La pierre enterrée

Citation :

L'Esprit de la Terre était triste. Il voyait bien qu'un différent opposait ses frères, et il pensait sans cesse à sa soeur... Avaient-ils eu raison ? Etait-ce vraiment l'unique solution ou auraient-ils pu adoucir ses souffrances d'une manière ou d'une autre ? Le bien du monde légitimait-il d'attiser la haine au sein d'une fratrie ? Il ne doutait pas que ses frères se réconcilieraient promptement, mais Néant avait toujours été différente... Et à présent, elle ne serait plus jamais la même.
Alors que plus loin au sud Feu inventait Esfelia en voulant faire entendre raison à Vie, Terre préféra marcher jusqu'aux montagnes. Il aimait cet endroit, c'est là qu'il laisserait son artefact. Vie pouvait dire ce qu'il voulait, mais le plus jeune des Esprits avait toujours fait confiance à Feu.

Tour de Jeu :

1. Crissolorio
   
2. Lorenz
   
3. Ambre
   
4. Kylian

Contexte : ce rp se déroule à la toute fin du mois de février (après le RP "un événement tout à fait inattendu") et débute en pleine nuit. Leur enquête a permit à vos personnages d'apprendre qu'une ville souterraine bien cachée existerait au coeur même des griffes. Ils ont accomplit leur ascension jusqu'à tomber sur des cavernes qui pourraient bien être l'entrée de cette ville. C'est là qu'ils se rencontrent. (Crissolorio et Kylian ont voyagé seuls, Lorenz et Ambre ensembles.)
Alors qu'ils échangent (vous êtes libres de vos réactions), ils sont surprit par l'attaque d'un groupe nombreux et bien armé...

Les Griffes Escarpés! Un nom célèbre sur tout Armanda qui désignait une chaîne de montagnes périlleuse pour n'importe quel voyageur mal préparé, et qui restait dangereuse pour n'importe qui d'ailleurs! Rare étaient ceux qui avaient pu ne serait-ce qu'y mettre les pieds, et pas seulement à cause du danger, mais aussi grâce au fait qu'il n'y avait que peu d'intérêt concret à prendre de tels risques, alors qu'il n'y avait a peu près rien d'intéressant sur ces montagnes. Enfin rien d'intéressant jusqu'a il y a peu. Crissolorio Ostiz bourgeois, trésorier de l'Etat, et ministre de l'information au passage avait était l'un des premier à être informé dans l'Empire du fait que les rebelles étaient à la recherche de plusieurs objets précieux, et voyant vite l'acharnement avec lequel ceux-ci étaient en train de le faire Fabius Kohan pensa que ce serait une bonne idée de les trouver avant eux, et Crissolorio aussi...

Bien entendu le trésorier mena aux débuts quelques recherches en secret qui le menèrent bien vite à une conclusion. L'un de ces fameux objets se trouver dans les cavernes situaient au sommet de cette grande chaîne de montagne. Il s'était par la suite arrangé pour préparer son départ à cet endroit de manière discrète pour ne pas se faire distancer par d’autres opportuniste (de plus il aurait eu du mal à aller vite avec une escorte en pareille endroit donc autant y aller seul), et quand il décida que le moment de lancer cette petite expédition était venu il avait simplement prétexté qu'il allait rendre visite à un membre de sa famille, et après le reste consista à se préparer à ce qui allait s'avérer être une belle ascensions pour quelqu'un de son âge.

Bien entendu ce n'avait pas du tout été une partie de plaisir pour lui. Au bout d'un certain moment il avait même été obliger de laisser son cheval en arrière car il y n'avait pas l'espace pour que cette brave bête puisse le faire avancer plus vite... Autant dire que le reste du voyage avait du se faire à pied, mais heureusement il portait sur lui une couverture des 4 saisons qui lui permettait au moins de faire en partie abstraction du froid environnant, et habituel des hautes altitudes. Il se disait que s'il arrivait à acquérir cet artefact il pourrait faire encore plus bonne impression auprès de l'empereur qui devait déjà avoir une excellente opinion de son trésorier pour avoir confié de telles responsabilités à celui-ci... Et ainsi ça course au pouvoir serait encore facilité, et il deviendrait un membre encore plus éminent de la cour, et encore bien plus riche qu'avant de plus... Oh oui aussi pénible que soit cette aventure c'était bien médiocre par rapport à la récompense qu'il obtiendrait quand il y serait arrivé... Et au pire s'il échoue personne ne sera au courant de son fiasco.

Au bout du compte il finit par arriver à portée de vue des fameuses cavernes, et il se permit de souffler quelques instants puis de fumer un coup sa pipe pour se détendre un peu, et ranger sa couverture des saisons au passage... Et voilà! Il y était enfin arrivé, et il ne resterait plus qu'a rentrer à l'intérieur de ces fameuses grottes pour trouver cette fameuse ville oubliée. Néanmoins il vaudrait mieux prendre garde se dit-il car n'importe quoi pourrait se terrer à l'intérieur, et il serait bien sot de penser avoir été le seul à entreprendre cette petite aventure même si cela l'étonnerait que quelqu'un l'ait suivit... Mais il jeta quand même un petit coup d’œil à sa pièce des passeurs pour s'en assurer...

Et celle-ci brillait faiblement ce qui voulait dire qu'un danger n'était pas loin, et sachant que cette pierre ne le prévenait que des dangers, et non pas des alliés. Cela voulait dire que soit c'était un animal sauvage, des bandits ce qui serait étonnait, ou bien des rebelles! Se dit-il en ne se faisant pas prier pour enfiler la capuche de son manteau de brume ce qui le rendait presque totalement invisible, et empêchait de le reconnaître facilement dans tous les cas. Puis il se doutait bien qu'il y avait des chances qu'on l'ait suivit, ou que les intrus ait repéré sa présence avec son odeur si c'était par malchance des elfes, ou des vampires, alors il se contenta d'activer son anneau d'illusion qui créa une image immatériel de lui pendant qu'il alla se cacher une dizaine de mètres plus loin derrière la végétation, et quelques rochers...

Et il ne lui fallut pas longtemps à attendre pour s’apercevoir qu'il avait raison car ce n'était personne d'autre que Lorenz Wintel en personne qui était là! Heureusement le vampire ne l'avait pas vu lui, et la magie serait sans doute inefficace pour le localiser vu que son manteau ferait interférence, mais néanmoins ce tyran devait l'avoir senti se dit-il quand il aperçut une jeune fille qui accompagnait le seigneur vampirique.

Ce psychopathe en puissce aperçut très vite l'hologramme qu'avait crée Crissolorio, et le vampire après quelques instants d'observation se contenta de lancer un éclair magique qui fit disparaître l'hologramme sans doute qu'il avait vu juste dans la petite ruse...

Néanmoins Lorenz ne le repéra pas vit-il, et peut-être que le vampire pourrait penser que le trésorier s'est engouffrer dans la grotte, et ainsi Crissolorio aurait le champ libre si ce monstre rentrer dans le tunnel avec sa compagne sans demander son resye...

Mais il faudrait sans doute attendre encore un petit peu se pensa t-il quand il vit qu'un voyageur en capuche les rejoignit, et c'est avec intérêt que pour patienter Crissolorio écouta avec attention la conversation qui se déroula par la suite juste en face de lui. Qui sait? il pourrait sans doute apprendre quelques chose d'utile...

[...]

Cela dura un bon moment malheureusement où il arriva tant bien que mal à ne pas se faire repérer, et aurait pu durer encore un petit moment si des intrus lourdement armés n'avaient pas surgit brusquement à l'opposé de l'endroit où se trouver le ministre. Il devina que c'était des elfes en voyant leurs oreilles pointues. Il valait peut-être mieux s'éclipser discrètement se dit-il quand les elfes s'en prirent au trio. En espérant si possible que tout ce joyeux petit monde s'entre-tue, et le laisse en paix!

Enfin il en conclut vite que les elfes avaient du se cacher non loin avant d'intervenir il y a un petit moment car ceux-ci savaient qu'il était-là, et le firent remarquer en tirant une flèche en boulet dans sa direction... Le trésorier eu à peine le temps d'activer le pouvoir de son anneau de bannissement qui le rendit impalpable instantanément. Et c'est ainsi que la flèche lui traversa la tête sans le blessé comme s'il n'y avait eu que du vide a ce moment précis, et le projectile n'eut que pour effet de lui enlever sa capuche ce qui compromit sa furtivité finalement car les trois rebelles s'aperçurent qu'il était là bien vite...

Il se contenta donc de se cacher derrière un arbre en voyant que quelques elfes se rapprocher pour l'encercler comme s'ils voulaient le faire prisonnier... Il voyait bien qu'il n'avait que trois possibilité maintenant qui se présentait face à lui. Soit fuir à toute jambe, mais les elfes sont réputés être bien plus rapides que des humains. Aussi se rendre tout simplement, mais ce serait idiot de le faire sans tenter quelques chose avant...

Il se contenta donc de sortir sa Mandoline d'Aif, et de jouer une petite mélodie qui devrai provoquer une légère somnolence chez ceux qui l'entendraient avec un peu de chance...

Etrange situation...
Le visage fermé du prince vampire ne laissait rien transparaître alors qu'il observait leur petit groupe. Un groupe restreint que celui là. Trois vampires et une humaine, il aurait sans doute pu s'entourer de plus de gardes mais c'était suffisant. Ambre ne serait jamais autant en sureté qu'à ses côtés, et il avait été plutôt satisfait qu'elle démontre l'envie de se mêler à la quête qu'il entendait mener à bien. Il n'aurait pas aimé la laisser en arrière, surtout pas avec les vampires en ébullition depuis qu'il leur avait annoncé qu'il ne la considérait plus comme son esclave mais bien comme tout autre chose. Peu d'entre eux avaient été assez fous pour s'opposer à lui frontalement, mais il n'était pas dupe des bruits de couloir. Tout ceci avait sérieusement ébranlé son autorité, l'obligeant à se montrer plus dur encore qu'il ne l'était déjà. Tant pis, le jeu en valait largement la chandelle après tout. Mais éloigner Ambre de tout cela pendant quelques temps ne serait sans doute pas une mauvaise idée.

Ils n'avaient donc pas traîné. Après avoir été informé de la rencontre entre le chef de file humain et cet étrange voyageur, il n'avait eut aucun mal à enquêter sur les objets cités dans son message. Ce n'était pas comme si il s'agissait d'un secret bien caché d'ailleurs... Les légendes sur ces artefacts sans réel pouvoir abondaient dans toutes les cultures du continent. Sauf que personne ne s'y était jamais vraiment intéressé, ces objets étaient inutiles non ? Lorenz n'était pas du genre à perdre son temps à traquer une chose qui ne pourrait pas lui servir, sauf que la présence de cet Edwyn changeait tout...

Il avait reniflé sa puissance à l'instant même où il était revenu à Aigue après avoir passé plusieurs nuits au sein du camp vampirique. L'être n'était plus là, mais sa magie était si pure qu'il était possible d'en ressentir les fragrance bien des semaines après son passage ! C'était bien la première fois que l'ancestral voyait une chose pareille et bien sur, cela le fascina. Il exigea très rapidement de voir ce Voyageur dont tout le monde parlait, mais en fut pour ses frais puisque celui-ci avait déjà reprit la route. De plus il apprit assez rapidement que celui-ci voyageait avec un dragon de très grande taille. Mauvaise pioche donc... Il se pourrait bien que cet être là se révèle être un terrible danger. Et même si ce n'était pas le cas, il n'aimait pas savoir qu'un être largement plus puissant que lui se baladait sur les terres Armandéennes. D'intenses réflexions suivirent tout ceci mais son enquête sur les artefacts vint l'en distraire. Qui que ce soit cet Edwyn Ruddy, Lorenz ne pouvait pas se tenir à l'écart de ce qu'il pressentait comme étant un virage important pour le continent. Si tant de gens se mettaient à la recherche des objets sans valeurs, alors c'est qu'ils devenaient plus importants qu'il ne l'aurait cru. Dans le doute il valait mieux s'en emparer.

Et c'est ainsi qu'ils chevauchèrent. Les deux vampires qui l'accompagnaient avaient été sélectionnés parce qu'ils étaient du genre à obéir sans poser de questions et parce qu'ils étaient assez loyaux pour tolérer sans sourciller les choix excentriques de leur chef. Ils ne s'en prendraient donc pas à Ambre pendant qu'il avait le dos tourné, au contraire de ce qui risquait de se passer au camp. Cela faisait un soucis de moins, mais il en restait pas mal et pas uniquement au sujet de la quête aux objets... Il n'ignorait pas qu'il avait sérieusement déplu à la jeune femme en indiquant à ses vampires qu'il l'a prenait comme compagne sans pour autant lui demander son avis. Peut-être avait-il été un peu vite en besogne en réalité, mais ce qui était fait était fait et il ne le regrettait pas. Elle ne lui en voudrait pas longtemps, il y veillerait. Et puis elle n'était pas du genre rancunière à ce qu'il lui semblait.

Le voyage se fit quand même dans une atmosphère bizarre, un peu tendue. Les deux gardes vampires n'étaient pas bavards, et Lorenz garda un silence prudent en ne sachant pas très bien si sa petite étoile était simplement plongée dans ses habituelles rêveries ou si elle s'imaginait simplement en train de l'étrangler. Le fait qu'elle n'ai aucune chance d'y parvenir ne rendrait pas cette hypothèse plus agréable pour autant, il espérait quand même lui inspirer d'autres sentiments que la colère... Si c'était seulement ce qu'elle ressentait. Pour cette fois, il avait du mal à lire en elle et à deviner ce qu'elle pouvait bien penser. C'était plutôt frustrant. Mais mieux valait patienter et attendre le bon moment pour entamer une conversation sur ce sujet. C'est donc à peine si ils échangèrent quelques mots jusqu'à cet instant critique où ils durent laisser leurs montures incapables de se déplacer sur les chemins tortueux et escarpés de ces montagnes.

"Tout ira bien, Aranwë saura se débrouiller. Et Medlinya le suivra sans hésitations. Ces deux là s'entendent de mieux en mieux j'ai l'impression..."

Il n'y avait pas besoin d'être un fin connaisseur des chevaux légendaires ou non pour s'en apercevoir. Les deux animaux passaient leur temps ensembles et il arrivait régulièrement à leurs maîtres de les retrouver naseaux contre naseaux en ce qui ressemblait fort à une conversation sérieuse. Peut-être parlaient-ils d'eux... L'idée était amusante. Mais Ambre était sans doute trop attristée et inquiète de devoir laisser sa jument en arrière pour vraiment y réfléchir. Lorenz était d'autant plus conscient de son trouble qu'il se séparait lui-même d'Aranwë avec fortes réticences. Mais ce n'était pas comme si il avait le choix, il ne voyait pas très bien l'énorme étalon jouant les équilibristes sur ces dangereux sentiers... Ni aucun autre cheval d'ailleurs. La suite se ferait à pied.

Le regard flamboyant du destier le cueillit alors qu'il lui retirait son équipement et il fronça les sourcils en le soutenant. Mauvaise humeur ou pas, Aranwë ne pourrait pas le suivre et serait bien obligé de l'attendre en bas des montagnes. Il avait de quoi se nourrir même si il s'offusquerait de devoir se nourrir d'herbe sauvage. Après force renâclement, l'animal céda enfin et s'éloigna lentement avant de se retourner pour attendre Medlinya et les deux autres montures. Sans se préoccuper de l'éclair d'impatience qui s'était allumé dans les prunelles des deux gardes, l'ancestral s'approcha de l'humaine :

"Allez, il est temps."

Une tape ferme, et la jument s'éloigna enfin. Il n'avait pas voulu être brusque mais il n'était pas sur qu'Ambre aurait eu la force de le faire. Il lui empoigna les épaules avec bien plus de douceur et murmura :

"Je te promet que nous la retrouverons très vite. Juste le temps de récupérer cet objet et on pourra redescendre. Je n'ai jamais aimé la montagne."

Il était vrai que ce n'était pas son lieu préféré, loin de là. Il préférait les grands espaces de l'empire à ces gigantesques obstacles qui avaient compliqué la vie de bien des armées. Ils allaient donc faire les choses vite et bien... Ce n'était pas comme si il pouvait se permettre de se tenir loin de son armée trop longtemps de toutes manières.


La nuit était tombée enfin, et tant mieux. Les trois vampires avaient été terriblement indiposés par le soleil pendant la difficile ascension. Les rayons timides de la lune étaient bien préférables, même si ils allaient compliquer la vie d'Ambre qui n'allait plus voir où elle posait les pieds. Ce n'était pas bien grave de toutes façons, elle en avait désormais l'habitude et elle pouvait compter sur trois paires d'yeux parfaitement nyctalopes qui lui éviteraient de tomber dans une crevasse. D'ailleurs et de toutes façons, il semblait bien qu'ils étaient arrivés à leur but. L'entrée des grottes que Lorenz recherchaient s'étalaient à présent sous leurs yeux, ce qui tira un grognement de satisfaction à l'un des vampires :

"Est-ce ici mon prince ? "

Le concerné ne répondit pas. Il avait relevé la tête, narines frémissantes. Son odorat avait capté une étrange odeur humaine, différente de celle d'Ambre. Qui pouvait bien se trouver là ? La réponse lui vint rapidement en une apparition qu'il éventa rapidement comme étant un hologramme magique. Un simple éclair le fit disparaître et il balaya la zone du regard. Il ne lui faudrait sans doute que quelques secondes pour repérer magiquement l'intrus, et lui faire payer son petit jeu. Mais il y avait tout autre chose qui le perturbait depuis déjà plusieurs heures. Une sorte de malaise latent qu'il ne parvenait pas à expliquer. De plus en plus méfiant, il s'immobilisa tout à fait, tous les sens en éveil. Cette odeur.. Il la connaissait.

"Wallam !"

Le nom avait tonné comme un ordre, faisant sursauter les deux vampires qui se tournèrent vers lui avec étonnement. Comment le renégat avait-il pu les suivre si longtemps sans être repéré, c'était un mystère. Mais il avait l'habitude de passer inaperçu après tout... Sauf que ce n'était à présent plus le cas, et que le ton impérieux du prince noir ne laissait aucun doute. Si Kylian ne se montrait pas de son plein gré, il risquait fort de le devoir le faire de force d'ici peu... Enfin, la silhouette furtive s'extirpa des ombres et l'attention du prince vampire se concentra exclusivement sur lui sans pour autant oublier l'autre présence qu'il avait sentie. Il grogna autant pour Ambre que pour les deux autres :

"Attention. Il n'est pas seul."

Bon gré, mal gré, il avait dû apprendre à se méfier de cet ennemi. Wallam était lamentable de faiblesse, mais il avait aussi démontré qu'il était rusé et appuyé par de solides partisans. L'humain qui se cachait par là en faisait-il parti ? Peut-être bien. Mais ce n'était pas ce qui mettait Lorenz mal à l'aise à ce point. Ses pupilles se retractèrent lorsqu'il chercha à percer les ombres derrière le renégat, tentant sans succès de comprendre les raisons de ses hésitations. Il était trop prudent pour prendre des risques alors que son instinct lui hurlait que quelque chose n'allait pas. Même sa magie était perturbée, la malédiction grondait en lui comme si... Non. Ce n'était tout simplement pas possible.

"Que viens-tu faire ici ?"

Question dont il imaginait assez facilement la réponse. On ne grimpait pas en haut d'une montagne pour rien et le renégat n'avait rien à gagner à pister son pire ennemi. Il recherchait donc sans doute l'objet lui aussi, cette pierre... Craignait-il qu'il en fasse un mauvais usage ? C'était fort probable. La méfiance prudente se disputait au désir de meurtre dans les prunelles d'acier lorsque le vampire s'approcha lentement de son ennemi, crocs à demi dévoilés :

"Tu crois peut-être qu'un simple bijou peux te protéger si il me vient la fantaisie de te trancher le cou ?"

En fait oui. Le bijou en question le protégeait plutôt bien jusque là puisque Lorenz tenait à l'alliance qui était la seule chance de vaincre les Alayiens. Sauf qu'il n'y avait pas de témoins ici hormi son propre groupe et un pauvre humain qui ne serait plus un problème dès lors que la mortelle attention de l'ancestral se sera reportée sur lui.

"Qui est avec toi ?"

Là c'était déjà une question dont la réponse l'intéressait plus. Il pouvait douter autant qu'il le voulait mais il ressentait bel et bien la présence d'un dragon non loin d'ici. Encore assez éloigné pour qu'il n'ai pas à en pâtir, mais tout de même bien trop proche à son goût. Sans doute s'agissait-il de la dragonne de Roëric... Celle qui avait déjà sauvé la mise de Kylian. Voilà qui était dérangeant... Il pouvait la combattre et peut-être bien la vaincre, mais il n'aimait pas beaucoup commencer un combat placé sous le signe du "peut-être". Si Wallam était monté jusque là pour mettre enfin un terme à leurs divergeances alors il avait fort bien choisit son lieu et son moment... D'autant plus qu'il y avait Ambre. Le vampire se raidit à cette pensée, de plus en plus contrarié.

Mais sa colère et ses inquiétudes devraient attendre. Ils n'échangèrent qu'un court moment avant d'être dérangés d'une infâme manière. Une nouvelle odeur, quelques bruits à peine audibles pour les oreilles vampiriques. L'attaque fut menée avec une telle maîtrise que les vampires eux-même ne la décelèrent qu'à l'instant où l'un des gardes glapit, une flèche plantée dans le poitrail. Pas de quoi tuer un vampire, mais il ne s'en écroula pas moins lorsque trois autres se plantèrent à sa suite. Sale temps pour les sang-froid...

La réaction du prince noir ne s'était pas fait attendre et les flèches suivantes allèrent se planter dans un mur de force qui sépara instantanément agresseurs et agressés. Il avait même dû englober Kylian dans sa protection ainsi sans doute que l'humain toujours caché. L'ironie de la situation ne lui échappa absolument pas mais il n'avait pas eu d'autre choix pour incluer Ambre dans sa défense. La terrible salve de flèches qui aurait dû les tuer tous s'arrêta bien vite lorsque les archers s'aperçurent de l'inutilité de leur stratégie et ils se précipitèrent vers eux, munit de lourdes haches. L'ancestral n'avait absolument pas le temps de créer un bouclier parfaitement circulaire qui les auraient entourés et même si c'était le cas il ne tenait pas spécialement à y rester enfermé jusqu'à ce que ces gens là se lassent. Il laissa donc le mur de force disparaître et gronda à l'intention de Kylian :

"Nous reparlerons plus tard..."

Car ils allaient avoir fort à faire pendant un bon moment ! Leurs ennemis étaient nombreux, très nombreux. Et très bien armés. Deux mages le prirent en grippe et connurent un sort atroce lorsque le totem du vampire siffla agressivement et il trouva le temps de s'étonner en voyant à qui il avait affaire. Des... Elfes ? Dans les griffes escarpées ? Des elfes guerriers, armés de haches et capables de déployer des sorts aussi offensifs ? Cette scène ne collait décidément pas...

Il repoussa la horde qui se jetait sur lui et Ambre d'un sort de choc qui les envoya voler quasiment jusqu'à l'entrée de grottes. Si ils croyaient que leur nombre allait suffire face à lui... Ils allaient être sacrément déçus. Quelques flèches recommencèrent à voler et il devina que le renégat se defendait sans doute de son côté tandis que l'humain se montrait enfin bien involontairement. Quelle foire que cette quête finalement... C'était vraiment du grand n'importe quoi... Gêné par la présence de l'humaine qu'il protégeait, il recula en même temps que les autres victimes de l'embuscade et ils se retrouvèrent bientôt serrés les uns contre les autres au milieu d'un cercle menaçant d'elfes décidés à leur faire la peau. Du coin de l'oeil, il vit l'humain sortir une mandoline et grimaça lorsqu'une mélodie magique vint lui agresser les oreilles. Il ne croyait quand même pas pouvoir endormir toute cette multitude, et eux avec ? Si ? Agacé, il frappa le bras de l'homme d'un mouvement si brutal qu'il manqua le lui briser et gronda :

"Ce n'est pas utile."

Sa magie se déploya comme une tempête et un sursaut unanime secoua tout le groupe ennemi lorsque le sortilège d'étreinte s'empara de leurs coeurs. La plupart d'entre eux s'affaissèrent les uns sur les autres, au bord de la crise cardiaque. Il ricana :

"Vous vous en êtes pris à la mauvaise personne... Qui commande ?"

Aucun ne pipa mot, à la grande fureur du vampire qui affermit son étreinte sur les organes malmenés jusqu'à ce que plusieurs d'entre eux s'effondrent. Il se répéta avec une mortelle lenteur :

"Qui... Commande ?"

L'un des elfes répondit enfin d'un gémissement :

"Il n'est pas ici... Nous devions vous conduire à lui..."

Pieds et poings liés certainement... Voilà qui n'était pas vraiment du goût de l'ancestral. Il fronça les sourcils avant de répondre :

"Tu es chanceux, c'est toi qui nous conduira."

Et tous les autres allaient mourir comme le prouva le geste qu'il esquissa...

Cela faisait plusieurs jours déjà qu'il avait quitté Aigue-Royale, afin de prendre de la distance avec le climat de tension constante qui régnait entre lui et certains membres d'une certaine famille d'un certain empire. Depuis les récents évènements qui avaient secoué son existence, la capitale rebelle lui apparaissait en effet particulièrement hostile : d'une part, le principal dirigeant de la rébellion ne semblait pas devoir le considérer autrement que comme la pire ignominie que le continent ait jamais porté, et d'autre part, celle qui aurait dû être son principal soutien s'entêtait à refuser d'admettre la nécessité qu'il y avait à user de certaines méthodes, certes peu reluisantes, sales même pourrait-on dire, mais non moins nécessaires. Les derniers échanges qu'ils avaient eu sur le sujet s'étaient d'ailleurs révélés particulièrement houleux, et le mot était faible au vu de la conclusion qu'ils y avaient apporté. Etait-il vraiment possible qu'ils se soient à ce point trompés ? Que les vampires et les humains étaient vraiment trop différents pour s'accepter ? Il lui était difficile de le concéder, car cela équivaudrait à admettre que toutes ces années pendant lesquelles il avait défendu les idées qui lui avaient été chères n'avaient en réalité jamais été qu'une douce illusion, et cette constatation lui était particulièrement douloureuse. Non, cela ne se pouvait pas. Ce que le couple des amants interdits avait partagé avait été trop beau que pour que cela put s'achever de la sorte, il y aurait forcément un autre dénouement. Lorsque le renégat vampirique aurait mené à bien la charge qui lui incombait désormais...

En attendant que vienne ce jour, Kylian avait trouvé refuge auprès de la massive écailleuse qu'il ne semblait plus devoir quitter. Confortablement installé sur son épaule, adossé à la large selle de cuir qui ornait l'armure légendaire, le vampire laissait glisser entre ses doigts la petite pierre d'un blanc pur, celle-là même qui lui avait chanté encore et encore une bien sombre histoire. Il s'interrompit néanmoins et rangea précipitamment le diamant lorsque sa compagne fit entendre une sorte de grondement sourd. D'instinct, l'apprenti dragonnier laissa glisser sa main sur l'une des douces écailles de la matriarche puis l'interrogea d'une voix affectueuse :

« Ca ne va pas ? Tu as senti... quelque chose ? »

< Ils abandonnent leurs montures. >

Ils, c'étaient Lorenz et le petit comité qui avait accompagné ce dernier depuis son départ d'Aigue-Royale à travers un périple dans tout l'Empire. Un long et mystérieux voyage qui les voyait aujourd'hui atteindre les flancs des plus hautes montagnes du continent. Ils, c'étaient ceux que le dragonnier en devenir et sa liée millénaire avaient prudemment suivis jusqu'ici. Une filature discrète depuis l'épaule d'une dragonne aux dimensions aussi colossales pouvait paraître totalement insensé, Kylian lui même s'était montré particulièrement réticent à cette idée, mais c'était faire abstraction des sens d'une créature qui surclassait totalement tout ce que l'imagination bipède était à même de concevoir. Ainsi la dragonne avait-elle pu ressentir les pérégrinations du petit groupe par-delà les forêts et les champs, par-delà les rivières et les marais, jusqu'aux sommets escarpés et ce sans jamais être visible d'eux.
Après un court instant de réflexion, le renégat vampirique poursuivit :

« Trouve une vallée discrète où me déposer, je vais continuer seul. Ils doivent toucher au but. »

Le but en question, Kylian l'ignorait ou, plus exactement, il ne connaissait pas la nature exacte de ce que le prince noir était venu chercher si loin au nord. Néanmoins, il devinait sans mal qu'il devait s'agir de l'une des reliques dont il avait entendu parler à Aigue-Royale, un peu avant de quitter la ville souterraine. Des artéfacts que l'on disait sans pouvoir et sans valeur... mais que le Dracos le foudroie sur place si c'était bel et bien le cas : il connaissait suffisamment bien son ennemi que pour savoir que ce qui pouvait attirer les convoitises de Lorenz Wintel au point de lui faire mener personnellement une expédition jusqu'ici recélait forcément un intérêt important. Alors quel que soit l'objet sur lequel le prince autoproclamé était venu mettre la main, Kylian n'avait certainement pas l'intention de le laisser en faire usage.

De son côté, la dragonne n'eut guère besoin de formuler sa réponse pour faire ressentir au vampire que cette idée lui déplaisait, mais il insista néanmoins :

« Je serais plus discret pour les approcher, et si je veux trouver ce qu'ils sont venus chercher ici avant eux, il me faut savoir précisément de quoi il est question. Les clauses de l'alliance interdisent à Lorenz de s'en prendre à tout porteur d'un anneau, mais au cas où, il y a suffisamment de sommets derrière lesquels te cacher pour rester à proximité. Si les choses devaient mal tourner, tu pourras intervenir en un coup d'ailes et j'ai toute confiance en toi pour assurer ma sécurité. »

L'aspirant dragonnier déposa une nouvelle caresse sur les écailles de l'ancestrale écailleuse tandis qu'elle l'amenait prudemment au sol. Enfin, il lui adressa un sourire confiant et se détourna pour s'éloigner souplement et silencieusement, s'imprégnant des ténèbres nocturnes pour y disparaître avec la maestria qui était la sienne. Créature d'ombre au coeur de lumière, Kylian avait depuis longtemps appris à domestiquer les premières pour assurer la survie de la seconde, et ce savoir-faire serait une fois de plus son meilleur atout. Tout le temps que dura le trajet qui devait le mener à la rencontre de son plus mortel ennemi, sa concentration avait été telle qu'il n'avait pas même effleuré le plus petit gravillon susceptible de le faire repérer.
Il fallut au vampire près d'une heure de course effrénée pour combler la distance qui le séparait de ceux qu'il poursuivait, jusqu'à ce que finalement, au détour d'un escarpement rocheux, son regard acéré put venir se poser sur les quatre silhouettes qui s'acheminaient péniblement sur les étroits sentiers de montagne. Péniblement, car si les trois vampires n'avaient à souffrir des difficiles conditions d'une promenade nocturne en montagne, tel n'était pas le cas de la petite humaine qui les accompagnait. Probablement une immunisée que le prince avait emporté avec lui en guise de ravitaillement, mais quelque chose chez elle interpella le regard du renégat. De fait, s'il ne se souvenait pas l'avoir jamais rencontrée par le passé, ses traits lui restaient étrangement familiers et à mesure que les heures de marche s'égrainaient, ce sentiment encore impalpable se renforçait. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, Lorenz se montrait en effet particulièrement doux et attentionné avec elle. Les premiers temps, Kylian avait simplement considéré cela comment une précaution d'un prince noir qui ne souhaitait pas risquer de voir sa réserve de sang frais lui claquer entre les doigts, mais un détail après l'autre, cette hypothèse s'effrita lentement au profit d'une toute autre possibilité.

Cependant, le renégat vampirique n'eut guère le loisir de développer plus avant son raisonnement : devant lui, Lorenz venait de s'immobiliser, imité en cela par ses compagnons et l'ombre discrète qui s'était accrochée à leur sillage, à quelques dizaines de mètres d'un humain assez âgé. Qui était-il et que venait-il faire ici ? Le mystère était entier mais à en juger par le geste qu'esquissa le prince vampirique, il semblait bien que ces questions demeureraient sans réponse. Sauf que, incapable de rester impassible devant la scène, Kylian se précipita silencieusement et dégaina son arc en une tentative désespérée d'éviter l'inéluctable. La prudence lui commandait de n'en rien faire, mais son empathie naturelle lui interdisait de ne pas au moins tenter de sauver le malheureux. Trop tard cependant : avec un sinistre claquement électrique, l'éclair jaillit et vint frapper de plein fouet l'humain qui n'eut pas même le temps d'esquisser le moindre geste avant de... s'évaporer dans l'air ?! Il s'agissait d'un leurre ! Dracos soit loué... et maudit tout à la fois, car en voulant se porter au secours de ce qui n'avait été qu'une illusion, le renégat vampirique s'était déplacé dans le vent et se retrouvait maintenant en bien délicate position. L'appel qui résonna en un écho lugubre d'un versant à l'autre des montagnes vint d'ailleurs rapidement confirmer ce que le rebelle idéaliste avait d'ores et déjà compris : cette seule petite erreur avait suffit à le faire découvrir. Désormais, il devenait inutile d'espérer continuer la filature, Lorenz savait pertinemment qu'il était suivi, et même par qui il l'était. Les choses sérieuses s'annonçaient.

Inspirant profondément, l'archer vampire quitta le refuge des ombres pour s'avancer d'un pas lent et plus assuré qu'il ne l'aurait pensé vers celui qui se prétendait son prince. Les doigts de sa main gauche demeuraient crispés sur le pommeau de son arc, tandis que ceux de la main droite effleuraient nerveusement les empennages des flèches qui garnissaient son carquois. Skade le voyait-elle en ce moment ? Probablement, même si peut-être pas de ses propres yeux. Elle demeurait encore invisible, simple présence proche et lointaine à la fois, intangible mais bien réelle, que le renégat pouvait ressentir à ses côtés pour l'envelopper d'un cocon protecteur.
Rasséréné par cette constatation, Kylian ne put s'empêcher de laisser apparaître un sourire narquois devant la première question qu'on lui adressa et à laquelle il répondit le plus naturellement du monde :

« La même chose que ce à quoi j'ai consacré chaque seconde de mon existence depuis que nous nous sommes rencontrés : t'empêcher de nuire... »

Le renégat soutint le regard meurtrier du prince avec aplomb, ses lèvres brûlant d'ajouter un ''définitivement'' menaçant. Une lueur inhabituellement féroce traversa les yeux clairs du rebelle tandis que son adversaire de toujours évoquait la protection que pouvait procurer un simple bijou. Le prince noir faisait bien évidemment référence à l'anneau de la résistance qui ornait un doigt de la main droite du renégat, inconscient qu'il était alors de la présence d'une petite pierre très particulière dans les poches de celui qui le défiait. Dracos, si seulement Esmelda ne s'était pas montrée aussi butée sur l'utilisation de Dévoreuse, tout aurait pu finir ici et maintenant, avec un minimum de dégâts collatéraux. Si seulement... Mais il ne servait à rien de s'apitoyer, même sans l'anneau maléfique pour lui simplifier la tâche, le rebelle possédait d'autres très sérieux atouts dans sa manche et il sembla bien que Lorenz en eut pleinement conscience. La preuve la plus éloquente était sans doute le fait qu'il ne lui ait pas déjà sauté à la gorge. En vérité, sous son sous masque d'arrogante assurance, l'ancestral vampire se dévoilait circonspect et soupçonneux, peut-être même pouvait-on oser prétendre que le tout était saupoudré d'un zeste de nervosité quand bien même le principal concerné n'oserait l'avouer même sous la pire des tortures. De son côté, Kylian souriait toujours, savourant presque avec une jubilation morbide l'incertitude qu'il décelait dans la dernière question du redoutable Wintel. De grands airs, oui, servis par de grands pouvoirs, mais ôtez donc la peur qu'il s'efforçait d'inspirer et il ne restait sous la surface qu'un lâche qui n'attendait que l'occasion de prendre ses jambes à son cou. Et c'est lui que l'on qualifiait de pitoyable.

« Quelqu'un que tu n'as aucune envie d'affronter, Lorenz, crois moi sur parole. Alors retourne d'où tu viens, car je ne te laisserais pas t'emparer de ce qui se cache dans ces montagnes et tu n'es pas en position de t'y opposer. La seule raison pour laquelle tu es encore... »

Il n'eut guère l'opportunité de terminer sa phrase et fut brutalement interrompu par une volée de flèches venue mettre un terme à l'éternité de l'un des acolytes vampiriques qui escortaient l'ancestral. Une embuscade ! Et sacrément bien préparée que pour avoir ainsi pu prendre au dépourvu des vampires aux sens sur-aiguisés. Peut-être des brigands des montagnes inquiets à l'idée de voir débarquer des vampires dans les alentours de leur repaire ? Préoccupé qu'il avait été par son face à face avec le prince noir, Kylian en avait presque oublié l'hologramme qui avait été à l'origine de tout ceci, et maintenant que les flèches pleuvaient sur eux, ce détail semblait prendre de son importance. S'agissait-il d'une protection quelconque que Lorenz avait activée en la détruisant ? Peut-être bien, toujours est-il que les deux vampires ennemis se retrouvaient bon gré mal gré contraints de coopérer pour un temps.

« Pour cette fois, nous sommes d'accord. »

L'archer vampirique se détourna aussitôt pour amener une flèche Noctare sur la corde de son arc et décocher un premier projectile soporifique en direction de leurs assaillants... elfiques ?! Des bandits elfiques en montagnes ? Inconcevable ! Mais s'ils n'étaient des bandits, alors qui étaient-ils ? Des guerriers, de toute évidence, et l'hypothèse la plus vraisemblable était qu'ils avaient été attirés ici par l'exacte même raison que celle qui avait amené Wintel à gravir les Griffes Escarpées : ils étaient venus s'emparer de l'artéfact mystérieux qui y reposait et ne semblaient pas devoir accepter la concurrence vampirique. Finalement, cet objet sans importance attisait bien des convoitises.

Le combat se poursuivit de longues secondes, Kylian partageant constamment son attention entre leurs agresseurs immédiats et les agissements du prince qui, s'il l'avait protégé sous son bouclier magique un peu plus tôt, n'hésiterait certainement pas un instant à le poignarder dans le dos si l'occasion lui était donnée. Fidèle à lui même d'ailleurs, Lorenz répandait la mort sans discernement aucun mais se révélait décidément particulièrement protecteur envers la jeune guérisseuse, laquelle s'efforçait pour sa part de sauver, ou peut-être serait-il plus juste de parler d'achever, le vampire préalablement blessé. L'humain voulut les accompagner en musique tandis que de son côté, Kylian continuait de distiller ses flèches, ajustant sa visée sur les jambes ou les bras afin de blesser et immobiliser plutôt que tuer. Il s'interrompit néanmoins brutalement lorsque le vampire ancestral eut l'opportunité de passer la vitesse supérieure et enserra dans l'étau de sa magie tous leurs assaillants. La méthode était efficace, force était de le reconnaître, et le combat cessa aussi brutalement qu'il avait commencé.

Abandonnant son arc, le renégat tourna un visage furieux vers le prince autoproclamé et referma la main sur le pommeau de son épée à l'instant précis où une voix féminine venait réclamer ce qu'il s'apprêtait lui-même à exiger, à savoir la clémence du monstre. Kylian cligna des yeux lorsque son regard croisa celui de la jeune femme et sa bouche s'ouvrit sur une contestation qui ne semblait pas devoir sortir. Un mot ou plus exactement un prénom venait de s'imprimer dans son esprit : Enelya ! Voilà où le renégat avait été chercher cette sensation de déjà vu, l'humaine qui se cramponnait désespérément au bras de Lorenz ressemblait trait pour trait à celle que l'ancestral avait aimée jadis. Deux ou trois secondes s'écoulèrent en silence avant que le rebelle ne parvienne à retrouver l'usage de sa langue, repoussant à plus tard les conclusions à tirer de cette information.

« Elle a raison : ils sont vaincus, inutile de les massacrer. Laisse les repartir ! »

Il avait craché les trois derniers mots sur un ton impérieux, dégainant cette fois franchement son épée de dragonnier pour en diriger la lame vers le seigneur vampirique. Deux minutes à peine s'étaient écoulées depuis que les premières flèches avaient frappés.

« Il s'agit là d'un excellent conseil que je vous encourage à suivre, vampire. »

La voix qui avait prononcé ces mots avait sonné dans l'air avec une douce fermeté, s'attirant les regards circonspects des principaux protagonistes. Profitant de la confusion, de nouveaux elfes avaient visiblement surgis des grottes et se tenaient désormais à tout au plus quelques mètres d'eux. Les nouveaux arrivants devaient être une dizaine, répartis en cercle autour d'un autre sylvain. Plutôt grand et richement habillé, ses longs cheveux clairs noués en une coiffure particulièrement complexe, la prestance de ce dernier dominait largement l'assemblée.

« Je suis Thanaën Elildyëië, dirigeant de la ville oubliée. Les montagnes qui nous entourent représentent les frontières d'un territoire au sein duquel j'ai tout pouvoir, en ce compris celui de prendre la vie de quiconque s'y trouve. Je réitère donc ma demande : relâchez ces hommes, ou soyez prêts à remettre vos âmes à l'Esprit de la Mort... »

Il y eut un instant de flottement, pendant lequel s'échangèrent quantités de regards pour la plupart interrogatifs, mais Lorenz consentit finalement à obtempérer. Le dénommé Thanaën disait vrai, ou en tout cas représentait une menace suffisamment importante pour qu'un mage aussi puissant que pouvait l'être le prince vampirique accepta de plier devant la menace.
La libération des elfes fut saluée d'un rugissement sonore roulant sur les montagnes avec le fracas d'un grondement de tonnerre, provoquant une avalanche sur le versant d'un sommet opposé, à l'instant même où surgissait entre les sommets enneigés la silhouette massive de la matriarche draconique. Kylian leva un visage soucieux vers l'ombre colossale qui se dirigeait vers eux, dissimulant les étoiles à leurs regards. Non pas qu'il craignit la dragonne elle-même, mais si cet elfe disait vrai, alors il ne fallait à aucun prix qu'elle approcha davantage. C'eut été dangereux pour eux autant que pour elle. Il n'avait aucune idée du résultat qu'il obtiendrait, mais la panique aidant, il s'efforça de concentrer son esprit sur celui de la dragonne avec l'espoir de s'y faire entendre :

* Skade, non ! Si tu approches encore, nous mourrons tous et toi avec nous, c'est un risque que je me refuse de prendre ! Je sais que ce n'est pas facile pour toi, mais je te demande de me faire confiance : reste en dehors de ça ! *

Il s'était efforcé de s'exprimer durement, peut-être un peu trop d'ailleurs, mais il préférait mille fois endurer la colère de la dragonne vexée qu'il se permette de lui donner des ordres que prendre le risque qu'elle put perdre la vie en essayant de lui venir en aide.

Les secondes suivantes furent un véritable supplice pour le renégat vampirique alors bien incapable de détourner le regard de la titanesque dragonne qui approchait rapidement. Il ignorait totalement s'il avait été entendu, et encore n'avait-il aucune garantie si tel était le cas qu'elle daignerait obtempérer, mais au bout de quelques instants, l'ombre menaçante dévia finalement sa course et entreprit de décrire un large cercle autour des montagnes.
Ce n'est qu'à cet instant que Kylian consentit à se détendre, laissant échapper un long soupir de soulagement tandis que les gardes elfiques récupéraient leurs armes et les encadraient pour les escorter en direction des souterrains tout proches. Alors qu'on lui liait les poignets avec de la corde elfique, le renégat expédia un regard sévère à l'adresse du prince vampirique puis laissa ses yeux clairs glisser sur la silhouette de la jeune humaine, pour finalement revenir trouver celui de Lorenz. Cela ne dura que quelques instants, avant qu'il ne se détourne pour observer l'escorte vampirique du prince noir rechigner à se délester de ses armes. L'archer chercha ensuite l'humain plus âgé dont Lorenz avait détruit l'illusion, et se rendit brutalement compte de l'absence du musicien. Instinctivement, le renégat pivota pour essayer d'apercevoir le corps du vieillard parmi les blessés mais déjà les elfes les poussaient en direction de la grotte obscure.

Spoiler:

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Et bien la situation s'envenima assez vite pour le trésorier, et ses soit disant "alliés de circonstances". Les elfes maintenait une telle pression sur eux que leurs groupe du se replier sur lui-même, et Crissolorio se retrouva très vite quasiment coude à coude avec le prince vampirique qui l'avait repérer depuis le temps, une autres humaine, et celui qui était a ce qu'il avait un compris un traître au peuple vampirique qui se nommait "Kylian Wallam". Autant dire qu'il avait une chance presque obscène par le fait que personne ne l'avait encore reconnu... Avec chance le peuple vampirique ne connaissait peut-être pas son visage à lui qui était presque devenu le bras droit de Fabius Kohan depuis le temps car sinon il aurait été une simple cible pour tout le monde par ici... Oui autant garder sa capuche baisser, et éviter les croisements de regard dangereux se dit-il en sortant son Aif pour jouer une musique qui devrait rendre tous les elfes somnolents avec un peu de chance... Et peut-être aussi les vampires au passage ce qui ne serait pas plus mal pour lui après tout. Car il préférait largement les elfes aux buveurs de sang qu'importe la situation. Surtout que la vue du sang le dégoûtait, et le simple idée qu'une créature puisse boire le sien avait presque de quoi lui donner des cauchemars. Donc autant dire que plus longtemps il se tiendrait loin des vampires mieux il se porterait. Comme sans doute la totalité de la race humaine, et elfique à vrai dire...

Lui qui abhorrait la violence était donc servit en cet instant de pure débauche guerrière, et martiale. Même si à vrai dire pour le moment cela n'allait que dans un seul sens, et ce n'était malheureusement pas en sa faveur...

Néanmoins cette brute de Lorenz Wintel trouva qu'il était de bon ton de stopper la mélodie de Crissolorio en frappant violemment celui-ci au bras. Le secrétaire s'arrêta donc naturellement car ce n'est pas comme s'il avait le choix, et il se contenta donc de garder sa douleur pour lui en se retenant d'esquisser une grimace tout en reculant prudemment derrière le groupe pour ne pas être en première ligne. Après tout il n'était absolument pas un guerrier donc autant ne pas prendre trop de risque!

Il vit bien vite de toute façon que a part l'un des vampires cette lutte ne ferait pas plus de victime que cela à part les elfes vu que Lorenz Wintel d'un simple geste mit tous les assaillants à genoux. Les elfes avaient perdu d'une façon étonnamment humiliante pour eux sans doute... Et il fallait avouer que la puissance du prince vampirique était tout simplement effrayante à observer.

Dans tous les cas s'était sa chance se dit-il en profitant du fait que absolument personne ne lui portait attention, et que les vampires étaient étaient bien trop occupés avec leurs victimes pour se préoccuper d'un simple vieillard comme lui.

Il se contenta donc de s’éclipser discrètement tout en employant à nouveau son manteau de brume au moment où le despote vampirique s'apprêtait à condamner à mort ces pauvres non-humains. Après tout s'était un espoir qui se présentait face à lui, et il doutait de ses chances de survie si l'autre voulait sa mort, ou le reconnaissait donc autant en profiter pour soit redescendre de cette montagne tant qu'il était encore temps, ou bien rentrer dans cette grotte comme il voulait le faire depuis le début. et c'est le dernier choix qu'il prit en y entrant le premier sans se préoccuper plus que cela des dangers qu'il devait y avoir à l'intérieur car ceux-ci seraient sans doute bien moindre par rapport au danger que représente Lorenz Wintel...

Néanmoins il put voir avant d'être totalement entré qu'une jeune femme avait décidée d'empêcher ce tyran de tuer tous ces elfes. Soit elle était courageuse, ou elle simplement folle, et suicidaire se dit-il. Tout le monde connaissait la réputation de ce monstre, et il se doutait bien que les elfes ne comptaient que leurs temps dorénavant en seconde avant de se faire exécuter par le vampire. Le Grand Trésorier se retourna donc pour rentrer dans le grotte quand il entendit la voix d'un elfe qui semblait venir avec des renforts pour calmer les vapures. Il n'avait pas besoin de plus pour deviner que les vampires allaient être fait prisonnier, et qu'il devrait se faire discret s'il ne voulait pas finir dans le même cellule qu'eux car cela ne lui offrirait malheureusement que de faibles chances de survie... De plus il n'avait aucune envie que l'empereur Fabius Kohan découvre qu'il a été fait étrangement prisonnier dans les pics rocheux avec rien d'autre que Lorenz Wintel alors qu'il était juste censé aller voir sa famille Oui ce serait assez fâcheux dans tout les cas pour lui si l'empereur l'apprenait...

Il entendit néanmoins à l'intérieur de la montagne un puissant rugissement qui ressemblait fortement à celui qu'avait poussé cette abomination rouge quand il l'avait rencontré auparavant. Un dragon! Décidément il ne valait mieux pas pour lui qu'il fasse de vieux os ici surtout si cette bête était avec les elfes! Mais il y avait peu de chance sans doute que ce soit cela vu que le rugissement venait de dehors, et qu'il doutait énormément qu'un dragon de bonne taille puisse venir dans ces souterrains... Oui il avait fait le bon choix définitivement en s'engouffrant dans ces galeries. Si un dragon (vu qu'ils sont tous alliés à la rébellion sans aucun doute) était dehors il ne valait mieux pas pour quelqu'un comme lui qu'il y soit. Peut-être qu'il y avait une sortie dans ces galeries peut-être avec un peu de chance?

Dans tous les cas cela au moins le mettrait à l'abri pour un temps car ces grottes avaient pour le moment l'air bien plus accueillantes, et sûre pour lui que dehors avec tout ces rebelles qui auraient pu s'en prendre à lui pour peu qu'ils sachent qui il était... Qui après tout parmi ces séparatistes ne voudrait pas le livrer à Korentin, ou du moins mettre sa tête sur une pique pour les plus violents d'entre-eux s'il savait qu'il était sans doute l'un des personnages les plus éminents de l'empire? Le pouvoir avait des avantages bien entendu, mais il savait bien que les hommes ambitieux comme lui avaient tendance à se faire des ennemis à ne plus savoir qu'en faire, et l'histoire était jalonné d'homme qui après s'être hissés au sommet ont subit une dure chute a cause d'un complot de leurs ennemis, ou par simple imprudence. S'il ne faisait pas attention Crissolorio avait de bonne chance de finir comme eux car il savait bien que sa position était encore instable pour le moment...

Au bout d'un long moment de marche solitaire, et silencieuse dans ces galeries où il s'attendait à voir des elfes surgir de n'importe où Crissolorio déboucha dans ce qui semblait être une gigantesque cité souterraine se dit-il avec étonnement! Et personne n'avait jamais su ce qu'il y avait ici à part ces elfes? Mais quelle découverte venait-il de faire? Dans tous les cas il avait au moins le mérite de la faire sans chaîne contrairement aux "invités" des elfes qui avaient du passer par là auparavant, et ceux qui allaient bientôt arrivés...

Voyant qu'il n'y avait personne dans les alentours ce qui donnait l'impression que cet endroit était désert, alors que c'est là que devait vivre les elfes Crissolorio attarda un peu son regard sur les anciens édifices.

C'étaient des ruines anciennes qui se tenaient visiblement devant lui même si les bâtiments recouverts en partie par la végétation n'étaient pas en si mauvaise état, et qu'ils témoignaient encore de la splendeur des temps passés par le somptueuses formes, et leurs agencements qui n'appartenait sans doute à aucun des peuples Armandéens montrait bien que ces structures datait certainement d'une ancienne époque. Les fontaines par ci était soit épuisé, ou bien continué à fonctionner avec de l'eau encore étonnamment pure, quelques arches par là, et autres monuments qui semblaient être à la gloire des esprits se tenait là fièrement, et il aperçut même plusieurs petites statues d'or, et sculpture en émeraude, et autres pierres précieuses qui devaient avoir une belle valeur sans aucun doute. Néanmoins le fait que cet endroit était quasiment dépourvu de vie lui donnait une impression de malaise surtout que les elfes qui s'en étaient pris à lui devait vivre ici donc que certainement un archer pourrait surgir à n'importe quel moment, et le faire prisonnier. C'est donc avec prudence qu'il s'engouffra dans cette cité bien morose, mais qui serait sans doute digne de l'attention de n'importe quel chasseur de trésor chevronné!

Car après tout cela ne l'étonnerait pas que ces elfes dissimulent de l'or, des trésors en grande quantité, ou des artefacts magiques de leurs peuples en ces lieux, et tout le monde savait que ce genre d'objet avaient une haute valeur monétaire pour n'importe quel marchand, et un humain qui découvrait ce genre d'objet gagnait généralement assez d'or pour pouvoir vivre une vie faste sans bouger le petit doigt, et faire le moindre effort. Sans parler de la valeur historique d'un tel lieu qui attirerait sans doute nombre d'archéologue quand son existence sera révélée au grand jour! Une belle trouvaille en somme!

Quelques instants après pendant cette petite promenade exotique Crissolorio eu une intuition comme si son totem du hérisson le prévenait subitement qu'il y avait danger dans les environs. Et sachant que son totem ne lui avait quasiment jamais fait défaut, et que généralement quand Crissolorio a l'impression que quelque chose va déraper c'est que quelque chose va déraper c'est tout naturellement que celui-ci sortit sa pièce des passeurs pour la regarder, et voir si son objet magique ne confirmer pas le fait qu'il allait se passer quelque chose. Bien entendu la piécette afficha sa faible lueur qui indiquait qu'un danger était dans les environs, et il n'attendit pas de découvrir ce que s'était exactement pour s'engouffrer à l'intérieur d'une habitation en ruine qui avait l'air assez aisée, et qui était partiellement effondrée...

Il était presque invisible après s'être cacher derrière un pilier donc il attendit tranquillement quand il entendit des bruits de pas approcher. Heureusement il n'eu pas vraiment à patienter longtemps de façon anxieuse pour apercevoir tout d'abord le chef des elfes qui avait fait prisonnier le groupe de vampire, et qui arriva avec ses otages, et ses hommes. Le convoi ne s'arrêta même pas sur son chemin, et personne ne jeta de regard dans sa direction. Personne ne l'avait vu sans doute, et il était encore incognito pour le moment...

Il était sur, et certain que les elfes étaient en route pour aller placer leurs nouveaux "invités' dans leur suite, et personne ne devait savoir qu'il se trouvait par ici ce qui était une chance pour lui sans aucun doute, et de plus il pourrait toujours sortir d'ici maintenant que le danger était passé pour lui. Après tout c'était maintenant lui qui s'était infiltré, et même s'il était en territoire inconnu il y avait peu de chance qu''il se fasse avoir s'il se montre un peu prudent...

Lorsque le groupe armé fut enfin passer, et que les bruits de pas se perdirent au loin pour laisser place à un lourd silence oppressant, et presque inquiétant le trésorier sortit calmement de sa cachette pour reprendre sa route de façon prudente voir presque paranoïaque...

Le plus comique dans cette situation ce devait être le le fait qu'un humain ce soit introduit dans un territoire elfique ancestrale sans que ceux-ci ne s'en aperçoivent, et qu'il ne s'était pas du tout fait remarqué au passage! Même les vampires ne devaient pas se douter qu'il était là! cette histoire aurait sans doute constituer un joli conte surtout si à la fin de ce comte le barde aurait raconté comment l'humain avait pillé le trésor des elfes au nez, et à la barbe de ceux-ci avant de s'en aller discrètement en ricanant. Le genre de chose qui devait arriver une fois par millénaire sans doute! Et qui donc devait forcément arriver à lui!

Surtout que le vampire qui s'était fait avoir n'était autre que Lorenz Wintel en personne! Sans doute le plus grand ennemi du genre humain, ou du moins du genre impérial. Autant dire que ce n'était pas tous les jours que ce genre de chose arrivait, et il y avait de fortes chance que le secrétaire s'amuser à raconter cette histoire (ce qui est fort peu probable) une fois de retour de retour à Gloria que tout le monde le prenne pour un fou, ou au mieux disent qu'il a une imagination très fertile, et que c'était le début de la sénilité pour lui. Il fallait vraiment le voir pour le croire après tout!

Il n'aurait sans doute jamais les réponses aux questions qu'il se poser à propos de cette cité, mais ça montrer bien qu'il rester encore des mystères à découvrir sur ce continent. Ou peut-être qu'il se gourer juste encore une fois, et que c'était juste une cité elfique comme les autres... Car il avait encore en lui ce cliché de la cité elfique dans les arbres, et non dans des souterrains... D'ailleurs il se demandait quel intérêt aurait eu un peuple aussi proche de la nature a s'implanté en un tel endroit? C'était louche cet histoire décidément... Peut-être que c'était des ruines vampiriques? Mais ce serait étonnant que ces sauvages ait pu bâtir un lieu qui a l'air aussi faste...

Néanmoins il ne fallait pas qu'il oublie quel était le but premier de sa venue ici! Même si cet histoire avec ces vampires était fort intéressante, et que cette cité souterraine était aussi assez saisissantes à découvrir il était tout d'abord là pour récupérer un artefact des esprits! Sans doute le genre d'objet que les elfes devaient soigneusement gardés, et qu'il n'aurait absolument aucune juste d'approcher à moins de tenir à se faire chopper, et jeter en prison. De plus il ne savait pas où c'était, et lui-même trouverait audacieux le fait d'essayer de trouver cette pierre tout seul, et sans aucune idée d'où elle se trouve exactement dans ces lieux, alors que tout les autochtones dans environ sont sans doute hostile à son égard!

Il pouvait toujours tenter d'y aller seul se disait-il, mais sa prudence de hérisson, et son expérience d'ancien collecteurs d'impôt qui collectionne les ennuis comme un empereur collectionne les aventures amoureuses lui indiquait qu'il y avait une autre solution qui se présentait face à lui, et dont il pourrait tirer parti avec bien moins d'efforts, et de risque sans aucun doute même si cela ne serait pas non plus dénuer de danger évidemment. Après tout autant prendre le moins de risque possible!

Il suffisait donc juste d'essayer de libérer ses anciens compagnons d'infortune, et de leurs demander en retour leurs aide pour récupérer ce caillou! Après tout même s'il y avait des chances que ce ne soit pas lui qui récupère l'artefact au final il y avait par contre de fortes chances qu'il y ait d'autres objets de valeurs dans les environs! Et au pire il ne se ferait pas un ennemi à vie au moins s'il venait en aide au prince vampirique, et cela pourrait même s'avérer avantageux pour lui un jour dans que l'empereur ne l'apprenait pas. Au moins dans tous les cas ce vampire rebelle qui avait l'air bien moins fourbes que son despotique non éclairé seigneur saurait se montrer bien plus reconnaissant sans doute...

C'était donc décider il allait venir en aide aux vampires, et à l'humaine en espérant que ceux-ci lui soit d'un certain secours en retour, et au pire ils ne tenteront pas de le tuer s'il les libèrent, et ils feront diversion... Et sa clé de quatre allait donc sans doute lui être utile pour cela...

Il aurait dû se douter qu'on allait encore le contrarier. La simple présence du renégat conjuguée à celle des elfes était déjà bien suffisante en elle-même mais il devait être écrit quelque part que le monde tout entier s'acharnerait désormais à lui casser les pieds. La phrase de Wallam au sujet de la personne ou de la chose qui l'accompagnait résonnait encore dans un coin de sa tête, source d'une impalpable inquiétude. Certaines données du problème lui échappaient, et il détestait cela. Au moins pouvait-il passer ses nerfs sur leurs imprudents agresseurs, ou pas d'ailleurs... Le contact de la peau plus fraîche sur la sienne le détourna assez de ses cibles pour leur permettre un léger répit et il n'eut d'autre choix que de baisser le regard sur la jeune femme lorsqu'elle se campa carrément devant lui. Ben voyons...

"Oui c'est certain, on a toujours besoin d'une armée ennemie dans le dos..."

Sa réponse avait été plus agressive que vraiment goguenarde comme il l'avait voulu, tout ceci ne l'amusait décidément pas du tout et cette petite scène était tout simplement désolante. Quoi que puisse être Ambre à ses yeux, il ne pouvait simplement pas plier devant elle et certainement pas sous les yeux de tiers. Elle le mettait dans une situation difficile en choisissant de s'opposer ainsi à lui frontalement, une situation sans issues. Et Wallam qui s'en mêlait... Ignorer le second était facile, et ignorer la première était indispensable même si désagréable. Il n'avait pas le choix, mais non décidément cela ne l'amusait plus. Sa réponse tomba comme un couperet :

"Ces elfes là n'ont rien à voir avec ceux des bois, il n'y a pas de piège."

Ou du moins si, mais pas dans le sens où l'entendait Ambre. L'ancestral qu'il était n'avait eut aucun mal à s'apercevoir du premier coup d'oeil que leurs agresseurs étaient trop différents de son ancien peuple pour en faire véritablement parti. Leurs coutumes, leurs armes, leurs stratégies, leurs vêtements même... Ils étaient peut-être de race elfique, mais il était clair qu'ils avaient renié l'allégeance à leur royaume depuis bien longtemps. Qui était-il ? C'était là un mystère qu'il entendait bien éclaircir, une fois qu'il aurait tué toute menace dans un rayon de plusieurs lieux.

Mais il n'en eut pas le temps, et si l'arrivée de cet étrange groupe d'elfe le sauva d'une scène douloureuse avec son humaine, elle n'arrangea pas les choses pour autant. Ce Thanaën était un parfait inconnu dans l'esprit du vampire, le confortant encore dans son opinion que ces elfes là avaient quitté le royaume elfique depuis longtemps pour peu qu'ils n'y aient jamais mis les pieds. Quand à la ville oubliée, il n'en avait entendu parler qu'à partir du moment où il avait commencé à se renseigner sur la pierre enterrée. Il y avait vu un autre vestige de cet ancien peuple dont il avait découvert depuis peu l'existence et avait donc considéré à tort qu'elle serait sans doute déserte. Il s'était apparemment trompé... Ces elfes là pouvaient-ils être ce peuple ? Il n'y croyait pas trop, il imaginait un peuple plus évolué que celui-ci et certainement pas aussi belliqueux. Des opportunistes donc ? Qui s'était installé plus tard dans la ville en question ? Avaient-ils trouvé la pierre ? La gardaient-ils pour eux, et si oui, dans quel but ? Toutes ces questions méritaient d'être posées mais il avait d'autres priorités à gérer. La menace de l'elfe était bien réelle, il lui suffisait de savoir quoi chercher pour s'apercevoir qu'il se trouvait bel et bien dans un traquenart magique tout à fait capable de faire fi de sa puissance brute. Sang de dragon ou pas, il ne survivrait pas à ce sortilège de mort. Mieux valait prendre patience et obtempérer jusqu'à ce qu'il trouve le moyen de sortir de ce piège.

Il relacha son sort brutalement, légitimement mécontent d'un tel résultat. Qu'est-ce qu'il avait dit déjà en montant ? Qu'ils allaient prendre la pierre et redescendre aussitôt ? Il avait dans l'idée que ça allait s'avérer un peu plus compliqué que prévu même si il n'était pas encore véritablement inquiet. Tout sortilège avait ses failles, il suffisait de trouver celle de ce cercle de mort. Il le désactiverait, et plus rien ne pourrait alors sauver ces imbéciles. Son visage impassible ne laissait rien transparaître tandis qu'il fixait le chef elfique, mais la lueur assurée de ses prunelles prouvait assez ses intentions. Aussi acharnés l'un que l'autre, l'elfe et le vampire se livraient à un étrange duel de volonté. Mais l'apparition d'une ombre dans la vision périphérique de l'ancestral vint mettre un terme à cet échange, et si il n'y avait eu que cela...

La sensation lancinante de malaise qui ne l'avait pas quitté depuis des heures s'intensifia brusquement une seconde avant que le rugissement monstrueux ne se fasse entendre. Des cris d'effroi s'élevèrent parmi les elfes lorsque la gigantesque masse sombre leur cacha le ciel et Lorenz fut sans doute le seul à ne pas faire entendre le moindre son. La nuque brûlante, il avait reculé d'un pas chancelant et en était à prier que le Dracos que sa tête ne soit pas fendue en deux comme il en avait la désagréable impression. Encore que ce serait sans doute une bonne chose si cela pouvait mettre un terme à la déferlante de souffrance qui balayait brusquement tout son être. Il n'avait pas d'autre choix que la fuite mais le peu d'énergie qu'il parvint à rassembler à cet instant ne servit qu'à lui faire prendre conscience qu'il était sur le point de s'effondrer sans autre forme de procès. D'où que sorte cette abomination, elle avait toutes les chances de mettre un terme à ses projets qu'ils soient amoureux ou meurtriers ici et maintenant. Sans autres ressources, il se raccrocha au seul soutien possible à cet instant et la petite Ambre se retrouva donc à soutenir tout son poids. Non pas qu'il souhaitait véritablement l'écraser, mais il pouvait difficilement faire autrement en l'état actuel des choses. L'odeur de l'humaine eut au moins l'avantage de lui rappeler que sa propre existence n'était pas la seule en jeu, l'amenant à rassembler à nouveau son énergie. Un seul sort de retour au sanctuaire, et ils seraient à l'abri tous les deux... La douleur s'en irait et il serait en mesure de réfléchir aux implications de cette vision dérangeante de Wallam totalement concentré sur le dragon. C'était officiel, le monde avait juré de le rendre dingue.

La créature fit demi tour une demi seconde avant qu'il ne se dématérialise avec Ambre, et avec ou sans sa coopération d'ailleurs. Quand à l'autre vampire... Eh bien, il aurait bien su retrouver son chemin. Ce n'était pas comme si c'était facile de lancer ce genre de sort et plus encore de le contrôler avec une passagère. Tout aussi ahuri par l'apparition que par la disparition brutale du colosse, l'ancestral demeura parfaitement immobile, comptant machinalement les coups de masse qui ralentissaient peu à peu mais n'en continuaient pas moins de lui vriller les neurones. Il avait oublié les elfes et portait un regard profondément haineux au renégat qu'il devinait lié d'une façon ou d'une autre à la créature. Comment était-ce possible ? Que Kylian devienne dragonnier aurait déjà été un cauchemar, mais d'une si énorme et si affreuse masse ? Il y avait forcément une erreur quelque part...

La migraine s'estompa pour laisser place à l'intense nausée provoquée par le dégoût qu'il ressentait au contact de n'importe quel lien dragon/dragonnier. La seule lueur d'espoir de cette histoire c'était qu'il ne l'avait pas vraiment ressenti jusque là, et qu'il ne le ressentait pas non plus totalement à cet instant. Ce qui reliait ces deux là était différent de ce qu'il connaissait, même si tout aussi méprisable. Peut-être que cela pouvait être détruit... En attendant, il soutint le regard tourné vers lui sans tenter de cacher sa répulsion, de la haine au dégoût, au moins Kylian évoluait-il dans l'ordre des valeurs du prince vampire... Les elfes les emmenèrent sans même que Lorenz ne daigne leur accorder une seule seconde d'attention si ce n'était pour remettre les rares armes qu'il portait sur lui. Aussi nombreux qu'ils soient, ils n'étaient qu'une menace bien minime comparé à ce qu'il venait de découvrir.

**********
Quelques minutes plus tard

Ils avaient traversé de longs et nombreux couloirs avant de déboucher dans la ville souterraine. Tout ceci formait un labyrinthe où il serait facile de se perdre, mais les vampires pouvaient compter sur leur flair et leur sens de l'orientation pour en sortir lorsque le moment serait venu. Avant cela, Lorenz avait quelques petites choses à régler et c'est donc sans rechigner une seule seconde qu'il se laissa enfermer avec Wallam. Moins barbares qu'il n'y semblait, les elfes avaient prit soin de séparer l'humaine des trois vampires et avaient donc utilisé deux cellules séparées. Tant mieux, elle n'allait pas pouvoir s'interposer dans ce qui allait suivre. Car avant même que le bruit de pas de leur kidnappeurs ne se soit éteint, deux des prisonniers dentus s'empoignaient :

"Qu'est-ce que c'était que cette chose ? D'où... Depuis quand ??"

Il ne savait pas dans quel ordre poser ses questions, mais c'était sans importance. Ni lui ni Kylian ne sortiraient de cette cellule avant qu'il n'ai eut toutes les réponses qu'il voulait, et nul ne l'en ferait sortir de force. Il le bouscula avec fureur contre la grille qui les séparaient d'Ambre et son cerveau trouva absurdement le temps de noter que leur cage avait apparemment été conçue pour résister à la fureur de deux vampires, même de cette trempe là. Cette constatation lui rappela leur situation et il dû faire appel à toute sa maîtrise pour faire redescendre un minimum la rage effrayée qui l'habitait et reculer enfin d'un pas, une flamme haineuse dans les prunelles.

"Si j'étais sur de l'éliminer de cette façon je nous ferais tomber toute la montagne sur la tête. Armanda saignera avant que je n'y tolère un tel monstre."

Il ne plaisantait pas, mais il était à peu près certain que le dragon survivrait à la mort de Kylian. Il fallait avoir vu le dragonnet naître pour se prétendre dragonnier, et vu la taille de celui là il y avait peu de chance que ça ai été le cas. Et puis... Il y avait Ambre. Encore... Il ne pouvait pas l'ensevelir... La vision de la jeune femme ramena le calme dans son esprit lorsqu'il détourna le regard de son ennemi pour le tourner vers les yeux clairs. Il soupira en achevant de tempérer son humeur et s'intéressa de plus près aux barreaux qu'il empoigna. Solides... Magiques. Il pouvait utiliser la magie à l'intérieur de la cellule, mais rien n'en sortirait. Pire, un sort trop puissant risquerait de les griller tous. Et la menace d'une montagne leur tombant sur la tête n'était pas tout à fait risible étant donné l'état de la voute. Merveilleux...

La seule porte de sortie qu'il voyait de leur côté risquait de prendre des jours, voir des semaines. Il pouvait peut-être trouver le moyen de détruire les protections magiques de la cage, mais il devrait y aller en douceur et par petites touches. Les elfes auraient des chances de s'en apercevoir à moins qu'il ne revienne pas les nourrir, ce qui était au moins aussi dérangeant. Il y avait Ambre bien sur qui pouvait passer facilement ses bras à travers les barreaux mais l'idée qu'elle se donne aussi aux deux autres lui répugnait et elle l'exigerait. Elle ne pouvait nourrir trois vampires, et elle aussi aurait besoin de se nourrir. Et de boire. Bien plus vite qu'eux même... Il la couva d'un regard soucieux sans se préoccuper du renégat. Au point où ils en étaient, ils n'avaient plus grand chose à se cacher n'est-ce pas ? S'approchant jusqu'à ce qu'ils ne soient plus séparés que par la grille, il s'adressa à elle avec ce mélange d'autorité et de douceur qu'il n'employait qu'à son attention :

"Nous ne sortirons pas par ici, ou pas avant longtemps. Tu auras peut-être plus de chance de ton côté. Tu vas faire lentement le tour de ta cellule et inspecter chaque barreau, chaque pouce de sol. Va."

Silencieux, il l'observa se mettre à la tâche en tentant de faire abstraction des deux autres vampires et plus particulièrement de celui qu'il rêvait d'égorger. Leurs regards se croisèrent malgré tout, il serait difficile de s'éviter dans un lieu si exigu... Il dévoila ses canines sans pouvoir s'en empêcher en grognant instinctivement :

"Prie le Dracos pour qu'on ne soit pas coincés ici trop longtemps... "

Il ne répondrait plus de rien dans le cas contraire, il y avait des limites à ce qu'il pouvait supporter. Il voulu se replonger dans le silence en continuant de surveiller avec espoir les avancées de l'humaine mais une question germa tout à coup dans son esprit et il interrogea avec perplexité :

"Au fait... Où est l'humain ?"

La perspective de se retrouver enfermé avec pour seule compagnie Lorenz et l'un de ses sbires, furent-ils désarmés, n'avait rien de particulièrement réjouissante. Pourtant, l'esprit du renégat vampirique était alors à des lieues de ces considérations : ses seules inquiétudes étaient dirigées vers Skade et la manière dont la dragonne millénaire réagirait à l'emprisonnement de celui qu'elle se plaisait à appeler ''son'' vampire. Il était parvenu à la convaincre de ne pas intervenir lorsqu'ils avaient été capturé, ou du moins le pensait-il, mais combien de temps patienterait-elle avant d'ouvrir la montagne comme s'il s'était agi un vulgaire coffre ? Elle qui n'appréciait déjà pas les elfes, cette histoire ne risquait pas d'améliorer ses relations avec le peuple des bois... ou peut-être serait-il plus juste de parler du peuple des montagnes dans le cas présent. Des elfes en montagne. Cette idée lui apparaissait totalement absurde et pourtant, à en juger par le peu qu'il avait pu apercevoir de leurs installations, ils occupaient ces grottes depuis un certain temps déjà. Donc ils n'étaient pas venu ici pour chercher le mystérieux artéfact qui avait attiré Lorenz, à moins que l'objet en question ne fut extrêmement bien caché et nécessita de très laborieuses recherches ? Le temps avait à peine plus d'emprise sur les elfes qu'il n'en avait sur les vampires, mais tout de même. Sans oublier bien sûr l'autre possibilité : que ces elfes ne soient pas ici pour s'emparer de l'objet de toutes ces convoitises mais bien pour veiller à ce que personne ne puisse se l'approprier. Et pourquoi voudrait-on protéger ce qui n'a ni valeur, ni pouvoir ?

Le renégat vampirique fut brutalement tiré de ses réflexions par une main venue saisir violemment le col de son vêtement pour le pousser contre les barreaux de leur cellule. Sa propre main vint enserrer le poignet qui s'était lancé vers lui tandis qu'il relevait les yeux vers le visage haineux qui l'interrogeait. L'espace d'un instant, Kylian eut pu jurer avoir aperçu une éphémère lueur de peur dans les prunelles enflammées qui le dévisageaient et cette pensée le ragaillardit. Pour sans doute la première fois, Lorenz n'avait pas la main haute dans leur affrontement, ou du moins pas totalement. Le prince noir se retrouvait hors de sa zone de confort et sa confiance arrogante se désagrégeait rapidement, tout son pouvoir ne lui était d'aucune aide face à ce qui l'attendait au dehors et cette constatation le terrifiait. C'en était presque... savoureux. Kylian grogna et se débattit un instant pour tenter de se libérer de l'emprise que maintenait encore l'ancestral mais l'autre tenait bon et le rebelle dut abdiquer, répondant avec une grimace agressive :

« Depuis suffisamment longtemps pour te faire reconsidérer le ridicule de mes menaces. »

Instinctivement, le vampire leva les yeux vers le plafond rocheux que l'on menaçait de lui faire tomber sur le crâne avant de ramener son attention sur celui qui le maintenait toujours fermement entre ses griffes :

« Je me moque de ce que tu peux tolérer ou non, Lorenz. Le seul monstre qu'eut jamais porté ce continent se trouve devant moi en ce moment, alors ne te prive pas de nous ensevelir si c'est le prix à payer pour nous en débarrasser. »

Il était aussi sérieux que l'avait été la menace du prince, dardant sur ce dernier un regard chargé d'une froide détermination. Un lourd silence s'installa, les deux vampires se défiant toujours du regard : l'un semblait peser le pour et le contre, évaluer à quel point la haine qu'il éprouvait pour le renégat valait qu'il put mettre sa menace à exécution, tandis que l'autre attendait sombrement que le premier eut pris sa décision. L'étreinte qui enserrait sa chemise se détendit finalement et Lorenz le relâcha, de toute évidence à contrecœur mais le résultat était le même : il avait cédé. L'inébranlable ancestral avait plié l'échine, sinon physiquement, au moins psychologiquement, sinon définitivement, au moins temporairement. Cela tenait presque lieu de victoire pour le renégat et surtout, cela venait mettre en lumière les faiblesses du tout-puissant prince noir. Sans un mot, Kylian réajusta sa tenue malmenée par les ardeurs de son adversaire, suivant ce dernier du regard tandis qu'il approchait de la cellule voisine pour s'entretenir avec la prisonnière qui y séjournait. Si on lui avait dis la veille qu'il verrait Lorenz se soucier d'autrui, jamais il ne l'aurait cru et pourtant l'évidence lui apparaissait sous les yeux. Toute la question était de savoir si c'était bien au sujet de l'humaine qu'il s'inquiétait, ou au contraire de celle qu'elle ne pouvait manquer lui évoquer. Le regard clair du rebelle s'égara quelques instants à observer plus finement les traits de la jeune femme et ne put que s'étonner à nouveau de la ressemblance frappante qui la liait à celle qu'avait jadis perdu l'ancestral. C'en était véritablement perturbant.

La dernière menace du prince sonna dans le vide, Kylian préférant détourner le regard. Chaque nouveau geste, chaque nouveau mot que tenait Lorenz à son égard ne faisait que renforcer un peu plus encore la conviction du renégat sur les peurs qui étreignaient le vampire maudit. Il répondit néanmoins à sa dernière question, le regard perdu dans le vide. Non pas qu'elle lui soit adressée particulièrement mais il s'agissait d'avantage d'une pensée émise à voix haute que d'une réelle réponse :

« Probablement mort. »

Il consentit néanmoins à gratifier le prince d'un coup d'oeil en coin tandis qu'il ajoutait :

« Elle d'abord, lui ensuite, je vais vraiment finir par croire que tu es capable d'empathie. Tu ... »

Il s'interrompit lorsqu'il constata que l'autre n'écoutait plus, à supposer qu'il ait jamais écouté d'ailleurs, et suivit le regard du prince en direction de la cellule voisine désormais vidée de son occupante. L'humaine avait découvert une sortie et s'était échappée. Kylian aurait voulu pouvoir s'en réjouir mais déjà l'attention des trois vampires se tournait en direction du couloir qui menait à leur cellule, au milieu duquel venait de surgir la jeune femme, un trousseau de clés à la main. Elle n'allait tout de même pas... Et si, elle venait bel et bien d'entamer des négociations dont l'enjeu n'était autre que leur libération à tous les trois. Le renégat fut le premier à répliquer, devançant les deux autres pour affirmer avec force conviction :

« Sa parole n'a aucune valeur, débarrasse toi de ces clés et sauve toi tant que tu le peux, laisse... »

La suite se perdit dans un grognement douloureux, le sbire vampirique du prince noir ayant préféré faire taire l'impétueux rebelle d'un solide coup venu le cueillir par surprise, précisément dans le flanc. Il n'avait probablement pas plus envie que son maître de croupir ici et n'avait guère attendu pour le faire savoir. Par réflexe, Kylian agrippa l'épaule du concerné pour répliquer mais n'en eut guère l'occasion, la demoiselle coupant court à toute discussion pour se précipiter dans leur cellule et se dissimuler à la vue de l'intrus qui approchait. Il y eut un instant de flottement, chacun s'immobilisant pour se concentrer sur ses sens et déterminer l'identité de celui, celle, ceux ou ce qui approchait. On pouvait d'ores et déjà éliminer la possibilité que ce fut un vampire, les battements de son coeur trahissaient le caractère vivant de celui qui approchait lentement. Celui ou celle, en effet, car il ou elle était bien seul. Un garde elfique en patrouille ? Probablement pas, à moins qu'il ne s'agisse du plus maladroit et balourd d'entre eux, car si l'on devinait aisément à l'oreille que le nouvel arrivant s'efforçait de faire preuve de discrétion, celui-ci souffrait difficilement la comparaison avec la grâce et la légèreté naturelle des elfes. Restait donc...

Il n'aimait pas du tout la lueur confiante qui luisait dans le regard de son vieil ennemi, celui-ci savait parfaitement qu'il le plaçait dans une situation impossible et sans doute comptait-il en profiter autant qu'il le pourrait. Si il croyait qu'il allait le laisser faire... Il passait sa non-vie à se tirer de situations délicates, celle-ci ne serait qu'une de plus même si il devait avouer qu'elle était singulièrement relevée. Qu'un dragon de cette taille existe sur les terres Armandéenne c'était déjà bien gênant, mais qu'en plus il soit lié à Wallam... Bref dans tous les cas, il préférait encore mourir sous les affres de la malédiction que de le laisser penser qu'il craignait pour son avenir. Leurs regards s'affrontèrent tandis que le renégat le défiait de mettre se menace à exécution et il manqua bien le faire rien que pour lui prouver que ça ne le dérangeait pas. Sauf que ça ne tuerait pas la créature, et qu'Ambre était là... Décidément il radotait...

Il lui fallu un effort certain pour se décider à se détourner du rebelle et à ne surtout pas se retourner vers lui même après que l'humaine se soit mise à la recherche d'une sortir. Sans la quitter des yeux, il serra la mâchoire lorsque l'autre répondit à sa question et se durcit encore lorsqu'il osa continuer. Il allait finir par croire qu'il était capable d'empathie ? Parce qu'il le prenait pour un rocher peut-être jusque là ? Qu'on le respecte qu'on le craigne lui convenait très bien, mais il commençait à trouver vexante cette propension qu'avait les gens à le réduire à l'image d'un psychopathe sans cervelle ni sensations autres que son goût du sang. Le souvenir de la surprise d'Eliowir s'aperçevant qu'il était bel et bien un être cultivé était déjà assez cuisant. D'accord cela lui permettait de surprendre mortellement ses adversaires, mais ça allait vraiment loin par moment... Peut-être était-ce aussi ce qui l'attirait chez Ambre et ce qui l'avait rendu plus prompt à tolérer l'écart de Merithyn. A défaut de plus il y avait au moins deux êtres en ce monde qui voyaient au delà du prince noir. Non pas que l'autre imbécile qui partageait sa cellule soit capable de voir plus loin que le bout de son nez remarquez bien...

Il ne daigna pas lui répondre, ni se retourner. Surtout pas... Tout son empire sur lui-même ne lui suffirait certainement pas à s'empêcher de faire exploser proprement son compagnon de cellule si il avait le malheur de croiser son regard. De plus Ambre semblait avoir découvert quelque chose, elle s'intéressait de près à un amas de pierre qui une fois écartées révélèrent un passage sans doute creusé par un ancien prisonnier. Enfin un peu de chance dans toute cette histoire, il était temps tiens ! Il l'observa se glisser dans le passage et ressortir de l'autre côté avec une intense satisfaction. D'ici peu il serait libre et... Et quoi ? Valait-il mieux quitter les lieux et revenir en force ? Rechercher la pierre directement en comptant sur sa magie en cas de problèmes ? Et la masse écailleuse qui attendait dehors, qu'allait-il en faire au final ? Que de questionnements... Mieux valait prendre les choses une à une à commencer par le doux chantage qu'une non moins douce humaine entendait lui faire... Ben voyons...

Immobile et silencieux, il soutint son regard sans effort. Croyait-elle vraiment qu'il allait céder devant elle ? Il l'aimait, c'était un fait et il l'admettait même plus facilement qu'elle à présent. Mais cela ne changeait rien au fait que c'était lui le prince, et elle l'humaine. Déjà qu'elle ne savait pas ce qui était bon pour elle même, il ne risquait pas de la laisser lui imposer son point de vue. Voyant qu'elle ne disait plus rien, il s'accorda un léger haussement d'épaule fataliste :

"Je reste ici si c'est ce que tu préfères."

Il savait très bien que c'était loin d'être le cas et tout ce que pourrait dire Wallam n'y changerait rien. Il la connaissait à présent trop bien à présent et ne se gêna pas pour le faire savoir :

"Cesse de nous faire perdre du temps. Nous savons pertinement tous les deux que tu ne nous laisseras pas là, et surtout pas si tu sais qu'ils comptent certainement nous laisser mourir de soif. Tu n'es pas moi Elisseï, tu peux apprendre à mon contact mais il y a des choses qui ne changent jamais."

Et au moins en était-il conscient. Aurait-elle était mauvaise et sans scrupules que ça aurait rendu les choses plus faciles entre eux. Sauf qu'elle ne l'était pas et qu'il devait faire avec. C'était bien la première fois qu'il ne pouvait que se réjouir du fait qu'elle soit si pétrie de remords et de bonnes intentions. Il y avait une chose dont il était absolument certain à cet instant, elle ne leur tournerait pas le dos pour s'en aller en les laissant enfermer.

Et la suite lui prouva qu'il avait raison. Pendant que le renégat à côté de lui grondait suite au coup qu'il avait reçu dans les cotes, il serra farouchement les barreaux de la cage. C'est qu'il avait entendu un bruit de pas derrière son humaine, et il ne supporterait certainement pas qu'on la surprenne en pleine évasion. Il gronda un avertissement mais elle avait déjà éventé le danger et sa réaction fut rapide. Un tour de clé, et voilà qu'elle atterrisait dans leur cellule ! Lui avait plutôt eu l'idée d'en sortir pour affronter le danger mais c'était un bon plan, ils bénéficieraient de l'effet de surprise même si leurs geoliers s'apercevaient que la prisonnière humaine avait changé d'appartement. De toutes façons le bruit de pas et la respiration prouvait qu'il n'y avait qu'un seul elfe. Et était-ce bien un elfe d'ailleurs ? Son pas était trop lourd et... L'humain ? Alors ça, il neigerait en Esfelia avant qu'il ne soit dit que le prince noir avait besoin de l'aide d'une outre à sang !

La porte de la cellule se rouvrit avec fracas, pour la plus grande surprise du concerné. Le second vampire fut le premier à sortir, suivit du renégat et d'Ambre que Lorenz attrapa par un bras avant qu'elle ne passe le seuil :

"je ne te conseille pas de retenter de m'arracher une promesse de cette façon."

Simple conseil proféré d'une voix neutre. Il pouvait lui offrir beaucoup, il le lui avait déjà dit, mais il ne tolérerait pas tout. Il la maintint sous son regard tranchant pendant quelques secondes avant de la laisser sortir et de la suivre de près. Il ne croyait pas qu'Ambre l'aurait laissé là dedans, mais Kylian par contre en était parfaitement capable...

Ce risque écarté, il devait se concentrer sur leur situation. Le groupe était perdu au coeur de la montagne, sans doute que les sens des vampires leur permettraient de retrouver la sortir mais puisqu'ils étaient infiltrés au coeur du domaine ennemi ce ne serait sans doute pas une mauvaise idée de rechercher la pierre. Il prit la parole :

"Les elfes ne changent pas de mode de vie et de façon d'être en quelques années, ceux-ci doivent vivre ici depuis bien longtemps. Et je ne crois pas aux coïncidences, si ils vivent dans ces montagnes c'est parce que la pierre est ici. On va la chercher."

Il parlait avant tout à Ambre et à l'autre vampire mais son regard s'égara sur l'humain et plus encore sur le rebelle. Peu de chance qu'ils décident de plutôt s'en aller, et ce ne serait sans doute pas plus mal de les avoir à l'oeil, surtout le second. Il assena donc sans leur laisser le loisir de répliquer :

"Je mène le groupe."

Il fallait bien un chef n'est-ce pas ? Et la question ne se posait pas quand à son identité. Cet épineux problème réglé, ils se mirent en route à travers un réseau de galerie qui s'élargissait de plus en plus pour finalement les mener au coeur de ce qui était bel et bien une véritable petite ville. Plutôt déserte par ailleurs... Elle semblait gigantesque et les elfes n'en avait investit qu'une minuscule fraction qu'ils évitèrent soigneusement. Ou du moins ils essayèrent, mais il y avait fort à parier que la pierre se trouvait dans cette zone bien gardée plutôt que dans les lieux déserts ! N'ayant d'autre choix, ils finirent donc par s'engouffrer dans un ensemble de bâtiments à la solidité toute relative et y découvrirent une véritable petite bibliothèque qui n'avait apparemment pas connu de nettoyage depuis fort longtemps.

La pièce était spacieuse mais si engorgée de babioles en tout genre qu'on y circulait très mal. Une telle couche de poussière recouvrait ces objets ainsi que le sol que chaque mouvement laissait des empreintes et soulevait des nuages à même de faire éternuer même un vampire. Le groupe se faufila entre les grandes étagères jusqu'à parvenir au centre de la pièce, une zone un peu plus dégagée et pourvue de tables et de chaises encore moins propres que le reste. C'est là qu'ils firent une pause après ces heures de discrète errance, Lorenz commençait pour tout dire à en avoir assez de se promener à l'aveuglette, aussi ordonna-t-il :

"Il faut qu'on se renseigne sur cet endroit, peut-être pouvons nous trouver une carte. L'histoire ce peuple, de son lien avec la pierre peut-être. Cherchez."

La tâche allait s'avérer un peu plus complexe que prévu, il s'en aperçu vite en promenant son regard sur les différents titres. Le problème lui échappa un instant pendant qu'il déchiffrait les élégantes arabesques elfiques puis il réalisa la chose. Allons bon... Il y en avait au moins trois qui ne lui seraient d'aucune utilité, et Ambre ne déchiffrait l'elfique que très lentement et approximativement. Il soupira en voyant le renégat plisser les yeux devant la couverture de ce qui semblait être un livre pour enfant et les dirigea d'un geste vers des étagères plus lointaines. Peut-être trouveraient-ils des bouquins en langue commune par là bas... Et si ce n'était pas le cas, au moins ne les aurait-il pas dans les pattes.

Le calme retomba sur la bibliothèque pendant près d'une heure, chacun était plongé dans ses recherches plus ou moins fructueuse. Au moins Lorenz savait-il à présent que ces elfes étaient effectivement là depuis bien des siècles, qu'ils étaient bien venus pour la pierre et qu'elle se trouvait de toutes évidence encore ici. A part cela... Pas grand chose. Ah si, il venait d'apprendre que le crâne de l'humain qui les accompagnait était plus solide qu'il n'y paraîssait. A l'instant même, l'une des étagère venait de lui dégringoler sur la tête dans un fracas phénoménal. Comment avait-il pu faire son coup ? C'était un mystère mais ce qui était certain c'était qu'une alarme magique venait de se déclencher ! Avait-on entendu le boucan ou bien leur disparition avait-elle été découverte ? Difficile à dire... Le vampire jura dans son ancienne langue en se levant précipitament :

"On aurait dû le flanquer dans la cellule. Allons voir."

Lui et Ambre retrouvèrent bien vite les trois autres. L'humain gisait sous une pile de livres que Wallam tentait d'écarter sous le regard réprobateur de l'autre vampire. Lorenz interrogea ce dernier du regard et il lui répondit en désignant le trou béant dans le mur qui avait été jusque là masqué par l'étagère :

"Il semble que notre humain ai du nez, il a trouvé ce passage.. Mais en essayant de bouger l'étagère il l'a fait dégringoler. Je crois qu'il en a pour longtemps, il a prit une encyclopédie sur la tête..."

L'ancestral haussa un sourcil lorsque son regard se posa sur le livre en question. Effectivement il risquait de dormir longtemps... Mais au moins n'étoufferait-il pas, Wallam venait de parvenir enfin à faire émerger son visage. Lorenz ne s'en souciait pas vraiment mais il en avait assez de se chamailler avec Ambre au sujet de la survie ou de la mort de ceux qui l'entouraient. Au moins allait-elle pouvoir le suivre sans faire d'histoire, car il entendait bien visiter ce passage si bien dissimulé. Qu'est-ce que l'humain avait pu renifler pour être autant attiré par cet endroit ? Il désigna l'autre vampire :

"Jette un oeil"

La créature obtempéra avec prudence, enjambant à la fois l'humain et les débris de l'étagère. Son appel résonna bientôt, preuve qu'il n'y avait pas de réel danger. Lorenz croisa le regard des autres :

"Allons-y. Laisse notre dormeur en paix Ambre, il ne risque rien. Si les elfes avaient découvert que nous sommes ici ils auraient déjà investi les lieux. Ils ont dû simplement découvrir notre disparition, ils en ont pour de semaines à fouiller partout."

Et il n'avait pas l'intention de s'amuser à transporter un humain assommé. Il s'engouffra dans le passage, embarquant l'humaine sans lui demander son avis et plantant là un renégat qui n'avait plus d'autre choix que de les suivre ou de servir de garde malade. Quelques pas à peine dans ce passage dérobé, et ils débarquaient tous dans une grande salle encore plus encombrée que la précédente. Sauf que cette fois, point de poussière. Ils marchaient carrément sur des tonnes d'or... Tiens tiens... Avaient-ils découvert le coffre fort des elfes ? C'était très bien, mais ça ne leur donnait toujours pas leur pierre. D'autant plus que cet endroit ne lui disait rien qui vaille, une salle au trésor c'était toujours un endroit sensible. Il sentait la puissance des sortilèges qui n'attendaient que le moment de les éviscérer et averti :

"Ne touchez à rien, et surtout pas aux..."

Trop tard. Lequel de ses compagnons avait eu la mauvaise idée de poser la main sur le mur ? Il n'avait pas le temps de leur poser la question, ceux-ci s'étaient mit en devoir de se rapprocher de façon inexorable. L'or tintait joyeusement à mesure qu'il était repoussé par la force colossale de ce qui ressemblait à un sortilège d'écrasement. Bon eh bien... Mieux valait ne pas s'éterniser là :

"Demi-tour !"

Son ordre se perdit dans un grognement de dépit. Le passage s'était refermé derrière eux, les piégeant comme des rats. Sans autre choix, il déploya sa magie et opposa sa puissance brute à celle du sort. Les deux sources magiques s'affrontèrent en un duel invisible mais parfaitement palpable et il comprit qu'il ne sortirait pas vainqueur. Il pouvait leur faire gagner du temps, éventuellement s'essayer à un sort de retour au sanctuaire après cela mais c'était tout. Si Wallam et l'autre vampire devaient être sauvés, ils devraient trouver une solution très rapidement. Il gronda en sentant la ridicule puissance magique de certains d'entre eux s'essayer à soutenir la sienne :

"Vous ne m'êtes d'aucune utilité, trouvez une sortie et vite !"

Sa voix était étouffée par l'effort et par la pression de sa mâchoire serrée à l'extrême. D'où ce sort pouvait-il bien tirer sa puissance ? Il n'avait même pas le temps d'y réfléchir. Il raffermit son propre effort avec la férocité agressive qui le caractérisait et chercha les autres du regard. L'un s'affairait à tenter de rouvrir le passage refermé, les autres cherchaient une autre issue. Sale situation...

[justify]Ils avaient fini par tous sortir, l’humain étant celui qui les avait effrayés. Le cœur battant la chamade, Ambre avait bien cru qu’ils allaient se faire repérer. Elle n’avait aucune envie de rester enfermée ici et si les elfes l’avaient trouvé… Ils n’auraient pas été aussi magnanimes. Elle jeta un regard vers les deux autres, les voyant près à réagir tout comme elle le percevait chez Lorenz. Mieux valait pour le ou les arrivants qu’ils soient amis, sans quoi elle ne pourrait pas le protéger de la colère du prince et de son fidèle garde. Mais il n’y avait rien à craindre, et ils se détendirent tous rapidement avant de sortir un à un, Ambre se trouvant un instant sous le feu du regard de Lorenz qui n’avait visiblement peu apprécié la tentative de paix forcée que la demoiselle avait essayé d’imposer. Elle hocha la tête en signe d’assentiment, lui montrant qu’elle avait compris ; inutile de s’excuser, elle ne regrettait toutefois pas son geste. Certes, cette méthode lui laissait un étrange malaise dans le cœur, elle qui n’appréciait pas du tout les méthodes que le vampire employait faisait à présent de même. C’était du chantage, ni plus ni moins, et pour cela elle se sentait quelque peu mal. Mais eut-il réussit qu’elle aurait pu sauver des vies et s’assurer que les deux ennemis ne s’entretueraient pas avant la fin. Malheureusement pour elle, celui qui l’avait arraché à sa famille la connaissait maintenant trop bien pour se laisser ainsi manipulé ; bien sûr que non, elle ne les aurait jamais laissé ainsi, n’en déplaise au rebelle qui avait pourtant bien tenté de faire partir. Lui aussi aurait pâti de cet enfermement pourtant, d’autant qu’il se serait trouvé seul avec les deux autres, contraint à subir leurs lois tyranniques. Il avait déjà commencé à se faire frapper avant qu’elle ne rentre dans la cellule avec eux, cela n’aurait pu qu’empirer. Décidément, il était vraiment étrange.

Ils s’éloignèrent rapidement des geôles, Ambre observant autour d’elle la bouche entrouverte, les yeux pétillants, ne pouvant s’empêcher en dépit de la situation urgente et stressante dans laquelle ils étaient de contempler ma ville souterraine. Tout comme Aigue-Royale, c’était une merveille que de voir pareille ville engloutie dans la terre et la roche, bien que celle-ci paraisse plus élégante, moins grossière que celle des rebelles. Un avis tout à fait subjectif certes, mais cela n’empêchait pas la guérisseuse de tenter de détailler tous les détails de l’endroit. Après tout elle venait ici pour chercher la pierre certes, mais cela n’allait pas l’empêcher de profiter des mystères de l’endroit dans laquelle elle se cachait. La curiosité brûlante et innocente de la jeune fille ne faisait de mal à personne et, d’une certaine manière, la rassurait. Il lui semblait que tant qu’elle penserait à cette structure étrange, personne ne viendrait la déranger dans ses pensées. Ce n’était pas le cas, elle le savait bien, mais tout le monde avait besoin de se rassurer à sa manière. Suivant Lorenz en silence, chacun veillant à ne rien faire pour ne pas éveiller l’attention de leurs hôtes, malgré que ceux-ci ne soient pas visibles, ils débouchèrent dans une pièce des plus intéressantes : une bibliothèque envahie de nombreux, nombreux objets, certains ayant une forme pour le moins étrange qui laissait planer le mystère sur leur utilisation. Un sourire s’accrocha aux lèvres délicates de la jeune fille tandis qu’elle contemplait tout cela, ses yeux agiles sautant d’un objet à l’autre sans qu’elle ne s’approche pour les toucher ; tout semblait en équilibre précaire et elle ne souhaitait pas être la cause d’un effondrement de la pièce, d’autant qu’ils avaient bien d’autres choses à faire comme leur commanda leur meneur. Obéissante, la guérisseuse s’approcha des étagères et se mit à décrypter difficilement les titres qui s’alignaient devant elle, en feuilletant un ou deux qui s’annonçaient prometteurs ou demandant la traduction de quelques mots qui lui étaient inconnus, ce qui lui permit d’éliminer les rangées d’étagères qui semblaient inutiles.

- Il n’y a rien ici, mais ils sont tellement nombreux…

Les ouvrages traitaient de tout et n’importe quoi, des illustrations recouvrant presqu’entièrement certains d’entre eux tandis que d’autres étaient couverts d’une écriture minuscule et presqu’illisible. Difficile de tirer quelque chose de clair de ces livres, et aucun autre ne semblait avoir fait meilleure récolte. Sauf l’humain qui avait de toute évidence entreprit de lire l’étagère entière, et qui se la reçu sur la tête sans douceur. Inquiète, Ambre suivit Lorenz en grimaçant en entendant l’alarme qui résonnait, et retrouva le rebelle tentant de dégager la victime. Lui s’assurait qu’il n’étoufferait pas sous les ouvrages, mais la jeune fille préféra avant tout s’assurer qu’il était en vie, posant une main légère sur la tempe droite. Vu le poids et la taille de l’ouvrage qui l’avait mis à terre, cela n’aurait pas été surprenant qu’il se soit rompu le cou. Mais les esprits devaient le protéger puisqu’il semblait se porter comme un charme, hormis le fait qu’il dorme de force.
Le garde n’avait pas perdu de temps en attendant, envoyé en éclaireur, et Ambre se fit embarquer en grommelant.

- Et s’il se perd ? La ville souterraine est immense…

Toutefois en tournant la tête elle aperçut Wallam qui prenait l’humain inconnu sur son épaule, et elle lui lança un regard chargé de gratitude. Qui avait dit que les vampires étaient tous sans cœur et considération pour autrui ? Elle comprenait mieux toutefois pourquoi le prince et le rebelle se détestaient tant : ils étaient totalement différents… Et pourtant elle avait parfois l’impression de percevoir une certaine ressemblance de l’un chez l’autre, sans qu’elle ne puisse dire quoi exactement. Il ne vint toutefois pas à l’esprit qu’elle-même et Lorenz étaient tout à fait opposés et qu’ils ne se détestaient pas pour autant.

La salle dans laquelle ils atterrirent la laissa sans voix, et ce fut par automatisme plus que par volonté propre qu’elle continua à avancer. Autant d’or était inconcevable. Cela semblait carrément irréel. Se penchant, l’ancienne esclave manqua poser la main sur le tapis doré qu’ils piétinaient, s’arrêtant de justesse en entendant l’injonction de Lorenz qui lui fit lever la tête et se redresser. Ne toucher à rien. Cela allait être difficile, elle n’était pas spécialement attirée par les trésors mais s’avouait curieuse de la sensation que pouvait procurer une main perdue dans cette masse d’or, et les jeux de lumière dessus étaient magnifiques. Mais un bruit sourd résonna et elle aperçut, comme tous ceux présents dans la salle hormis l’endormi, les murs se resserraient beaucoup trop rapidement. Il semblait que venir ici avait été une mauvaise idée, d’autant qu’à présent la porte de sortie était close. Ils n’avaient plus qu’à espérer que d’autres issues se trouvaient dans les parages, et chacun s’attela à cette tâche, hormis le dormeur et le vampire dont les efforts magiques leur permettaient de faire gagner du temps.

Cherchant, fouillant, Ambre finit par parvenir à la porte principale, cherchant frénétiquement à l’ouvrir avant de s’apercevoir qu’elle était solidement barrée. Des voix se faisaient toutefois entendre de l’autre côté, et elle devina aisément qu’un certain nombre de gardes se trouvaient dehors afin de protéger leur bien. Les appeler au secours reviendrait à se livrer, mais au moins seraient-ils assurés d’avoir la vie sauve, encore que rien ne garantissait que l’on viendrait les aider ; d’un autre côté, ne rien dire leur assurait la liberté mais ils risquaient fort d’en mourir.

- L’or ira forcement quelque part, murmura-t-elle pour elle-même en tentant d’évaluer la salle, ou bloquera les murs. Mais aura-t-on assez d’air pour survivre, même si l’on ne meurt pas écrasé ? A moins que le sortilège ne s’arrête s’il ne détecte plus personne…

C’était une solution, mais cela aurait voulu dire que tous sans exception devaient prendre le risque de devenir buisson ou n’importe quelle autre solution qui s’offrait à lui pour disparaitre momentanément, et donc que Lorenz devait occuper sa magie à autre chose. Et au vu de la vitesse avec laquelle les murs s’étaient refermés, la solution était un peu trop mortelle pour qu’ils s’y risquent. Mais après tout qui ne tentait rien n’avait rien. Le visage concentré, elle observa une dernière fois la porte avant de se diriger rapidement vers le Prince.

- Il y a la porte principale, mais elle semble solidement gardée, et il ne semble pas il y avoir d’autre sortie. Peut-être…

Elle hésita une fraction de seconde, ne sachant si ce qu’elle disait pouvait s’avérer véridique, avant de se faire la réflexion qu’ils n’avaient le temps d’hésiter.

- Peut-être peut-on arrêter le sortilège en donnant l’impression de disparaitre.

Elle-même ferma le poing droit sur le cœur pour augmenter la résistance de sa peau, se dirigea vers le dormeur pour lui faire la même chose, s’apprêtant à s’auto-enlacer pour se recouvrir d’une cape des ombres ; il lui suffirait ensuite de s’immobiliser totalement pour être, l’espérait-elle, suffisamment invisible. Les autres avaient entendu, elle espérait pour eux qu’ils auraient de quoi l’imiter. Quant à l’humain… Et bien il dormait, il n’était donc pas vraiment conscient, donc pas vraiment perceptible. Si ?

Spoiler:

Restait donc... un humain. Et pas n'importe lequel puisqu'il s'agissait ni plus ni moins que du vieillard à la mandoline que Kylian avait cru mort. Ainsi donc, il s'en était sorti vivant et plus encore, il était parvenu à s'introduire dans la cité souterraine sans se faire remarquer. Une véritable prouesse, ou des poches remplies de porte-chances en tout genre, si l'on considérait le manque de discrétion qui caractérisait ses déplacements. Toutefois, ils n'avaient guère le temps d'épiloguer sur le pourquoi ou le comment l'humain s'était retrouvé là, l'essentiel à cet instant était qu'ils étaient libres. Bonne ou mauvaise chose, cela restait encore à déterminer. A cette pensée, Kylian laissa glisser son regard jusqu'à la frêle silhouette qui se tenait dans l'ombre de Lorenz. Pourquoi n'avait-elle pas pris la fuite ? Elle avait tenu là une occasion en or de se défaire de l'emprise du prince noir et n'en avait pourtant rien fait, Lorenz lui-même n'avait pas semblé douter ne serait-ce qu'un instant du fait qu'elle ne les abandonnerait pas ainsi. Ce que le renégat découvrait devenait décidément de plus en plus inquiétant, ou du moins était-ce ce dont il voulait se persuader. Car dans le même temps, quelque chose au fin fond de son esprit lui susurrait que cela devenait surtout de plus en plus... intéressant. C'était bel et bien une faiblesse, une de plus et non des moindres, qui se dessinait devant lui. Une nouvelle fissure dans le bouclier d'invulnérabilité qui semblait jusqu'alors auréoler son adversaire de toujours. Mais Kylian n'était pas de ceux-là. Il répugnait à user d'une innocente pour atteindre Lorenz et trouverait un autre moyen, il n'était pas encore prêt à tout pour vaincre. Pas encore. Pourquoi avait-il ressenti le besoin de préciser ce ''encore'' ? Non, il n'était pas de ceux-là. Kylian secoua la tête pour chasser ces sinistres pensées, ne remarquant même pas que sa main était naturellement venue effleurer du bout du doigt les contours du diamant qu'il dissimulait toujours dans une poche de sa tunique.

Lorenz venait de prendre la tête du groupe, sans que personne ne trouva à y redire. Si l'illusion de commander pouvait le satisfaire, il n'y avait aucune raison de l'en priver, le rebelle suivrait sans faire d'histoire, du moins aussi longtemps que cela serait nécessaire et que cela ne conduisait à rien de répréhensible. Et puis, si la pierre dont avait parlé l'ancestral se trouvait effectivement cachée ici, mieux valait ne pas perdre ce dernier de vue.

Le groupe atteignit bientôt une vaste bibliothèque et chacun se mit en devoir de décortiquer les ouvrages qui en occupaient les rayons, dans l'espoir de découvrir quelque indice utile à leur quête mystérieuse. Plus facile à dire qu'à faire toutefois : la plupart des livres étaient retranscrits en langue elfique, autant dire qu'une page blanche eut été aussi utile au renégat que les lourds ouvrages qu'il s'efforçait de démêler. Il finit néanmoins par découvrir un livre qui semblait plus imagé, mais devant la réaction qu'eut Lorenz, il comprit rapidement qu'il faisait fausse route. Finalement, ils se dispersèrent dans la bibliothèque et Kylian put mettre la main sur des livres en langue commune. Il en parcourut rapidement quelques-uns, mais force était de reconnaître qu'ils se révélèrent soit trop pauvres pour être intéressants, soit trop complexes pour ses capacités. Finalement, langue commune ou langue elfique, la différence que cela faisait dans sa moisson d'informations n'était pas bien grande, il était à souhaiter que les autres auraient eu plus de chance. Tout à ses lectures, le renégat vampirique leva un sourcil pour jeter un regard en direction de l'humain qui s'agitait au pied d'une étagère, mais il n'y accorda qu'une brève seconde de son attention avant de se replonger dans ses livres. Peut-être aurait-il dû se montrer plus vigilant, à en juger par le fracas qui vint bientôt secouer la bibliothèque. Une étagère entière venait de s'effondrer sur le vieillard, à la grande hilarité du sbire vampirique de Lorenz qui avait assisté à la scène et ne semblait pas le moins du monde concerné par l'éventualité que l'humain put être blessé.

Kylian lui expédia un regard dur tandis qu'il abandonnait l'ouvrage qu'il consultait pour aller dégager l'infortuné curieux. Celle que Lorenz avait appelé Elisseï vint bientôt lui prodiguer les premiers soins et s'assura qu'il n'y avait pas de blessure grave. Il ne se réveillerait pas avant un moment et aurait probablement droit à une migraine carabinée lorsqu'il reviendrait parmi eux, mais en dehors de cela, ses jours n'étaient pas en danger. Pour l'instant du moins, car fidèle à ses habitudes, Lorenz se dirigea vers le passage bien maladroitement découvert, avec la ferme intention d'abandonner là le malheureux. Voilà bien le Lorenz que le renégat connaissait. Sans un mot, Kylian se saisit de l'inconscient pour le charger sur son épaule et s'engagea à la suite du groupe, répondant d'un signe de tête entendu aux muets remerciements que lui adressa la demoiselle. Elle semblait sincèrement attentionnée et gentille, constatation qui ne manqua pas arracher une pointe de regret au rebelle. C'était injuste de voir des personnes comme elle souffrir de l'oppression du tyran vampirique, encore qu'elle avait la chance, si tant est que l'on pouvait qualifier cela ainsi, de bénéficier d'un traitement de faveur. Il atteignit la pièce suivante quelques instants après ses compagnons du moment, son regard glissant sur les montagnes d'or scintillantes qui encombraient l'endroit tandis qu'il déposait son fardeau humain dans un coin, prenant soin de l'adosser au mur pour ne pas... Bon, d'accord, fausse bonne idée !

En effet, ces mêmes murs se mirent en mouvement à l'instant même où le passage qui les avait amené ici s'obstruait, le piège se refermant lentement sur eux. Finalement, il semblait bien que le renégat fut parvenu à empêcher Lorenz de quitter cet endroit vivant, dommage toutefois que ce fut involontaire et que cela implique de sacrifier des innocents. Kylian hésita, sincèrement, pendant quelques secondes. L'ancestral pouvait retarder l'inéluctable, mais toute sa puissance ne suffirait pas à lui permettre d'arrêter le piège. Le rebelle le tenait donc littéralement au creux de sa main, il lui suffisait de rappeler mentalement son épée pour se jeter sur l'ancestral et ainsi les condamner tous. Le regard clair du rebelle vampirique pesa lourdement sur la silhouette de l'un des pires fléaux armandéens, mais glissa ensuite sur la silhouette de la jeune fille qui se démenait pour essayer de trouver une sortie, sur celle du sbire vampirique qui l'imitait et finalement sur celle de l'humain qui n'avait pas même conscience de ce qui était en train de se passer. Trois vies, ou plutôt deux et demie, en plus de la sienne pour débarrasser le monde d'un tueur de masse. Cela semblait si peu, en comparaison de toutes celles que ce geste pourrait sauver, mais aucun d'eux n'avait demandé à se retrouver dans cette situation. Non, il ne pouvait pas. Lorenz paierait un jour pour ce qu'il avait fait, mais pas de cette manière. Kylian n'était pas prêt à tout. Pas encore.

Le renégat se contraignit à détourner le regard pour se pencher sur le corps inanimé du musicien inconscient, l'enveloppant soigneusement dans le manteau de brume que portait le vieil homme. Ceci fait, le vampire se dirigea vers un coffre que l'on devinait rempli d'or et posa une main sur le couvercle, usant de sa magie pour en appeler au sort de métamorphose. Quelques instants après, la silhouette du rebelle disparaissait pour laisser place à un second coffre en tout point identique au premier. Les deux vampires restant s'évaporèrent en coordonné, si bien que l'espace d'un instant, la salle sembla vide de tout occupant. La seconde suivante fut particulièrement longue et angoissante, mais finalement, le grondement rocheux qui accompagnait le mouvement des murs s'arrêta un instant, puis se fit de nouveau entendre tandis que les parois de la salle s'éloignaient pour reprendre leurs positions initiales. Les vampires se rematérialisèrent, la dénommée Elisseï quitta le couvert de sa cape et l'un des coffres cerclés d'acier se vit pousser bras et jambes tandis que le renégat vampirique reprenait son apparence. Le regard clair du rebelle vint alors trouver celui du prince noir, lequel venait de faire un pas dans sa direction. Voulait-il le châtier d'avoir déclenché le piège ? Ou avait-il perçu l'hésitation du renégat quant à la conduite à tenir au moment où les murs se refermaient sur eux ? Mystère. Toujours est-il que Lorenz n'eut guère l'occasion de poser un deuxième pas au sol, celui-ci semblant brutalement décider que sa présence ne leur était plus nécessaire. La force de gravité fit le reste, attirant vampires et humains dans le vide pour une chute libre de plusieurs mètres dont la finalité ne leur était pas encore connue.

Quelques mètres plus bas néanmoins, ils furent réceptionnés par un dallage de pierre, les vampires, plus agiles, parvenant sans trop de peine à se réceptionner décemment tandis que les humains heurtaient durement ce nouveau sol, soulevant un nuage de poussière. Une voix féminine fit toutefois entendre une exclamation douloureuse, signe que l'un, ou plus exactement l'une, d'entre eux avait eu à endurer un atterrissage plus difficile que les autres. Ceci leur fut rapidement confirmé alors que retombait lentement la poussière en suspension dans l'air et que les regards purent se poser sur une Elisseï en bien fâcheuse posture. Au centre de la pièce trônait un massif autel de pierre, sur lequel la jeune femme était venue terminer sa course. Malheureusement pour elle, les quatre coins de cette étrange table de pierre étaient ornés de pointes en métal que pas même le temps n'était parvenu à émousser, et c'était précisément sur l'une de ces pointes qu'était venue s'embrocher la jambe de l'humaine. Une chance pour elle, l'embout métallique avait évité aussi bien l'os que l'artère : la blessure était impressionnante et douloureuse, mais ne lui serait pas fatale si tant est qu'elle reçoive les soins adéquats...


HRP : ne pas hésiter à me faire éditer si nécessaire, en particulier pour la blessure x')

Spoiler:

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Finalement ça ne s'avéra pas si compliqué que cela de retrouver l'endroit où les vampires, et l'humaine s'étaient faits emprisonnés par les elfes, et par chance Crissolorio ne rencontra pas beaucoup d'entre-eux sur le chemin ce qui lui facilita énormément la tâche... Peut-être que les elfes n'étaient pas très méfiants, et ne pensaient pas qu'une aide extérieure comme lui leurs viendrait en aide aussi vite ce qui était quand même assez compréhensible après tout... Lui même se disait qu'il devait jouer d'une chance absolument obscène pour arriver à ne pas se faire repérer, et à rester inaperçu en ces lieux... A croire qu'il devait y avoir une bonne étoile qui veillait au dessus de lui, ou bien juste le fait que ces hôtes bien mystérieux ne devaient pas être très attentif... D'ailleurs lorsqu'il arriva aux geôles dîtes des vampires il n'eu pas grand mal à ouvrir la porte avec sa clé de quatre (au moins les elfes avaient pensés à la fermer à clé c'était déjà ça....), mais il s'étonna surtout de ne croiser quasiment aucun garde en cours de route... Peut-être il y avait t-il des pièges magiques quelques part qui sait? Même si cela restait fort probable une intuition lui dit que ce n'était pas le cas, et il se contenta de rentrer dans la salle où se tenaient les prisonnier après quelques instants de marche assez stressants...

Il se contenta ensuite de rester silencieux quand les vampires, et l'humaine le regardèrent avec un certain étonnement (du moins c'est ce qu'il pensait car il ne les regarda pas directement dans les yeux, et garda sa tête caché derrière sa capuche par peur de se faire reconnaître car on ne savait jamais...) Puis il s'approcha de la cellule, et celle-ci s'ouvrit sans qu'il n'est besoin de le faire lui-même (ils avaient sans doute déjà commencer à s'échapper, et ils n'avaient pas vraiment besoin de son aide au final...) ce qui était assez surprenant, mais pas non plus invraisemblables au final... Il se contenta donc juste de rester calme comme à son habitude au prix d'un maigre effort mental, et de regarder les vampires sortirent tour à tour de la cellule silencieusement... Par la suite il se contenta d'écouter d'une oreille ce que disait le prince noir à l'humaine, mais au final n'y prêtait pas plus d'intérêt que cela car c'était clairement des menaces que ce rustre adressé à une demoiselle ce qui n'était pas étonnant de la part d'un tel malotru.

Il se contenta ensuite de rester silencieux, et d'observer en silence ce groupe qui était visiblement constitué de personne infréquentables pour un honnête d'homme de sa stature, et de son intégrité, et d'une esclave humaine qui n'avait vraiment pas de chance à vrai dire. Au moins l'empereur ne sera jamais au courant de cette histoire se disait-il, et ce serait toujours ça de pris car savoir que le Grand Trésorier s'était retrouvé à quelques mètres de Lorenz Wintel sans que ne coule un bain de sang avait de quoi faire soulever nombre de questions particulièrement gênantes pour sa personne, mais après tout.... Ce n'est pas non plus comme si c'était la première fois qu'une chose pareille lui arrivait! Même si à moins grande échelle bien entendu...

Il ne fallut pas attendre longtemps pour que le despote se mette à faire entendre sa voix, et décide de lui-même qu'il vaudrait mieux pour le groupe partir à la recherche de cette pierre. Et Crissolorio n'était pas vraiment contre car après tout il n'était pas venu pour cela à l'origine? Donc il se contenta d’acquiescer calmement, et il ne trouva rien à redire lorsque le tyran voulu mener le groupe lui-même. Après tout au moins ce ne serait pas le Trésorier qui se retrouverait en première ligne en cas de pépin, et il ne pouvait pas dire non dans ce cas!

Puis le groupe commença à marcher, et le secrétaire d'Etat se contenta d'avancer en silence au milieu du groupe pour n'importuner personne, et disposer d'un minimum de protection de la part des vampires. Bien entendu la marche à travers les galeries fut assez longue, et il s'attendait à tout moment à croiser un elfe armé jusqu'aux dents, mais ils arrivèrent assez vite, et sans problème près de la ville avant de se diriger vers celle-ci... Au bout d'une assez courte traversée des ruines urbaines elfiques ils finirent par arriver dans une sorte de bibliothèque dans un état somme toute assez précaire....

Il ne perdit pas de temps pour s'engouffrer à l'intérieur de celle-ci, et circulait au milieux des étagères recouvertes de poussières tout en baladant un regard inquisiteur sur ses dernières pour voir tout élément qui pourrait paraître suspect... Néanmoins le groupe qu'il accompagnait fit une halte, et le prince noir mit en avant le fait logique qu'ils devraient débuter des recherches ici, et le trésorier se contenta après avoir éternué a cause de la poussière omniprésente de s'éloigner un peu pour débuter les investigations de son côté...

Au final après une assez courte promenade au milieu des ouvrages le bourgeois s'arrêta devant une étagère assez haute qui avait l'air de crouler sur les bouquins, et Crissolorio se contenta d'empoigner l'un d'entre-eux pour consulter quelques pages...

C'était de l'elfique se dit-il, et ce n'était pas vraiment étonnant. Et il n'avait malheureusement que quelques notions là dedans qu'il était arrivé à arracher après une longue insistance à une érudit il y a fort longtemps de cela. Et c'était vraiment des faibles notions à un tel point qu'il se contenta de ranger délicatement le livre dans sa sacoche (ça pourrait intéresser un érudit, ou deux qui sait...), et de continuer à scruter celle-ci pour voir s'il n'y avait pas quelques choses de plus intéressants à voir. Qu'est-ce qu'il ne ferait pas en cet instant pour connaître un sort qui permettrait de déchiffrer l'elfique se dit-il avec un peu de cynisme. Comme lui disait son oncle "toute connaissance est utile", et il avait raison décidément car il aurait sans doute était bien aise de mieux connaître l'elfique en cet instant...

Il regarda néanmoins un bout d'un instant avec application un détail qui le turlupinait. N'était ce pas le vide qu'il y avait derrière l'étagère? Et non pas un mur vit-il après avoir enlevé un ouvrage assez lourd. De plus il sentait une légère odeur rance que seul un lecteur averti comme lui connaissait, et qui voulait souvent dire que des livres en cuir étaient fortement abîmés à cause de l'humidité de l'air qui ne venait sans doute pas de la bibliothèque d'ailleurs... Pour en être sûr il commença à pousser légèrement celle-ci après y avoir ôté quelques bouquins, mais le meuble était en train mauvaise état décidément, et s'effondra sur sa digne personne. Et il eu à peine le temps de s'en apercevoir quun livre énorme qui était en haut de l'étagère vint cogner son crâne...

[...]

Après un assez court sommeil à ce qu'il lui semblait il se réveilla avec assez de mal. Le monde était trouble tout autour de lui, et c'est à peine s'il arrivait au bout d'une dizaines de secondes à se rappeler dans quelle situation délicate il était, et pas au milieu de sa maison luxueuse, ou d'un tas d'or dans lequel il aurait dormi (même s'il ne l'avait pas encore fait pour le moment il avait du avouer qu'une fois l'idée l'avait tenté...) Néanmoins ça aurait sans doute était plus confortable qu'au milieu de ruines elfique en compagnie de vampires, après qu'une encyclopédie lui soit tombé sur la tête, et que par miracle il n'ait rien à part quelques contusions... Et une légère migraine qui s'effaça assez vite quand le monde autour de lui lui paru clairement, et non plus en un tas chaotiques d'ombres plus, ou moins sombres, et méconnaissables.

D'ailleurs il avait assez mal au dos ce qui montrait bien qu'il avait du subir un choc avant de se réveiller, et quand il leva les yeux vers les autres membres du groupe il vit les vampires attroupaient autour de l'autre humaine qui avait la jambe empalait, et Crissolorio se demandait bien comme elle avait fait pour se blesser comme cela... De plus il se demandait bien comment ils allaient faire pour la faire sortir d'ici sauf si elle arrivait à trouver un moyen efficace pour ce soigner... Reste à espérer qu'il y ait de bon mages dans le groupes sinon elle allait se vider de son sang assez vite, et serait sans doute en mauvais état pour marcher par la suite...

D'ailleurs il remarqua vite qu'autour de lui la pièce était assez sombre, et il se contenta donc d'utiliser son anneau de lumière pour éclairer notamment mieux celle-ci, et il vit que sur le piédestal au milieu de la pièce il y avait la fameuse pierre qu'ils étaient sans doute venu chercher avec un peu de chance car ce serait étonnant qu'une pierre orange comme celle-ci, et de forme assez quelconque soit poser ici comme un objet précieux sans qu'elle n'ait rien de particulier pour les elfes...

Il se contenta donc de s'approcher de celle-ci, et de la prendre dans ses mains pour l'examiner avant de la mettre dans sa sacoche avant de dire avec une voix étonnamment calme, et calculatrice.

Nous verrons ce que nous en ferons après être sortit d'ici.

En espérant si possible qu'il ait l'occasion de quitter la compagnie des vampires sans trop de problème bientôt sinon il se contentera de leurs donner la pierre en échange de sa vie...

Il jeta ensuite des regards autour de lui pour voir qu'ils se tenaient tous dans une pièce aux dimensions sphérique, et de couleur blanche, mais d'un blanc absolument parfait. D'une pureté qui n'était égalé que par le meilleur marbre du palais impérial, et ces murs d'un blanc pur semblaient n'arborer aucune excroissances, ou impuretés quelconques... Le genre de prouesse dignes seulement des meilleurs artisans, et qui montraient bien là une prospérité, et une richesse admirable de la part du peuple qui a bâti cette salle. Il perdit pendant quelques instants son regard sur cette pièce, et sur les piliers faits dans un marbre de couleur noir (comme la nuit sans lune) ce qui était assez étonnant, et donner une certaine impression d'harmonie à la pièce. Pour constater qu'il n'y avait aucune sortie dans cette salle, et cela l'inquiéta, mais il se dit qu'il devait sans doute y avoir une énigme derrière, ou un mécanisme à activer, et il reporta donc son regard sur le piédestal pour y voir une inscription qu'il lu à voix haute, et du ton non émotif d'un banquier qui est venu réclamer ses intérêts...

La notion de perfection est illusoire et ne rend pas gloire aux Esprits. Ils admettent leurs propres défauts et luttent contre eux depuis les temps qui précédèrent la création. Océan est colère, Vent désinvolture, Néant obstination, Mort nonchalance, Végétal prétention tandis que Vie doit limiter son mépris et que Feu se sait revanchard. Et Terre quand à lui ? Il est celui qui lutte le moins... Curiosité est son travers, et il ne s'en cache point.

Sachant cela, chacun devra s'acquitter d'une taxe afin de pouvoir passer le portail de Terre. Un secret pour chacun, donné de libre choix et à très haute voix. Noire ou touchante, qu'importe le choix de la confidence pourvu qu'elle soit précieuse au coeur de celui qui en fera le sacrifice. Terre étant juge et bourreau des mensonges.

Il compris assez vite la petite histoire là-dedans, et réfléchit au sens caché de la dernière phrase... Un secret? Il devait révéler un secret? Eh bien soit il le fera, et entonna donc à voix haute...

Je suis un homme d'une ambitieux sans limite. Simple bourgeois je ne veux pas rester. Je veux atteindre les plus haut niveaux de la société par ma ruse, et ma compétence. Même si elle a était en partie exaucé ma soif de pouvoir n'est pas encore étanché. Une soif que j'essaye de satisfaire par de froids calculs, et aussi par une réflexion pragmatique digne de n'importe quel homme ambitieux qui a son esprit comme atout principal.

Il attendit quelques secondes, mais il ne s'était rien passé... Après tout ce n'était pas vraiment un secret car tout ceux qui avaient entendu parler de lui dans l'empire devait s'en douter un peu en fait. Surtout que Fabius Kohan lui-même le savait donc bon... Ce n'était pas vraiment un vrai secret.

Je suis aussi un grand avare. Ma soif d'or est à peine égalée par ma soif de pouvoir. Pour moi l'or est un bon moyen de démontrer son statut social, et d'amasser plus de pouvoir, et encore plus d'or. Car l'argent, et le pouvoir vont de paire selon moi. J'ambitionne même d'être l'homme le plus riche de l'empire, et même si je ne suis pas prêt à tuer pour cela le sang marchand qui coule dans mes veines affûte encore ce vice que j'assume être mien. Je suis un homme très riche, et je tiens à le rester dans tous les cas. Même si je ne méprise pas les pauvres il m'arrive souvent d'avoir un pincement au cœur quand je fais l'aumône car j'ai du mal à me départir de mes biens même par altruisme...

Il attendit ensuite quelques instants pour voir si quelque chose se passait... Car il espérait sincèrement ne pas avoir à dire de choses de plus gênants pour sa personne ici...

L'ancestral n'avait rien eut à redire au plan proposé par Ambre, il était intelligent et plutôt logique mais pas moins dangereux pour autant. Il ignorait totalement comment le sort allait réagir lorsqu'il allait relâcher ses efforts. Les murs pouvaient accélérer simplement leur course, ce qui était déjà très problématique, ou bien le sortilège pourrait compenser le retard qu'il avait prit et rebondir assez pour tous les écraser dans la seconde. Autant dire que cette deuxième possibilité était encore plus problématique... Mais quel autre choix avaient-ils ? Son petit doigt lui disait que les elfes des montagnes étaient bien moins conciliants que leurs cousins des forêts et qu'ils seraient bien capables de leur rire au nez à travers la porte plutôt que de sauver leurs fugitifs. Pas question donc de leur donner cette joie.

Il avait laissé son énergie filer à une vitesse alarmante pendant qu'il réfléchissait, cherchant une solution moins dangereuse tout en sachant quelle n'existait pas. Sombrement concentré, son regard avait croisé celui du renégat qui le fixait avec trop d'intensité pour ne pas attirer son attention. A quoi songeait-il lui encore ? Bien que trop plongé dans l'urgence pour pouvoir vraiment s'y intéresser, il ne pouvait s'empêcher d'être désarçonné par les réactions de Wallam depuis leur rencontre. Le plus jeune avait changé, profondément. Il ressentait plus de dureté en lui, une certaine forme de cynisme amer qui jurait avec son caractère habituel. Et il n'était pas sur d'aimer cela... Pas du tout même. Ils se toisèrent un moment avant que Wallam ne se décide à se détourner pour s'intéresser à un coffre. Lorsqu'il passa devant lui, Lorenz aurait juré voir briller fugitivement une lueur meurtrière dans son regard. Cette lueur qu'il n'avait que lorsqu'il était en fureur, comme cette nuit là dans le village en feu. Apprenait-il lui aussi à puiser de la force dans sa rage même dans les périodes calmes ? Drôle d'ironie que celle là... Inquiétante, mais amusante avant tout.

Les événements ne se prêtaient pourtant pas à ce genre de réflexions sarcastiques. Ambre venait d'emmitoufler l'autre humain dans sa cape des brumes, elle-même disparaissant dans une cape des Ombres. L'ancestral croisa une dernière fois le regard de Wallam en pleine métamorphose et, se remettant à la chance, il s'évapora en même temps que l'autre vampire. Il ne pensait pas que le sort allait rebondir, mais si c'était le cas alors il aurait l'immense joie d'expérimenter l'art de la rematérialisation dans un mur... Le sort d'évaporation ne permettait quasiment pas de déplacement, et ne durait qu'une seconde à peine. Il n'eut donc pas à attendre bien longtemps le verdict et ne pu que pousser un soupir de soulagement lorsque le retour dans le monde réel lui confirma qu'ils étaient bien tous en vie. Enfin... Deux d'entre eux disons. Il ouvrait déjà la bouche pour commenter ce fait lorsque le sol décida soudainement de leur jouer un sale tour. Ils tombèrent tous avant même d'avoir pu réaliser ce qui se passait.

L'atterrissage fut plutôt rude, mais l'organisme des vampires était bien trop solide pour en souffrir. Les trois créatures de la nuit se réceptionnèrent avec la prestance de félins quelque peu ébouriffés par cette mauvaise surprise tandis que le choc sourd provoqué par les corps humains heurtant le sol venait leur chatouiller les oreilles. L'odeur du sang suivit aussitôt, montant et explosant à leurs narines et faisant tourner les trois têtes avec un bel ensemble dans la même direction. Ambre...

"Läw..."
non

Il s'était déplacé avec vivacité et se trouvait déjà près d'elle tandis que l'autre vampire, plus jeune, reculait en grondant et en maîtrisant difficilement sa soif éveillée par la vue et l'odeur d'un tel nectar. L'ancestral ne lui accorda pas un regard mais l'autre ne s'y trompait pas et il se déplaça aussi loin qu'il le pu, peu dupe du sort qui lui serait réservé si il lui venait l'idée de sauter à la gorge de la jeune femme. Lorenz de son côté portait toute son attention sur la blessure et sur le pâle visage qui grimaçait de douleur. Il n'y connaissait rien dans l'art de la guérison, la guérisseuse se trouvant justement être la personne blessée. Mais il avait tranché assez de membres humains ou non pour savoir que la jeune femme se serait déjà vidée de son sang sous ses yeux si l'artère avait été touchée. La blessure était sérieuse donc, mais pas nécessairement mortelle. A condition de réagir rapidement, et efficacement... Les sorts de soin n'avaient jamais été sa spécialité, même lorsqu'il était elfe, loin de là d'ailleurs. Mais cela n'avait pas d'importance, il revendiquait sans vergogne le titre de plus grand mage du continent, il pouvait bien refermer une blessure non ? Un jeu d'enfant. Pourquoi alors se sentait-il tétanisé ?

Agacé par lui-même, il s'obligea à se secouer. Le temps était précieux à la blessée, et la vision de sa souffrance lui était insupportable. Son visage se ferma pendant qu'il endurcissait sa résolution. Il s'empara de la pique qui traversait la jambe de la jeune femme et plongea ses prunelles brûlantes dans les siennes :

"Je dois la briser et la retirer Elisseï. Cela va faire mal."

Presque autant à lui qu'à elle pour tout dire, mais les autres n'avaient pas besoin de le savoir. Il sentait le regard du rebelle sur sa nuque, conscient de l'incongru de la situation. Le prince noir transformé en guérisseur par la force des choses... Lui qui parlait d'ironie tout à l'heure, il n'aurait pas cru y être confronté de façon aussi délicate. Mais cela n'avait pas d'importance, il n'avait jamais daigné porter attention à ce qu'on pouvait bien penser de lui et cela n'allait pas commencer à présent. Ambre lui appartenait, il ne la laisserait pas ainsi même si il devait aller disputer son âme à l'Esprit de la Mort. Une fois lui avait suffit. Il la laissa prendre une inspiration profonde, ne quittant pas son regard et espérant qu'elle y puiserait la force nécessaire pour supporter ce qui allait suivre. Puis il passa à l'action.

La pique ne résista pas à sa force vampirique. Il avait agit avec maîtrise et précision, comme il le faisait pour toute chose. Volontairement brutal afin de gagner en rapidité, il n'entendit même pas si elle hurlait ou non lorsqu'il extirpa d'un seul geste l'embout métallique piqué dans sa chair. Le sang gicla aussitôt par la blessure laissée béante, trempant l'avant de sa tunique puis sa manche lorsqu'il la comprima de sa main gauche. Il fallait la refermer en vitesse si il voulait éviter une hémorragie fatale. Le feu le pouvait, son totem n'était pas fait pour guérir mais il était capable de cautériser une plaie et d'avoir le même effet que ce sort de magie humaine qu'il maîtrisait mal. Facile donc... Mais pas tant que cela. Il sentait sa souffrance par tous les pores de sa peau et répugnait à lui en infliger plus encore. Le mage qu'il était pouvait bien s'attaquer à tous types de sorts non ? Il n'avait aucune raison de se limiter. Sans plus d'hésitation, il passa doucemement sa main droite par dessus celle qui comprimait la plaie et plissa les yeux lorsqu'une lueur sensée être apaisante vint lui agresser les prunelles. Ce n'était pas parfait, mais le sortilège avait réussit. De moins lui semblait-il.

La vision de la peau fragile mais intacte qui se dévoila lorsqu'il retira sa main confirma sa pensée. Il ne pouvait rien pour tout le sang qu'elle avait perdu et sa jambe resterait faible un bon moment, mais au moins n'allait-elle pas mourir ici. La tension se relâcha brutalement et il s'aperçu avec retard de la frayeur intense qu'il avait ressentit. La scène lui avait rappelé de pénibles souvenirs, il serait plus vigilant à l'avenir. Il croisa le regard du rebelle oublié pendant tout ce temps et le soutint un long moment avec calme. Il devait lui avoir donné matière à penser... Grand bien lui en fasse.

"Allez. Ne restons pas là. Je n'aime pas beaucoup cet endroit."

Pour tout dire il n'avait pas encore vraiment prit le temps de l'observer mais ce qu'il venait de se passer lui suffisait. Conscient du fait qu'elle allait prétendre détester cela mais aussi qu'elle n'aurait pas la force de protester, il se pencha vers Ambre et la souleva sans efforts. Aucune chance qu'il ne la laisse marcher après une telle aventure, d'autant plus qu'elle en serait certainement incapable. Quand à la confier à un autre, c'était tout bonnement impensable. Ainsi au moins, il était certain qu'il ne lui arriverait plus rien de fâcheux. C'était même assez paradoxal de se dire qu'elle était plus en sureté dans les bras du prince noir que nul par ailleurs.. Mais les faits étaient là. Qu'on vienne donc essayer de le transpercer, lui...

La première chose qu'il repéra en observant enfin la pièce ce fut le piedestal désormais vide. Tiens donc... L'humain croyait vraiment s'en tirer ainsi ? Il pouvait encore le griller sur place sans même déranger son fardeau au cas où l'autre en aurait douté... Mais soit. Il patienta en premier lieu, préférant écouter la lecture de l'énigme. Qui n'en était pas vraiment une d'ailleurs, c'était même plus que clair... Un secret ? Il devait sacrifier un secret ? Ce ne serait pas très difficile à trouver, il en avait beaucoup. Mais l'idée de le prononcer à haute voix en une telle compagnie lui déplaisait beaucoup. L'humain n'avait apparemment pas les mêmes scrupules et il montra l'exemple aussitôt, tirant un rictus méprisant au vampire :

"Touchante confession."

Cela suffirait-il ? Apparemment oui car la forme bleutée d'une immatérielle porte se forma rapidement au centre de la pièce. Une sortie magique donc, et une magie liée aux Esprits Supérieurs... Aucune chance qu'il ne parvienne à la soumettre à sa volonté. Il grinça des dents à cette pensée mais ne perdit pas le nord pour autant puisque son ordre claqua avant que l'humain ai pu traverser :

"Arrête le."

Le plus jeune vampire qui s'était approché subtilement ne se le fit pas répéter. Le crissement funeste de son épée déchira l'air et la vision de la pointe se posant sur le cou délicat fit sourire l'ancestral :

"Je peux faire deux choses, humain. Prendre la pierre seule, ou prendre ta vie avec. Je pense pouvoir deviner laquelle t'est la plus précieuse."

L'autre vampire plongea sa main libre dans la sacoche de l'homme et en ressortit l'objet sans jamais le quitter des yeux. Il n'attendait que l'ordre d'abattre sa proie, mais Lorenz n'irait pas jusque là. Puisque Ambre et Kylian tenait tant à la vie du vieil homme, il voulait bien la lui laisser. Tant qu'il gardait l'artefact. Satisfait de savoir celui-ci entre les mains de son garde, il reporta son attention sur la porte qui prenait une teinte rouge plus agressive lorsqu'il essayait de s'en approcher. Décidément il ne pourrait pas sortir sans s'être acquitté de sa taxe... Il se renfrogna un moment, plongé dans ses réflexions, puis une lueur rusée s'alluma dans ses prunelles et il se décida :

"J'ai tué Yanvril, mon oncle. Et le jumeau de mon père. Je l'ai traqué pendant des années et rendu fou de frayeur avant de me décider à le mettre à mort. A ce que j'en sais, mes parents sont morts de chagrin l'un après l'autre. Je n'en ai ressentit ni soulagement ni remord. Ils sont tous coupables de la mort d'Enelya."

Ses mots résonnèrent sinistrement dans la pièce, parfaitement incompréhensible pour tout autre que lui qui ne maîtriserait pas l'elfique. Même Ambre ne pourrait en saisir que quelques mots difficilement, et le nom d'Enelya n'était connu que d'elle. L'idée de se dévoiler lui était insupportable, aussi une lueur satisfaite s'alluma dans ses prunelles lorsque la porte vira au bleu. Il avait réussi à contourner le problème... Il se tourna vers les autres en une muette invitation. A eux de se tirer d'affaire comme ils le pouvaient... Le jeune vampire obtempéra sans paraître vraiment gêné par l'atrocité qu'il avoua. Restait Ambre et Kylian, les deux étant tout aussi intéressants l'un que l'autre... Silencieux, chacun attendit que l'un des deux se décide.

*Phrase en Elfique

Anxieuse, Ambre attendit l’accord de tous les présents avec une crainte croissante de s’être trompée, d’autant qu’il s’agissait de leurs vies qui étaient en jeu. Son raisonnement aurait pu être logique, mais il y avait sans doute bien d’autres solutions possibles, et la magie avait de cela si particulier qu’elle possédait une logique tout à fait particulière ; encore qu’il était déjà difficile de lui en attribuer une. Mais c’était cela qui faisait sa beauté aussi : qu’elle ne réponde qu’à de mystérieuses lois, loin de toute raison pure et simple. Mais pour l’heure, ils avaient justement besoin qu’elle le soit, rationnelle. D’autant que la petite troupe semblait avoir accepté la proposition dangereuse et incertaine de la guérisseuse, à, elle devait le reconnaitre en son for intérieur, son plus grand étonnement. Ils lui faisaient confiance. A moins qu’ils n’aient simplement pas d’autres idées, mais même si tel était le cas, cette constatation réchauffa la demoiselle angoissée. Restait à savoir s’ils avaient bien fait. Enveloppée dans sa cape des ombres, elle assista à l’arrêt des murs et, alors qu’elle soufflait de soulagement en annulant le sort, apercevant les deux vampires réapparaitre et le dernier se retransformer, le sol eut la fort bonne idée de se dérober sous leur pieds, les précipitant dans une salle plus bas. Surprise, Ambre lâcha un couinement tandis qu’elle accompagnait les autres dans leur découverte improvisée et involontaire de la cité souterraine, atterrissant sans douceur sur quelque chose de dur, le choc la laissant étourdie et privée de sensations pendant quelques instants, ses yeux se voilant de noir tandis que sa tête heurtait l’autel sur lequel elle avait terminé sa course dans le vide. Lorsqu’elle reprit finalement ses esprits, l’ancienne esclave resta immobile, fixant le plafond sans vraiment le voir, cherchant à récupérer ses sensations toujours figées, son corps étant encore engourdi. Et lorsqu’elles revinrent, explosant dans son être entier, ce fut avec une force et une violence telles qu’elle ne put que pousser un bruit de gorge étranglé, les larmes perlant à sa paupière pour perler à ses joues et couler dans son cou sans qu’elle ne s’en aperçoive. Sa jambe lui faisait mal… Vraiment mal. Une douleur comme elle n’en avait encore jamais connu, lui semblait-il. La douleur morale, elle connaissait, elle avait appris à lui résister, à la combattre mais celle physique, elle en avait moins l’habitude et celle qu’elle ressentait à présent était horriblement forte, terriblement prenante. Difficilement, elle releva la tête, ses bras tremblants ne la portant que difficilement mais suffisamment pour apercevoir la pointe de métal fichée dans sa chair, apercevant les ruisseaux écarlates qui quittaient son corps. Son esprit logique analysa rapidement la situation, et elle comprit qu’il faudrait rapidement ôter la pique si elle voulait conserver sa jambe et, si possible, sa vie. Même ainsi, il fallait espérer qu’une infection ne la gagne pas, mais cela la magie pourrait se charger de la protéger. Par le Dracos, comment avait-elle fait pour tomber juste à cet endroit ? Elle ferma les yeux un bref instant, serrant les dents pour juguler la douleur tandis qu’un sanglot lui montait à la gorge, notant sans le voir l’arrivée de Lorenz à son côté. Et pourtant inconsciemment, son esprit la mit en garde : elle était blessée, en présence de trois sang-froids. L’odeur du sang, qu’elle-même percevait nettement, devait être affreusement tentante. Malgré cela, elle faisait étrangement confiance à son prince, connaissant le contrôle qu’il avait, et lisant dans le regard qui avait accroché le sien, fiévreux de douleur, une sincérité et un réconfort qui lui fit du bien.
Elle hocha vaguement la tête à sa phrase, posant la tête contre la pierre froide de l’autel sur lequel elle se trouvait, sachant pertinemment qu’il n’y avait pas d’autre solution mais appréhendant le moment où il lui ôterait la cause de sa douleur. Ses mains moites étaient crispées sur la pierre, comme si s’ancrer en elle lui permettrait de fuir cette souffrance. Elle ne put retenir un bref mais perçant hurlement de douleur lorsqu’elle sentit le mouvement de métal contre sa chair, puis la main qui se pressa contre la plaie tandis que l’écarlate s’en échappait. Ce n’était pas très hygiénique que d’appuyer une main sale sur la blessure, souffla une petite voix dans sa tête, mais le reste de son esprit était entièrement concentré sur la douleur qu’elle ressentait, tentant tant bien que mal de la contenir du mieux que possible, jusqu’à ce qu’une sensation douce comme un frôlement de soie n’efface sa souffrance alors qu’elle sentait ses chairs déchirées se réparer lentement. Un soupir tremblotant s’échappa de ses lèvres pâles tandis qu’épuisée, elle s’asseyait doucement pour observer le travail, efficace d’ailleurs, de son guérisseur improvisé. Lorenz Wintel guérisseur… Voilà une idée qui pouvait paraitre véritablement loufoque, mais Ambre était plus qu’heureuse de ce petit bouleversement dans les habitudes sanglantes du vampire. Il semblait que petit à petit, il quittait le voile noir qui l’entourait et qu’Ambre avait connu dès sa capture.

- Merci.

Sa voix était rauque et quelque tremblante, et elle se sentait horriblement faible, son corps frêle peu habitué à pareille traitement. Qu’il était épuisant de souffrir. La perte de sang la laissait bien pâlotte mais au moins était-elle en vie. Ambre effleura doucement sa jambe blessée, sachant pertinemment qu’elle allait devoir attendre encore un peu avant de poser le pied par terre. Elle n’espérait de pas gêner les autres ainsi, l’idée qu’ils puissent se faire capturer par sa faute parce qu’elle les avait ralenti ne lui plaisait pas du tout. Lorenz régla toutefois la question en la soulevant sans mal, ce qui lui valut un grognement de contrariété de la part de l’ex-blessée, sans qu’elle ne proteste plus toutefois. Elle sentait encore son rythme cardiaque un peu trop affolé et son corps trop épuisé pour avoir l’énergie de se débattre, d’autant que si c’était pour s’effondrer au sol après, ce n’était guère logique. Elle en profita pour observer la pièce dans laquelle ils se trouvaient, grimaçant en apercevant les piques de l’autel qui avait sa source de souffrance, notant l’emplacement vide d’un piédestal et, tout à fait marquant, le fait qu’il n’y ait aucune porte. On entrait donc sans pouvoir ressortir, voilà une pièce des plus dangereuses. La lecture de l’inscription par le mystérieux humain qui ne s’était toujours pas présenté attira son attention et résolu l’énigme de la porte manquante, et elle l’observa en l’écoutant attentivement, ouvrant grand les yeux en entendant le texte. Comment ça, un secret ? Elle n’en avait guère, et le principe même du secret était qu’il reste confidentiel, seulement connu de son possesseur. Le dévoiler ainsi était totalement impudique, d’autant qu’il s’agissait, hormis le Prince, de personnes qu’elle ne connaissait pas ou presque. Elle se mordilla la lèvre inférieure, écoutant l’étranger prendre la parole sans la moindre honte dans ses propos. Il aurait dû avoir honte de ce qu’il disait, mais au contraire il continuait à parler sans que rien ne montre qu’il se reprochait ses faits. Ce qu’il disait était plus une description de lui-même qu’un véritable secret, mais néanmoins cela sembla fonctionner puisqu’une porte apparue dans une douce lueur bleutée, attirant les regards à elle. L’ordre de Lorenz résonna dans la pièce tandis que son garde arrêtait le voleur, et Ambre se détourna de la scène après s’être assurée qu’ils ne le tueraient pas. Un secret donc… Voilà qui était ennuyeux. Elle n’avait guère envie de rester ici trop longtemps. Mais un secret, ce n’était pas toujours quelque chose d’horrible après tout. Ce pouvait être un rêve, un espoir, une broutille connue d’une seule personne. Ce qu’avait dit l’humain avait ouvert la porte magique après tout. Et la déclaration incompréhensible de Lorenz aussi. Curieuse, la jeune fille chercha à lire sur le visage du vampire ce qu’il avait bien put prononcer. Elle avait reconnu le nom de la jeune fille, ainsi que « mort », « années » et « soulagement ». Pas de quoi parvenir à faire une traduction correcte de ses phrases. Sans doute en aurait-elle comprit plus si le sang-froid avait parlé moins vite, afin qu’elle en comprenne distinctement chaque mot, mais là devait être la traduction exacte. Il y avait de très nombreuses possibilités, et il était frustrant de s’apercevoir qu’elle était si loin du parler elfique. Son apprentissage avait commencé depuis plusieurs mois mais elle n’avançait que lentement, et principalement par l’écrit. Ce qu’il disait montrait au moins qu’elle allait devoir s’entrainer oralement pour s’améliorer.

Ils étaient maintenant trois à rester, et le guerrier qui les accompagnait s’acquitta sans mal de la taxe demandé, sans la moindre gêne pour ce qu’il dévoilait ainsi. Cela fonctionna, mais la guérisseuse grimaça d’horreur en l’entendant. Ne restait donc plus que Wallam et elle-même. Ils se dévisagèrent un instant, chacun attendant que l’autre prenne la parole, jusqu’à ce que le rebelle adresse un léger signe de tête à la demoiselle, l’invitant ainsi à s’exprimer avant lui. Geste galant s’il en était mais qui n’arrangeait guère la jeune fille, toujours incertaine. Toutefois, par délicatesse, elle se tourna vers l’écriture, se libérant à son tour d’un secret. Touchant ou noir, était-il gravé… Sans qu’elle ne sache vraiment pourquoi, le visage de Bae lui revint en mémoire, puis de son oncle, ses parents, ses frères ; elle ferma à demi les paupières, avant de s’adresser à la pierre, le cœur ouvert, comme oubliant la présence des autres. Les Esprits demandaient un prix, et elle se devait de leur obéir.

- Je l’aimais comme un frère, et je ne voulais pas accepter sa demande ; pourtant cela l’aurait blessé et déçu mes parents. Je suis partie pour réfléchir. Je me dis encore parfois que j’aurais dû accepter immédiatement, sans chercher à y réfléchir davantage ; peut-être Pral serait-il encore en vie, car je suis aussi responsable de sa mort.

Responsable sans l’avoir jamais voulu, mais il l’avait accompagné pour la protéger, et au fond d’elle elle ressentait encore l’amertume de cette culpabilité. Elle ne l’avait jamais exprimée, et le faire en présence de Terre, l’Esprit, qui jugerait de la qualité de ce secret, était apaisant. Non pas qu’elle se sente disculpée, mais au moins cette petite plaie pourrait-elle trouver un jour, peut-être, de quoi se soigner.
Bras croisés, elle se redressa dans les bras qui la portaient, manifestant sa volonté de s’en libérer et de poser pied à terre ; elle était encore faible et fatiguée, mais capable de tenir debout sans s’effondrer. Ne restait plus qu’une personne, vers qui convergèrent tous les regards. Dans l’attente.

Lui aurait-on annoncé par le passé qu'il assisterait un jour à ce qui se déroulait sous ses yeux que Kylian n'en eut certainement pas cru un mot. D'ailleurs, il peinait encore à réaliser ce dont il était témoin à cet instant et ce quand bien même les récents évènements, les récentes découvertes qu'il avait faites, avaient pu semer le trouble dans son esprit. Mais cette fois, le doute n'était plus permis : Lorenz était sincèrement touché par la blessure de la jeune Elisseï, il éprouvait donc bel et bien des sentiments à son égard. Toutefois, le rebelle ne se risquerait pas encore à oser évoquer le mot amour, le seul terme d'affection lui apparaissait déjà totalement irréel. Depuis combien d'années le prince noir avait-il oublié jusqu'à la signification de ces mots ? Des dizaines, peut-être des centaines, et voilà qu'après tant de haine, de violence, de souffrance et de mort, il se découvrait doux et attentionné envers une humaine. Envers une représentante d'un peuple dont il méprisait la présumée faiblesse et qu'il souhaitait voir réduit en esclavage. Etait-ce vraiment possible ? Il y avait pourtant tout lieu de le croire désormais, et cette constatation troubla le jeune rebelle. Cela faisait quatre ans, quatre longues années qu'il s'efforçait de s'endurcir, de se convaincre chaque jour un peu plus de l'horreur dans laquelle Lorenz avait plongé le monde, de se persuader qu'Armanda ne pourrait jamais connaître la paix aussi longtemps que le prince noir en foulerait les terres. Bref, quatre années d'une profonde lutte intérieure en vue de se préparer à accomplir ce qui devait être accompli, et voilà qu'à présent qu'il pouvait se sentir effleurer son but du bout du doigt, une lueur d'espoir venait se rallumer et le torturer.

Kylian demeura ainsi, son regard pensif fixé sur la silhouette de son plus terrible ennemi tandis que celui-ci administrait ses soins à la blessée. Il en avait presque l'envie de se pincer pour s'assurer qu'il ne dormait pas, mais deux siècles d'insomnie étaient plus qu'il n'en fallait pour s'éviter ce genre de confirmations. Lorsqu'il eut terminé et qu'il se retourna, portant la jeune femme dans ses bras, les yeux d'acier du prince croisèrent ceux du renégat. Ils n'échangèrent pas un mot sur ce qui s'était passé, cela ne leur était pas nécessaire : chacun pouvait aisément deviner les pensées qui animaient l'esprit de l'autre. D'ailleurs, Kylian n'eut pour seule réaction qu'un geste, en vérité totalement involontaire et à peine perceptible, un léger hochement de la tête en signe d'acquiescement et de remerciements adressés au prince noir. Pourquoi ? Il n'en avait pas la moindre idée, ç'avait été une impulsion venue de bien au delà de sa conscience propre, laquelle demeurait pour sa part convaincue que même cet altruisme et cette empathie apparents dissimulaient en fait le plus pur égoïsme qui soit. Lorenz n'avait pas soigné l'humaine parce qu'il tenait à elle, mais bien parce qu'il tenait à ce qu'elle représentait pour lui. Ce n'était pas la personne à proprement parler qui lui importait, mais les souvenirs qu'elle éveillait en lui, une sorte de projection mentale à laquelle le prince vampirique espérait pouvoir se raccrocher.

L'épisode clôt, ils s'intéressèrent à ce nouvel endroit. S'il était regrettable qu'Elisseï eut à en payer le prix fort, leur chute les avait apparemment mené directement là où ils l'avaient espéré. Une bonne chose, du moins en apparence car il leur fallait désormais pouvoir ressortir et cela semblait bien plus facile à dire qu'à faire. Ce fut une fois encore l'humain qui découvrit le chemin à emprunter, avec cette fois la bonne idée de s'épargner la douloureuse réception d'une encyclopédie sur la tête. Fort heureusement, l'ouvrage ne semblait pas l'avoir trop atteint et il consentit même à leur faire la lecture des inscriptions qui scellaient ce qui semblait bien devoir être la seule issue possible. Un secret ? Ils allaient vraiment devoir payer leur liberté d'un secret ? La réponse à cette question lui fut apportée par l'humain, lequel venait de se confesser à l'Esprit Terre et s'était vu ouvrir une porte magique qui les mènerait Dracos savait où.

Lorsque le sbire vampirique récupéra la pierre des mains du vieillard, Kylian se crispa. Jusqu'à présent, ils avaient eu besoin les uns des autres mais maintenant que la fin de cette aventure se profilait à l'horizon, le point de rupture approchait rapidement. Une pierre, trois intérêts opposés pour la récupérer, cela ne pouvait pas se passer sans accroc. Apparemment plus raisonnable que n'escomptait l'être le renégat vampirique, le vieil homme s'effaça docilement devant la menace que fit peser sur lui le prince autoproclamé des vampires. Les traits sombres, l'archer renégat demeura silencieux et attendit un moment plus opportun pour intervenir... par exemple, lorsqu'ils seraient à l'extérieur et qu'il pourrait alors compter sur le soutien d'une dragonne millénaire.

Lorenz parvint à truquer le sacrifice de son secret en usant de la langue elfique pour s'assurer de n'être compris que de la porte elle-même. Le subterfuge fit naître l'ombre d'un rictus narquois au coin des lèvres du rebelle tandis que sa main s'était une fois de plus glissée dans la poche de sa tunique pour venir effleurer du bout du doigt la pierre qu'il y dissimulait. Kylian n'avait pas compris un traître mot des paroles du prince, mais deux noms firent écho à son esprit : Yanvril, l'oncle qui perdit la vie des mains de son propre neveu, et Enelya, l'amour perdu que Lorenz espérait voir renaître chez Elisseï.
D'un signe de tête, Kylian invita justement cette dernière à le précéder, ce dont elle s'acquitta avec hésitation et timidité. Le secret qu'elle révéla concernait un autre coeur brisé, apparemment, et celui-ci semblait avoir sacrifié sa vie à son chagrin même s'il était difficile de tirer quelconque conclusion sans indices complémentaires.

Ce fut finalement au tour du rebelle de se présenter devant le portail de Terre, alors que les regards curieux convergeaient vers lui. Ses yeux vinrent trouver brièvement ceux de son indiscret auditoire pendant qu'il cherchait les mots qu'il prononcerait bientôt. Il était hors de question qu'il révéla quelconque information qui put servir à son ennemi, et en dépit de ce qui avait pu les séparer, l'idée d'avouer son amour pour la princesse Kohan vint rapidement effleurer son esprit. Cela au moins, Lorenz le savait déjà et n'apprendrait donc rien de plus. Néanmoins, Lorenz n'était pas le seul occupant de la salle et si Elisseï ou le sbire vampirique ne représentaient guère de risque, demeurait l'humain musicien, celui-là même qui fit aveux d'ambition et d'avarice. Typiquement le genre d'individus qui ne méritait nulle confiance, ce d'autant plus qu'à en croire son discours, Kylian n'avait aucune peine à l'imaginer gravitant dans l'entourage de la noblesse humaine. Prudence est mère de sûreté , disait-on.

« Je ... caresse l'espoir de découvrir un jour un remède au mal qui me ronge. Je veux retrouver mon humanité, et je suis prêt à endurer tous les tourments pour y parvenir car je veux pouvoir donner un enfant à celle que j'aime. Je veux pouvoir vivre, vieillir et mourir à ses côtés. »

Pas forcément le plus important secret du renégat mais la pierre ne réclamait pas non plus la nouvelle du siècle, si ? Apparemment pas, et chacun put franchir le portail à tour de rôle. Kylian franchit la porte bleutée le dernier, et le vent froid qui vint lui fouetter le visage sitôt qu'il s'y était engagé lui confirma rapidement qu'ils se retrouvaient en extérieur, quelque part dans les montagnes. Où exactement, cela demeurait encore un mystère mais l'essentiel étaient qu'ils soient parvenus à échapper aux elfes avec la pierre en leur possession. Désormais, le vampire ne doutait pas que Skade le retrouverait rapidement.
Le point de rupture évoqué précédemment venait d'ailleurs d'être atteint, comme pouvait en témoigner les échanges de regards auxquels se livraient les différents intérêts de leur petit groupe. L'instant suivant, la fragile entente officieuse qui les avait lié jusqu'ici vola en éclat et, d'un bref appel mental à son enchantement de retour, Kylian dégaina son épée de dragonnier pour en pointer la lame effilée en direction du sbire vampirique porteur de la pierre. D'une voix froide et sévère, il s'adressa au soi-disant prince :

« Tu sais aussi bien que moi que je ne peux te laisser récupérer cette pierre, Lorenz. J'ignore pour quelles raisons tu la veux, mais tu ne me feras jamais croire qu'elles sont honnêtes, même après ce que j'ai pu voir ici. »

Son regard passa rapidement sur la silhouette de la jeune femme qui se débattait faiblement dans le bras du prince avant de glisser sur celle du garde vampire pour finalement revenir vers celle du mage ancestral :

« Dis lui de me remettre la pierre, je la porterais moi-même jusqu'à Aigue-Royale. Si ce sont bien là tes propres intentions, tu n'as aucune raison de t'y opposer et ma parole vaut largement la tienne, tu ne peux prétendre le contraire. »

La tension qui régnait dans ses épaules le faisait souffrir, mais pour rien au monde n'aurait-il montré le moindre tremblement dans la lame de son épée. Le sbire vampirique se déplaça d'un pas, puis d'un deuxième et bientôt d'un troisième, suivant une trajectoire circulaire, tel un fauve tournant autour de sa proie dans l'attente d'une occasion de bondir. Inflexible, Kylian suivit de sa lame la lente progression du porteur de la pierre, se composant un visage sévère tandis que celui-ci remettait l'objet de leurs convoitises à son maître.

« Je suis prêt à me battre si tu m'y contrains, Lorenz, mais tu es trop prudent que pour risquer qu'Elisseï soit blessée dans notre affrontement, n'est-ce pas ? »

N'est-ce pas ?

Il resta impassible quand il vit une ouverture magique en face de lui s'ouvrir ce qui prouvait que le secret qu'il avait révélé plus tôt était assez important pour que l'esprit de la terre lui ouvre le passage, et il se contenta donc après quelques secondes à regarder le portail de se diriger vers celui-ci calmement... Il se borna aussi ignorer royalement la remarque du prince car il n'avait a peu près rien à faire de ce que ce dernier devait penser de lui, et après tout qui y avait-il de moins bien placé pour le juger que l'un des pires monstres qui avait jamais foulé le continent? A vrai dire Crissolorio était une noble âme comparé à Lorenz Wintel, et lui contrairement à ce monstre n'avait pas de sang sur les mains, ou en tout cas pas de sang d'innocent, et de pauvre types... Du sang se disait-il avec dégoût...

Mais avant qu'il ne traverse le portail le despote ordonna rapidement à son serviteur de l'arrêter dans son mouvement, et le trésorier n'eu même pas le temps de réagir qu'une lame vampirique se mit à quelques centimètres de son cou ce qui était bien annonciateur de ce qui pourrait éventuellement se passer si ce tyran avait des envies meurtrières... Néanmoins le bourgeois se contenta de rester calme, et de regarder cela avec stoïcisme pendant qu'il entendait le prince noir lui imposait ses conditions.

Conditions qu'il était bien obligé d'accepter de toute façon se dit-il en laissant le serviteur de Lorenz Wintel récupérer la pierre dans sa sacoche sous le regard inflexible du trésorier qui attendit que la lame soit éloigné de son coup avant d'aller calmement dans un coin de la salle comme si de rien n'était pour attendre car il n'y avait plus vraiment de raison de se presser maintenant... Surtout que pendant que le despote parlait sans doute en elfique pour ne pas révéler quoi que ce soit de compromettant pour lui Crissolorio remplit distraitement sa bourse avec l'or, et les bijoux qui traînaient par terre car après quelle utilité auraient les elfes de tout cet or?

Puis il avait aussi envie d'entendre le secret des deux autres personnes non pas parce que ça le concernait vraiment, mais que toute information peu se révéler utile un jour qui sait? Surtout si celle-ci compromettent le prince noir en personne... D'ailleurs Crissolorio se disait qu'il avait de la chance de n'avoir eu à avouer que l'avarice car dire qui il était vraiment ici aurait été très périlleux pour sa personne... Même si maintenant il y avait trois personne sur ce monde qui savent qu'il est avare, et ce n'est jamais bon ça même s'il ne les reverra sans doute jamais! En tout cas pas avant un bon moment se disait-il comme après avoir rencontré cette soit-disant dame de fer...

Il se contenta de faire un tsss méprisant en entendant l'autre vampire qui était le serviteur du prince noir parlait des horreurs qu'il avait fait puis il regarda silencieusement la jeune fille qui s'avançait, et Crissolorio écouta discrètement ce qu'elle disait pendant qu'il achevait de remplir sa bourse à ras-bord pour au moins ne pas repartir d'ici les mains vide même si cela était au final très peu pour quelqu'un d'aussi riche que lui...

Elle ne dit rien de compromettant pour le dirigeant des vampires, mais pour elle-même, et Crissolorio se contenta de faire une légère grimace d'empathie car cette fille semblait en avoir lourd sur le cœur en plus d'avoir sans doute une vie très dure d'esclave vampirique. Il avait compris que quelqu'un était mort car elle avait refusé quelque chose, mais pas vraiment plus à vrai dire... Le genre de chose qui doivent tourmenter n'importe qui pendant presque toute une vie. Qu'il remerciait la providence pour ne pas avoir connu de telle tragédie lui-même a par la mort de sa femme qui l'avait laissé assez vide... Même s'il préférait ne pas y penser à nouveau. Il irait sans doute déposer des fleurs sur sa tombe quand il reviendrait à Gloria se dit-il, et faire une prière pour le repos de son âme. Car c'était sans doute la moindre des choses à faire selon lui.

Il tourna ensuite calmement son attention vers le dernier vampire qui n'avait pas encore révélé son secret en se demandant bien si celui-ci avait encore un crime horrible sur la conscience comme son camarade qui lui semblait ne pas avoir de remords comme le monstre qu'il était...

Il rencontra le regard du vampire qui semblait en pleine réflexion, et se contenta de le soutenir de manière calme. A quoi celui-ci pensait-il? Peut-être qu'il possédait un secret qu'il serait gêner de révéler en présence de sa personne? Non peu probable... C'était peut-être juste une façon de faire patienter tout le monde avant de dire ce qu'il voulait dire...

Et ce que dit le vampire effectivement était étonnant, mais pas choquant pour le trésorier, et sans doute pour quiconque dans la salle sauf les autres vampires. Crissolorio se dit finalement que tout les vampires n'étaient pas forcément des monstres comme leurs prince sans doute même si leur existence était en elle-même une erreur des esprits... Ainsi il voulait redevenir humain? Et il était amoureux d'une humaine a ce qu'il avait compris même s'il ne savait pas de qui pouvait bien parler le vampire... Intéressant se disait Crissolorio qui se contenta de lancer un regard chargé d'une certaine empathie presque effacé au vampire avant de sortir le premier par le portail magique qui s'était ouvert, et avec sa bourse, et sa sacoche qui étaient dorénavant remplies d'or, et de pierres précieuses maintenant à défaut de l'être avec cette pierre...

Puis quand les autres furent sortit la tension ne tarda pas à s'envenimer après un échange de regards entre tout le monde. Écoutant les échanges qui démontrèrent que tout les vampires n'étaient forcément alliés Crissolorio en conclut que ce serait le moment idéal pour s'éclipser discrètement surtout qu'il se souvenait qu'il y avait un dragon qui se balader aux alentours, et qu'il ne valait mieux pas tomber sur lui...

Il se contenta donc de se cacher dans sa cape de brume en s'éloignant calmement, et silencieusement du groupe avant d'entreprendre de redescendre pendant qu'il entendait des bruits d'ailes se rapprochait, et qu'il accéléra le pas aussitôt pour ensuite se mettre à courir quand il était assez éloigné selon-lui du groupe des vampires, et pendant qu'il entendait des hurlements qui n'étaient pas du tout humains...

Au moins s'en était-il sortit vivant se disait-il, et un peu plus riche qu'avant même si c'était sans doute une mauvaise nouvelle pour l'empire que ce qui venait de se passer...

Les deux derniers mirent du temps à se décider à sacrifier enfin un secret, mais il était vrai que ce n'était pas chose aisée. L'Esprit de la Terre les avait bien attrapés en utilisant ce genre d'artifice plutôt qu'une énigme ou toute autre épreuve... Si il n'avait été bilingue, l'ancestral n'aurait sans doute su comment s'en sortir. Au moins était-il débarrassé du problème à présent et ses propres difficultés ne l'empêchaient pas de darder un regard scrutateur sur ceux qui devaient encore parler. Les secrets d'Ambre et ceux de Kylian l'intéressaient aussi prodigieusement les uns que les autres. Bon les premiers étaient peut-être un peu plus agaçants que les seconds..

L'ombre furtive qui passa dans son regard lorsque l'humaine évoqua cet homme qui avait apparemment demandé sa main ne trompait pas. Le vampire n'appréciait pas du tout cette idée, et plus que l'idée il détestait encore plus ce "Pral" dont elle parlait. Mais il eut la sagesse de ne pas émettre le moindre commentaire, sachant qu'il serait sans doute mal reçu. Après tout il n'y avait pas de concurrence à craindre de la part d'un mort, même si la simple évocation de son existence passée risquait à présent de lui hérisser le poil. Rien n'égalait la jalousie d'un vampire, d'autant plus qu'elle prenait ses racines directement dans l'un de leurs travers les plus ancrés qu'était leur instinct de propriété. Au moins un traits qu'ils partageaient tous, à de très rares exceptions près et le prince n'en était pas une. Peut-être même était-il pire que les autres quand il y pensait... Bref.

Elle remua dans ses bras et il songea distraitement à l'ignorer. Elle était bien là... Non ? Apparemment non. Elle bougea à nouveau et il se décida à la déposer à terre en un geste aussi soigneux que réticent. Elle tenait sur ses jambes, mais c'était limite. Aucune chance qu'il ne s'éloigne de plus de quelques centimètres donc, et ses protestations n'y changeraient pas grand chose comme il le lui prouva d'un regard plein d'autorité. Elle devait déjà s'estimer heureuse qu'il ai accepté de la laisser se servir de ses jambes. Voyant qu'elle ne cherchait pas spécialement à s'éloigner, il reporta son attention sur le renégat qui prenait la parole à son tour et mit un instant à comprendre de quel mal il parlait vraiment. C'était tout Kylian ça, de regretter sa condition actuelle pour soupirer après une autre qui l'affaiblirait et finirait par le tuer. Et même... Venait-il vraiment de souhaiter pouvoir vieillir et mourir ? Il était encore plus jeté qu'il n'en avait l'air décidément... Son neurone solitaire était-il trop occupé pour prendre le temps d'imaginer la solution contraire ? La princesse n'était pas immunisée aux dernières nouvelles, il y avait donc moyen de régler ce petit problème de mortalité très facilement. Et de la rendre plus forte en passant, donc plus difficile à utiliser pour le faire souffrir. Evidemment il n'était pas vraiment dans les intérêts de Lorenz d'aller souffler tout ceci à son ennemi, mais il n'avait sans doute pas besoin de lui pour y penser. Alors pourquoi ? Un autre mystère Kylianesque... Et il n'avait fichtrement plus le courage de chercher à les élucider tous. Conclure qu'il avait simplement affaire à un indécrottable imbécile était plus rapide et moins désespérant. Il garda donc un visage impassible, se contentant d'un regard appuyé pour prouver à son éternel ennemi qu'il avait tout de même prit note de son "secret". On ne savait jamais...

L'effort du rebelle fut suffisant comme le prouva la teinte bleue que prit une nouvelle fois le portail. Cette fois c'était réglé, ils allaient pouvoir tous passer. Pour se retrouver où, et dans quel état ? Là était la question... A laquelle devait se rajouter une autre tout aussi épineuse, qu'allait-il se passer entre eux tous une fois qu'ils seraient dehors ? Encore peu de temps auparavant, l'ancestral ne se serait pas inquiété sur ce point. Il pouvait maîtriser à lui seul et sans efforts toute cette clique, mais il devait à présent ajouter une masse d'écailles de belle taille à son équation, et elle en déséquilibrait quelque peu le résultat. Pas en sa faveur évidemment... Calculateur, son regard se porta un moment sur Wallam mais se détourna avant que celui-ci ai pu s'en apercevoir. Le prince réfléchissait, affutant ses armes et pesant atouts et faiblesses de son propre camps. Une chose était certaine, il ne céderait pas sa prise si il avait moyen de faire autrement. Et il y avait toujours moyen de faire autrement, son expérience en disait long sur ce sujet. Lorsqu'ils s'engouffrèrent tous tour à tour dans le passage, il était prêt.

Ils eurent sans doute tous un peu de mal à se réorienter en sortant du passage, ils étaient toujours dans la montagne mais les repères avaient changé ! Après un instant de réflexion, l'ancestral comprit qu'ils avaient tout simplement atterri sur un autre versant. De toutes façons si les choses se déroulaient comme il s'y attendait, il n'aurait sans doute pas besoin de chercher à s'orienter et à retrouver son chemin. Et il n'était pas du genre à se tromper, n'est-ce pas ? La soudaine apparition d'une épée dans la main du renégat le lui prouva, tirant un rictus agressif au vampire vers qui elle était pointée ainsi qu'une remarque sardonique à son prince :

"Eh bien... Notre entente était pourtant si... Parfaite..."

Un sourire moqueur dévoila ses canines mais il ne montait pas jusqu'à ses yeux qui restaient froids et terriblement méprisants. Une épée de dragonnier hein ? Croyait-il que cela et la compagne de route qu'il s'était trouvé suffirait à en faire plus qu'un moins que rien à ses yeux ? D'accord, il représentait à présent un danger sérieux qu'il ne sous estimerait pas, mais de là à lui accorder la moindre estime... Ce n'était d'ailleurs pas comme si il respectait les dragonniers et leurs sacs d'écailles évidemment. Quand il y réfléchissait, force était de constater que cela donnait même plutôt l'effet contraire. Quoi de plus méprisable qu'un être qui ouvre la porte de son propre esprit ? Il n'y avait pas sanctuaire plus précieux selon l'opinion de l'ancestral. Bien qu'il ai un moment caressé l'espoir de voir un dragon éclore pour lui et l'aider dans ses projets lors de l'arrivée de la première génération, c'était à présent un désir bien enterré et il se réjouissait qu'il n'ai pas été assouvit maintenant qu'il comprenait ce que cela impliquait. Il n'aurait probablement pas supporté une chose pareille. Une telle proximité avec un autre être... C'était indécent pour quelqu'un d'aussi renfermé et secret qu'il pouvait l'être.

Les deux ennemis se toisèrent un instant pendant que le garde vampirique se déplaçait lentement, les yeux fixés sur la pointe de l'épée qui suivait ses mouvements. Le renégat ne se laisserait évidemment pas surprendre, et Lorenz était plus que conscient que le temps jouait désormais contre lui. Le dragon était sans doute déjà à leur recherche, il ne s'écoulerait qu'une poignée de minutes, voir de secondes avant qu'il ne soit sur eux. Pas de temps à perdre donc, il devait agir dès maintenant, mais il avait du mal à se résoudre à mettre fin au duel de regards meurtriers qui s'était engagé entre lui et le plus jeune. Finalement, il articula avec un calme inquiétant :

"C'est tentant."

Quoi donc ? C'est ce que criaient les yeux de chacun, moins de l'humain au fait... Où était-il encore passé celui là ? La question traversa l'esprit de l'ancestral sans s'y attarder, tant qu'il n'avait pas la pierre après tout... En cas de besoin il serait encore temps de le retrouver ou de le faire assassiner par un sbire ou un autre. Il préféra rester concentré sur son principal ennemi et lui expliquer sa pensée :

"De te tuer là. Maintenant. Tu es trop idéaliste Wallam, à quoi t'attends tu ? Tu espère vraiment que je vais te remettre la pierre sagement et attendre de voir si cela te suffit ou si tu veux ma non-vie en prime ? Tu peux te lier à qui tu voudras, tu ne me vaincra jamais parce que j'aurai toujours une longueur d'avance sur toi. Je sais qui tu es, et tu ne sais rien de moi. Même les changements qui s'opèrent au coeur de ton être ne m'échappent pas. Mieux, ils m'amusent grandement."

Sans être devin, il était tout de même assez observateur pour voir que les choses ne tournaient pas rond chez son ennemi. Il changeait à une vitesse presque alarmante, cela avait forcément été provoqué par quelque chose même si il n'avait aucune chance de deviner quoi. Ce qui était sur, c'était que le changement en question était en parfaite opposition avec les valeurs qu'avaient toujours défendu Kylian. Quoi de plus drôle que de voir un coeur pur s'obscurir peu à peu ? De plus rassurant aussi... Excuser ses propres fautes était d'autant plus facile lorsqu'on s'apercevait que même les plus droits finissaient invariablement par mettre de l'eau dans leur vin. Ainsi fonctionnait l'existence, des êtres durs pour un monde dur... Que Kylian finisse par contre et accepter cela n'était peut-être pas très bon pour lui car ça le rendrait plus fort, mais l'ironie de la chose l'amusait grandement.

Sèchement, il claqua des doigts vers son garde et celui-ci ne tarda pas à lui remettre la pierre sans jamais quitter des yeux leur adversaire. Le petit objet roula entre les doigts du plus ancien qui fronça les sourcils et siffla entre ses dents :

"Il faut vraiment que j'aime l'histoire... Tu me croira ou non, mais tu es en train de risquer ton existence pour défendre un artefact qui ne possède à priori pas la moindre magie. Bien sur je pourrais toujours te tuer avec en lui faisant traverser tes organes un à un, mais cela prendrait du temps. Et je n'en ai pas. De plus... J'ai toujours estimé que ma parole valait tout autant que la tienne. Dès lors que je décide que la promesse donnée vaut bien un effort..."

Son regard glissa vers l'anneau du rebelle, s'y attardant brièvement avant de revenir vers l'humaine que désignait à présent Kylian. La question le hérissa :

"C'est un risque qui n'existe pas. Je suis capable de défendre ce qui m'appartient, moi."

La lueur acérée qui brillait dans ses prunelles rendait l'acier de son regard plus tranchant encore qu'à son habitude. Il était dangereux en temps normal, mais nul ne savait encore à quel point il pouvait l'être plus lorsqu'il combattait pour ce type d'enjeux. Encore une fois il songea avec satisfaction à l'ignorance totale dans laquelle l'autre baignait à ce sujet, il ne savait rien de lui et c'était une force qu'il comptait exploiter. Mais pas aujourd'hui, pas alors que la malédiction lui vrillait les tempes avec de plus en plus d'intensité. Le dragon était tout proche, trop proche... Le danger devenait trop palpable.

Tuer ou ne pas tuer ? Là était la question... Il n'en avait pas eu l'intention l'instant d'avant, le risque de faire exploser ainsi l'alliance était trop important. Et puis il y avait Ambre aussi... Elle l'avait vu accomplir des atrocités plus terribles encore, mais cela n'aiderait pas sa convalescence et encore moins ses projets à son encontre. Elle risquait même de le repousser plus encore... Mieux valait remettre cela à plus tard. Même si la menace qu'il avait osé faire peser sur elle avait réveillé une froide et terrible colère au sein de son esprit. Cela se payerait, un jour ou l'autre. En attendant, il était temps d'échapper à la douleur de la marque qui brûlait de plus en plus sa nuque et sa joue et qu'il ne repoussait plus qu'avec peine. Tendant la main vers la jeune femme, il se saisit de la sienne sans lui donner d'explications. A l'instant de disparaître et avant que l'autre ne comprenne ses intentions, il énonça :

"J'ai vu ton humaine, j'ai partagé un long moment avec elle. Assez pour savoir qui elle est. Assez pour savoir que tu va la perdre. Qui sait, peut-être qu'au final je finirai par te tuer par miséricorde..."

L'idée aurait dû l'amuser follement mais pas tant que ça au final. Le destin avait fait de lui un être cruel et vindicatif, mais jamais au point de l'amener à souhaiter la même souffrance que celle qu'il avait lui-même vécu à un autre homme. Même si c'était Wallam, ce n'était pas réjouissant pour autant. Le faire souffrir et finalement le tuer, cela ne lui posait aucun problème. Mais le voir vivre l'éternité avec ce vide atroce que laissait le départ volontaire ou non de l'être cher ? Cette sentence là était un peu lourde, même pour lui. Alors oui, si il fallait le tuer par miséricorde autant que par haine profonde, cela lui irait aussi. Il était un être complexe après tout... Sur cette pensée, il tourna la tête vers le garde :

"Tue le avant, si tu le peux."

Ou bien meure... Cela n'avait pas de réelle importance. Le retour au sanctuaire était un sortilège difficile seul, et plus encore à deux. Même un mage tel que lui ne pouvait transporter deux personnes à la fois. Et entre l'autre vampire et Ambre, son choix était tout désigné. D'un coup d'oeil, il eut encore le temps de voir la surprise et la colère du renégat devant sa fuite, mais il ne pouvait rien faire vu l'attaque féroce que l'autre vampire lançait contre lui. Un geste, un seul. Et l'ancestral disparu, entraînant avec lui l'humaine qu'il avait décrétée sienne.

**********
Dans les cavernes vampiriques

"Bienvenue dans mon ex chez-moi..."

Ils avaient atterri dans une vaste caverne meublée avec le goût tout caractéristique de l'ancestral, et rangé avec le soin méticuleux qui le caractérisait tout autant. Il huma l'air distraitement mais n'en tira aucun plaisir, si il avait quitté le royaume vampirique ce n'était pas pour en avoir la nostalgie... Mais au moins cet endroit lui fournissait un sanctuaire sécurisé et bien équipé. Son pas silencieux se dirigea aussitôt vers un renfoncement d'où il sorti plusieurs fioles remplie de sang qu'il conservait magiquement. Il ne porta une à ses lèvres avant d'expliquer :

"Nous allons chevaucher longuement pour retrouver le camp, il n'est pas question de t'affaiblir plus encore. Il doit rester quelques destriers vampiriques au coeur du royaume, Aranwë nous rejoindra de lui-même, il sent ma présence à travers tout le continent. Quand à Medlinya, elle est assez intelligente pour le suivre."

Sentant l'inquiétude de l'humaine, il essuya le sang qui perlait à ses lèvres et s'en approcha, l'enlaçant en un étrange mélange de douceur et de totale fermeté envers toute résistance qu'elle aurait pu esquisser :

"Elle aura la force de faire le chemin, je l'ai choisie parce qu'elle te ressemble. Aussi gracile et fragile d'apparence que forte et obstinée à l'intérieur. Nous irons à leur rencontre si c'est nécessaire."

De sa main, il lui releva le menton afin de l'obliger à plonger dans son regard clair et assuré. Il savait à présent à quel point elle tenait à sa jument, et ce qui lui tenait à coeur devenait instantanément prioritaire à ses yeux. L'animal serait auprès de sa maitresse avant qu'elle n'ai le temps de dire ouf, dusse-t-il pour cela aller la chercher lui-même. Il la fixa un instant, cherchant la confiance qu'il espérait voir naître dans ses yeux mais incapable de deviner ce qu'elle pouvait bien penser puis sourit finalement. Le front contre le sien, il sembla réfléchir un moment mais ses lèvres ne firent qu'effleurer les siennes sans les toucher avant qu'il ne s'éloigne à contrecoeur. La patience avait autant de vertues en amour que dans les combats. Dos tourné, il tourna à demi la tête vers elle en s'approchant de la porte :

"Tu viens ?"

Une fois encore, il s'était montré trop faible. Une fois encore, il avait échoué. Ces pensées revenaient inlassablement s'imprimer dans son esprit alors que s'élevait dans l'air de la montagne le crissement métallique des lames s'entrechoquant à intervalles réguliers. Parade, esquive, contre, un pas sur le côté, attaque en coup de taille, nouvelle esquive, attention à l'équilibre. Kylian combattait mécaniquement, instinctivement, laissant à son corps le soin de se remémorer les quelques leçons d'escrime qu'avaient pu lui enseigner Roëric. Son esprit, lui, n'était concentré que sur la colère qui l'enserrait lentement. Lorenz s'était enfoui, emportant avec lui l'objet de leurs convoitises communes. Une fois encore, le prince noir était parvenu à ses fins. Il avait balayé les efforts du petit rebelle d'un simple revers de la main, comme il aurait écarté un enfant de sa route. Une fois encore, il l'avait piétiné, ridiculisé et s'était amusé de ses menaces.

Pourquoi ? Depuis l'instant où l'ancestral s'était évaporé sous ses yeux pour l'abandonner aux griffes de son sbire, cette incessante question s'était accaparée toute l'attention du renégat vampirique. Pourquoi avait-il été incapable de s'emparer de la pierre ? Pourquoi était-il resté simple spectateur de sa défaite, alors même qu'au plus profond de lui, Kylian avait immédiatement su que Lorenz ne cèderait pas à ses menaces ? Pourquoi avait-il été trop faible pour intervenir ? Et par le Dracos, pourquoi était-il incapable d'apporter des réponses à ses questions ? Il avait pourtant écouté le diamant que lui avait confié Merithyn, encore et encore. Il s'était imprégné du chant que renfermait la pierre et n'avait cependant pas même été capable de s'en servir pour devancer les intentions de son adversaire. Pourquoi ? Que lui manquait-il donc pour être capable de faire ravaler sa fierté à ce monstre qui se jouait de lui comme d'un pantin ?

Sans qu'il en eut vraiment conscience, l'intensité et la rage des coups qu'il portait à son adversaire avaient redoublé à chaque nouvelle question que le vampire s'était infligée, ses postures et son style se teintant progressivement d'une agressivité nouvelle. Les parades et les esquives se firent moins nombreuses à mesure que le renégat multipliait les attaques et les assauts, adoptant une attitude plus offensive que défensive et contraignant son adversaire à reculer peu à peu, à la plus grande surprise de ce dernier. Le regard absent, plongé dans ses réflexions, Kylian voyait sans vraiment le voir le visage agacé d'un sbire vampirique qui semblait confronté à d'inattendues difficultés. Ce détail interpella son attention et à nouveau surgit l'éternelle question : pourquoi ? Lorsqu'il s'était jeté sur lui pour obéir à la volonté de celui qu'il nommait son prince, le guerrier vampire était apparu presque reconnaissant envers la tâche qui lui avait été confiée, comme s'il s'était alors amusé de pouvoir affronter celui qu'il combattait. N'était-ce vraiment qu'un jeu pour lui ? Que faudrait-il donc pour qu'on lui accorda un tant soit peu de sérieux ?

Un lourd rugissement vint interrompre le fil de ces perturbantes pensées en même temps que le combat, les deux adversaires s'immobilisant pour tourner leurs regards vers le sommet enneigé au détour duquel venait d'apparaître l'ombre titanesque de la dragonne plusieurs fois millénaire. Pas même le soutien dont Kylian bénéficiait de la part de l'écailleuse n'avait semblé atteindre l'orgueil du prince noir. Pourquoi ? La réponse lui parvint finalement, sous la forme d'un tintement métallique résonnant à ses pieds. Le regard clair du rebelle revint aussitôt se poser sur la silhouette de son adversaire du moment, lequel venait de jeter son épée au sol, un sourire narquois aux lèvres tandis qu'il proclamait avec une assurance parfaitement déstabilisante qu'il se rendait.

« Tu te rends ? »

« J'ai fais ce que Lorenz attendait de moi : il est loin d'ici avec la pierre, je ne vais pas me faire tuer par une dragonne pour rien. »

C'était donc aussi simple que cela. Il jetait son arme et se rendait convaincu que le renégat épargnerait sa vie. Il craignait Skade, mais il ne le redoutait pas, lui. Il le considérait comme un faible, une simple distraction amusante de médiocrité, un enfant qui ne méritait que son mépris. Aussi simple que cela. Mâchoires crispées et traits figés, Kylian releva les yeux vers le visage suffisant de son adversaire vaincu tandis que ses doigts se resserraient lentement sur le pommeau de l'épée qu'il tenait toujours dans sa main droite, lame baissée vers le sol. L'autre soutint son regard sans vaciller : toujours drapé d'une arrogante tranquillité, il semblait attendre patiemment que le rebelle lui intima l'ordre de déguerpir. Il ne faisait aucun doute pour lui que le faible Kylian Wallam n'exécuterait pas un prisonnier désarmé...

« Tu as eu tort. »

Sa voix n'avait été qu'un sombre murmure, qu'il n'était pas même persuadé d'avoir prononcé. Sa conscience lui donna l'impression de lui échapper provisoirement tandis que d'un geste sec, le rebelle vampirique empoignait son prisonnier, arrachant à ce dernier un grognement sec qui se mua bientôt en un feulement rauque. Mue par une froide détermination, l'étincelante épée du dragonnier venait de s'enfoncer dans les chairs de son prisonnier pour le transpercer de part en part. Les regards des deux vampires se croisèrent et la lueur arrogante dans les yeux du second s'éteignit pour laisser place à une stupéfaction douloureuse. La lame ensanglantée du renégat glissa ensuite lentement hors de la plaie avant de s'enfoncer de nouveau dans le corps meurtri pour y inscrire une seconde blessure, puis une troisième, et une quatrième. Kylian n'agissait plus désormais que pour répondre à l'irrépressible besoin de sang qui s'était emparé de lui, comme si son corps avait brutalement été doté d'une volonté propre et décidé de faire voler en éclat les remparts de ses scrupules. Ce n'est que lorsque son épée eut tracé son chemin à travers le corps du sbire vampirique pour la cinquième fois qu'il consentit à relâcher sa prise et à la laisser s'effondrer sur le sol rocheux dont elle ne se relèverait plus. Derrière eux, Skade venait de se poser non loin de la scène.

Sans un mot, l'apprenti-dragonnier essuya sa lame sur le pantalon du vaincu puis la rengaina au fourreau, non sans difficulté toutefois. Sa main tremblait. En fait, tout son corps était secoué de tremblements qui rendaient ses gestes mal assurés. Son esprit n'était pas mieux loti et succombait lentement à la tempête d'un amer ressentiment qui ne l'agaçait que plus et plus encore. Après un dernier regard sur la silhouette inanimée gisant à ses pieds, Kylian se retourna et se dirigea d'un pas rapide vers sa future liée. L'écailleuse millénaire baissa le museau dans sa direction en une muette requête d'explications à laquelle le vampire ne répondit que quelques mots crachés avec plus d'agressivité qu'il n'aurait souhaité en montrer :

« Qu'est-ce qu'il y a ? C'était un être mauvais, Armanda se portera beaucoup mieux sans lui ! »

D'un bond souple, le dragonnier vampire se hissa en direction des lanières de cuir qui devaient faciliter son ascension et gagna rapidement la selle qui ornait l'armure légendaire de la Mère des Tempêtes.

« Lorenz s'est échappé avec la pierre, ramène moi à Althaïa. »

Il y eut un bref silence avant que la voix du rebelle ne consentit à s'adoucir pour ajouter :

« S'il te plaît... »

Intervention du MDJ : fin du RP, jet du dé récompense.

Cette intrigue est terminée, merci de votre participation et de votre implication tout au long de cette série d'aventure ! Un XP supplémentaire (en plus de celui qui sanctionne la participation à une intrigue) sera distribué à chacun d'entre vous afin de récompenser la qualité de vos RPs et votre très bon rythme

En parallèle, ce dé "récompense" vous permettra de gagner un lot aléatoire. Il sera désormais tiré à la fin de chaque quête ou de chaque intrigue pour tous les participants actifs d'un bout à l'autre. Inutile de trop croiser les doigts, toutes les faces sont gagnantes ^^

• Dé 1 : Crissolorio
  
• Dé 2 : Lorenz
  
• Dé 3 : Ambre
  
• Dé 4 : Kylian

Le membre 'Lorenz Wintel' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

'Récompense' :

Vous pouvez ajouter vos lots dans vos inventaires Ambre et Kylian, ou bien aller jeter un oeil à la boutique des enchantements (ou encore au marché des ingrédients)

Bon jeu !