir des problèmes… Ou peut être était ce Matis qui allait en avoir des problèmes.. Il n’avait pas vraiment le temps de se poser la question pour le moment car tout ce qui le préoccupait à cet instant c’était sa capacité à rester en vie, et pour cela il devait pénétrer dans ce petit bois le plus vite possible.

Redoublant de puissance et de vitesse, il se rendit vite compte que l’autre prenait un autre chemin. Cherchait il un meilleur moyen de le capturer ? Ou n’était ce qu’un moyen de faire diversion ? Il se posait tout un tas de question et se rendit compte qu’il était maintenant dans le bois. Sachant que l’autre avait prit un tout autre chemin, il ralentit pour finalement s’arrêter et reprendre son souffle… Posant son genou à terre, il observa les alentours et laissa son oreille analyser le moindre bruit. N’étant pas vraiment un bon traqueur il n’entendit rien de plus que ce qui semblait être la faune nocturne locale, alors il décida de continuer sa route le plus discrètement possible en traversant le bois par ce qu’il désigna comme étant son centre.

Il resta le plus silencieux possible mais le moindre de ses pas entrainait une véritable cacophonie du fait des branches et brindilles jonchant le sol du bois. C’était l’endroit parfait pour un piège ou une embuscade mais il n’avait pas du tout le temps de se poser la question ou d’essayer de trouver un autre chemin. Il devait rester en vie, et pour cela il n’avait pas vraiment le choix, il ne pouvait pas rester ici plus longtemps. Sa route le conduisit tout proche d’un arbre sans doute centenaire autour du quel des marques de pas étaient présente et c’est en s’approchant de celle-ci qu’il tomba en plein dans le piège.

Avait il était laissé à son intention ? Il ne le pensait pas à en voir l’épaisseur de la corde s’était sans doute un piège pour les animaux. Quoi qu’il en soit, il se trouvait maintenant la tête à l’envers, pendu par les pieds à un arbre à environ un bon mettre cinquante du sol. Il essaya de se relever pour défaire la corde en utilisant son épée qui n’était pas tombée contrairement à sa besace de voyage mais il fallait se faire une raison, pour le moment il n’y arrivait pas… Peut être avec le temps… Quoi que, ce n’était pas comme s’il avait vraiment beaucoup de temps devant lui avec l’autre qui le traquait.

C’est ce qu’il se dit avant de deviner dans la nuit, l’approche de celui qui le traquait depuis un temps déjà… Avec un peu, beaucoup en fait, de chance il tomberait lui aussi dans un piège similaire car s’il y en a un, il devait sans doute y’en avoir un second… Du moins il l’espérait sinon il était vraiment dans la mouise… Une fois de plus.

Alauwyr ne bougeait plus. Telle une statue noire qui garderait une porte invisible, il gardait l'oreille tendue pour entendre le moindre bruissement de feuille. Le sous-bois perturbé par la présence de deux mortels offrait un silence presque effrayant. Oh, il y avait bien quelques rongeurs qui furetaient sous les feuilles mortes qui recouvraient l'humus, mais c'était tellement infime que ce n'était pas là ce que guettait. Il n'eut d'ailleurs pas longtemps à attendre quand des bruits de pas froissant le sol lui parvinrent. Il posa son épaule sur le tronc proche de lui et le contourna à peine en se penchant en avant. Dans les ténèbres, il ne distingua rien. Mais sa proie était là, à portée. Attendre. Il devait encore attendre. Le fuyard ne devait pas être convaincu que le sombre soldat était à proximité, en train de l'entendre.

Un bruit lourd lui parvint, avec un mouvement presque sifflant. L'Alayien sourcilla. Qu'est ce que préparait l'autre encore ? Il fit quelques pas furtifs pour tenter de distinguer quelque chose. Il serra les dents. Jamais il n'aurait dû prendre l'initiative de se lancer seul après cet individu. ne voyant rien, il pourrait très bien tomber dans un piège préparé par celui qu'il poursuivait. Cela expliquerait ces bruits étranges. Pourtant, quand il entendit encore du remous, il y avait quelque chose de différent. L'épéiste n'en pouvant plus de rester sur place, prit sur lui de se déplacer vers cette source sonore un peu particulière. Il y arriva en se coulant dans l'ombre des arbres et une fois arrivé sur place, il chercha dans les environs et quand son attention fut attirée dans les airs, il écarquilla les yeux. Puis il sourit. Sa proie s'était faite prendre dans un piège à gibier. Pendu en l'air, il était tel une offrande à saisir.

La confiance se gonfla en lui quand à l'opportunité qui se présenta maintenant à lui. Il sortit de l'ombre et il apparut comme surgissant de la nuit même. La tête levée, on ne discernait guère son visage, mais on put voir la blancheur de dents composant un sourire prédateur.

''Et bien, on dirait que la chance me sourit.....Qui croyait fuir s'est fait prendre. ''

Toujours la tête levée vers Matis, Alauwyr tourna en dessous de lui. Un lion observait sa proie sous toute les coutures, en se gardant une distance de sécurité. Un violent coup ou une arme de jet caché pourrait lui être fatal.

''Quand on fuit des soldats, c'est que le coeur pèse d'une certaine culpabilité. Alors dis moi ''Pendu-par-les pieds'', quelque chose à confesser ? Une crainte qui expliquerait que tu as préféré me fuir ? ''

Il cessa de marcher, croisant les bras. L'homme qui pendait au-dessus de lui n'avait guère l'allure d'un paysan. Il avait quelque chose qui se dégageait de lui. Une certaine forme de prestance ? Alauwyr ne sut le définir.

''Alors dis moi... qui es-tu donc pour fuir de la sorte ? ''

Le temps de cette question, il avait fait un pas sur le côté pour se mettre à son aise. Dans cette atmosphère nocturne, où la couleur n'était qu'ombre et grisailles obscures, il ne vit absolument pas l'autre piège qui attendait le passage d'une autre proie. Le chasseur devint à son tour le gibier. Une corde se serra violemment autour de sa cheville et le sol entier bascula à l'envers, pendant qu'il se sentit tirer dans la voie des airs. Se balançant doucement au bout d'une corde de chanvre qui grinça doucement, il lâcha un juron alayien. Pris au piège comme un vulgaire lapin ! Il jeta un regard furibond à Matis avant d'entendre un bruit mat dans les feuilles par terre. Sa dague s'était faufilée hors de sa ceinture.

Sans attendre, il évalua rapidement la situation. Son fuyard n'était qu'à deux mètres de lui. Il releva sa tête et chercha à discerner le passage des cordes. Etait-ce leur suite qu'il aperçut le long de l'écorce de l'arbre ? Le large tronc n'aidait en rien pour les apercevoir avec détails. Et comme il était hors de question de rester à jouer les balançoires toute la nuit.

Il attrapa son épée et la sortie du fourreau. Il la serra au maximum, car si elle tombait à son tour, il serait vraiment dans la mouise. Il jeta à son compagnon d'infortune une réplique assez glaciale

''Ne crois pas que je vais te régler ton compte avec cette lame ! Ne bouge pas où tu le sentiras passer ''

Il commença à se balancer. La tentative était pénible à chaque mouvement oscillant. Le sang battait de plus en plus à ses tempes et la corde enserrait si fort sa cheville que le sang ne devait plus y circuler. Alauwyr donna encore un mouvement de balancier avant de soudainement frapper les deux cordes qui les tenaient en l'air. L'épée éclata l'écorce du tronc qui s'éparpillait en quelques morceaux tout en tranchant les liens. L'Alayien se sentit violemment rappelé par la gravité avant de percuter le sol. Il en eut le souffle coupé. Etourdi, la première chose qu'il tenta fut de reprendre son épée, tomber à quelques pas de lui...

Attaché comme il l’était et, vu sa situation, on pouvait globalement dire qu’il était dans la mélasse…. Voire autre chose pour les plus vulgaires. Il se savait traqué par un Théocrate, il savait qu’il avait peu de temps avant que l’autre ne se pointe. Peut-être l’avait-il entendu ? Oui c’était quelque chose de sûr, avec le bruit qu’il avait fait il y avait peu de chance qu’il n’ait pas été entendu. Tout ce qu’il pouvait alors espéré c’était que l’autre n’ait pas le temps de le rejoindre avant qu’il ne se libère. Hélas ce ne fut pas le cas, et déjà il put voir une nouvelle ombre se mouvoir non loin de lui. Un long soupire du saucisson retenti alors que le Théocratre apparaissait dans son champs de vision.

Il ne voyait pas bien son adversaire mais devinait sans peine le sourire carnassier qui devait séjourner sur le visage de son adversaire d’une nuit. Il devait se sentir fort et fier à ce moment-là, si ça se trouve il était tombé sur un véritable incapable qui, profitant de cette chance, allait prendre du galon en livrant le fuyard. Mais savait-il au moins a qui il avait affaire ? Rien n’était moins sûr au vu du comportement du guerrier qu’il avait devant lui. Il avait du mal à voir son visage mais, à son accent et à sa façon d’être il crut reconnaitre un Alayien… Il était presque étonné de voir que certains d’entre eux se battait pour Vraorg.. Encore que, aujourd’hui il n’y avait plus grand-chose qui le choquait vraiment alors un Alayien se battant pour le dragon qui avait asservi Armanda…

Quoi qu’il en soit l’autre balançais déjà des phrases se voulant philosophique… hélas pour lui, sa philosophie était plus celle d’une moule ou d’une huitre que celle d’un véritable penseur moderne. C’est sans attendre qu’il envoie déjà ses premières piques sur son traqueur.

A l’origine la phrase est, Est pris qui croyait prendre, mais venant d’un soudard qu’attendre de plus ? La réflexion de ce genre de phrase vous est étrangère… Néanmoins faite attention à vous, tout cela pourrait se retourner contre vous…

Il n’y avait aucune peur dans sa voix, la fatigue avait été subjuguée par l’afflux d’adrénaline. La situation était certes dangereux pour lui, mais il en avait déjà vu d’autre et savait qu’il y avait toujours un moyen de s’en sortir. Il gardait un œil sur son adversaire qui, tel la hyène tournait autour de lui comme s’il n’avait été qu’un simple morceau de jambon. L’autre conservait quand même quelques distances de sécurité, peut-être n’était-il pas si stupide qu’il n’y paraissait. Mais rien n’était perdu.

Le soudard se présentait comme un soldat et se posait la question qui tous se posait, pourquoi était-il partit ? Pourquoi avait il fuit ? Il fallait être un sacré malade pour rester dans un endroit où séjourne des Théocrates en armes et sans cervelle…

Je ne vois nul soldat ici, es-tu soldat ? Tu ressembles plus à un bandit ou un vulgaire soudard traquant les paysans avant de les taxer de rebelles. Fuir des gens tel que vous est salutaire pour quiconque souhaite vivre un tant soit peu en paix.

Et quand bien même j’aurais quelques choses à me reprocher sache que ce n’est certainement pas à toi que j’irais parler. Je préfère causer à mon cochon.

L’autre s’arrêta de parler et de marcher. Il l’observait d’un œil circonspect et attendait de voir ce qui allait se passer avant de faire quoi que ce soit d’autre. Mais la phrase de l’autre le fit rire, malgré le sang qui lui montait à la tête il ne pu se retenir.

Qui suis-je ? Mais un bucheron pardi, un simple voyageur qui s’est fait vaillamment arrêter par un courageux héros tel que vous. Il ne fallait certainement pas que je commette un faute, il fallait m’arrêter avant que je n’aille couper du bois… Mais attention, paraitrait que les arbres fomentent une rébellion…

Il ne voulait pas que l’autre sache qui il était, il n’avait aucun intérêt à se faire attraper et encore moins à se faire avoir en temps que Matis Falkire. Pour le coup il préférait être pris pour un idiot ou un paysan tant qu’il était en position de faiblesse… Mais la suite des événements prit une toute autre tournure, peut être pouvait il saisir sa chance…

L’autre se trouva attaché, tout comme lui, non loin de là. A moins de deux mètres en fait. Il sourit en voyant cela et n’hésita pas un instant avant de lui rappeler ses paroles.

Qu’avais je dit tout à l’heure ? Tant pis pour toi…

L’autre n’hésita pas un seul instant avant de sortir sa lame pour essayer de se défaire, ce qui était sûr c’était qu’il gigotait bien trop et qu’il risquait de mal tomber. Vu leur hauteur il risquerait de se faire assez mal ce qui n’était pas pour lui déplaire. Après tout s’il mourrait en se brisant la nuque ce n’était certainement pas lui qui allait le pleurer.

Une nouvelle phrase servit à présenter une nouvelle fois une personne fort violente qui n’hésitait pas un seul instant à faire parler la manière forte. Tant pis pour lui, il en payerait les conséquences. Chose qui ne se fit pas attendre d’ailleurs. Matis comprit bien vite qu’il allait pouvoir couper les cordes, et dans son mouvement il attrapa les deux cordes faisant tomber le soudard et Matis. Comme prévu, l’autre retomba mal et resta étourdi quelques instants, mais Matis avait prévu le coup et amorti sa chute. Certes elle ne se fit pas dans le calme mais il était déjà debout alors que l’autre essayait vainement d’attraper son épée.

Sans sortir la sienne, il posa nonchalamment son pied sur l’arme devant le regard de l’autre qui l’avait presque dans la main. Laissant ses mains dans les poches, il observa le soudard sans une once de pouvoir ou de sourire. Il n’avait que du dégout pour lui. Ses épées étaient toujours dans son dos et n’attendait qu’une chose, rencontrer l’acier mais ce n’était pas le moment. Ne jouait il pas un rôle ? Personne ne devait savoir qui il était.

Vous autres Alayiens n’êtes vraiment pas fait pour vivre sur ces terres. Et ce n’est pas en vous mettant à Son service que vous gagnerait quelque chose.

Que disais tu déjà ? Tu pensais pouvoir attraper un « dangereux » rebelle sans rien faire ? Tu as affaire à un simple bucheron qui tire maintenant les ficelles. Je savais qu’ils ne prenaient pas les plus malin mais là ils ont fait fort…

Quel est ton nom soudard ? Que je sache quel nom inscrire sur la pancarte qui trônera sur la fosse qui contiendra ton corps ?

Nulle crémation pour lui, seulement la mort et la décomposition lente et violente….

Les paroles de Matis trottaient encore dans sa tête quand il palpa le sol à la recherche de la garde de son épée. Quand ses doigts sentirent le contact familier de son arme, quelque chose d'autres se posa sur la lame et la bloqua sans grand effort. Cela imposa de faire lever la tête encore un poil étourdie de l'Alayien vers Matis. Les sourcils froncés, il le fixa froidement, ravalant un mauvais rictus. La situation s'était renversée et au moindre geste, qui sait ce que ce fuyard serait capable de faire. Son esprit bouillonnait encore des répliques de ce prétendu paysan tout en essayant de trouver un moyen de se sortir de là. Car celui qui s'affirmait être un bûcheron était loin d'en être apr!s l'avoir bien regardé, même si la pénombre n'offrait pas tous les détails.

L'homme était trop sûr de lui. Même si sa carrure pourrait lui donner raison quand à ce prétendu emploi évoqué, il avait un maintien trop différent pour un métier basique. Et pour l'avoir reconnu comme étant un Alayien, il en avait déjà croisé. Un bûcheron hein qu'il disait...

''Pour que je te donne mon nom, faudrait peut-être te présenter avant...''

Un trait d'humour alors qu'il n'était pas en bonne posture ? Possible. En tout cas, Alauwyr ne compta pas rester comme cela à la merci d'un homme qui avait pris ses jambes à son cou dès la première venue d'un être comme lui. Soudard, soldat, Alayien.... peu importait les noms qu'on lui affublait. Tant qu'il arrivait à se sortir de là....

''Tu sais bien causer pour un fuyard....''

Soudain, il jeta une poignée de terre mêlée à d'humus et des feuilles à la figure de Matis, pour le détourner un peu de son attention braquée sur lui. Il ne récupérera pas son épée, mais au moins, il ne se retrouvera plus à terre, en posture défavorable pour réagir. Là, dans cette action peu honorable et rapide, il pourra se relever et être sur ses deux jambes, pour être dans une position plus... adaptée. Certes, sans arme, face à un homme qui jouait un bon trop bien sur les mots pour un homme qui prétendant couper du bois à coup de hache. Une fois donc debout, il avait de suite mis les distances. Nul doute que Matis aura réagi lui aussi

''Ne te prends pas pour ce que tu n'es pas. Rien que quelques détails te trahissent... Un bûcheron....Va dire cela à un soudard encore plus imbécile que moi. ''

Il aurait pu rire, mais il n'était pas en position de force. Son épée était toujours par terre, dans la mousse et les feuilles mortes. Et comme sa dague était tombée quelque part par là elle aussi. Non mais quelle idée il avait eu là de poursuivre ce malandrin tout seul ! Donc il ne pouvait que rester sur la défensive. Si les hostilités montaient, peut-être qu'avec un peu de chance, il saura reprendre sa lame.

''Alors Armandéen, que vas-tu faire maintenant ? Continuer à essayer de te faire passer ce que tu n'es pas ? Tout en continuant de me faire la morale pour ce que je suis ? ''

Son regard s'était plissé avec un glacial sérieux.

''Le ''bûcheron rebelle'' ferait mieux de se décider à quoi faire, car le temps joue contre lui. Car c'est ce que tu es au final n'est ce pas ? Alors mon cher, vas-tu préférer fuir vu que c'est pour l'instant ta spécialité ou faire comme moi et tant d'autres qui sommes à tes yeux des vils sbires du Blanc, tuer pour la seule joie d'apporter des âmes à Mort ? ''

Matis regardait avec une attention redoublée le soudard qu’il avait en face de lui. Il savait clairement à quoi s’attendre avec ce type de personne. Il savait aussi qu’il devait rester sur ses gardes, ils étaient capables de beaucoup d’entourloupes. Ce qui marqua une fois de plus l’ancien capitaine, c’était sa manière hautaine de s’exprimer. Ces gens là, même dans la mouise la plus totale, restait toujours abominablement hautain. Comment cela se faisait il ? N’y avait il eu personne pour lui mettre des calottes quand il était bambin ? Il savait clairement que ce n’était pas ça la raison, mais il savait qu’il allait devoir le ramener à la raison et à la vérité. La vérité étant qu’il était non loin de la mort. Sans doute une fois de plus.

Oui bien sûr… Mon nom… Tu pensais vraiment que j’allais te le donner ? A la première occasion, et si tu t’en sors vivant, tu ira me dénoncer et j’aurais des problèmes. Alors j’aime autant laisser ton cadavre dans un trou sans nom. Ce sera moins problématique pour moi.

L’autre n’était pas convaincu quant à ses propos concernant son origine « basse ». Mais il pouvait penser quoi que ce soit, ce n’était pas lui qui tenait l’épée, ce n’était pas lui qui se tenait au-dessus, gardant un œil sur l’ensemble de la situation. Alors c’est en souriant qu’il lui répondit.

Ha bha fallait il pas que nous caussame comme des bourgeois hein ? Je ne sais pas dans quelle grotte vous vivez, mais être bucheront ne m’empêche en rien de parler correctement. M’enfin, qu’attendre de plus d’un homme qui prend la mort pour seul horizon et la destruction pour seul mode de vie ?

Il ne fallut pas plus de temps pour que l’autre ne se relève et lui jette à la figure ses propres figures de styles, certes principalement composé d’humus et d’herbe, mais cela ne changeait rien au final. Il s’était relevé et Matis avait trop attendu. Il était lui-même tombé dans le piège de la palabre. Il aurait du le tuer dès qu’il en avait eu l’occasion… Jamais il n’aurait du attendre autant, maintenant il avait des soucis à se faire car se débarrasser d’un pareil spécimen serait tout sauf facile maintenant.

Quoi qu’il en soit, l’autre semblait ravi de cette « reprise en main » de l’action. Comme si le fait de se lever allait lui sauver définitivement la mise. Certes il avait prit ses distances avec Matis, mais il n’en était pas moins sortit d’affaire. Il ne fallait pas trop abuser non plus. Ecoutant les propos de l’Alayien il sourit, comme ça il l’avait démasqué ? Il n’en croyait pas un mot.

Ohw ? M’aurais tu donc démasqué ? Toi le soudard vénérant Vraorg ? Dis ce que tu veux, tu es et restera à jamais un soudard. Le fait que tu sois un imbécile n’entre pas en compte, cela n’a aucun rapport avec ce que tu es actuellement… Encore que ce n’est pas tout à fait sûr.

Il n’avait peut être plus la lame entre ses mains, il n’en restait pas moins en position avantageuse. N’allons pas jusqu’à dire de force car ce ne serait pas vraiment la vérité. Mais il restait près de la lame de son adversaire, lui-même n’avait pas encore dégainé les siennes et l’autre ne se doutait nullement à quel point il pouvait être armé. Il avait peut être des doutes, mais il ne l’avait pas reconnu, et c’était déjà un bon point.

Cacher ce que je suis ne n’oblige en rien à ne pas juger ce que tu es. Et ce que tu es est très simple à définir. Je ne m’aventurerais pas à te faire la morale, il me faudrait bien trop de temps pour cela et je n’en ai pas. Me faire les gros yeux ne changera en rien ce qui t’attend….

Les dernières paroles du soudard le firent rire, non pas dans le fond ou sur la forme, mais bien à cause du fait qu’il y croyait vraiment. C’était… Pathétique en fait. L’autre lui faisait pitié car il ne pouvait vivre par soit même, il était obligé de vivre à travers la mort et la destruction et ça… ça c’était triste.

Vous n’êtes rien, je ne vous dois rien, alors donnez-moi une seule bonne raison de m’abaisser à vous répondre vraiment ? Vous qui ne vivez qu’à travers la mort finirez avec du fer en travers de la gorge. Vous êtes venu par l’épée, et bien laissez moi vous dire qu’on vous bottera le cul jusqu’à vous renvoyer dans les terres désolées d’où vous venez et que jamais vous n’auriez dû quitter.

Finissons en maintenant… L’attente n’a que trop duré.

Alauwyr avait à peine grimacé sous les répliques méprisantes de son adversaire. Il reconnaissant intérieurement qu'il était un imbécile, mais d'avoir suivi cet homme qui mentait sur ce qu'il était réellement. un bûcheron... quel piètre mensonge. De la façon de se tenir, de garder un excellent sang-froid malgré la pression qui montait de plus en plus ; à entendre son impatience. Chercher à discuter plus n'apporterait rien, si ce n'était de perdre du temps. Et cette denrée était importante pour l'Alayien. Car plus il attendrait et plus il encourait le risque de se voir égorger par ce beau parleur et de finir, comme l'autre le persiflait si bien, en cadavre pourrissant au fond d'un trou.

''Tu parles beaucoup trop....Tu as déjà donné la mort. Cela s'entend et ça se voit...''

Le regard de cet homme, sa posture, sa façon d'être. Un bûcheron ? Tellement risible. L'homme cherchait à cacher ce qu'il était et il s'y prenait bien mal. A moins d'être un menteur né bien entendu. Non, la détermination froide dans l'expression de ce fuyard était trop criard pour qu'un combattant comme Alauwyr ne puisse pas le remarquer. Un guerrier reconnaissait toujours un autre guerrier.

''La mort qui suit celui qui la répand, bon gré ou mal gré, laisse toujours une saveur étrange au fond de la gorge. La tienne mon cher, quelle est-elle ? Du plaisir ? Du dégoût ? Peut-être de la culpabilité de trop ou de pas assez tuer. Qu'est ce que la bataille de l'Aube Rouge t'a laissé au fond du coeur mon cher ? Toi qui penses si bien connaître ce que nous sommes ? ''

Il n'avait pas bougé un seul doigt le temps de rajouter de la conversation dans la balance. L'autre parlait d'en finir. Impatient donc... Il allait avoir la réponse à ses attentes...

''J'espère que tu auras eu une certaine de satisfaction en contribuant à notre perte...''

Soudainement, il fondit en avant. Le but ? Bousculer Matis en le faisant chuter à terre et récupérer son épée qui était juste à côté de lui. Ce fut si prompt...Sans aucun doute, son adversaire ne laissera pas passer ça, autant pour préserver sa vie que pour éliminer le gêneur que représentait l'Alayien dans sa fuite. Par chance ou par réflexe, on ne sut le dire, Alauwyr réussit à refermer sa main sur la poignée de sa bonne vieille lame et à se mettre en joue face à Matis. Les deux hommes devaient être là prêt à se confronter par le fer.

Sa lame en garde, Alauwyr sentit un goût ferreux sur les lèvrese et essuya du revers de son gant le sang qui coulait d'une entaille reçue à hauteur de recoin droit des lèvres. Un coup de poing ou un coup de tranchant peut-être, qu'il n'avait rien senti sur l'instant. Dans sa volonté certaine de reprendre son épée pour ne pas être démuni contre ce faux bûcheron. Les choses paraissaient s'équilibrer cette fois...

''A toi de voir si tu veux en finir de cette façon là.... Moi je n'ai rien à perdre, à ton contraire, sans aucun doute. A toi de décider si tu veux mourir en me combattant, car je vendrai chèrement ma carcasse. ''

Point de raillerie, de cynisme ou encore de moqueries dans l'éclat de sa voix ou dans la lueur de son regard.

''Tu as encore l'opportunité de partir, de reprendre ta petite fuite. Car si à tes yeux, je ne suis qu'un soudard qui vénère Vraorg, Toi... tu n'es pas de ceux qui l'apprécient et à en parler de la sorte aussi ouvertement. Tu ne sais rien de mes choix vis à vis de ça ! Tu ne sais rien ! ''

Il cracha le sang qui envahissait ses lèvres, appuyant le mépris qu'il portait sur le ton qui était le sien.

''Allez l'Armandéen, file te faire pendre ailleurs si tu tiens à l'importance de ton existence. va rejoindre la Frontière ! ''

Alauwyr recula d'un ou deux pas, s'offrant une petite distance de sécurité avec Matis. Autant rester prudent avec un homme au caractère méconnu comme celui-ci

Matis sentait le temps filer, il sentait qu’à chaque instant passé ici à écouter la moindre des paroles de cet être abjecte qu’il avait sous les yeux, il risquait de tout perdre. Et, dans les circonstances actuelles il ne pouvait pas perdre le moindre instant. Sans aller jusqu’à dire que beaucoup comptait sur lui, il devait quand même mener à bien sa mission qui était de rentrer en vie au Protectorat… Et pour cela il devait se débarrasser de l’autre énergumène en face de lui. Cet homme qui n’était autre chose qu’un barrage et un obstacle sur sa route.

Quoi qu’il en soit, et alors qu’il se tenait toujours calmement devant son adversaire, il se rendit vite compte que l’autre se doutait qu’il n’était pas un bucheron. De toute façon il ne pouvait plus vraiment maintenir le doute sur ce qu’il était ou sur ses convictions. Mais ce n’était pas bien grave, la situation n’était à l’avantage d’aucune des parties, ils étaient en un contre un et, même s’il était affaiblit par son Totem ou son séjour à MorneFlamme, il lui restait quand même de belles capacités. Peut-être pas assez pour faire une guerre mais pour survivre, il avait ce qu’il fallait.

Dans ses propos il essaya de le déstabiliser, lui parlant de l’odeur de la mort, de son gout qui reste accroché à un être sans que celui-ci ne puisse s’en débarrasser. Il était un Alayien, il aurait donc été stupide de lui retirer le fait qu’il la connaisse de près cette Mort. Certains, et peut être était-il de ceux-là, l’appelaient de leur vœux, étant considéré comme le but ultime de leur vie… De toute façon, et surtout depuis qu’ils servaient Vraorg, beaucoup d’entre eux avaient vu leur fanatisme grandement évoluer. Que ce soit en diminuant ou en s’accentuant… Il se doutait bien de l’alignement du personnage qu’il avait en face de lui… Il savait donc à quoi s’en tenir.

Ce n’est pas à vous de m’expliquer tout cela même s’il est logique que vous en ayez une parfaite connaissance, si ce n’est maitrise. Vous avez menez cette terre à la guerre et au bord de la destruction alors oui l’odeur de la mort touche et accompagne le moindre être vivant sur cette terre dorénavant.

Alors oui j’ai déjà dû tuer, mais jamais je n’en ai eu le moindre plaisir comme vous sur ces questions-là. La mort est loin d’être un jouet avec lequel on peut jouer impunément.

Les seuls qui s’y sont risqué s’en sont mordu les doigts… Il n’en reste pas moins que Vraorg joue avec elle comme si elle n’était qu’une vulgaire poupée et rien n’avait été fait pour le mettre hors d’état de nuire pour le moment. Du moins rien qui n’ai vraiment marché…

Il n’eut pas le temps de laisser sa réflexion suivre son corps quand il se rendit compte de son erreur. Sa seconde en fait, peut être même la troisième si on considère que se planquer dans une grange était une erreur… L’homme se jeta sans vergogne sur ce qui avait été son épée et qui trainait toujours entre les deux protagonistes. Il espérait sans doute reprendre un tant soit peu le contrôle de la situation, situation qui échappait clairement à Matis. Et pour reprendre en main la situation il n’y avait pas beaucoup de solution.

Sortant Héritage de son fourreau, il fit face à son adversaire en se précipitant à son encontre. L’homme était à deux doigts d’attraper son arme quand l’ancien capitaine arma son bras pour frapper son adversaire. Il pensait avoir encore le temps de le tuer sans risque un combat long et passablement fatiguant mais ce ne fut pas le cas. Sa lame siffla avec le son si particulier de ses dents sabrant l’air ambiant et atteignit le visage de son adversaire. Ce n’était pas une grosse blessure car le mouvement de l’Alayien lui épargna la souffrance de voir ôter la vie.

Reprenant ses distances alors que le sang coulait toujours sur son visage, l’Alayien observa le capitaine comme s’il était conforté dans son ressentiment. Matis avait très mal gérer son coup, de ce fait il s’était griller lui-même sur cette question… il devait maintenant trouver un moyen de s’en sortir, et vivant si possible. Sa lame luisait dans la nuit et pendant un temps il n’entendit que l’écoulement du sang de son adversaire sur sa lame. Chacune des minces goutes de sang allant abreuver cette terre qui l’avait trop souvent été.

Pendant ce laps de temps l’autre avait aussi pris ses distances, tant et si bien que déjà plusieurs mètres les séparaient tout deux. Comme si aucun d’entre ne voulait vraiment de combat malgré l’ensemble des menaces proférés des deux côtés. Ses propos étaient clairs, il ne voulait pas combattre, sans quoi il se serait jeter sur son adversaire sans attendre plus longtemps… Cet Alayien n’était peut être pas tout à fait fou…

Tu t’en sors avec une simple égratignure pour cette fois… Matis recula encore en gardant bien en vu son adversaire. Pour le moment il n’avait pas vraiment le choix. J’espère juste que tu ne retombera plus jamais entre mes mains, en tout cas je l’espère pour toi car cette fois ci je ne serais pas aussi conciliant…

Reculant de plus en plus, il finit par se trouver derrière un arbre et c’est sans avoir de vu sur son adversaire qu’il conclu leur « engagement » sur une simple phrase.

Tu méritais bien plus que ce que je n’ai pu t’infliger… Sache que les gens comme toi ne feront pas long feu dans les mois à venir… Supplie donc ton Dieu de te protéger, car notre colère sera terrible…

Théâtral, pathétique, beaucoup d’adjectif pouvaient être trouvé sur cette réplique mais il n’en avait cure, l’important était le rôle qu’il jouait et la fuite qu’il prenait. Le reste n’était rien.

Son adversaire avait opté lui aussi à quelques pas en arrière. Au lieu de profiter de l'opportunité que lui offrait Alauwyr, à savoir de partir, il préférait jouer encore les beaux parleurs. A chaque parole qui sortait de sa bouche, les dents de l'Alayien se serrèrent sous la provocation. Le sang coulait toujours le long de l'estafilade. Un fin filet moite et chaud commençait à couler le long de son cou. Il n'en avait cure. Son coeur battant plus fortement à ce qu'il l'entendait le préoccupait bien plus intensément. Une gêne dans le bas de sa cheville lui rappela à son mauvais souvenir. Il secoua son pied pour se défaire de la corde traîtresse.

Doucement, Matis se retira dans l'ombre des arbres, se dissimulant parmi les troncs ; peut-être même derrière le premier qui était à proximité, car il l'entendait encore parler ! C'était de trop. Il ne bougea pas de sa position, dardant un regard empli de hargne sur le dernier emplacement où s'était trouvé l'Armandéen. Il devait être encore à portée de voix, car il n'avait pas entendu de pas précipités ou dans le même genre définissant une fuite. Il n'aurait pas dû hésiter. Il aurait du lancer les hostilités face à cet impétueux ! A se demander qui méritait réellement une leçon dans l'histoire. La chance que lui avait offert d'une certaine manière l'Alayien venait de s'envoler. On ne bafouait pas ce qu'il offrait, alors qu'en temps que Théocrate, un tel acte si on l'apprenait sera immédiatement considéré comme de la trahison. Mais là... La voix de Matis appelait la voie des armes. D'une voix forte et glaciale, Alauwyr cracha alors :

''Que des menaces ! Que des mots ! Hormis parler et réussir seulement à m'entailler la peau du visage, sais-tu faire autre chose Armandéen ? ''

Il n'avait eu besoin de prier Néantpour réussir à rester en vie, à repousser et à tuer ceux qui prétendaient le supplanter dans la loi du plus fort, loi naturelle qu'on retrouvait partout dans la nature. Bien qu'une part de chance avait contribué à sa survie, il garda en tête que que majoritairement, c'était le désir absolu de rester en vie par le chemin des armes l'avait aidé jusque là. Bien entendu, l'épée n'avait pas été la seule actrice dans la plupart de ses actes et de ses rencontres... Mais là avec ce faux bûcheron qui avait tout d'un combattant expérimenté.

Il se baissa vivement sans perdre de vu la source possible de la position de Matis, pour avoir dans sa main libre la corde et son noeud coulant. Quelques mouvement souples de son bras et la corde s'enroula autour de son poignet.

''Viens donc joindre l'action à tes paroles. Viens m'infliger ce que tu oses prétendre ! Viens croiser le fer pour découvrir que je n'ai nul besoin de prier pour défendre ma vie ! ''

Matis être conciliant. Cela le faisais doucement rire comme cela l'agaçait. Une grimace mauvaise s'était peinte sur son visage. Cet Armandéen ne savait rien. Absolument rien ! Peu importait les épreuves qui l'avaient forcées celui-là, Alauwyr n'y voyait qu'un arrogant, se pensant propre sur lui. Comme les Alayiens étaient une forme d'excuses pour se justifier d'être dans le bon chemin. Si au lieu de palabrer et faire le fier paon, il aurait pris ses jambes à son cou ! Non, il avait préféré le défier, en se montrant supérieur par des mots !

''Seul un lâche est capable de proférer de telles répliques. Viens donc mettre en application ce que tu profères !''

Un léger craquement fut émis du cuir qui habillait la main qui enserra un peu plus la garde de sa lame. Quelques gouttes de sang gouttèrent sur le sol, ne provoquant à peine qu'un léger bruit humide sur les feuilles qui couvraient le sol de la forêt...

Il errait doucement dans cette petite forêt qu’on pourrait à peine qualifier de bois au vu de sa taille. Il savait que l’autre n’était pas loin et qu’il n’hésiterait pas un seul instant à le suivre dans sa fuite. Il pouvait dire ce qu’il voulait, il pouvait l’insulter, le traiter de lâche, rien n’avait d’emprise sur lui. Il était certain de son état et de sa situation et savait clairement qu’il ne pouvait plus rester ici une minute de plus. Alors il s’était désengager du combat, certain pourrait le voir comme un lâche qui menace mais ne fait rien. Mais ils étaient tellement loin du compte. Chaque menace n’était pas vaine, il les avaient toujours menés à bien, il avait toujours mis un point d’honneur à clore ses dettes vis-à-vis de ses adversaires. L’alayien pouvait croire ce qu’il voulait, tout ce qui venait de la part d’un être vénérant le Néant comme Dieu n’avait aucun crédit.

Pendant que l’autre hurlait sa rage de ne pouvoir combattre, à croire qu’il ne savait faire que cela, Matis ôta la corde qui restait accroché à son pied. Cela ne pouvait être qu’une gêne, voire pire, durant sa fuite. Alors, en attendant de pouvoir vraiment fuir, il assurait ses arrières.

D’une voix sombre et claire il répondit à l’Alayien qui voulait tant savoir ce qu’il savait faire de ses mains. Il aurait été étonné, mais ce n’était pas le moment d’entre plus que cela dans les détails.

Je pourrais t’expliquer mille et une façon de jouer avec tes trippes, mais je n’ai ni le temps, ni l’envie de le faire aujourd’hui. Fais juste attention à toi, qui sait ce qui pourrait t’arriver à l’avenir… Néant ou ta mère ne seront pas toujours là pour te protéger….

Aller hop, un pique sur sa mère et la probabilité qu’elle le torche encore comme un enfant en bas âge. Il savait parfaitement que ce n’était pas le cas mais tout de même. Il savait qu’une majorité des Alayiens étaient fébrile et ne savait pas vraiment se contenir dans ce genre de situation, l’important était de lui faire perdre sa raison et le pousser à la faute. Mais il savait aussi que ce n’était pas avec ça qu’il arrivait au résultat escompté.

La froideur de la nuit commençait à marquer son emprise et la fatigue de la journée continuait de troubler l’ex-capitaine. Il savait qu’il ne tiendrait pas plus longtemps et qu’il devait rompre l’engagement. Il avait fait des erreurs, des erreurs qu’il n’aurait pas produit à un autre moment de sa vie mais aujourd’hui était différent… Avec ce qu’il avait vécu, il savait qu’il ne réagissait plus de la même manière qu’avant. Il savait qu’il n’était plus le même….

La voix de l’Alayien vint troubler ses pensées alors qu’il se mettait de nouveau en marche pour quitter le bois le plus silencieusement qu’il pouvait. Ses paroles le firent sourire, comme il le pensait, l’Alayien était un guerrier et rien de plus.

Pourquoi devrais je m’abaisser à combattre un mollusque dans ton genre ? Le cucurbitacée qui te sert de cerveau serait en train de se faire dévorer pour des limaces ? Fais ce que bon te semble pour défendre ta vie, mais tu te laisse guider par un dieu, comme un enfant avec sa mère.

A ce propos, comment Néant a elle réagit à ta nouvelle divinité ? Sûre qu’elle doit t’en vouloir à mort d’avoir détourné ta foi vers le Blanc… A sa place je ne laisserais pas ce sacrilège impuni….

Sa phrase se termina dans un silence assourdissant tandis qu’il continuait sa marche silencieuse. Petit à petit il quittait le lieu de leur confrontation. La distance qu’il mettait entre lui et l’Alayien était salutaire tant pour lui que pour l’autre d’ailleurs… Les dernières paroles de l’Alayien le firent stopper net son évasion, il ne voulait donc pas lâcher le morceau celui là… Si l’on devait lui laisser quelque chose ce serait bien son acharnement…

Seul un imbécile appelle la mort de ses vœux. Qu’attends-tu toi pour mettre en branle tes actions ? Je ne te vois pas beaucoup bouger depuis tout à l’heure. Aurais tu donc peur de voir ton joli petit visage et tes magnifique petite mains, sans doute manucurées par ailleurs, blessées ou salies ?

Alors cesse de jouer au plus malin toi qui ne sais que détruire et faire preuve d’un barbarisme affolant.

Alauwyr laisse parler l'Armandéen, serrant les dents sous les insultes qu'il proférait à son encontre. Laisser sous-entendre que lui aussi n'était qu'un homme mou et dépourvu de volonté à se battre... Il ravala ses injures et remonta la cagoule sur son visage, remettant ensuite sa capuche sombre sur sa tête, pendant qu'il écoutait toujours les paroles de Matis. A l'entendre, il arrivait plus ou moins à savoir dans quelle direction il se trouvait. Par contre, les mots détournés pour toucher sa foi envers Néant ne porta pas ses fruits. Cet Armandéen ne savait rien de lui ! Rien de ce qu'il pouvait ressentir depuis les premiers jours où il foulait ces terres. Rien de ce qui le rongeait maintenant. Il connaissait la position de l'Esprit qui avait poussé tout un peuple à la vénérer. Mais là, maintenant, Néant n'était pas là et jusqu'ici, comme à de nombreuses reprises, Alauwyr n'avait pu compter que sur lui-même et son épée. Même avec la disparition du verre noir, il n'avait pas reculé face à l'adversité. Quand on visait sur sa survivance....

Doucement, il se fondit dans les ombres, laissant l'armure qu'il portait jouer son rôle. Ses muscles de mâchoires se tendirent quand à l'usage de cette... chose. Mais elle avait son utilité et avait déjà bien servi. Pour rester en vie, il fallait savoir tolérer quelques désagréments. Et avant d'espérer prendre à revoir son adversaire, il ne lâcha que quelques mots, dans un ton froid et dénué de toute émotivité. La colère poussait à la faute et avec cet homme là, il ne pouvait pas se permettre d'en commettre.

''Tu aurais mieux faire de partir au lien de palabrer....''

Ce fut ces seuls mots, avant de tenter de contourner son ennemi. Un jeu du chat et de la souris, où il avait un léger petit avantage sur Matis. En se fondant précautionneusement dans les ombres, veillant à avoir le pas le plus léger possible pour se rapprocher de sa cible ; qui n'attendra pas sur place à l'attendre sans aucun doute. Peut-être que Matis arrivera lui aussi à l'entendre se déplacer non loin de lui, car l'Alayien, bien que souple, n'était pas un rôdeur averti. Chose certaine sera qu'il sera bien plus furtif que sa proie, qui se complaisait à se croire au-dessus de lui. C'était là le genre de contrariété déplaisante qui donnait envie de tuer la cible, de lui faire comprendre dans une mort lente la grosse erreur commise.

Un instant, Alauwyr stoppa son avancement, guettant le moindre bruit, le moindre craquement de feuille ou de brindilles. La nuit était encore bien présente et l'ombre des feuillages des arbres l'aidaient. Doucement, il resserra la prise qu'il avait sur son épée, qu'il veilla à garder contre lui pour ne pas qu'un tout petit fil de lueur la faire luire. Même s'il y avait très peu de lumière, malgré le peu que les étoiles offraient, un rien suffirait à dévoiler sa position. Collé contre un vieux tronc d'hêtre, il sonda les environs. Il n'entendait plus rien. Ce bougre aurait réussi à lui échapper ? Il en doutait grandement. Comme lui, il devait se cacher pour guetter le bon moment pour frapper et terrasser celui qui le pourchassait. Le pourchassé qui pouvait ou était devenu le chasseur.

L'intérieur de la forêt était bien silencieux, comme si les animaux eux-même retenaient leurs cris pour guetter l'instant de l'affrontement. Un poil gênant, car le moindre faux pas s'entendrait à des dizaines de mètres. Doucement, il quitta sa cachette et se rapprocha d'un autre arbre. Il ne prit pas garde à la couleur du tronc. C'était aussi un gros vieux tronc, mais l'écorce striée de noir et de blanc, qui permettait d'identifier l'espèce de l'arbre comme appartenant à la famille des bouleaux, trahit l'espace d'un bref temps sa silhouette. Une ombre à la forme humaine qui passe devant ce genre de bois ne peut que se dévoiler. Cela dut suffire à Matis, pour attaquer son poursuivant. Peut-être l'instinct où un mouvement parasite dans le coin du regard de l'Alayien lui permit de parer le coup au dernier moment, dans un mouvement souple et vif. Sans attendre une autre riposte, l'épéiste repoussa la lame de son adversaire pour répliquer dans une offensive plus brutale. Si le silence de la forêt avait perturée le temps de la course poursuite entre les deux hommes, elle fut brisée le choc du métal se percutant violemment l'un contre l'autre.

Alauwyr profita de la passe d'arme suivante pour se mettre hors de portée, gardant son épée en garde et jaugeant son adversaire. Le combat promettait déjà : l'Armandéen savait réellement usé de son épée. Un bûcheron hein ! Il lui darda un regard froid et dépourvu de toute émotion, devenant qu'un combattant affrontant un autre combattant

Etait-ce donc de cela que sa vie serait dorénavant faite ? Des combats, des fuites, des traques et des nuits passées dans des forêts à attendre la mort ? Que ne s’était-il pas battu pour que cesse cette vie ? Mais aujourd’hui n’était pas le meilleur moment pour remettre en cause tout ce qui composait la vie du soldat, il en avait vu tellement d’autre et aujourd’hui encore il allait devoir se battre, pour rester en vie et poursuivre le combat.

Cette nuit resterait donc dans ses anales comme l’une des traques les plus épuisantes qu’il ait déjà dû mener. Ce n’était que son adversaire était particulièrement ténébreux, puissant ou monstrueux ni même que les conditions climatiques étaient très mauvaises. C’était juste qu’il sortait de MorneFlamme. Et on aura beau dire ce que l’on croit, ce n’était pas de tout repos. Il était impossible, même après plusieurs semaines de fuites et de repos, de reprendre autant de force ni même ses capacités post-prison. Du coup tout ceci avait un impact majeur sur sa condition générale et son esprit divaguait de plus en plus. Il cherchait un moyen de mettre un terme à ce combat et de quitter ce lieu. Mais ce n’était pas pour tout de sutie.

Après une ultime réponse de son adversaire, il stoppa son avancée, comme pour attendre celui qui le défiait et qui n’allait trouver qu’un combattant à la place d’un bucheron ou d’un simple paysan. Pas sûr que la surprise lui plaise même s’il savait qu’il n’avait plus vraiment de doute quant à sa condition.

Silencieux, il patientait difficilement dans ce bois, attendant que l’autre pointe le bout de son nez. En attendant il avait sorti ses deux épées et les tenait fermement en main. Héritage aurait sans doute soucis mais son épée de justice pouvait déstabiliser les personnes à l’alignement déviant. Et il n’avait aucun doute quant à l’alignement du personnage qui le traquait. Ainsi, durant quelques instants il porta son attention sur ses deux épées. L’épée de justice était simple bien que marquée par les runes qui lui conférait sa magie, il avait fait ajouter des lanières de cuir supplémentaire pour améliorer sa prise en main mais dans l’ensemble elle restait t’elle qu’il l’avait obtenue. Celle-ci lui avait été offert il y a quatre années déjà, mais par qui ? Il ne l’avait jamais su, un matin il l’avait trouvé devant son lit telle une offrande. Et, après l’avoir analyser sous toutes ses coutures, Matis s’était résolu à l’utiliser et depuis elle ne lui avait jamais fait défaut.

La seconde, et sans doute la plus importantes à ses yeux, était Héritage. Une épée qu’il avait héritée de son père qui lui-même la tenait de son père et l’on pouvait remonter ainsi sur quelques générations. De mémoire d’homme elle avait toujours été dans sa famille, mais il avait des doutes quant à certaines parties de son histoire. Cette épée avait connue d’innombrable bataille, de la création de l’Empire à sa destruction devant les Alayiens et il n’était pas sûr qu’elle avait toujours eu cette forme si particulière. A dire vrai il n’avait jamais rencontrer d’adversaire ou de personne possédant une épée telle que la sienne. Elle était unique. D’un côté tranchant, de l’autre bardée d’une série de temps mettant en avant le côté sauvage et bestial du combat… Une arme qu’il avait fait renfoncer quelques mois avant la prison. Elle était unique, et il se l’imaginait vivante, comme si celle-ci réclamait la guerre et le sang. Et en cet instant, alors qu’il l’avait en main, elle ne réclamait que cela.

Un bruit vint de la droite, et il se rendit compte que son adversaire était sorti de sa cachette. Sans plus attendre il se dirigea vers lui dans l’espoir de l’attaquer le plus silencieusement du monde. Hélas il était loin d’être un rodeur ou un voleur confirmé, alors il fini par se faire voir. Au dernier moment certes, mais il se fit voir quand même et son attaque échoua. L’autre para son attaque et se défendit violement en contre-attaquant mais Matis ne se laissa pas faire et n’hésita pas à utiliser ses deux lames pour se défendre.

Tu te bat bien pour un fanatique doublé d’un soudard.

Attaquant de nouveau il lança ses deux lames à l’attaque de la protection de l’Alayien. En position de « force » il devait profiter de chaque instant pour mettre à bas sa défense et finir rapidement ce combat. Mais il n’en restait pas moins prudent pour ne pas pêcher par orgueil et se retrouver dans une situation encore plus critique. Les lames s’entrechoquèrent et finirent par n’être que les derniers bruits venant troubler la pseudo quiétude de ces bois.

Soit donc gentil, cesse de bouger que je puisse régler cette affaire au plus vite. J’ai autre chose à faire moi… Envoya il comme une pique naïve à son adversaire d’un soir.

Il savait qu’il ne se laisserait pas faire, aucun des deux ne pouvaient le faire car leurs idéaux étaient trop différents, leur vision du monde était trop différente. Rien n’aurait pu les unir, rien ne pourrait plus les arrêter. Ce combat n’était pas seulement celui de deux hommes, c’était celui de deux systèmes qui s’affrontaient dans un combat à mort où seul le plus malin, le plus chanceux ou le plus fort finirait par rester en vie.

Deux épées contre une seule. On pourrait de suite penser que l'avantage serait pour Matis, mais comme lui, l'Alayien était versé dans le maniement des armes depuis bien des années et il avait appris à se battre contre d'autres types de lames ou de pointes. Alauwyr avait veillé également, à l'époque où Néant était encore là pour son peuple dévoué, à améliorer et à entretenir un style de combat qui lui garantissait de savoir se battre sans avoir à entièrement à se fier au verre noir qui était leur avantage le plus certain contre les gens qui usaient de magie. Un bon cheminement décidée car au jour de la débâcle à l'Aube Rouge, quand le verre noir ne fut plus qu'un métal tout ce qu'il y avait de plus banal...Aujourd'hui encore, il assurait plus ou moins sa survivance par ses acquis et ses expériences martiales, même si la magie si elle entrait en jeu le désavantageait. Sauf maintenant. Il avait pris sur lui de s'équiper. Une faible concession de sacrifier pour garder l'équilibre sur la balance.

Son adversaire s'était donc bien défendu et avait même répliqué pour reprendre le dessus. Peut-être qu'il ne s'était pas attendu à ce que l'Alayien arrive à se défendre. Et maintenant qu'ils faisaient face à face... deux hommes que tout opposait. L'un théocrate, l'autre protégé, Alayien contre Armandéen. L'ombre contre la lumière.

Veillant à chaque geste que pourrait faire Matis, Alauwyr garda la lame de son épée haute, prêt à se défendre. Car doucement, quelque chose le perturbait dans son être. Une forme de crainte s'instillait en lui. Depuis que l'autre avait sorti ses deux épées, qui brillaient par leur splendeur et leur redoutable facture, Alauwyr ressentait cette étrange ressenti qui n'était pas dans ses habitudes. Matis tenait des armes conçues pour résister solidement à un combat et à arracher des vies, mais qui devaient être entourés d'un charme magique. Satanée magie ! Voilà pourquoi l'Armandéen se sentait si sûr de lui ! Apporter la crainte et le doute à ses adversaires était un moyen bien lâche de gagner sur eux !

Bien malgré lui, il hésita à lancer une offensive frontale à la dernière réplique de son adversaire. Les muscles de ses mâchoires se crispèrent devant cette faiblesse qui n'était pas sienne. Il n'avait pas peur d'un homme comme Matis ! Il avait déjà affronté des vampires et lui n'était qu'un homme. certes, pour les vampires, le verre noir avait été un avantage plus que certain, il y a quelques années. La chanson était tout autre maintenant.

Il fit quelques pas de côté, toujours maintenant une distance entre lui et Matis. Il se permit alors de répliquer à ce fichu faux bûcheron sur un ton des plus froids, réprimant une certaine colère.

''Si tu crois que j'attendais gentiment de me faire occire par tes lames... tu te trompais Armandéen. Et ne crois pas que tu m'effraies. Si tu veux m'atteindre... à toi d'être le plus rapide''

A ces derniers mots, il se jeta sur lui avec une soudaine vivacité. Bien que de disposant que d'une lame pour en affronter deux ans, il sut attaquer et frapper avec force et expertise. L'Armandéen ne pourrait que lui offrir une parade pour contrer son assaut déterminé. La peur sourdait doucement et traîtreusement, dilué dans son sang battant à flot dans ses veines. La chassant de ses pensées, il entraîna Matis dans une danse martiale, qui exigerait de tous les deux le déploiement de tous leurs savoir-faire pour se contrer l'un et l'autre. Chacun d'eux tenta de trouver une ouverture, pour se voir parer et repousser. A plusieurs reprises, Alauwyr rattrapa la main pour dominer Matis, le contraignant qu'à se défendre, pendant qu'il le harcelait de coups. Il était doué, et le combat des plus passionnants. Il y avait bien longtemps qu'Alauwyr n'avait pas eu à se battre de la sorte. Mais l’insidieuse magie était toujours là et même avec toute la volonté.

Un coup tranchant manqua de lui entailler sévèrement le bras. Ce fut la corde qu'il portait entouré autour qui prit le coup. Il jeta le reste qu'il tenait encore en main à la figure de Matis, profitant de la possible perte d'attention que ce geste imprévu occasionnerait. Sa lame siffla latéralement pour frapper... Des voix retentirent à l'orée de cette forêt qui était devenue une arène pour régler les comptes. Alauwyr contre-attaqua, imposant à son adversaire à reculer. L'Alayien grimaça devant l'arrivée probable de renfort. En même temps, vu le raffut qui découlait de leur combat à tous les deux, il n'était guère surprenant d'attirer l'attention.

Epée levée, dardant un regard froid et sourcillant à Matis, plusieurs décisions s'offraient à l'Alayien. Les renforts ne pouvaient être que des Théocrates, il lui suffirait de tenir son adversaire assez longtemps pour le faire prendre. Ou bien il le tuait sur place... ou bien... Pourquoi fallait-il qu'il ait toujours ce genre de pensées contradictoires !

''Tu devrais dégager sur le champ si tu ne veux pas tomber dans les mains de mes congénères. Si tu as réellement d'autres choses à faire, fais le maintenant''

Il avait reculé de quelques pas, autant pour réduire l'effet de peur qui venait d'une de ces deux lames -qui finissait par lui tendre atrocement les muscles-, que pour montrer qu'il s'écartait du combat; mais pourquoi il optait pour ça ! La réponse qu'il se trouva et qu'il le conforta était pour remettre ce duel à plus tard. L'issue allait être gâchée par la venue des importuns théocrates. Mais était-ce réellement la véritable raison ? Après restait à voir comment Matis prendrait la chose et surtout... de ce qu'il déciderait.

L’autre se battait quand même avec beaucoup d’implication, il ne tenait pas à mourir si vite. Ce qui, en soit, n’était pas une si mauvaise chose. Mais alors que faire dans une situation pareille ? Ils semblaient tout deux se battre sur un pied d’égalité mais l’Alayien avait l’Avantage d’être sur son terrain, entouré de ses alliés. Matis était en fuite depuis des mois, traqués par les traitres et les félons qui voulaient le voir mort. Vraorg avait mit sa tête à prix et, il ne savait pas vraiment pourquoi, faisait parti de la demi-douzaine de personne recherché à n’importe quel prix. Il n’était plus considéré comme un homme, il n’était plus qu’une bête que l’on traque. Un criminel de droit commun qui n’avait pour seul horizon que la fuite ou la mort. Comment en était il arrivé là ?

Il n’arriverait jamais à se faire à l’idée de l’ensemble de ces changements survenus en moins de cinq ans, comme s’il n’acceptait pas ce qu’il avait pu devenir uniquement parce qu’il avait décidé de suivre son credo, son honneur ainsi que ses idéaux plutôt que la facilité. D’officier servant son pays avec bravoure et courage il était devenu un prisonnier en fuite après avoir été un rebelle et un assassin recherché par le pouvoir qu’il avait lui-même protégé et que sa famille avait aidée à mettre sur pied. En terme de reconnaissance de dette on repassera.

Et pourtant il se battait encore. Il se battait contre vent et marrais. Il affrontait sans peur et sans honte ceux qui voulaient le voir mort ou derrière des barreaux. Il se battait pour que vive ses idéaux et que sa descendance puisse un jour vivre dans un monde plus juste acceptant son passé et se battant pour un futur glorieux… Ils étaient si nombreux à se battre contre Vraorg après avoir affronté les Alayiens et les Vampires. Ils étaient si nombreux ceux qui ne voulaient pas abandonner le combat à cause d’un proche, d’un idéal, d’une vengeance ou pour récupérer une vie qui leur avait été arrachée. Matis se battait un peu pour toutes ces raisons. Que ce soit pour ses sœurs, sa compagne ou ses amis il avait tant de monde à essayer de protéger. Il voulait aussi participer à la reconstruction d’un état Humain fort où tout un chacun aurait sa place et où la guerre ne serait pas une fin en soi. Mais l’un des moteurs les plus importants depuis les dernières semaines était la vengeance. Une vendetta personnelle contre un régime personnifié par Vraorg le Blanc. L’être le plus cruel et le plus obscur qui lui fut permit de connaitre. Une vengeance qui se trouvait incarné par chacun des sbires de cet être cruel, du maire du hameau à un soldat défendant sa cause. Tout ceux qui le servaient devenaient des ennemis mortel et qu’il se devait d’éliminer.

Son combat contre l’alayien était un moyen d’éliminer une menace immédiate mais aussi, et surtout, le moyen d’assouvir une vengeance qui couvait depuis des semaines et qui se trouvait renforcé par des jours de traque. Mais l’autre était loin de se laisser faire, il fallait au moins lui laisser cela, l’autre se battait bien. A plusieurs reprises Matis dû parer des attaques audacieuses et mortelle. Il avait affaire à un être dont la guerre était loin d’être un passe temps ou une occupation. L’autre se battait et vivait pour la guerre cela se voyait à sa posture, cela se sentait à sa rage au combat. Il n’aurait donc aucune excuse à sa défaite….

C’est tellement dommage, cela m’aurait évité bien des traquas et de gagner du temps… Mais ce n’est pas grave, tout vient à point à qui sait attendre et tu finirais pas rejoindre ton premier Dieu avant que le second ne te suive dans la tombe.

Repoussant l’autre, qui semblait marqué par la présence magique de son épée, Matis prit le temps de montrer un sourire mauvais. Il fallait se rendre à l’évidence, dans cette guerre il n’y avait pas de bon ou de mauvais, il n’était pas question d’une lutte entre le bien ou le mal… Dans la théorie et dans les histoires ce serait comme cela que cette guerre serait présentée, mais dans les faits qu’en était-il ? Dans les fait il n’y avait que des combattants qui s’entretuer pour des idées et pour ne pas mourir, mais comment rendre ça ‘beau’ ? Comment rendre ce combat glorieux alors qu’il ne s’agissait que de survie guerrière ?

Comme lui avait dit un jour son ancien capitaine, les idéaux sont pacifiques et beaux mais l’histoire n’est que violence.

Le combat continua encore quelques instants, des instants qui parurent lui durer une éternité alors qu’il ne s’agissait que de quelques minutes. De passes d’armes en passes d’armes, d’esquive en parade, aucun ne semblait prendre le dessus sur l’autre et Matis commençait à se poser des questions. Il ne doutait pas de sa capacité à se défaire de l’autre, mais il se demandait s’ils ne finiraient pas par être repéré par d’autres théocrates…. Et dans ce cas là il serait sacrément dans la panade.

Après une énième passe d’arme l’Alayien recula et lui jeta au visage une nouvelle pique. Cela ne le laissa pas indifférent car il n’avait pas vraiment tord, mais Matis sentit bien que l’autre n’était pas tranquille non plus, qui pouvait être sûr de la nature des bruits ? Sa voix ne trahissait aucune crainte ou peur, mais il sentait bien qu’il n’était pas tranquille. Etait ce dû à son épée ? Sans doute, mais pas uniquement.

Ben voyons, je vais m’en retourner chez moi comme ça ? Tu pense un seul instant que je t’imagine me laissant partir tranquillement vers d’autres contrées ? Hélas pour toi, je ne partirais que lorsque j’aurais réglé ton compte alors soit gentil, laisse toi faire tranquillement. De ce fait on pourra régler cela bien plus vite et bien plus proprement.

Matis fit un pas de plus vers son adversaire. Il fit faire des moulinets à Héritage, pour lui montrer qu’il était déterminé mais aussi pour préparer sa prochaine attaque. A chaque pas il avait martelé ses mots comme une menace qui prenait doucement corps devant eux. Comme un fait inéluctable qui prendrait corps… Il gardait néanmoins un œil sur les alentours, ne sachant pas vraiment à quoi s’attendre de son adversaire.

Qu’est ce qu’un roublard tel que toi garde encore dans sa manche ? Ne penses tu pas que nous devrions en finir d’une manière ou d’une autre ? Alors dis moi ton nom petit, au moins je saurais peut être m’en rappeler…

L'Armandéen s'était rapproché d'un pas en avant pour réduire la distance qu'Alauwyr avait mis entre eux deux. Les sourcils froncés, il serra les dents devant son manège. L'épée qu'il moulina siffla dans l'air, chantant d'une façon menaçante que d'ordinaire il ne laisserait pas passer. Mais cette nuit, les choses seront complètement différentes.

''Tu aurais du me le régler bien avant... Et dommage pour toi, je te rendrai pas ce plaisir. Tu aurais du partir au lieu de palabrer. A croire que c'est ta spécialité. ''

Alauwyr se mit dans une posture défensive, s'attendant à tout instant à ce que Matis relance les hostilités par son envie d'en découdre et de l'occire au plus vite. Mais il nota qu'il était observateur des environs, comme s'il comprenait que des choses se passaient autour d'eux. Ou alors redoutait-il encore un mauvais coup de l'Alayien. Cela se confirma par une énième réplique. Au moins, il y avait de l'évolution : on passait de soudard à roublard. Par contre à sa petite demande, il se contenta de sourire avec un certain cynisme, même si l'effet de l'épée commençait à déteindre de plus en plus ; cela se voyait à sa posture, qui bien que défensive, était hésitante. La peur se frayait petit à petit un chemin et l'Alayia détesta cela. Son sourire se perdit dans un rictus malsain.

''Que je te donne mon nom, blanc bec ? Tu ne mérites même pas cet honneur. Allez amène toi, à moins que tu aies aussi peur qu'une fillette !

Il n'attendit pas que Matis se décide à agir pour attaquer et reprendre leur joute endiablée. Comme précédemment, Alauwyr y mit tout son savoir-faire pour contrer, parer, attaquer et obliger son protagoniste à reculer. D'une oreille, il entendait des individus qui se hélaient. Une battue s'oragnisait ou cherchait-on à les encercler ? Les deux solutions étaient possibles. Sur une feinte, Alauwyr obligea Matis à reculer. Grimaçant, on voyait ses dents serrés à travers ses lèvres entrouvertes par l'effort qu'il produisait pour chasser cette sensation de peur qui s'était installé. Là où il aurait du frapper, il ne put que faire un ou deux pas en arrière. Satané tricheur par la magie !

''Crois moi que tu vas regretter de ne pas être parti mon cher...''

La magie était une vilenie, une souillure. Savoir qu'elle pénétrait en lui attisait assez de colère pour résister encore plus longtemps à ce qui entrait dans son esprit. Ressentir de la peur alors qu'il n'y avait pas de raisons précises était quasiment une insulte. Cela lui suffit donc à répliquer à nouveau contre Matis, y mettant toute sa hargne et sa colère. Cette fois, il devait suivre l'idée qui avait germé dans son esprit pour se défaire de lui. Entamant une danse plus rapide cette fois, il harcela encore et encore l'Armandéen, jusqu'à ce qu'une ouverture fatale se présenta. Vif et frappant il fut. Un coup de poing frappa donc la pommette de Matis. Alauwyr ne put éviter de se faire entailler la joue sur le coup, rajoutant donc une nouvelle entaille qui saigna déjà abondamment à son visage. Mais le coup qu'il avait porté contre l'Armandéen devrait suffire pour l'étourdir, le temps de ce qu'il avait à lui cracher.

Passant une main pour essuyer une fois de plus le sang qui coulait, chaud et moite contre sa peau déjà bien balafré d'anciens combats, il adressa un air assassin à Matis, tout en reculant.

''Tu n'es qu'un idiot. A croire que c'est toi qui appelles la mort de tes voeux. Si tu as des choses encore à faire, alors évite de gaspiller stupidement ta vie. Imbécile d'Armandéen ! Peu m'importe d'où tu viens ou tu vas, mais crois moi que je n'ai pas besoin d'un nom pour me rappeler un visage. ''

Il pointa sa lame vers lui, dans un dernier geste menaçant et se faufila dans les ombres.

''Pars ! Pars tant que tu le peux encore ! ''

Sinistre imbécile qu'il était, tout comme cet Armandéen ! Si l'Alayien s'écoutait réellement, il l'aurait achevé. Et au lieu de cela.... Au moins, il ne sentait plus la morsure maligne de la peur s'instiller en lui. Un soulagement. Par contre, quand il jugea être à bonne distance, il porta une main à ses lèvres pour héler les autres. Théocrates ou personnes venues secourir le pauvre malheureux Matis, le résultat était le même pour Alauwyr.

'' Par ici ! Le fuyard est parti par ici. Suivez ma voix pour me rejoindre ! ''

Et bien entendu, le but était d'aller à l'opposé de Matis. A se demander pourquoi Alauwyr faisait cela. Dans son esprit, il se convainquait que c'était pour recroiser ce bougre et le combattre dans de meilleures conditions...Mais était-ce là réellement la réponse à ce qui motivait son geste ? Bien sûr que non. Au moins aurait-il une belle excuse à apporter quand aux deux fines entailles qui lui balafrait le coin de la bouche et la joue.

L’autre, cet Alayien qui avait envahit et détruit par deux fois tout ce pour quoi il s’était battu durant des années, restait devant lui tel un parasite accroché à sa proie. Un morpion dont il ne pouvait pas se débarrasser aussi facilement qu’il l’aurait voulu. Car malgré tout ce qu’il disait de lui, de tout le mal qu’il pensait tant de son être que de ses motivations il fallait avouer qu’il était doué dans son domaine. Certes il n’avait pas le niveau d’un maitre bretteur d’un Alford ou il ne savait pas qui, mais il avait un niveau fort honorable, pas loin de celui de Matis même.

Mais il parlait trop. Par ses ancêtres il ne cessait de parler à tel point que l’ex capitaine se sentait presque obligé de lui répondre et il le faisait sans se faire prier même. Pourquoi ? Pourquoi faisait-il cela alors que cela lui prenait le peu d’énergie qui lui restait, lui coupait le souffle et brisait ses actions. Il le faisait car après tant de semaines de fuite il n’avait d’envie que de parler même si c’était avec un être si abjecte que lui.

Voila donc quelque chose que je pourrais te retourner le soudard. Qu’as-tu donc fais à part parler ? Tu te vante d’être un soldat, prouve le car pour le moment je ne vois rien d’autre qu’un enfant appeuré.

L’autre attaqua de nouveau sans retenir le moindre de ses coups et malgré tout ce que voulait faire Matis, celui-ci commençait à fatiguer. Les longues journées de traques et de chasse commençaient à se faire sentir sur son métabolisme déjà fortement malmené par ses trois années d’emprisonnements à MorneFlamme.

Les attaques de l’Alayien redoublèrent d’intensité pour atteindre sa cible qu’était Matis. Hélas pour lui le capitaine ne se rendait pas si facilement et n’abandonnait pas le combat pour sa vie et son futur. Une attaque de son adversaire vint percer sa défense et c’est un poing qui vola contre son visage tandis que sa propre lame alla rejoindre son visage dans un mouvement mortel. La lame entailla le visage de l’Alayien mais ne put atteindre son but.

Le capitaine fut sonné pendant quelques instants du fait de l’attaque de son adversaire, mais il arriva quand même à très vite reprendre le dessus sur ses sensations déstabilisantes. L’autre, contrairement à ce qu’il pensait n’en avait pas profité pour s’en prendre au soldat mais bel et bien pour prendre une distance de sécurité et pour parler de nouveau. A le voir se tenir la tête Matis compris que son acte n’avait pas été un total échec, au moins il aurait la satisfaction d’avoir laissé sa trace sur son adversaire d’un soir.

Ces paroles furent étranges, qu’attendait il réellement de lui ? Mais il savait aussi qu’il avait raison alors, sans pour autant lui donner raison il essaya de se retirer de ce guêpier. Les bruits qui se dirigeaient vers lui annonçaient de nouveaux problèmes, des problèmes qu’il ne pouvait pas subir. Surtout au vu de sa situation actuelle.

Ne pense pas que je t’oublierais… La prochaine fois je ne te raterais pas, profite de ce moment de calme pour arriver à faire autre chose que palabrer.

Matis recula en gardant à l’œil son adversaire puis fini par disparaitre dans les ombres du bois. Il savait qu’il devait le quitter le plus rapidement possible et poursuivre sa route sans se retourner. Mais il gardait aussi en tête le fait qu’il n’aurait jamais dû s’arrêter dans ce village. Au moins cela lui servirait d’expérience pour la suite de sa fuite solitaire, plus jamais il ne devait s’arrêter dans un lieu tel que celui-ci… Il y avait trop de risque et il devait rester en vie ne serait ce que pour poursuivre le combat contre Vraorg… Pas sûr que son épée changerait quoi que ce soit mais il devait au moins participer à la lutte.

C’est donc dans une nuit totale que Matis poursuivi sa route vers le protectorat, pas vraiment certain de ce qu’il pourrait rencontrer de plus. Pas franchement sûr non de s’en sortir vivant… Rien de nouveau sous le soleil en sommes.

Alauwyr avait-il eu le temps d'entendre les paroles de Matis avant de se retirer ? Très probablement, car nul doute qu'il voudra recroiser son chemin, pour voir qui d'eux deux réussiraient à remporter l'échange. Là ce dernier n'avait pu se conclure en raison de la venue des renforts. Mais heureusement pour Matis, si Alauwyr avait entendu sa dernière réplique, l'épéiste préféra attirer l'attention des forces en approche pour laisser l'évader prendre la fuite que de chercher encore à avoir le dessus sur lui. Une perte de temps et qui perdrait toute sa saveur vu que le nombre serait contre l'Armandéen. L'Alayien aimait faire les choses par lui-même...

la prochaine fois qu'ils se rencontraient, cela promettait d'être percutant et voir même tranchant. Le fuyard savait user de sa lame, incontestablement. Cela se confirmait avec le sang qui coulait encore de l'entaille toute récente. D'ailleurs, Alauwyr stoppa sa course, laissant les autres venir à lui tout en portant une main à l'entaille sanglante. Il cracha le sang qui avait réussi à s'insérer entre ses lèvres serrées. Un goût ferrugineux avait également envahi l'intérieur de sa bouche. Ecoeurant. Il cracha une fois encore et reprit un pas de course vers les nouveaux venus. S'il arrivait à les détourner de la direction prise par Matis, le fuyard aura la paix pendant un bon moment. Et pour s'assurer de cela, Alauwyr courut un peu plus vite, au risque de se prendre une racine dans les pieds. Et toujours en hélant pour que les autres le rejoignent.

Il ne sut dire combien de temps il arriva à les attirer à lui de la sorte, mais au bout d'un moment, quand la lisière de forêt se distinguait un peu sur le fond sombre de la nuit, il stoppa sa course, essoufflé et se tint les bras tendus sur ses genoux pour tenter de reprendre son souffle. Il simulait un peu, mais sa respiration rapide était bien réelle elle. Les autres théocrates qui le rejoignirent étaient d'une autre patrouille, qui s'était adjointe à celle d'Alauwyr. L'Alayien résuma comme il put la situation, entre deux reprises de souffle, et que celui qu'il poursuivait avait réussi à détaler. Forcément, on le traita d'imbécile et d'autres noms peu glorieux quand au fait d'avoir été tout seul à tenter de l'arrêter. Cela fait, les théocrates reprirent le chemin du retour, guère enthousiaste d'avoir eu un fuyard.... échappé.

Alauwyr tourna la tête une dernière fois dans la direction prise par Matis. Les yeux froncés, il eut mille et une pensées mais n'en garda qu'une seule :

*Profite bien de cet avantage, Armandéen.... La prochaine fois sera différente*

[HRP : merci de ce rp et j'ai déjà hâte de notre prochaine rencontre ]