Alors qu'il était en train d'assommer Achroma des derniers potins de l'endroit, de ce qu'il avait pu observer ou encore entendu, voilà que le blond stoppa le flot de paroles du roux en lui confiant qu'une jeune elfe avait besoin de lui parler d'urgence d'un projet qui tenait à cœur au vieux vampire et il lui était d'une importance capitale que son élève lui promette de la rencontre pour discuter de ce truc si important. Pourtant, Kedrildan répugnait à laisser son maître et pilier seul avec son « fils », de peur qu'il lui arrive quelque chose ou encore que ce gamin irresponsable agravent plus qu'autre chose la situation précaire dans laquelle se trouvait Achroma qui était déjà bien souffrant comme ça. Il avait d'ailleurs essayé plus d'une fois de l'éjecter de l'endroit mais le blond ne voulait pas qu'ils se battent, du moins en se présence parce que les cris et protestations glapissantes enflammaient son mal de tête, et ensuite parce que ce parasite semblait faire corps avec le lit en bois tellement il n'arrivait pas à l'en arracher.

Ce qu'il pouvait être agaçant ce microbe ! C'était son Achroma à lui ! Et à personne d'autre ! Et non il n'était pas jaloux ou possessif ! C'était juste que personne d'autre que le roux était digne de ce vampire exceptionnel !

Grrr... Obéissant bien que fulminant en silence tout en offrant des œillades noires à Zaphirel qui arborait un air triomphale tout en le fixant d'un air goguenard, Kedrildan finit par abdiquer et quitta la pièce d'un pas rageur, attendant dans sa chambre que cette fameuse elfe envoie un coursier le chercher pour savoir le fin fond de cette histoire. Une missive qui arriva bien vite et le roux se mit à la déchiffrer en prenant son temps même s'il avait plus d'aisance qu'au début de son apprentissage de la lecture, avant de se lever. Inutile de demander à Trissi, elle était présentement en train de roucouler avec... Tout ce qu'elle lui autorisa à voir ce fut un éclat doré avant de le renvoyer sèchement dans son coin. Si elle continuait de cette manière, elle allait finir par être enceinte avant la fin de la guerre contre les Alayens. Tsss... Attrapant sa bourse qu'il mit à sa taille avant de lacer correctement ses bottes en cuir, le roux bouda encore plus en se souvenant qu'il avait confié dagues et épées au Seigneur Merithyn avant de se lever quand le soleil commença à décliner à l'horizon : il était l'heure d'aller au rendez-vous avec cette... Euh son nom... Une seconde... Ah ! Voilà, avec cette Lyroë Tuwiel, dragonnier elfique de son état.

Bon bah allons-y alors...

Sortant du sanctuaire du feu, il suivit les instructions du mot pour atterrir finalement dans une petite plaine sans fioritures, apercevant la jeune femme qui le vit elle aussi et se mit à le saluer.

- Bonsoir, la salua-t-il à son tour, la regardant d'un air dubitatif en croisant les bras, s'adossant à un arbre en restant couvert par leur ombre histoire d'éviter les derniers rayons du soleil. Mon maître, sire Achroma, m'a prévenu que vous vouliez me parler d'une chose importante et j'ai reçu votre message, donc... En quoi puis-je vous aider ? Finit-il par lui dire avec curiosité, allant droit au but pour ne pas passer par les ronds de jambes, pas le temps pour ce genre de choses futiles et humiliantes.

Il était venu pour Achroma, parce qu'il le voulait lui et c'est tout : si ça n'avait tenu qu'à lui, il aurait continué ses démarches pour repousser le bébé loin de sa place qui était la sienne afin de veiller et protéger le blond. Mais l'air grave et curieux de son joli petit minois l'avait poussé à le laisser en compagnie de son fils pour aller voir ce que lui voulait cette dragonnière elfique. C'était donc sous l'ombre bienfaitrice des arbres qu'il la regardait avec des yeux froid où les lucioles acides de la curiosité le rendant presque docile et inoffensif. Pour l'instant...

- Ne me remerciez pas pour si peu, elfe : que me voulez-vous exactement ? Votre message sibyllin n'a pas été des plus explicites même si je me doute que mon maître en sache davantage sur le pourquoi de cette réunion, dit-il tranquillement sur un ton distant, croisant les bras en s'adossant contre un arbre, en apparence tranquille et détendu.

Elle aussi elle avait l'air grave... Une catastrophe bien pire que l'invasion des Alayens ? Mouais, il n'y avait pas assez de souci en ligne de mire pour qu'elle ait un air si... Si... Si grave, oui.

- Si vous me dites ça c'est parce que vous sous-entendez que vous ne voulez pas que le seigneur Lorenz n'ait aucun écho de cette histoire, de cette rencontre, n'est-ce pas ?... Soit, je n'ai d'allégeance qu'auprès de ma dragonne Trissi et mon maître, sire Achroma, alors parlez : je vous écoute, hocha-t-il la tête en attrapant une boucle de ses cheveux qu'il s'amusa à tortiller et enrouler autour de ses grands doigts pour jouer avec, cela l'aidait à se concentrer.

Et puis elle ouvrit ses lèvres pulpeuses d'elfes pour déverser un flot de parole fleurit et alambiqués : c'est fou le nombre de personne qui se sentait l'envie, le besoin, de faire de longue phrases diplomatique. Était-ce si dur que ça que d'aller droit au but avec des mots simples et franc ? Hmpf àlàlàlà ces elfes... Levant les yeux au ciel, Kedrildan ne rompit pas pour autant sa concentration, absorbant chacune de ses paroles et les digérant intellectuellement pour n'ingérer que l'essentiel de ce qu'elle voulait lui faire avaler. Au final... Rien parce qu'elle s'arrêta avant la fin de sa probable proposition.

- Je ne veux pas paraître indifférent à votre souffrance et urgence, dragonnière, mais parler du passé pour illustrer le présent ne sert à rien du tout, soupira-t-il en posant un regard presque ennuyé sur elle, penchant la tête sur le côté. L'important est de voir ce qu'il se passe à présent pour prendre des mesures afin d'avoir un meilleur avenir. Le seul souci c'est que vous n'avez pas parler clairement de ce que vous attendez de moi, de ce que vous aimeriez que j'exécute pour combler ce que vous recherchez : caché sous le miel des images et des parades, vous noyez l'essence de vos paroles alors que nous, vampires, avons un esprit simple et des manières directs, continua-t-il avec fermeté. Vous parlez de me voir comme dragonnier et non vampire alors cesser la diplomatie elfique qui coule dans votre sang pour allez droit au but, nous n'avons plus le temps pour des jeux de jambes avec cette invasion qui fleurit aux portes du domaine des baptistrels. Alors avec une structure de phrase de base, sujet-verbe-complément, expliquez-moi ce que vous voulez de moi et de tous les dragonniers qui peuplent Armanda, conclut-t-il avec détermination, plissant le nez.

Prendre des gants ? La ménager et faire un effort diplomatique ? Non. Déjà, cela ne ressemblait pas à Kedrildan et en plus les temps étaient suffisamment dur comme ça pour en plus rajouter avec des ronds de jambes tout à fait inutile.

Il avait beau paraître rustre jusqu'à l'os mais au moins il était franc du collier et direct dans ce qu'il voulait entendre. Et elle avec ses ronds de jambes... Ca lui donnait le tournis au pauvre rouquin ! Pourquoi c'était si dur pour un elfe de faire un simple sujet-verbe-complément ? Cela n'allait tout de même pas lui trouer la langue de parler comme s'il avait un débile profond en guise d'interlocuteur ! Fallait croire qu'il avait peur d'attraper de l'urticaire... Alàlàlà. Levant les yeux au ciel alors qu'elle recommençait son style ampoulé alors qu'il lui avait dit d'aller au plus simple et strict minimum, Kedrildan grogna discrètement en se pinçant l'arrête du nez. Bon bah puisqu'elle avait l'impression d'avaler de l'acide à parler normalement, autant que ce soit à lui de le faire étant donné qu'il était déjà mort !

- Un vampire n'a pas de passé d'abord : quand il naît, il oublie tout pour n'avoir que le présent en guise d'histoire et point de repère alors je doute que votre remarque sois pertinente pour les personnes de notre race, commenta-t-il tranquillement, un poil exaspéré quand même : il n'arrivait vraiment pas à comprendre le pourquoi d'une telle nécessité esthétique à propos du dialogue.

De vrai snob les elfes di diou ! Et puis où avait-elle vu qu'elle lui avait expliqué qu'elle souhaitait une union entre tous les dragonniers ? Il était peut-être con mais fallait pas le prendre pour une truite non plus hein ! Agaçant, ce que ces mangeurs de salades pouvaient être agaçant ! Vive la simplicité franche et coupante des vampires et puis c'est tout ! Argh ! Pas s'énerver... On se calme, on a promit d'être sage à Achroma donc on va être docile... Voilà... Et puis il était convaincu qu'elle faisait exprès de ne pas mettre tous les mots nécessaire à sa compréhension !

- Bon, puisque vous commencez à me crisper et que vous semblez être incapable de faire un phrase courte et essentiel, je vais tâcher de la faire à votre place, elfe : vous souhaitez que tous les dragonniers s'unissent en une caste à part, comme une équivalence de race c'est ça ? Dit-il en posant son regard vide sur elle, haussant un sourcil parfaitement épilé. Ce n'est pas plus simple dis de cette manière ou vous aviez trop peur de faire une poussée de bouton en utilisant le langage des roturiers humains ? S'irrita-t-il en plissant le nez.

Bon, puisque nous avons à peu près réussit à deviner le pourquoi de son invitation à son égard... Soyons vampirique jusqu'à l'os.

- Si j'accède à votre requête, elfe, que gagnerais-je dans cette histoire ? Dans mon éternité, seuls deux êtres ont de l'importance : mon maître et ma dragonne, je n'en ai rien à fiche du reste, ni de la vie, ni de l'équilibre des peuples, ni même d'Armanda, expliqua-t-il froidement. Je n'agis, je ne parle, je ne pense que pour eux et leurs intérêts, leurs plaisirs et leurs satisfactions alors... Ce que vous dites ne me touche pas, il n'y a aucun écho dans votre discours qui n'émeut la nature qui est la mienne. Je vous redemande donc, que gagnerais-je à rejoindre votre « race unie » de dragonniers ? Demanda-t-il en relevant le menton, sans la quitter un seul instant du regard.

Et bien il semblait qu'elle n'appréciait pas du tout son côté franc du collier la petite mangeuse de salade... Kedrildan avait même l'impression de voir le bout de ses petites oreilles pointues rougir de colère alors qu'elle plissait son regard sous la frustration d'une bêtise sans manière comme le vampire qu'elle avait sous les yeux. Et bien ma petite, le méchant dent pointu vous agace ? Bah faut faire avec !

- Hier est toujours le passé, ce que je viens de vous dire et ce que vous me dites appartient déjà au passé, elfe. Et nous pouvons aller encore bien plus loin si vous le souhaitez car je parle déjà au passé : l'instant présent est un moment qui échappe à tous à la seconde même, au millième de seconde qui s'écoule nous sommes déjà dans le passé, dit-il tranquillement, le visage froid et vide de toute émotion : philosophons alors.

Et puis sa vie vampirique, parlons-en... Une vie de fuite et de crainte, de jappement faussement hargneux pour faire fuir toute menace potentielle qui pourrait faciliter sa survie dans son éternité si longue. Une vie de musaraigne en détresse qu'il ne voulait pas se rappeler, pas alors qu'il était en train de se métamorphoser en mangouste de combat et qu'il ne respirait plus (enfin façon de parler hein!) que pour Trissi et Achroma. En tout cas, en plus de le prendre pour un abrutit, elle fulminait littéralement de rage... Bon dans un sens c'était tout simplement jouissif parce que déranger les elfes figés dans leur immobilité et leur absence de frémissement physique était un réel plaisir ; mais bon, à côté, bah les choses n'avançaient pas vraiment entre eux. Au pire, ils s'horripilaient mutuellement et finiraient par se quitter dans un blanc pesant jusqu'à ce que son blond de maître apprenne l'histoire et lui tire les oreilles pour lui apprendre à n'a pas avoir été sage alors qu'il le lui avait demandé.

- Je ne joue pas aux paons vampiriques mais je vous exprime simplement un fait : je n'ai de raison d'existence en ces lieux que pour Achroma et Trissi, personne d'autre. Est-ce clair ? Est-ce que vous comprenez, elfe, ce que cela implique ? C'est pour mon maître que je suis ici, pas pour vous ou pour je ne sais quelle noble cause : le monde des vampires est un monde sans pitié où seul le plus fort s'en sort et les faibles se font égorger sans sommation sauf si les plus forts ont envie de s'amuser, déclara-t-il froidement, les yeux durs et tranchants.

Que croyait-elle ? Etait-ce si atroce que ça d'aligner trois mots pour dire vraiment le fond de sa pensée ? Droit, direct, simple, l'essentiel et la vérité, voilà tout ce qui comptait et c'était si abominable que ça ?! Merde à la fin ! Saloperie d'elfe à la con ! On se calme, on se calme... Penser à Achroma avait le don de le détendre et savoir la punition qu'il risquait de subir à la moindre connerie refroidirait n'importe quelle ardeur. Et puis, ce qu'elle avait dit eu l'importance d'attirer son attention sur le sujet : protéger la vie de sa liée et du vampire qui avait eu la gentillesse de détruire son éternité et son existence pour le rouquin.

- Je me rappelle un peu de ma première mort... De la souffrance aiguë, des larmes d'impuissance et une solitude si froide, si glacée... Mourir n'est pas une expérience des plus agréables et si effectivement vous dites que perdre sa moitié d'âme est pire que mourir, alors je veux bien vous croire sans aucune difficulté : la première expérience fut cuisante... Dit-il pensivement en jouant avec une de ses boucles. Très bien, pour la vie de ma liée et de mon maître, pour eux deux, je veux bien vous écouter et, si effectivement nous unir tous les uns et les autres permettraient que les deux lumières de mon existence brille toujours et pour longtemps, alors je m'unirais à vous et cette caste, guilde, secte ou je ne sais quoi, de dragonnier, exprima-t-il avec fermeté et détermination. Pour eux deux, je ferais tout ce qu'il y a de possible et nécessaire afin de leur assurer une éternité paisible et sans heurt, sans qu'on ne leur arrache l'existence.

Pour Achroma et Trissi... Oui, pour eux deux et rien que eux deux, Kedrildan s'enchaînerait aux autres dragonniers pour cette caste si chère au cœur de cette elfe si rigide et frigide.