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Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène]

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MessageSujet: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeMer 4 Sep 2013 - 20:45

Troisième jour avant les négociations
Matinée



Il s'était allongé à même l'herbe moelleuse et douce comme un véritable sommier de plumes. Une couche plus moelleuse que toutes celles qu'il avait connu depuis des années. Il n'était guère habituer à tant de confort, aussi singulier fut-il, et bien davantage à la dure vie de camp, qu'il s'agisse du camp vampirique ou tout simplement des camps d'errance de ses camarades dans l'inconnu des plaines du sud. Étrange quand on y pensait, ce simple cercle d'herbes était aussi appréciable que le plus luxueux des lits... un remerciement dû aux elfes il supposait, et il ne les en priverait nullement si il pouvait en faire bénéficier son dos un moment. Tête sur une formation de mousses odorantes, ses longs cheveux étalés autour de lui comme un drapé luisant sous le soleil, il offrait son corps à la lumière de l'astre diurne, se laissant lentement réchauffé et éveillé par la caresse des longs doigts d'or. Même si il était une créature de la nuit, il avait toujours aimé le soleil, l'éclat de cette couronne incandescente incendiant les cieux de sa majesté d'un blanc impétueux, qui respirait la vie, qui respirait la santé et un espoir immuable, inscrit là depuis le commencement. Très tôt dans sa non-vie, il s'était forcé à sortir au soleil, à endurer le tourment de sa race et à le défier, à faire sienne cette chaleur flamboyante... et depuis, il ne ressentait plus la moindre perte de puissance, vivant tout aussi bien au soleil que dans les ténèbres. C'était un choix affecté, mais il avait adoré retrouver les journées d'Armanda, qui au final lui avait énormément manquées. C'était plus que le simple confort d'une étreinte chaleureuse se propageant lentement dans son corps mort, le piquetant de milliers de caresses de phalènes impalpables, c'était une vibration de bien-être s'enfonçant jusque dans l'abysse de l'âme qu'il pensait avoir perdu, le transformant intérieurement en plante héliotrope, toute entière tournée vers cet éclat qui chassait les ténèbres de son esprit. Depuis la nuit précédente il avait en effet été assaillit de terribles visions, et de sentiments chaotiques et déconcertant...sans doute était-ce là le contre-coup de sa rencontre avec l'elfe du nom d'Eliowir, ou bien le pur fruit du hasard, mais le dragon enfouit en lui, venimeux et glacé, avait redoublé d'ardeur et de détermination à le torturer...

Toute cette organisation n'est que mascarade. Ils sont ligués contre toi ! Ils veulent ta perte ! Ne peux-tu voir ? Ils jouent ton jeu pour t'aveugler et te conduire au désastre. Aucun d'eux ne te mérite, pas plus cet elfe pitoyable que ta propre famille... Jamais tu n'aurais dû confier tes messages à Isendal, il les a transmit à Lorenz, pour sûr ! Tu n'es plus rien, le Double Royal t'as réduit à un simple pion, jamais les anciens ne te considéreront de nouveau comme leurs chef, tu ne mérites plus cet honneur, toi qui a offert ton cou au collier de Lorenz... Les anciens ne respectent pas les esclaves, aussi puissants soient-ils, que croit-tu être ? Il nous a transformé en esclave ! Nous devons nous libérer ! Nous devons nous battre ! Nous sommes le véritable prince des vampires, jamais nous ne devrions subir ce genre de choses ! Oui nous devons agir... mais nous ne pouvons demander de l'aide, à personne ! Ils ne font que te créer des faiblesses, tu m'as moi ! Et tu as le souvenir d'Adryne, tu as la rancune de sa mort, c'est bien assez ! Regarde ce que Kedrildan t'as fait ! Par sa stupidité tu te retrouves enchaîné ! Méfiance ! Solitude ! Ce n'est qu'ainsi que tu....
Oui... il en avait assez. Assez de ces sifflements constant, de ce mal de vivre, et ces doutes que le dragon exacerbait, s'enroulant avec lenteur autour de ses organes pour le compresser et accoucher d'une flamme de doute permanente, immuable et impérissable. Il en mourrait fatalement, si non physiquement, du moins socialement, intellectuellement... et à vrai dire, pour un vampire, cela revenait à une morte totale, surtout à son niveau. Et bien qu'il fut si grandement affligé, il ne parvenait toujours pas à saisir exactement comment et quand le dragon s'était éveillé, sinistre présence qu'il avait presque eut l'audace d'oublier, des siècles après ses premiers méfaits. Bien mal lui en avait prit, il était désormais faible et sans défense contre sa menace... et son plus grand ennemi était, une fois de plus, ses propres ténèbres occultées.

Il n'avait pas eut tord en affirmant à Isendal que les jeunes se méprenaient en pensant qu'il était un être bon, uniquement, et foncièrement vertueux. Oh la vertu était sienne, pas de doutes possibles, et pourtant... Il était le créateur de bien des horreurs, du Double Royal à la Faim sans fin, il était le père d'un pan tout entier des arts sombres d'autrefois, perdu dans les mémoires et que seuls conservaient les anciens. Il avait juré de ne jamais plus se servir de ses... capacités. Sur l'amour de sa mère, sur le sang qu'il avait odieusement versé, jamais plus il ne devait user de tels sortilèges quand bien même des individus tels que Lorenz Wintel le méritaient. Plutôt la mort que de couvrir à nouveau de honte, plutôt s'offrir corps et âme au néant plutôt que de s'entendre de nouveau parler de la danse macabre. D'ailleurs... peut-être était-ce la raison de son mal être, le fait qu'il ai discuté de tout cela avec Eliowir ? Sans doute, y penser lui remuait les entrailles à chaque fois. Il ne voulait plus y penser, et pourtant cela traînait en lui comme le goût de la bile... une souillure impossible à enlever en totalité. Et Dracos que ce lieu était pourtant emprunt de pureté. D'une grande puissance, mais d'une grande simplicité. Cela aidait... un peu, guère plus qu'une caresse aqueuse sur un océan d'huile mais c'était déjà beaucoup. Là, les yeux fermés, il écoutait battre le cœur du monde, faisant fi de tout, et pourtant aussi vulnérable qu'un nouveau né.  Depuis combien de temps était-il allongé ? Il n'en savait rien, le temps ne comptait guère pour des créatures immortelles... et la saveur d'un maigre réconfort ne comptait pas le nombre d'heures qu'elle nécessitait. La terre l'acceptait, du moins le pensait-il, un peu.... et c'était un grand honneur que de partager quelques instants de cette merveilleuse harmonie avec le monde. Une harmonie qui lui permit d'ailleurs de sentir l'approche d'une personne spéciale et chère à son cœur. Souriant légèrement, il vint rompre le silence douillet des lieux.

« Isendal aurait-il mouchardé auprès de vous ô ma tendre mère, ou bien est-ce simplement votre instinct qui vous a conduit ici ?  »

Tournant la tête sans pour autant se relever, il l'observa, belle, majestueuse, blanche figure de songe ancien, dont la vue lui étreignait le cœur de maints sentiments. Son amour pour elle était plus fort que tout, et jamais il ne s'était tarit au cours des éons passés. Cette pure statue de marbre gemmée, couleur d'empyrée, était l'une des seules capables de le réchauffer jusqu'au tréfonds de l'âme tant elle était belle. Belle... plus que le physique, elle était belle à l'intérieur à ses yeux émerveillés. D'un souffle tremblant, il vida ses poumons, alors que ses yeux s'embuaient de plaisir et qu'il tendait la main vers elle, telle une peinture antique, cosmogonique, du fils déchu cherchant l'étreinte salvatrice des bras aimants.

« Vous êtes la première vision de ma nouvelle vie ma mère, une étoile qui m'a éblouit alors que je n'étais qu'un jeune vampire.... si un seul de mes nombreux vœux devait réellement venir à se réaliser, je souhaite que vous soyez également mon ultime vision avant le trépas véritable  »
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeMar 10 Sep 2013 - 1:27



    Les elfes avaient bien des défauts, mais il fallait reconnaître que leurs demeures et leur domaine était féeriques et d'un confort exquis. En dépit de toutes ces qualités extraordinaires et sortant de tous les standards, on s'y sentait à l'étroit, et l'on pouvait ressentir un besoin pressant et urgent de s'évader, l'espace de quelques heures. Les négociations rendaient l'atmosphère tendue, car, malgré le respect des délégations les unes envers les autres, il était évident que les vieilles rancunes n'étaient oubliées, et que la méfiance demeurait le maître-mot. Tout cela avait fatigué Cyrène bien plus qu'elle ne souhaitait l'avouer. La constante tension était malsaine, éprouvante et lui mettait ses nerfs à vif. Son immense expérience, issue de son vécu aussi fourni que séculaire, ne lui assurait pas la même approche que si elle avait encore eu la fougue de la jeunesse. Conserver toute sa concentration durant les présentations, l'accueil par les elfes, puis quelques unes des discussions qu'elle avait été obligée d'avoir lui siphonnait son énergie avec avidité. Et, après de longues palabres exténuantes, n'aboutissant évidemment sur rien de concret ni même de définitif, la journée s'achevait pour tous, leur autorisant un repos salvateur avant la reprise durant la soirée. Ce rythme était épouvantable, car au final, la fatigue annihilait la lucidité, et le ton finissait invariablement par monter de quelques tons, avant que tous ne se séparent pour la nuit. Cyrène considérait toute cette perte de temps d'un oeil externe, car elle ne participait guère activement à cela. Au mieux donnait-elle son avis de temps à autres, intervenant sporadiquement dans les discussions. La plupart de ses arguments étaient écouté dans une mauvaise grâce en premier lieu, puis avec bien plus d'attention dans un second. Dans le fait, elle n'exposait que les faits que son expérience lui faisait remarquer plus aisément. Son âge avancé lui octroyait en outre un sens des priorités bien différent, permettant d'envisager les problèmes sous un angle nouveau.

    Par chance, elle avait réussi à s'enfuir de ce monde infernal qu'était les discussions précédant les négociations. Pour des débuts en politique, elle n'avait guère été épargnée par le destin, qui avait choisi cet instant pour lancer le plus grand conflit qu'Armanda avait connu depuis des lustres. Malgré toute sa bonne volonté, ces intrigues, discussions animées allant parfois jusqu'aux complots ne lui étaient lui agréables ni intéressantes, bien au contraire. C'était un mal nécessaire, rien de plus et rien de moins, qu'elle devait endurer pour la bonne cause. En réalité, l'avenir d'Armanda lui importait moins que la seule et unique raison qui la poussait encore à vivre. En habile personnage qu'elle était, Velours grappillait des informations partout où elle le pouvait, questionnant la bonne personne au bon moment. C'était là extraordinairement délicat, et toute indiscrétion pouvait arriver jusqu'aux oreilles du maléfique souverain. Et finalement, elle avait obtenu ce qu'elle avait espéré depuis si longtemps, un instant de solitude, où il s'était isolé.

    Achroma...

    Ce nom résonnait à ses oreilles de bien des manières, mais toutes étaient similaires, une affection sans fin étreignit son coeur de mère. Il n'était pas son fils biologique, bien malheureusement, mais ce qu'elle ressentait pour celui qui, outre son statut de fils, avait gagné le statut d'héritier aux yeux de Velours. Il avait été le centre de sa propre vie des années durant, passées à le former, à l'aimer et le choyer. Pour elle, le temps s'était ralenti durant cette heureuse période, où elle avait joui de la compagnie d'êtres aimés, qui l'accompagnaient dans sa non-vie. Avec le recul de l'expérience, Cyrène considéra cette période comme la plus heureuse de sa vie. Le dragonnier avait été un apprenti extrêmement doué et rempli de respect. Velours était fière de son fils. Elle avait placé tant d'espoirs en lui, et il ne l'avait guère déçue. Achroma, auteur de maints exploits et de dizaines de haut-faits. Un millénaire plus tard, de terribles événements avait survenu, à un moment où Armanda n'en avait guère besoin. Cette hérésie qu'était le sort du double royal hérissait encore les cheveux de Cyrène durant les quelques heures où elle s'autorisait du repos, allongée sur un divan. Voir l'avenir de son fils être calciné par une éternité de servitude, voilà qui était bouleversant.

    Il était là, allongé sur le sol, ses cheveux en couronne argentée auréolant son visage angélique d'une blancheur de nacre. Cette vue rappela à Velours de doux souvenirs, issus d'un temps oublié de tous sauf de rares êtres, si vieux qu'ils en défiaient le temps lui même. Cyrène son coeur se serrer. Son fils, chéri à tel point qu'elle en oubliait parfois les convenances. Elle s'approcha doucement de lui, lentement, puis s'assit non lui, attrapant la main tendue, délicatement, puis l'embrassant avec une affection non feinte. Achroma représentait son héritage, toute l'expérience qu'elle transmettrait aux générations futures. Car même si tout deux étaient vampires et pouvaient subsister éternellement, Velours était persuadée qu'il lui survivrait, elle y comptait.

    " - Ce n'est ni l'un ni l'autre. En vérité, seule compte l'affection d'une mère aimante non ? " Elle sourit légèrement, fugace éclair de joie sur son visage séculaire, sur lequel le temps et la vieillesse avaient dû renoncer à apposer leurs marques. " Je saurai te retrouver, quoi qu'il arrive."

    Achroma...

    Elle le regarda, les larmes aux yeux, puis ne put se retenir plus longtemps. En un éclair, elle était agenouillée près de lui, le serrant contre elle, sanglotant sur son épaule, joie et soulagement de l'avoir retrouvé mêlés à la tristesse de son avenir incertain et aux regrets des siècles passés. Un millénaire s'était écoulé depuis leur dernière discussion privée. Une éternité pour une mère aimante. Elle sourit faiblement dans le cou de son fils adoré, rougissait légèrement à ses flatteries. Elle recula un peu et saisit son visage de ses mains blanches.

    " - Tu sais, tu es resté un vil flatteur Achroma ! " Cyrène roucoula puis lui déposa un baiser sur la joue, comme elle le faisait onze siècles auparavant. Le souvenir la fit rayonner, alors qu'elle écrasait ses larmes d'un geste déterminé. " Je suis ta première vision, mais je souhaite être cette étoile que tu pourras regarder, et utiliser pour te guider et retrouver ta demeure, revenir un jour parmi les tiens, ta famille. Tu m'as tellement manqué."

    Elle fit une courte pause, plus sérieuse. Son regard d'Ambre illuminé par la tendresse qu'elle éprouvait à l'encontre du dragonnier.

    " - Ne dis pas de telles choses, pas devant ta mère. Tu dois me survivre et enseigner ce que je t'ai moi-même appris, promets-le moi ! Et ne t'avise pas de faire les bêtises que tu faisais alors que tu n'étais qu'un enfant joyeux et souriant !" Dit Velours rapidement. Elle lui fit un clin d'oeil complice.

    Son Achroma lui avait causé bien des soucis, des troubles terribles et, en définitive, l'avait impliquée dans la politique de manière involontaire. Cependant, elle ne lui en voulait pas le moins du monde, elle ne pouvait pas. Une mère pardonnait tout à son fils, elle n'y coupait pas. De ses yeux couleur de miel, elle dévisageait Achroma avec douceur, la courbe de son nez et de ses lèvres, le contour de son menton. Il n'avait pas changé en un millénaire. Tout au plus s'était-il embelli, avec quelques très légères évolutions de sa morphologie. Cyrène fut amusée, car, à sa manière, il lui ressemblait aussi. Elle se souvint de quelque chose.

    " - D'ailleurs, j'ai un présent pour toi... "

    D'un mouvement ample, elle fit tomber une petite bourse de tissu carmin, assorti à la robe qu'elle portait. Elle la luit tendi avec un sourire rempli de tendresse. C'était une surprise. A l'intérieur se trouvait un collier d'argent, mince chaînette ressemblant à celle que Cyrène portait. Les mailles étaient torsadées, et le pendentif, une pierre amazonite, avait été en forme d'écaille avec brio par Velours. La pierre, d'un vert d'eau, avait été choisie pour l'unique imperfection qu'elle comprenait, une zébrure blanche courant en diagonale à sa surface. L'alliance neige et jade du bijou avaient, à l'époque de sa découverte, rappelé avec émotion le visage du fils chéri. La pierre avait une teinte similaire aux iris d'Achroma. Avec impatience, Cyrène l'encouragea à ouvrir la bourse, d'un geste bien peu distingué.

    " - J'espère que cela te plaira ! Considère qu'il s'agit d'un présent d'une mère aimante, je n'ai besoin d'un autre prétexte pour chérir mon unique fils, non ? "

    La dame blanche à la parure écarlate scruta le visage de son fils, légèrement anxieuse, mais émerveillée par la sagesse qu'il semblait détenir, et surtout, ravie qu'il soit, malgré tout, demeuré cet enfant si sentimental et touchant qu'elle connaissait. Il avait été son rayon de soleil, celui qui faisait battre son coeur et qui rythmait son quotidien, il était aujourd'hui un vampire en pleine possession de ses moyens, un être plus puissant qu'elle ne l'était. Pour la première fois, elle ressentit de l'admiration pour son fils, car il s'était élevé là où elle ne pourrait le rejoindre. La seule ombre sur cette peinture idyllique était encore à venir, préoccupant Velours dans un coin de son esprit qu'elle avait barricadé pour préserver ses sentiments. Il fallait qu'elle s'entretienne avec Achroma, mais cela attendrait. Ses retrouvailles avec son fils passaient premières.

    Achroma, qui es-tu devenu ? Songea-t-elle. Mon petit Achroma...






HRP: j'espère que ça te convient !
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeJeu 12 Sep 2013 - 21:24


Un baisé aussi léger que la caresse d'une aile de papillon, que le frôlement d'un flocon de neige fraîche, lui tirant un sourire ténu et éphémère. Aussi éphémère que la paix de cet instant, bris d'un cristal magnifié par sa rareté. Ah certes, cela faisait bien des siècles, un éon pour le moins, qu'ils ne s'étaient trouvés en une telle intimité... et c'était loin d'être désagréable de retrouver la paix de sa compagnie, mère attentive et exemplaire en tout ce qu'elle avait fait pour lui. Pouvait-elle réellement le retrouver quoi qu'il arrive ? Avait-elle un don échappant à toute compréhension qui l'attirerait irrémédiablement vers lui ? Sans doute pas, il ne doutait pourtant pas qu'elle ignorerait cet état de fait cruellement pragmatique. Qu'elle agisse différemment et elle n'aurait guère était Cyrène. Elle avait traversé bien des choses, bien des épreuves, au travers des guerres antiques, bien avant qu'il ne vienne lui-même au monde, et peut-être n'en connaissait-il pas tout les tenants et aboutissants, ce qui ne l'empêchait nullement de l'admirer comme n'importe quel enfant le ferait de sa mère. Un naturel qui semblait hélas fort déplacé, alors même qu'elle se penchait près de lui, voile incarnat brouillant son regard d'ambre, larmes de sangs, si rares pour leurs race et qui pourtant coulaient soudain comme un flot indomptable.

Il l'entoura d'un bras, tandis qu'elle sanglotait contre son épaule, semblant incapable de se retenir, et il fallait avouer qu'il se sentait, soudain, mal à l'aise... Après tout, il ne pleurait jamais. C'était une capacité qui l'avait quitté voilà longtemps, le laissant froid comme un lac des hauts monts, prit par le givre éternel, sans qu'il n'y voit le moindre inconvénient. Pleurer aurait été une faiblesse de sa part hélas, surtout en ces temps troublés, et la simple idée que Lorenz espionne au travers de lui le fit se tendre et se refermer sur lui, l'esprit clôt comme un écrin d'acier. Non, il n'espionnerait jamais sa mère en pareil état, le cœur à nue, tel l'agneau sur l'autel ; il ne voulait pas être la cause d'une réprobation quelconque envers elle pour ses sentiments à son égard. L'observant de ses prunelles de lagon alors qu'elle se redressait pour lui faire face.... «  Vous m'avez manqué également, mère » Avec douceur, il vint chasser les rivières pourpres souillant le visage au teint parfaitement ivoirin de sa mère. Il n'était, réellement, pas si flatteur que ça, exprimant simplement ses pensées avec une franchise qui déroutait tout jeune vampire, habitués qu'ils étaient aux mensonges éhontés.

Elle était belle, Cyrène, avec son blanc visage qui rayonnait soudainement, mais le poids de ses mots lui laissait un goût de cendre et d'aloès. Voulait-il revenir parmi les siens ? Et le pouvait-il seulement ? En avait-il le droit ? Quelque part, certainement, ce n'était pas le cas... il était trop coupable pour se sentir en paix, et bien loin de la fin de ses pérégrinations pour envisager de se reposer. Quand l'heure serait venue, il aurait l'occasion de se reposer, à nouveau, ou enfin selon la façon dont on voyait les choses.... Jusque là, cependant, il devrait s'en passer. Les mettre en danger ne serait qu'une faute supplémentaire quant bien même la majorité d'entre eux se débrouillaient parfaitement sans lui. A quoi bon alors ? Était-ce donc un crime que de faire passer son devoir avant le confort auquel il pourrait prétendre, vouloir se battre, endurer seul, pour préserver les siens, plutôt que d'accepter d'entrer au sein de cette entité pourtant précieuse qu'était sa famille ? Tant de considérations qui l'angoissait par instant, l'étouffant sous une poigne de fer...

Un sourire tendrement perplexe vint orner son visage. «  Quelles bêtises ma mère ? Faire exploser les murailles de Gloria ou bien lâcher une abomination d'un autre monde en pleine armée elfique pour nous éviter un massacre ? » C'était cruel de sa part que de choisir deux épisodes aussi catastrophiques. Dans le premier cas il avait potentiellement tué autant de vampires que d'humains lorsque les pierres étaient retombées, et le rappel de la Faim sans fin était tout simplement monstrueux au vu de ses résultats. Un contingent vampirique entier massacré, l'armée elfique en déroute, et un champ de bataille souillée d'une magie terriblement malsaine qui avait perduré à travers les âges pour leurs malheur à tous. Certains enfants cassaient des vases, perdaient des objets, lui s'était drapé dans l'étole de l'esprit de la mort pour un nombre incalculable d'âmes.... Et aujourd'hui encore, la menace perdurait. Seule la pénurie de magie au sein du continent le restreignait dans sa capacité à user des sortilèges sombres qu'il avait construit et grandit, loin au fond de lui-même. Que se passerait-il si la magie reprenait encore davantage ses droits, et que Lorenz accédait aux richesses que recelaient son crâne ?

«  Je ne peux faire une telle promesse hélas. Jamais je ne pourrais vous mentir, mère adorée, quant bien même affirmer cela me fait souffrir. Oh ! J'aimerais en effet vivre, enseigner moi-même, et vous avoir à mes cotés. J'aimerais faire profiter aux nouvelles générations des bienfaits dont vous m'avez doté. Pourtant je sais également qu'avant la fin je serais confronté à ma propre mort... » Il ferma un instant les yeux, la vision de cette femme admirable le mettant au supplice, en comparaison de la souillure qui l'habitait «  Avant la fin je devrais de nouveau faire appel à ce qu'il y a de plus mauvais en moi.... Nous verrons alors si je survivrais » Il espérait survivre bien entendu. Mais le destin ne prenait pas en compte les caprices des insectes rampants entre ses filins. Mieux valait ne pas trop y penser, mieux valait savourer l'instant en compagnie de sa parente, comme une bulle, un souffle avant l'apnée de la guerre....

Un présent ? Voilà qui était surprenant, de quoi pouvait-il bien s'agir ? Il n'était après tout pas particulièrement matérialiste. «   Non bien entendu » Lui souriant, il délaça la bourse, et en tira la chaînette ornée de sa pierre, qu'il fit tomber au creux de sa paume, l'observant avec attention, et la caressante du bout d'un doigt avec délicatesse. Son visage pâle n'exprimait rien, alors qu'il admirait le présent, et que son cœur se serrait vicieusement. C'était un présent simple mais de goût, magnifique à observer, et qui possédait, outre sa valeur physique, une valeur sentimentale qu'il ne saisissait que trop bien... Le prenant, il rejeta sa longue chevelure de coté en un flot moiré et glissa la chaînette à son cou, la logeant contre sa peau froide, et réarrangeant les flots d'or de ses mèches. Sa mère avait un don formidable, pour tailler les pierres, confectionner de petits bijoux.... Un don admirable oui. Qu'il rêvait de posséder, avait toujours rêvé de posséder. Il en avait d'autres, hélas. Il était le Conteur.

«  C'est un présent magnifique.... » Il vint l'étreindre de nouveau, avec fermeté et douceur, déposé un baisé dans son cou. Oui il était réellement touché par cette tendre attention. Il resta là, un long moment, la serrant contre lui. Puis rompit le silence. «  J'ai toujours aimé vos créations. Elles m'enchantaient... Je suis heureux que vous ayez pensé à moi. Peut-être que je ne volerais pas la part de père cette fois-ci.... » Jeune, il avait toujours aimé faire tourner Erin chèvre en dissimulant les breloques que Cyrène lui offrait....
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeDim 22 Sep 2013 - 19:32



    A l'instar d'une chaude journée d'été, qu'elle aurait pu savourer autrefois, presque treize siècles plus tôt, il lui réchauffait son coeur mort. Il était son rayon de soleil depuis plus d'un millénaire. Elle était une mère, et son fils incarnait l'une des choses qu'elle chérissait le plus au monde, tel un trésor qu'elle désirait conserver précieusement, protéger avec soin et préserver avec prudence. Pour Cyrène, la famille était un cadeau du ciel, un présent et un bien dont il fallait s'occuper perpétuellement, car seuls les liens du sang parlaient à la fin, elle en était intimement persuadée. Au plus profond d'elle-même, sa conviction était que malgré les caractères, le destin et les intrigues, les liens familiaux finissaient systématiquement par avoir le dessus. C'était pourquoi elle n'aurait jamais pu renoncer à la liberté de son fils, au bonheur de l'observer et de le gâter honteusement, comme elle l'avait toujours fait. Mais tout cela, ces rêves utopistes que son imagination de mère lui offrait n'était qu'un passé révolu, envolé, parti en fumée. Aujourd'hui plus que jamais, l'avenir lui apparaissait comme incertain, et cette rencontre avec son cher fils était un cadeau de la lune et des étoiles qu'elle bénissait.

    Cyrène sourit, détendue par la présence apaisante, sereine et immensément puissante d'Achroma.

    " - Oui, exactement ce genre de bêtises-là. Sais-tu à quel point je me fais du soucis quand tu t'en vas guerroyer ? "

    En dépit du sérieux de la phrase, le ton de Velours était faussement énervé, son doigt pointé droit sur la poitrine du fils tant aimé, comme pour l'accuser d'un méfait, à la manière que l'aurait fait une mère aimante désignant son petit cadet comme le coupable d'une quelconque espièglerie enfantine. En dépit des apparences, les retrouvailles étaient amères, comme si un gigantesque fossé les séparait, creusé par des siècles d'absence et de distance entre eux. Velours s'assit à côté de son héritier, alors que celui-ci déballait son paquet. Avec une excitation à peine contenue, elle le dévisagea avec une affection que les siècles n'avaient pu éroder, alors qu'il déposait le pendentif dans le creux de sa paume, puis le portant devant ses yeux azur, le passa à son cou. Avec la fierté d'un artisan satisfait de son travail, Cyrène se surprit à ressentir une légère vanité, elle avait vu juste. Le bijou était magnifique, au cou du seul être digne de le porter. Une fois encore, son coeur se serra.

    Elle avait passé des heures, à travailler la pierre, façonner sa surface et tailler les arêtes pour en extraire l'essence même de la forme qu'elle désirait obtenir. Durant toutes ces heures de labeur, faisant preuve d'une minutie hors d'atteinte des mortels, et avec une patience digne de la mort elle-même, Cyrène avait oeuvré. Tout ce temps, elle avait songé à son fils, à la tragédie qu'était ce sort terrible qui le liait au tyran. Il ne le méritait pas. Ces mois d'artisanat avaient affiné sa pensée et son esprit déjà acéré. Une germe d'idée avait bourgeonné dans les méandres de ses songes les plus noirs et les plus obscures. Sa patience séculaire serait utile.

    L'étreinte douce, à la fois légère que le vent et tangible que la terre, de son fils la ramena au flot du présent. Un sourire éclatant fendit le visage de Velours, ravie que le présent plaise à son Achroma. Un ravissement brut para son visage.

    " - Je suis enchantée de savoir qu'il te plait. Quant à mes créations effectivement, j'ai toujours su que tu les appréciais. D'ailleurs, certaines que tu m'as chipées n'ont jamais refait surface..." Elle laissa quelques secondes s'enfuir avant de poursuivre. " Tu ne pourras point subtiliser de bijoux à Erin, cette fois, car il n'en a pas reçu, pas cette fois-ci. A vrai dire, je désirais réellement pouvoir te garder pour moi, l'espace d'un moment."

    Cyrène soupira. Le temps passait à une vitesse folle. Chacun avait vécu tant de siècles et tant de choses et pourtant, elle ressentait cet instant à la fois comme un événement inespéré mais semblant resurgir d'un temps passé. Quelque chose d'inconnu l'envahit, ce qu'elle compris être plus tard des regrets de n'avoir pu passer autant de temps qu'elle le voulait avec Achroma. Avec le temps, elle avait compris, à regret, qu'il aurait pu lui apprendre autant qu'elle lui avait elle-même enseigné, mais en de bien différents domaines.

    Les événements actuels, graves et préoccupants, passaient néanmoins avant des souvenirs et des remords d'une mère trop heureuse de retrouver enfin son fils tant aimé. Depuis qu'elle était arrivée, Cyrène avait gardé en mémoire la principale raison de son entrevue, qui n'était, en dépit de toute l'affection qu'elle lui portait, pas le simple fait de le revoir après tant d'années.

    Le double royal.

    C'était là une chose qui l'obsédait au-delà du raisonnable. Dans les fait, jamais elle ne s'était intéressée à ce point à la magie, et à un sort en particulier. En général dédaigneuse vis-à-vis de tout ce qui avait un lien avec l'ésotérisme ou le mysticisme, Velours avait une toute autre vision des choses lorsqu'il s'agissait de son bien-aimé Achroma. Elle souhaitait en savoir davantage de lui, depuis le temps. Les quelques rumeurs n'avaient pas assouvi sa soif de renseignements ni sa curiosité, et les informations de secondes main n'étaient guère véridiques, pour son plus grand malheur. Et, faire parler Achroma était, malgré tout, plus facile à dire qu'à faire. Dans ses souvenirs, il avait été joyeux, mais jamais bavard, peu enclin à parler de lui-même. Lui arracher quelques mots serait la récompense à des trésors d'ingéniosité, que possédait Velours. Aussi n'hésita-t-elle pas à en user dans un premier temps, simplement pour lancer la discussion. Dans le fond, elle souhaitait parvenir à le mettre au courant des ses intentions, et sonder sa volonté. Elle tenait à lui bien plus qu'à autre choses, toutefois, les intérêts de son fils pèseraient dans la balance, et elle en tiendrait compte. Avec une tendresse toute maternelle, elle le regarda de ses grands yeux couleur de miel.

    " - Alors, toi qu'on surnomme 'le Conteur', t'as tu point de choses à raconter à ta pauvre mère qui vit recluse et à l'écart du monde ? N'aurais-tu donc aucun exploit à me vanter ni la moindre aventure à me narrer ? Je crois pourtant savoir que de grandes choses sont arrivées, depuis notre dernière rencontre."

    A vrai dire, elle avait eu vent que de très peu de choses, car les récits étaient souvent contradictoires et bien peu réalistes, et ce malgré toutes les capacités qu'elle connaissait à Achroma. L'exagération était un lot commun, mais les faits s'en retrouvaient déformés, à tel point que la dichotomie du vrai et de la fantaisie s'en retrouvait parfois bien peu aisée. Outre cela, Cyrène connaissait les faits, en partie, sur le seul événement qui revêtait de l'importance à ses yeux: l'opposition de son fils à l'exécution sommaire de Kedrildan. Elle s'était trouvé au camp à cet instant précis. Cependant, son fils de l'avoir oubliée le temps de cette insensée proposition. Dans tous les cas, elle désirait avoir sa version des faits, et idéalement comprendre ce qui l'avait poussé à une telle chose. De l'extérieur, cela paraissait être une folie sans nom, sans le moindre sens. Pourtant, Achroma avait ses raisons, et son instinct l'avait intimé d'agir dans cette direction plutôt que de soutenir Lorenz. Pourquoi ? C'était là une question essentielle qui entourait le noeud d'intrigues que Velours cherchait justement à démêler. Et plus vite elle obtiendrait cette première réponse, plus vite elle serait à même d'échafauder la suite de ses sombres machinations.

    Velours prit la douce main de son fils entre les siennes, comme elle le faisait autrefois, mille ans plus tôt.

    " - Raconte-moi tout, tout depuis la dernière fois. "

    Son ton était presque suppliant. Elle aurait tant voulu avoir le talent d'une comédienne, maintenir un masque distant, mais son coeur de mère se fendait devant le tragique destin s'étendant devant son fils. Et si effectivement, comme lui-même l'avait mentionné, il devait se sacrifier une raison quelconque, elle s'offrirait à la mort si cela pouvait épargner son tendre enfant. Il était dragonnier, et possiblement une garantie de paix entre les peuples, si un accord était trouvé. Quant à elle, elle n'était qu'une vieille mégère acariâtre, trop préoccupée par sa famille pour être utile dans un avenir proche. La seule chose qu'elle possédait qui pourrait être utile à Armanda toute entière, dans un future proche, était ses talents martiaux, dont elle commençait à soupçonner une inutilité prodigieuse pour les temps à venir. Achroma, lui, était un mage puissant, un être sage et bienveillant. Elle devait le sauver des griffes du maléfique Lorenz, lui rendre son libre-arbitre et sa liberté totale. Mais avant cela, il fallait lui soutirer toute information utile.

    Oh Achroma...Comme tu as, à la fois, changé et es demeuré le petit garçon que tu étais...

    Mon coeur, dis-moi tout...

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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeLun 23 Sep 2013 - 12:03


En une observation attentive du passé, une observation infiniment tardive d'ailleurs, il voulait bien admettre que s'endormir aux cotés de Cyrène et des autres dans la crypte sous l'Ygg-Chall, sacrifier ses années de conscience au profit du continent et de l'avenir de son peuple, et bénéficier d'une paix relative , aurait été un choix plus judicieux que de se porter volontaire pour être le gardien de leurs sommeils, le veilleur silencieux des profondeurs, attendant là l'heure où la présence des antiques anciens serait la plus nécessaire.... Il aurait alors perdu l'occasion de découvrir les étendues inconnues, de croiser la compagnie de Beryl, et de participer aux sombres fantasmes que faisaient naître les terres d'au-delà des cartes, et des peuples qui l'habitaient ; il aurait très probablement laissé passé la chance de rencontrer ceux qui l'avait aidés à grandir et à s'améliorer, à devenir ce qu'il était aujourd'hui. Les leçons d'humilités n'étaient pas les seules choses qu'il avait gagné de ses périples.... qu'il n'aurait certainement pas reçut en restant au cœur des galeries. Oui sans nul doute aurait-il été quelqu'un de très différent si il s'était endormit avec les autres, peut-être même aurait-il suivit Lorenz de bon cœur. Mais hélas, tout puissant qu'il fut, il ne pouvait changer le passé, ni aucun des choix qu'il avait alors fait. Il était ce qu'il était, et il ne pouvait prétendre changer cela.... même si le gouffre qui semblait soudain le séparer de sa mère le blessait. Si son venin n'avait pas coulé en ses veines, si il n'avait pas eut tant de souvenir d'elle.... peut-être aurait-elle semblé être une étrangère à ses yeux, une femme qu'il ne comprenait plus, qu'il ne connaissait plus.

Le temps avait passé, s'était écoulé en un flot constant depuis l'instant, l'ultime instant, où leurs regards s'étaient croisés, lorsqu'il l'avait scellée dans son écrin de pierre pour ce si long sommeil... une ultime œillade qui l'avait hanté pendant longtemps, comme un regret tenace alors même qu'il savait que c'était là la seule bonne décision à prendre. Et l’anxiété l'avait également taraudé lorsqu'il avait dû les éveiller et les conduire dans le monde, après tout ce temps... Il avait réellement craint de se trouver face à elle, face à eux. Craint leurs jugement, craint leurs regards.... seraient-ils satisfait ? Perdus ? Troublés ? En colère ? Et plus que tout... le monde ressemblait-il à ce qu'ils s'étaient imaginés ? Souvent il en doutait, à voir la façon dont ils se comportaient tous, c'était clairement la déception qu'il ressentait. Ou bien se faisait-il des idées ? Parfois il ne savait vraiment plus.... mais toujours était-il qu'il avait craint cet instant jusqu'à l'instant où il avait été forcé de le vivre. Alors seulement c'était-il résolut à subir la fatalité, le fruit de ses choix, et de ceux de tout les autres vampires. Il ne pouvait guère faire plus que cela....

A la lumière de tout cela, il ne pouvait qu'apprécier le geste... non, les gestes, de sa mère. Cette façon bien à elle de s'inquiéter pour lui et de se montrer attentive et protectrice. Ce présent, comme un signe de paix, comme un pont entre leurs deux îlots de conscience, ouvrait les vannes d'un affect qu'il avait longtemps retenu. Pour tout autre, il était ' Votre Altesse ', Achroma le Conteur, dragonnier, membre du conseil, ancien, mage de génie... beaucoup de choses, oh oui sans aucun doute, et aucune qui était réellement, pleinement, lui. Aucune qui lui permettait d'exprimer réellement ses sentiments, et ses idées... Avait-il jamais eut le droit de pleurer ? Pas depuis son retour parmi les vampires en tout cas. Auparavant oui, avec la presque famille qui avait été la sienne dans les étendues sauvages, auprès de ces individus qui n'avaient rien à voir avec les Armandéens classiques. Là oui il avait eut le droit d'exister en temps que personne avant tout, mais ce temps là était à présent révolu, oublié, égrené aux quatre vent pour n'en conserver qu'un vulgaire squelette de mémoires et de souvenirs. Les vampires le voyait comme une figure, rien d'autre... et si il avait le malheur de montrer autre chose, ce serait un véritable crime de décadence. Hors justement, Cyrène le connaissait bien au delà du masque. Elle était sa mère, la femme à qui il devait sa non vie, et qui l'avait vu dans ses plus intimes instants, les joues criblées de carmin et la peur au fond des yeux... Oui elle l'avait vu, mis à nu dans toute la sauvage crudité de ses sentiments profonds qui, parfois, frôlaient indécemment la folie, qui qu'il ne fut pas pleinement dément. Seule l'empreinte d'un terrible passé le plongeait au sein des remous ténébreux de son propre psyché.

Il eut un sourire doux, quoi que teinté d'une peine sourde de savoir que ce genre d'instants se feraient d'autant plus rare que la guerre ferait à nouveau pleinement rage. Toute cette affaire de trêve, si elle lui avait semblé une perte de temps en elle-même, se révélait être une formidable bulle d'air frais pour lui... « Certes. Je serais heureux de vous appartenir exclusivement un moment. Ça a toujours été le cas mère  » Comme si il avait put oublier cela. Et il conservait toujours ses précieux larcins dans ses coffrets à bijoux, bien à l'abri, là où il pouvait les admirer à loisir et les trouver si il désirait les porter. C'était un pauvre rappel de leurs créatrice, mais un beau rappel tout à la fois, car ces parures étaient toujours d'un dessin exquis et merveilleux, du moins selon lui. Et son esprit était d'une reconnaissance sans fin d'être ainsi soulagé d'une part de ses idées noires, plongé dans les souvenirs doux-amers, et la tendresse d'une femme dont la lumière avait baigné ses jeunes années, un millénaire plus tôt. Cela semblait être une autre vie, et pourtant son fil s'étirait jusqu'à l'instant présent... Une étrangeté de plus dans un monde déjà rempli. Si il devait jamais marquer ouvertement les jalons de sa vie, il aurait bien du mal à décider ce qui comptait le plus, et ce même au regard d’événements aussi tragiques que son emprisonnement ou sa tentative de tuer Lorenz Wintel. Ce n'étaient là que des grains de sable dans un immense sablier. Il soupira simplement à l'idée de devoir lui conter tout ce qu'il avait put endurer, expérimenter... Il n'aimait pas forcément s'étendre sur tout cela et encore moins sur ce qui avait trait à ses aventures loin des terres connues, ayant juré de se faire discret sur tout ce qu'il avait put voir et entendre de ces terres et de ces hommes.... « Tout dépend de ce que vous désirez réellement entendre mère. Ou de ce que vous nommez exploit et aventure  »

Il n'imaginait pas que massacrer des humains sans défense soit véritablement un exploit. Il regarda sa main, reposant délicatement dans la sienne, et la serra doucement, tout d'abord silencieux. D'un silence presque tombal. Il n'avait guère envie de parler et encore moins de cela... Il n'avait pas envie de briser cet instant de bonheur simple, tout teinté d'amertume qu'il fut. Néanmoins, il ne désirait pas affliger sa mère d'un silence buté, aussi décida t-il simplement de ne verser que la moitié de la coupe. « Il y a beaucoup, et peu à dire. Après votre mise en sommeil j'ai contribué à la restructuration de notre peuple, je suis entré au conseil et j'ai suivis de loin leurs politiques en cherchant quelqu'un capable de me seconder ? J'ai trouvé cette personne, je l'ai formé. Mais j'ai dû lui abandonner ma tâche lorsque le conseil est devenu trop intrusif. J'ai beaucoup voyagé, et à mon retour j'ai découvert le retour des dragons et le continent en guerre, les nôtres parcourant les plaines... Il était temps pour votre réveil. Depuis, et bien guère plus que cela.... Je n'ai guère trouvé d'adversaires à ma valeur dans le camp d'en face mais je ne désespère pas. Et bien entendu, comme vous le savez, je suis lié à une dragonne. Voilà tout  » Il avait omit certaines choses, ne traçant là qu'une vague esquisse de ses longs siècles d'activités, mais à ses yeux c'était bien assez. Qu'y avait-il à dire de plus que cela, au final ? Le reste elle le connaissait très certainement. « C'est peu j'en conviens, mais mes expériences ne sont guère intéressantes  » 
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeSam 5 Oct 2013 - 1:40

    Resurgir des tréfonds du temps, des oubliettes, après près d'un millénaire de sommeil était loin d'être anodin. Dans les faits que l'on manquait, comme ceux que l'on aurait pu influencer, le présent s'en retrouvait frustrant, surprenant ou simplement encore totalement inattendu. Ne pas avoir vécu ou simplement avoir été témoin d'événements majeurs, ayant marqué leur période autant par les actions que par les conséquences impliquait avoir de sérieux manques. Comment se considérer alors comme un être à la vision neutre, observant le passé avec un regard se voulant objectif ? Cela n'était ni possible ni même réalisable d'une manière ou d'une autre. Les acteurs, avec un contexte leur étant propre, avaient déterminé des choses, se basant sur leur propre instant présent, sans avoir toutefois le loisir de pouvoir pleinement considérer les implications d'une action quelconque. Chaque choix, chaque geste et chaque décision, mûrement réfléchi ou pris sur le plus brusque des coups de tête avait une importance pour le future. Parfois cela était négligeable, parfois, cela pouvait influencer fortement une ou un grand nombre de vies. Quelqu'un de totalement neutre ne prenait jamais parti, se contentant d'être le témoin passif et silencieux d'un monde en changement, observateur critique des déboires et exploits des êtres vivants doués de raison et dotés de folie, changeant le monde et le cours de l'histoire. Ces gens étaient ces bons génies ou ces monstres diaboliques qui, en bien ou en mal, laissaient leur empreinte dans les annales, inspirant contes, légendes et mythes. Ces personnes-là étaient rares, uniques et douées d'une sagesse séculaire leur interdisant d'agir, en dépit de toute les tentations que leurs liens affectifs attachaient à quelque chose ou quelqu'un. De tels dilemmes torturaient en général l'esprit du sage, qui, de peur, par manque de courage ou simplement par principe, qui finissait par ne point agir. A un tel stade, c'était de toute manière bien trop tard pour tenter quoi que ce soit. Après quoi ne demeuraient que les remords et les regrets sans fin de n'avoir rien fait, de n'avoir su remuer le petit doigt ou encore de ne pas être parvenu à modifier le cours des choses. Inverser le flux du temps afin d'effacer les erreurs passées était hors de portée de n'importe quel être vivant, et de tels fardeaux devaient se porter une vie durant pour les plus chanceux, durant une vie infinie pour d'autres.

    Tels étaient les tourments de Cyrène Veanya, qui ne savait comment agir vis-à-vis de l'être qui lui était le plus cher. Achroma était son trésor, aussi précieux que la prunelle de ses propres yeux. Il incarnait toutes les valeurs qu'elle désirait voir prospérer, encore et encore. Son fils tant aimé, enchaîné à un tyran sanguinaire par un sortilège d'une magie aussi noire que l'âme du sombre souverain. Le dragonnier avait manqué de clairvoyance, aux yeux de sa mère, mais ses motivations devaient bien être réelles. En témoin passif qu'elle avait été, elle n'avait pu, n'avait su l'en empêcher. Etouffée par les remords, elle avait passé de longues nuits à sangloter, déplorant ainsi la quasi perte de son fils adoré. Car c'était ce qui était arrivé, d'une certaine manière, il avait renoncé à sa liberté et à son libre arbitre, enfilant une laisse le liant pour l'éternité au Prince Wintel. Le drame apparaissait, aux yeux de Cyrène, comme une vaste intrigue frustrante, dont elle ne pouvait saisir ni l'essence ni le but, et dont les objectifs demeuraient aussi sombres que la nuit sans lune la plus noire. Trop de temps s'était écoulé, trop de temps elle était demeurée une sorte d'exile, au bord du monde et à l'écart de tout. Avait-elle manqué quoi que ce soit d'important ? Sans doutes. Avait-elle, en s'écartant ainsi, d'une certaine façon renoncé à son propre fils ? Parfois, elle se l'était demandé. Le fait était qu'à un instant crucial pour le monde, elle avait failli, faible et orgueilleuse. Elle ne s'était pas sacrifiée pour son fils, qui lui même en payait le prix fort. Devant lui aujourd'hui, plus que jamais elle s'en mordait les longs. En contemplant le magnifique visage encadré de cheveux d'argent de son fils, en plongeant son regard dans les deux sphères d'un bleu enchanteur, elle revivait tous les instants de bonheur qui remontaient les flots de ses souvenirs, et savait que ces trop rapides moments de joie s'étaient envolés au même moment qu'un avenir radieux pour lui.

    Armanda était en guerre, les ennemis étaient présents en force, et elle ne se préoccupait que de son fils et d'elle-même. Quelle égoïste faisait-elle. Amère, elle ne put retenir un très long soupir, ni dissimuler à son précieux enfant ce qu'elle ne montrait jamais: du doute. Elle ne savait quoi dire, ni quoi faire. Velours se sentait perdue. Contrer cet horrible sort demeurait sa priorité, mais dans l'immédiat, sonder son fils demeurait l'unique chose à faire. Avant de poursuivre ses recherches et ses machinations, elle devait connaître sa position sur la chose. Elle le regarda, doucement, tendrement, comme mille ans auparavant. Elle fut frappée d'une chose. Physiquement, il n'avait quasiment pas changé, ce qui serra encore son coeur de mère torturée.

    " - Tu sais, Achroma, tes expériences ont toujours été uniques, pour la plupart. Tu es un être à part rien que par ta nature de vampire, et l'héritage que j'ai tant bien que mal tenté de te transmettre...Quant à ton lien avec un dragon, n'importe qui te l'envierait. Tu es immensément puissant, et d'une intelligence rare. Tu es un allié aussi précieux qu'un adversaire terrifiant. Je me félicite d'être ta mère et d'avoir ton respect et ton affection. "

    Elle soupira encore, le regard dans le vide. Venait désormais le plus difficile, aborder ce sujet quasiment tabou, qui la rebutait autant que lui, si ce n'était plus encore.

    " - Dis...à propos de ce sort, le Double Royal...Que peux-tu me dire exactement à son sujet ?" Hasarda-t-elle sur un ton faussement désintéressé. C'était douloureux de presque devoir mentir à son propre fils, bien plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Elle se maudit pour cela. Elle voulait être vraie, ne plus utiliser de subterfuge. " Pour être honnête, il m'effraie et m'affole....je vais être franche, je crains que Lorenz ne puisse ressentir quoi que ce soit à travers toi. Espionner par tes yeux et tes oreilles, sentir par ton nez et parler par ta propre bouche."

    Elle marqua une courte pause.

    " - Je suis terrifiée Achroma....A l'idée de t'avoir quasiment perdu, à l'idée que tu ne deviennes qu'un patin...Je suis perdue..."

    De nouvelles larmes coulèrent sur ses joues d'ivoire. La millénaire pleurait toutes les larmes accumulées depuis ce triste jour. Son trésor, son fils tant aimé, aux mains d'un monstre. Velours avait été sincère, elle se sentait elle-même prisonnière du hasard de la vie. Elle n'osait plus regarder son fils, de peur de ce qu'elle découvrirait sur son visage. La culpabilité la rongea, insidieuse et venimeuse. Pour la première fois, Cyrène s'abandonna totalement à l'instant présent. Touchée à son point le plus sensible, elle n'était plus en état de reprendre ses esprit. Tout ce temps, elle avait conservé ce masque de dignité, de grâce et de confiance que tout le monde lui connaissait. Mais maintenant qu'il était brisé, que le rideau s'était levé, elle ne pouvait dissimuler son secret plus longtemps. L'asservissement magique de son fils l'avait dévastée, bien plus qu'elle n'avait jamais voulu se l'avouer. Velours se dissimula son visage de ses blanches mains, autant de honte que de dépit. Elle avait honte, de l'image qu'elle montrait à son fils, mais également de ne rien pouvoir faire pour lui.

    " - Oh ! Je dois te paraître pathétique et faible. " Murmura-t-elle entre deux sanglots. " Oh Achroma...Si tu savais..."

    Dévastée par le chagrin, elle ne put poursuivre. Tout ce qu'elle espérait, était qu'il comprenne et qu'il accepte qu'au fond, elle ne désirait que l'aider. Pour un coeur qui était, en dépit des apparences, bien sensible, c'était trop. Velours ne pouvait plus encaisser, cacher et maintenir les apparences. Elle s'était ouverte à lui, pour la première fois, ne le considérant plus comme son fils, mais comme un égal qu'elle désirait ardemment protéger. Dans le conflit contre les Alayiens, il pourrait devenir une pièce maîtresse, elle en était intimement persuadée, et cette chaîne le liant à Lorenz lui annihilait toute liberté de mouvement. Quand elle put enfin regarder son cher fils, ses yeux exprimaient ce que des mots n'avaient pu faire: un immense désespoir, une imploration pour qu'il comprenne, mais surtout, qu'il lui pardonne d'avoir été aussi idiote et naïve.

    Si seulement j'avais pu me sacrifier à ta place...Pourquoi as-tu fait ça, Achroma ? Songea Cyrène.

    Oui, pourquoi ?


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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeDim 6 Oct 2013 - 1:08


Il l’observait d’un œil plein de frimas, éclat de métal dur dans ses douces prunelles, lors même que son faciès ivoirin, marmoréen, adoptait la dureté de la pierre… aussi lisse que du marbre poli, aussi inébranlable, dépourvu du moins sentiment, si ce n’était une intense et franche sévérité. Loin de lui l’intention de la juger, ou de mépriser les tendres sentiments qui l’angoissait envers sa personne…Oui, il comprenait ses sentiments, ils étaient, étonnamment, aisés à deviner, à circonvenir. Oui il savait quelles étaient les frayeurs pouvant étreindre son cœur mort depuis si longtemps. Oui, il savait que son amour pour lui était immense et inestimable, et qu’en mère attentionnée, la conception même d’un esclavage aussi avilissant imposé à son enfant lui était intolérable. Pour autant, il n’avait clairement pas eut l’envie, la volonté, ou tout simplement la liberté, de lui parler du Double Royal et en cela sa réponse évasive concernant ses antécédents aurait dû être très claire… il ne voulait nullement parler, quand bien même cela mettait sa pauvre mère au supplice, c’était ainsi. Il y avait des sujets qu’il valait mieux conserver pour des temps et des lieux autrement plus propices, et ce en particulier lorsqu’il venait sciemment chercher le calme et la paix d’un lieu comme celui qui les accueillaient présentement. Silencieux, il observa de nouvelles perles purpurines souiller les joues pâles, parant ses longs cils de luisants corindons… icône d’affliction, songe d’une fiévreuse nuit d’indigo, elle était aussi belle que fragile, laissant apparaître à fleur de peau les bris du cristal diamantin qui la constituait, donnant tour à tour l’envie de la cajoler avec tendresse… et de la broyer entre ses bras jusqu’à la voir réduite en fins éclats tranchants d’un verre teinté du miel de ses orbes clairvoyantes. Immobile et austère, tel une tour de guet face aux vagues d’une mer endeuillée, il la laissa s’épancher de longues minutes sans la quitter de ce regard pesant… Puis éleva lentement une main, prit doucement son menton entre deux doigts et contempla son visage dévasté par les pleurs, et le fond de son regard éperdu de tant de sentiments qu’il se sentait étonnamment brusques et brutal, hideux d’indifférence…

« Cesse  » Sa voix était calme, posée et détendue, ne laissant rien paraître de ce qu’il pouvait ou non penser. Relâchant sa prise délicate, il vint caresser la peau le long de la ligne de sa mâchoire, de la pulpe du pouce, retenant muettement le fil de parole, prêt à briser à nouveau le silence si il le désirait… ou plutôt quand il le désirait, ayant la ferme intention de tuer le dramatique de cette discussion dans l’œuf, comme un vulgaire poussin. « Tu ne me paraît pas pathétique, quand bien même tu ne m’a point habitué à une telle vision… troublante vision, et gênante, je ne peux te le cacher. Un enfant ne veut jamais voir ses parents pleurer. Etant moi-même père à présent, je comprends d’autant mieux le dilemme et la nécessité, parfois, de laisser aller le flot de son affect  »

Il comprenait parfaitement bien, effectivement, et aurait joué de mauvaise foi en refusant de l’admettre, reconnaissant par la même le bon droit de Cyrène à de telles manifestations, quoi qu’il ne fut pas pleinement capable d’appréhender et de circonvenir de tels épanchements. Il n’était guère une figure paternelle proche, et accessible aux sentiments, comme pouvait l’être Cyrène à sa façon… aussi il ne savait pas non plus comment rassurer sa mère autrement qu’en l’informant avec froideur, ancré dans la réalité d’un jeu de trône profondément malsain et qui menaçait de dégénérer à tout instant, en présentant des faits établis sans les atténuer d’un quelconque miel. Il ne pouvait pas, ce n’était nullement en sa nature. Conteur mais avait tout mage millénaire, il n’usait d’aucuns faux semblants, d’aucun mensonge, seulement de la vérité et d’un esprit pratique révoltant dans son dédains de l’affect qu’il tenait pourtant, autrement, en haute estime. Tout comme il s’était fait la voix de la raison lors de la sentence à l’égard de Kedrildan, et à l’égard de Silarae avant cela, il exposait sans pudeur de très pragmatiques considérations, oublieux, parfois, que les êtres qui peuplaient sa vie autant que son entourage n’étaient pas simplement des pions, ou des serviteurs empressés de le servir pour sa plus grande gloire.. Non Cyrène était sa mère, malgré ce long sommeil qui les séparait encore, il ne fallait pas la sous-estimer et encore moins la prendre pour un simple potentiel au sein de son escarcelle riches en coups sournois. Oh oui, il était bien meilleurs à ce jeu-là que bien des conseillers et pourtant il avait toujours dédaigné ces pratiques, avec raison pensait-il… Si il se dévoilait à présent, pour cette unique personne, il comptait bien ne pas le regretter. Si elle devenait un danger pour lui et aussi cruel et terrible que cela fut…. Il devrait s’assurer de son silence.

« Lorenz peut certes ressentir certaines choses au travers de moi, si il décide de s’en donner les moyens. Il peut même avoir accès à ma puissance magique, pour soutenir la sienne. C’est parfaitement vrai, comme il est parfaitement exacte que je suis le créateur du Double Royal, et que je savais ce que je faisais en le proposant comme solution  » Sérieux, il plongea son regard dans celui de sa mère, prenant son visage à deux mains, pouces caressant les joues peintes d’incarnat « Cyrène. Doutes-tu encore de moi après tout ce temps ? Doutes-tu que je puisse faire quoi que ce soit sans en tirer un profit quelconque ? Tu ne me connais pas si mal….  » Non, elle le connaissait bien « Ne t’émeut pas. Je suis victorieux ma mère… ma tendre, délicieuse mère…  »

Dans son œil s’était allumé une dangereuse lueur d’absinthe et d’interdit et un sourire provocateur se jucha sur ses lèvres, cruel ornement du millénaire qu’il était tout au fond de lui, et qu’il serait malgré toutes ses bonnes manières. « J’ai exactement ce que je désirais. Tout ce que je désirais, et si il est vrai que je souffre et que ma liberté immédiate s’en trouve balayée, ce que cette soumission m’apporte dépasse de loin le poids des sacrifices que je dois effectuer.  » Il caressa les sillons à demi effacés de ses lèvres, frôla les siennes d’un doigt délicat, posant son front contre le sien, geste intime, cachotier « Ils me soupçonnaient, ils ne me faisaient nullement confiance ô Velours… j’avais les mains liées par la suspicion mais… mais qui soupçonnerais un être défais et vaincu, réduit à l’impuissance, au rôle dégradant d’ombre. Qui croirait l’ancien prince capable de la moindre traîtrise ? Aucun de ces enfants, chère à mon cœur et à mon âme… et ils le regretterons tous  »
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeDim 13 Oct 2013 - 16:18

    Tu t'en es allé là où je peux difficilement t'accompagner,
    car tes objectifs lointains me sont interdits,
    tu es parti en quête de ce que tu as choisi,
    et je souhaite de tout coeur t'aider à les réaliser.


    De toutes les épreuves, voir son fils s'émanciper, le découvrir et le réaliser, était de loin l'une des plus difficiles. Comprendre que cet être, jadis un oisillon, était devenu un magnifique volatile, prenant son envol du nid pour découvrir le monde, porté par ses propres ailes, s'était irrémédiablement changé en une personne pleinement indépendante et autonome était difficile à accepter. Dans le fond, cela était totalement logique, une simple évolution des choses, un fait naturel qui était tout à fait commun, et pas le moins du monde affolant, bien au contraire. Cependant, cette fois-ci, c'était totalement différent. Dans le fond, bien qu'elle ait ardemment désiré le contraire, ce qui avait effrayé Cyrène dans un premier temps s'était avéré être la vérité, sous la plus cruelle de ses formes. Il ne voulait pas de son aide. Dans les fait, cela pouvait être compréhensible, mais l'absence de justification satisfaisante rendait la nouvelle amère, blessante et terriblement préoccupante. En dépit du plan vanté, de la vaine tentative de rassurer sa pauvre mère, Achroma n'était guère convaincant. Au contraire, son air était celui de quelqu'un sachant sa sentence proche, et condamné à la potence. La seule différence était cet air confiant qui lui était collé au visage, comme s'il était déterminé à tomber, mais la tête haute. Velours était assaillie par le doute et la tristesse. Son fils désirait la maintenir à l'écart, délibérément, autant par égoïsme que par fierté. Il lui refusait sa considération, et lui interdisait de l'aider.

    Cyrène était anéantie. Les tentatives infructueuse de son fils pour la consoler n'aboutissaient à rien, sinon l'attrister davantage. Alors que l'heure était aux pleurs, elle croulait sous les interrogations. Que pouvait-elle donc faire ? Comment pouvait-elle le convaincre ? Pourquoi refusait-il son aide ? Puis finalement, était-elle si bonne à rien qu'elle ne lui était même pas utile ? Ces questions l'étouffaient, la faisait suffoquer, car elle n'y avait ni réponse, ni même d'éléments permettant une quelconque pensée. Seule avec ces terribles interrogations, elle ne savait plus quoi faire. Achroma avait, semblait-il, choisi sa voie, celle de la vengeance, calme, froide et calculatrice, elle n'avait pas sa place dans ses plans. Résignée et abattue, elle baissa les yeux à la réprimande de son fils. Jamais elle ne l'avait connu ainsi, déterminé et terrifiant. La blanche vampiresse comprit enfin à quel point il était devenu dangereux, cet être aux cheveux d'argent liquide.

    Même si elle refusait de l'admettre, elle le comprenait. Elle saisissait pourquoi il ne désirait guère être accompagné, en solitaire qu'il était. Achroma n'avait jamais été attaché à quoi que ce soit, aussi loin que se souvienne Velours. Aussi n'avait-il guère ce boulet affectif à traîner derrière lui, un poids mort à charrier en tout temps, à tout moment. Le poids des sentiments était quelque chose de parfois pesant, parfois merveilleux et parfois handicapant. Cyrène le savait que trop bien. Le dragonnier s'était révélé être une source d'espoirs, de bonheur et de joie, de ravissement et d'enchantement. Pour la première fois, il était l'origine d'une profonde résignation, d'une tristesse sans fin, mais curieusement, d'une énorme fierté. Son fils adoré avait trouvé sa voie, et elle en était heureuse. Malgré son coeur lourd, elle parvint à lui sourire, un rayon de soleil fendant les nuages de tristesse. Sa proximité actuelle était rassurante, de même que ses rares confessions, extériorisation d'un esprit égal au sien, dont l'intelligence pouvait être aussi retorse que diabolique. La pomme n'était décidément pas tombée loin du pommier. Par instants, il lui rappelait son cher Erin, qui était probablement occupé à se moquer des autres délégations. Ses réprimandes avaient le même poids, la même efficacité, en à peine quelques secondes elle s'était calmée, profitant de sa simple présence, réconfortante et agréable.

    Son plan n'avait même pas été exposé que Cyrène avait d'ores et déjà une vague idée de ce qu'il comptait entreprendre. Si c'était son désir d'agir seul, elle n'allait guère intervenir, elle s'en fit la promesse, mais elle serait toujours là, dans l'ombre, à le surveiller et à le protéger du mieux qu'elle le pourrait, cela, elle se le jura silencieusement, alors qu'elle dévisageait son fils, inexpressif et neutre, comme souvent.

    Achroma posa son front contre le sien, comme elle-même le faisait, mille ans auparavant, quand les deux établissaient des plans pour taquiner Erin. Cela rappela de tendres souvenirs à Cyrène, qui les chassa aussitôt. Finie d'être faible, surtout devant son propre fils. Elle referma son armure, en apparence redevenue cette dame de marbre qu'elle était en temps normal. Finie la mère bien trop préoccupée par son fils, elle s'était rechangée en cette inflexible Velours, dont le regard dur comme les gemmes sondait les âmes avec une force prédatrice. De matriarche malheureuse, elle était devenue courtisane affamée, assoiffée de sang et avide de têtes qui tombent. Son instinct lui avait fait changer de tactique. Son côté maternel lui dictait de toujours aider son Achroma, mais a propre vision des choses lui faisait changer sa perception du problème. Plutôt que d'imposer au dragonnier ce qu'elle souhaitait faire elle même, Cyrène allait rentrer dans son jeu à lui, tenter de l'aider, et de jouer un rôle, aussi petit soit-il. Elle avait elle aussi une vengeance à mener. Son nez appuyé contre celui d'Achroma, ses yeux immergés dans les siens, elle redevint le monstre qu'elle était.

    " - Je te fais confiance mon fils, comme je l'ai toujours fait. Mes soucis de mère étaient infondés, à ce que je vois. J'étais inquiète, je le confesse, car je n'ai pu te parler, en discuter...Car je ne pouvais comprendre ce choix. Mais maintenant que tu m'as prodigué quelques éléments de réponses, je saisis ce que tu conçois faire, je devine tes plans. "

    Court silence.

    " - Quoi que tu fasses, je te soutiendrai, peu importe le prix...Tu es mon fils et je t'aime, et je ne souffrirai pas ton échec, aussi, demandes-moi ce que tu désires, et je tenterai de t'aider avec les moyens que j'ai à ma disposition."

    Elle avait dit cela très doucement, pour capter toute son attention. Délibérément, elle lui fit un baiser sur la joue, touchant volontairement la commissure de ses lèvres. Cela avait été un léger contact, aussi doux que la caresse d'une brise d'été.

    Oui, elle espérait, pour le salut de son fils, qu'elle pourrait l'aider.

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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeMer 23 Oct 2013 - 17:57


Nuance éphémère d’absinthe au fond de ses prunelles lisses, l’inexpressif agrément était pourtant bien présent, preuve qu’il n’accueillait pas les propos de sa digne mère autrement qu’en sa si chère patience. Si il se montrait, en l’instant, si peu expressif, c’était avant tout en raison de ses propres avis sur les questions soulevées par la vampiresse qui lui faisait présentement face. Il n’était nullement dans ses habitudes de se munir d’un affect apparent lorsqu’il devait avoir affaire au reste de ce continent. L’immuabilité du marbre le servait bien mieux que tous les sourires faussement courtois ou les regards intenses de la majorité des vampires du conseil, qui semblaient se complaire dans la certitude que faire admirer leurs prunelles les serviraient. Il souriait peu, en publique, c’était la plus stricte vérité, observant son entourage avec un calme immuable et un détachement profond transpirant de son manque de goût pour les pitoyables démonstrations des plus jeunes si non d’un manque d’implication auprès de son peuple, chose dont il serait malaisé de le taxer. A présent, c’était Cyrène qu’il observait sans que le moindre son ne quitte le sanctuaire de ses lèvres, incapables qu’ils étaient de briser cette barrière délicate. Sa mère semblait avoir une singulière façon de recevoir ses explications, si tant est que son discourt pu être interprété comme une explication de quelque nature que ce soit. C’était une prérogative qu’il ne lui retirerait pas, quoi qu’il put, au fond, penser de ses considérations, fruit des vagues ébauches qu’il lui avait tracé à loisir. Il y avait beaucoup à dire de ses mots, ou peut-être trop peu, et de façon trop dispersée pour qu’on puisse en construire la moindre tribune. Peu importait, il s’octroyait comme de droit la prérogative d’en juger un contenu autrement plus significatif que bien des débats tirant en longueur.

Confiance ? Certes… si elle ne pouvait pleinement saisir l’implication de ses mots elle pouvait au moins lui faire confiance. La compréhension pleine et entière viendrait en temps voulu, que ce soit lors de sa montée en puissance ou lors de son couronnement, ou bien plus tard encore si d’un caprice elle se toquait de se faire désirer. Il attendrait, et ce probablement avec plaisir, la laissant savourer l’étendue de l’édifice qu’il bâtissait au nom d’un ordre qui n’existerait qu’en dépit de tout. Il s’amusait, dans un coin de son esprit encore vierge du gel de la raison, de la façon dont elle posait ses affirmations. Certes, elle lui faisait confiance, autrement elle ne lui aurait jamais confié son long sommeil, ou la charge de veiller en l’attente d’un jour propice à un réveil plus que significatif. Sans compter les innombrables batailles vécues à ses côtés, bien évidement. Oui, elle lui faisait confiance, mais cela ne l’empêcherait nullement de mirer par-dessus son épaule lors de ses minutieux travaux à venir, il en était certain. Il n’en était pas dérangé, connaissant trop bien le caractère et les capacités de sa mère, et pourtant, il aurait sans aucun doute préféré qu’elle ne risque pas son existence, à défaut de vie, dans une entreprise si périlleuse. Lui n’avait rien à perdre, elle beaucoup trop. Il n’en fit pourtant pas le commentaire, n’ayant certainement aucun besoin de l’énoncer pour qu’elle en soit consciente, ce n’était pas une enfant. Mais quand à savoir si ses soucis de mère étaient infondés… il ne s’avancerait pas sur un terrain par trop dangereux pour un débat. Peut-être même davantage qu’envers le soutient et la compréhension qu’elle affirmait lui apporter. Oh, bien entendu, elle le ferait, et pourtant…

Soupirant légèrement, d’un souffle désabusé, il lui prit le visage entre les mains et l’observa, le regard troublé d’une lueur amusée et ironique. « Vraiment mère… je ne vous demande rien » C’était presque une tentative de s’immiscer au milieu de son jeu, et les pièces ne pouvaient être bouleversées à tort et à travers. Pas alors que l’opération était si délicate. Pourtant, malgré cet agrément, il n’avait pas non plus l’intention de ne pas saisir une offrande aussi empressée. Le tout était de ne point la considérer uniquement comme un simple outil à sa disposition, état d’esprit qu’il craignait d’atteindre tel qu’ il pouvait le faire au sujet de certains vampires jouant entre ses doigts. Une vision rappelant sans mal le troublant mélange d’amour filial et de désir qu’il pouvait ressentir à son égard, rappeler en cela par le baisé auquel il avait été sujet. « Je ne désir rien de vous, ma mère mais de ceux qui soutiennent mon adversaire. Oui, d’eux j’attends beaucoup » Il attendait leurs morts. Une simple fin de l’existence qui lui serait bien utile. Penchant la tête, il caressa distraitement une mèche des cheveux ivoirins de la vampiresse « Vos compétences martiales sont légendaires mère. Vous êtes notre championne. Il est tellement dommage que l’on vous préfère un enfant comme Ethan, alors même que vous avez déjà prouvé votre valeur… surtout à présent, avec l’unification de l’armée, la fin des tensions politiques entre les anciens et le conseil, il serait temps que vous soyez reconnue. Sans doute, quand Ethan trépassera, serez-vous appelée à être celle qui portera le fer au cœur de nos ennemis…. »
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeMer 30 Oct 2013 - 0:21

    Échec et mat.

    La dame blanche s'inclina. Il remportait l'échange, par ses flatteries, par son intelligence, et parce que sa mère donnerait n'importe quoi presque, y compris sa propre vie. Le dragonnier avait, sans peut-être le réaliser, gagné bien plus qu'un outil, mais une complice dévouée corps et âme, dont la fidélité dépassait le simple appât du gain, car les liens du "sang" étaient bien plus importants à ses yeux que quoi que ce fût d'autre. En dépit même de ses propres principes qui l'auraient en d'autres circonstances incitées à persévérer, à se battre pour sa propre opinion, Cyrène avait baissé le pavillon, rendu les armes. Elle s'était résignée à voir Achroma suivre son propre plan, ses idées et ses convictions. Elle n'avait alors que deux options à choix, la première était la passivité d'un spectateur, n'influant ni sur les événements ni sur le cours des choses. La seconde était naturellement d'y participer activement, en changeant de position, et en se ralliant à la cause de son fils. Le choix était, en fait, particulièrement simple et aisé à faire.

    C'était avec quelques regrets toutefois qu'elle dût faire cette décision. La voie des armes n'était guère quelque chose qu'elle appréciait, mais Velours savait quand elle était nécessaire. Elle n'appréciait ni la violence gratuite, ni les effusions de sang inutiles. En général, et ce en dépit de sa nature profonde, elle considérait que résoudre n'importe quel différent d'une façon diplomatique était toujours une voie préférable et honnête, bien que parfois frustrante. Dans le cas présent pourtant, elle ne pouvait que se glisser aux côtés de son cher fils.

    Se remémorer le passé en cet instant, c'était revoir bien des choses, bien des aventures et bien des expériences qu'ils avaient pu partager, un millénaire avant son réveil. La vampiresse était alors jeune, bien plus qu'en ce jour de tristesse, et en pleine possession de ses moyens. Les temps étaient différents, bien différents, et bien plus instables. Mais, de ce qu'elle se souvenait, elle avait été heureuse, joyeuse, et particulièrement fière d'avoir un tel fils.

    La séculaire Cyrène était là, aux côtés de son fils, une dizaine de siècles plus tard, réalisant que le monde avait avancé sans l'attendre, à son rythme. De dépit, elle se mordit la lèvre inférieure. En cet instant précis, elle se trouvait naïve et stupide, pathétique créature ne pensant qu'à ses intérêts personnels. Bien pire que tout, son égoïsme la dégoûtait. Même les flatteries suaves et douces d'Achroma ne parvenaient à changer son humeur aigre-douce. Il vantait ses capacités martiales, que jamais elle souhaitait devoir utiliser. La plupart du temps, elle s'arrangeait pour y couper, et manifestement, il désirait lui qu'elle s'en serve. Partagée entre son coeur et sa raison, Velours était tiraillée par le doute autant que par la peur. Sa crainte la plus grande était de se tromper, d'agir contre les intérêts de sa famille et de son peuple, mais surtout, elle était terrifiée à l'idée que peut-être, elle pourrait perdre son fils tant aimé.

    " - Oh mon Achroma...N'importe qui d'autre que toi voit la différence entre ce Ethan et moi. Il est plus jeune, il est fougueux et il inspire la peur chez les autres vampires. Je suis trop vieille pour ce genre de choses, quand bien même je surpasse n'importe quel soldat de l'armée du Prince."

    Cyrène soupira.

    " - Je crains de ne pouvoir être utile que sur le champ de bataille pourtant, malheureusement. Et à la guerre, comment pourrais-je t'aider ?"

    Elle plongea son regard dans celui de son fils.

    " - Souhaiter malheur à Ethan maintenant n'est pas une bonne chose, l'armée serait déstabilisée. Et si tous ces ambassadeurs décident la guerre ouverte contre ces Alayiens, une telle perte pourrait s'avérer être une catastrophe."

    Elle se rapprocha de lui, collant son corps menu contre celui plus imposant du dragonnier, et posa sa tête sur son épaule, le regard dans le vide.

    " - En tout honnêteté" dit-elle " je préférerais être à tes côtés les armes à la main plutôt qu'à la tête d'une immense armée d'incompétents comme celle que nous avons actuellement...Du très peu que j'aie vu des Alayiens, ce sont des machines à tuer, méthodiques et impitoyables, dont les coups d'épée sont comparables à n'importe quel guerrier entraîné et dont la passion est de verser du sang pour en abreuver sa lame."

    Tout cela la tracassait, bien plus qu'elle ne souhaitait l'admettre.

    " - Quant aux elfes et aux humains...Peu importe le fond, je ne parviens pas à leur faire confiance...Que faire ?"

    Cette ultime question s'adressait autant à Achroma qu'au vent. Velours était indécise, suivre son fils aveuglément, ou servir les intérêts de tout le continent. Ce choix était d'autant plus difficile que cela signifiait en partie d'accorder son aide à un souverain qu'elle souhaitait ardemment voir tomber. Cyrène leva une main blanche comme l'ivoire, attrapa le menton de son fils, dont elle tourna l'auguste visage vers elle, suffisamment proche pour que leur nez se frôle.

    " - Que ferais-tu, si tu étais à ma place ?"

    Ce n'était pas une question, c'était une supplique. Son fils était intelligent, clairvoyant et d'une sagesse qu'elle ne possédait pas. Contrairement à elle, il était destiné à accomplir de grandes choses, et sa vision des choses comptait beaucoup aux yeux de sa mère. Il était l'idéalisation même de l'être parfait ou presque, et, tant d'un point de vue de perceptrice que celui de mère, il la remplissait d'orgueil.

    Gênée, elle détourna les yeux.

    Il ne le sait peut-être pas encore, mais il m'a déjà gagnée à sa cause, avant même que l'on ne commence à parler, songea-t-elle, mi-amusée, mi-dépitée. Son coeur avait craqué, encore, pour son fils tant aimé qu'elle ne voulait que surprotéger, en allant à l'encontre même de sa volonté.

    Par pitié Achroma, promets-moi d'être celui que tu me dis être, et non pas celui que je crois que tu es, lui supplia-t-elle mentalement silencieusement, sans même bouger.

    Comme réponse, le silence, comme souvent. La caresse d'une brise légère sur leur visage, quelques rayons de lumière venant ombrer leurs visages de vampires, créatures contre-natures mais d'une élégance inégalée. Deux prédateurs, perdus dans leur discussion, oublieux du reste du monde, réunis simplement parce qu'ils étaient mère et fils.


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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeSam 2 Nov 2013 - 21:34


Il n’agissait et ne prévoyait jamais d’agir sans être absolument certain de ce qu’il faisait. Et espérait, attendait même, de ses plus proches alliés, qu’ils s’en souviennent. Et qu’ils agissent en conséquence. Et pourtant un bref instant, après l’espoir d’Isendal, sa propre mère le faisait douter de cet état de fait… Doutait-elle qu’il sache exactement ce qu’il faisait, aussi détestable que ses obligations lui soit ? De toutes évidences, c’était plus un défaut de vision qu’un défaut de valorisation. Non elle savait, mais elle appréhendait les choses à courts termes, à l’aube seule de la guerre contre les Alayiens, non sur un terme plus long et plus confortable à ceux qui, comme eux, avaient vécu des siècles. Ils avaient la patience. Ne l’avaient-ils pas ? Peut-être était-ce tout simplement l’effet de ce gouffre béant entre eux, rendant incompréhensible une certaine part de la pensée de l’autre, et ce dans les deux sens. Peut-être ne s’exprimait-il pas suffisamment concrètement… ou peut-être était-ce tout autre chose et il se trouvait aveuglé par ses considérations immédiates. Haussant un sourcil, il l’observa alors qu’elle déposait sa tête contre son épaule et poursuivait le tissage de son discourt… Et lui se pinça les lèvres pour ne pas entrer dans un combat de rhétorique profond. Oui les Alayiens étaient disciplinés, fanatiques et efficace… et c’était exactement la raison pour laquelle ils se devaient de les imiter. Avec un chef froid, stratégique et déterminé dépourvu de la fougue de la jeunesse et de son aveuglement, choses qui caractérisaient si bien le général vampirique… Oh oui il était un parangon de ce qu’aimait la jeunesse, et justement totalement inefficace quand il s’agissait d’agir au fond des choses. Preuve en était, l’armée vampirique avait beau avoir conservée sa cohésion, ils n’avaient cessés de reculer. Non, d’être repoussés, voilà un terme des plus exactes. Ethan, aveuglé par ses chimères internes, n’était en rien parvenu à rendre sa force aux vampires… comment l’aurait-il put d’ailleurs puisqu’il passait son temps à essayer de lui prêter des velléités de rébellion et ce depuis le commencement. Il aurait bien mieux fait de se concentrer sur ses tactiques, plutôt que de jouer le psedo justicier vain et aveugle après lui, brassant l’air et le vide au milieu d’intrigues qui le dépassaient de loin…Il avait tenté de le lui dire oui, il avait tenté de lui faire comprendre qu’il ne servait à rien d’adopter un tel comportement. L’autre l’avait-il écouté ? Bien sûr que non, persuadé qu’il était d’une culpabilité impossible à prouver. Un général se laissant guider par des illusions était-il un bon chef ? Certainement pas. Loin de là même. Mais il était loyal à Lorenz aussi il était impossible que celui-ci s’en débarrasse. De cela, pourtant, il n’entretint pas sa mère, qui faisait voix de ses pensées et de ses désirs avec une confiance touchante.

«  Vous n’avez nullement appris à leur faire confiance » Caressant son dos puissant d’une main ferme, il tourna le regard vers elle sous l’impulsion de cette main délicate. Il eut un soupire, geste tout humain en soit pour qui n’a besoin d’oxygéner un sang absent. Lui avait appris à vivre avec eux, auprès d’eux. Il avait vu, chez les humains en particulier, de véritables perles d’individus, des êtres véritablement dignes d’admiration et de respect qui, parfois, le dépassait même avec brio. Il avait appris à voir au-delà des apparences, à nouer des liens, à faire confiance quand pourtant tout semblait indiquer qu’ils avaient tords. Lui qui auparavant, dans sa prime jeunesse, n’avait jamais eu la foi, la foi sincère, l’aveugle confiance poussant à partir au combat, prêt à verser son sang sans en savoir la raison… lui avait découvert qu’il était également capable de cette abnégation. Et il avait appris, de ces hommes, de ces êtres… bien des sagesses, bien des choses, qui avait fait de lui ce qu’il était désormais, tout autant que les leçons de Cyrène l’avaient forgé. La question de sa mère, la situation dans laquelle il la mettait et tout ce qui en découlait, étaient imprimées dans sa conscience vive, et pourtant, en l’observant, en lui faisant tourner le regard vers lui de ce même geste qu’elle avait eu à son égard, souriant, il répondit avec autant de franchise que, peut-être, d’une certaine cruauté. «  Mais mère… je ne suis pas à votre place » Non il était à la sienne, et c’était déjà suffisamment difficile de s’accorder une ligne de conduite unique et sans bavure. Il ne comptait pas en plus s’adjuger la vision que pouvait avoir cette femme qui comptait tant pour lui, quand bien même l’amour qu’il lui portait n’avait pas son pareil. Non il n’était pas à sa place. Et d’une certaine façon il en était heureux. «  Mère… je ne vous demande pas de me suivre aveuglément. Cela je ne peux l’exiger, quand bien même cela me rendrait la tâche plus simple. C’est une chose que j’accepte de moi-même, qui ai vécu aux cotés des hommes et appris à agir, parfois, sans connaître mon lendemain. Mais je ne vous l’impose pas. Choisissez en vôtre âme et conscience, ce qui vous paraît le mieux, et je m’adapterais à votre décision avec grâce » Il caressa son visage «  Vous êtes libre mère. Et personne, moi le dernier, ne vous blâmera de quoi que ce soit. Je tente d’agir au mieux pour tout le monde, non pas seulement pour moi mais également pour les nôtres, pour ce monde et pour ces autres races encore enfant dont nous sommes les aînés. Je ne suis pas à votre place c’est vrai et ne prétend pas l’être, je ne puis décider pour vous, bien que vous ne le demandiez nullement. Mais ce que je fais à ma place à moi en tout cas… c’est agir comme mon instinct me le dicte. Le plus justement possible. Pour tout le monde »

Un bref instant, le silence flotta entre eux, avant qu’il n’avoue «  Je me rappelle toujours de ce que je fus humain. Et je me souviens d’une femme elfe, me regardant avec la plus grande sincérité, qui m’affirmait aimer ses enfants plus que tout, et vouloir les protéger, quoi qu’il advienne d’elle » Posant son front contre le sien, vrillant ses yeux des siens, leurs lèvres caressant «  Parce que les vampires au complet sont mes enfants, et que je refuse de les voir traités de monstres à tout jamais… voilà pourquoi j’agis. Voilà pourquoi je l’abattrais. Mère maintenant que vous savez, faites ce qui vous semble le mieux, car vous aurez toujours mon amour »

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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeLun 4 Nov 2013 - 0:12

    Son parfum l'enivrait, l'entourait. Sa présence l'écrasait, la rassurait, lui donnait envie de verser des larmes, mais également de profiter de chacune des secondes qui s'enfuyaient, trop rapidement. Si elle en avait été capable, elle aurait souhaité arrêter la course effrénée du temps, figer son flot trop rapide, et jouir de sa présence infiniment. Car au-delà des liens affectifs entre une mère et son fils, il n'en demeurait pas moins un être exceptionnel, unique et d'une certaine façon, terriblement attachant. Son visage de marbre, dont la perfection des traits la touchait chaque fois, ses yeux, d'un bleu du saphir le plus pur et sa cascade de cheveux de neige lui conféraient une apparence étrange. Il ressemblait à un vieux sage, à ceci près qu'il avait conservé un visage à la jeunesse éternelle, où pas la moindre ride n'était parvenue à s'épanouir. Oui, son fils était d'une beauté rare, à couper le souffle, à vous enchanter. A capturer le regard de quiconque, et à ensorceler son âme dans une servitude d'une adoration absolue.

    Cyrène aimait profondément son fils, pour ces raisons et bien d'autres encore. il possédait des valeurs morales fortes, un esprit délicieux et un sens de l'humour qu'elle adorait, quand il faisait - de trop rares - traits d'humour. Cette entrevue avait, pour elle, un goût curieux, car, quelque part dans ses pensées, elle avait abouti à une conclusion dérangeante. Achroma lui donnait l'impression d'avoir été un enfant à qui son innocence juvénile avait été arrachée beaucoup trop tôt et bien trop brutalement. Son ton froid à l'évocation de ses ennemis, ses yeux durs comme le diamant à la mention de ses plans, il était devenu inflexible, et cela terrifiait presque sa mère. Mais il n'en demeurait pas moins cet être qui avait, un millénaire plus tôt, été son unique raison de vivre une éternité.

    " - Je n'ai pas appris à leur faire confiance car je n'ai jamais eu à le faire..." Objecta-t-elle avec douceur. Comme souvent, son fils était d'une délicatesse rare avec elle.

    Il s'exprimait peu, mais chacun des mots qu'il employait étaient appropriés, donnant nuance et détails à chaque fois qu'il s'exprimait. Pour une intelligence telle que celle de Velours, cela était un moyen efficace de tout confesser sans tout prononcer. Elle était flattée qu'il soit autant préoccupé par elle, mettant des gants dès qu'il parlait. Son fils avait beaucoup changé, bien plus qu'elle ne l'aurait pensé au départ, mais il était devenu bien plus lui-même qu'il n'aurait pu l'être en demeurant son élève. Au contact de sa douce main contre sa joue, Cyrène ferma doucement les yeux, se plongeant dans un silence uniquement ponctué par le petit grondement de satisfaction qu'elle émit.

    " - Tu n'oses me demander de te suivre, mais c'est mon choix, Achroma. Tu m'es bien plus cher que toute autre chose sur cette terre. Tu représentes non seulement une partie de mes idéaux, mais également ma descendance. Je t'aime bien trop pour souffrir de te voir partir et de demeurer, moi, les bras croiser à n'être qu'une vulgaire spectatrice de tes exploits. "

    Elle n'avait nullement le ton du reproche, elle exposait simplement le choix qu'elle avait fait, et qui, d'une certaine manière, scellait son destin à court terme. Velours conserva les yeux clos et continua.

    " - Si je décide de rester à tes côtés, ce n'est pas uniquement pour te protéger ou t'aider, mais simplement car j'ai été inactive et passive bien trop longtemps pour me l'autoriser davantage. Je m'en veux, Achroma, je m'en veux de n'avoir été qu'une excentrique ne quittant que rarement ses sombres cavernes. "

    Elle serra les poings, ses phalanges blanchissant davantage sa peau d'ivoire sous l'effort.

    " - Et je ne te demande pas d'être à ma place, mais simplement de me conseiller, comme mon frère l'aurait fait s'il avait été là."

    Il posa son front contre le sien, leurs lèvres se frôlant, sensuellement, avec délicatesse. Sur l'instant, Cyrène manqua de l'embrasser, puis se retint. Cela aurait été aussi inconvenant que gênant. Et, à cet instant précis, elle jouissait bien plus de la proximité de son fils que de quoi que ce soit d'autre. Pour la première fois depuis si longtemps, il était tout à elle. Blottie contre lui, elle profitait de disposer du temps de son fils pour partager ces instants avec lui. La tendresse que Velours éprouvait à son égard était sans limites, aussi vaste que le ciel. Car Achroma avait été pour lui une étoile illuminant les cieux noirs et sombres de sa vie. Il lui avait donné un but, un être cher de plus à protéger et à chérir.

    " - Tu désires protéger tes enfants, dis-tu, tous les vampires. Je comprends et j'admire cela. Mais, quoi qu'il en soit, aux yeux des elfes et des hommes, nous demeurerons des monstres contre-nature, des horreurs de la non-vie...Et n'importe quel acte d'une bonté sans précédent venant de l'un des l'autre n'effacera pas cela..."

    Elle murmurait, doucement.

    " - Tu veux être le gardien des vampires et les protéger ? Alors, je t'en prie, laisse-moi protéger l'unique fils que j'ai..."

    Son ton était devenu implorant. C'était une requête quasiment désespérée. Velours se serra davantage contre lui, se glissant contre son flanc. Elle avait été maladroite, et, front contre front, leurs lèvres s'étaient touchées, contact court durant lequel elle avait goûté leur galbe sucré. Presque aussitôt, elle avait détouré la tête, gênée, les joues rosies par sa maladresse.

    Perdue, elle dévia son regard au loin, alors que d'épaisses boucles d'argent tombaient devant son visage et ses yeux d'ambre qui exprimaient le doute autant que l'envie, la crainte autant qu'un amour débordant, et pour la première fois, une passion étrange qu'elle n'avait jamais ressentie auparavant.
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeLun 4 Nov 2013 - 23:22


Exploits. Le terme était étrangement pourvut de cet aveuglement maternel qu’il chérissait par ailleurs lorsqu’il était plus jeune, bien plus jeune. Un simple nouveau-né vampirique à cette lointaine époque, où il apprenait aux cotés de la dame d’ivoire. La maturité l’avait drapée, depuis, de son digne manteau, et à présent, il se demandait si c’était réellement de l’aveuglement ou bien simplement la perspicacité outrageuse qu’elle avait toujours possédée. Qualifierait-on ses actes d’exploits dans le futur ? Non il en doutait. Il serait difficile, même pour son propre peuple, d’avaler la pilule, lorsqu’il serait prince. Bien entendu, l’on pensait qu’il serait un guide sage et il tâcherait, cela n’empêcherait nullement son règne d’être une dictature. Cordiale, mais une dictature. Il le fallait, il n’y avait guère d’autre moyen, du moins jusqu’à ce que les générations se renouvellent sous un autre mode de pensée, bien plus adapté et raisonnable. Une dictature donc, son premier choix étant évidemment de dissoudre ce maudit conseil qui ne servait décidément pas à grand-chose et était peuplé de bons à rien ambitieux. Oh certes, les anciens ayant pris place à bord du navire, eux, conserveraient une place avantageuse, ils n’étaient nullement trempés de son mépris quoi que parfois de sa perplexité. Eux seraient ses avis personnels, d’un statut singulier et restreint… mais non dû. Quand aux autres… ceux qui n’avaient absolument rien à faire près de lui, ceux qui s’aveuglaient de leurs propres puissances, ils iraient, si leurs vies étaient épargnées, par le monde, loin de ses yeux, loin de son domaine. Il fallait réorganiser le peuple vampirique, l’éduquer de maintes manières, non seulement par la discipline de la bête en eux, mais également en la discipline de l’esprit, la raison, la pensée vraie… oui il y avait tant à faire, leur donner une dignité et une ligne de conduite, une éthique… Il serait sans doute fort occupé pendant plusieurs siècles. Ce n’était pas forcément un mal bien évidement, mais cela l’empêcherait certainement de parcourir le continent, il ne comptait guère abandonner son œuvre à moitié terminée. Un nouvel âge pour les siens, un âge strict mais juste, à l’image des anciens et ce n’était pas plus mal ainsi. C’était même pour le mieux. Quelqu’un penserait-il qu’il s’agissait réellement d’un exploit ? Il en doutait sincèrement mais ne cherchait pas non plus à voir advenir une telle utopie.

Utopie n’avait nulle place en son cœur malgré son amour de son peuple et ses souhaits pour lui. Utopie n’était que rêves brisés en vérité, désirs désavoués, soupires languides d’après une étoile moirée… Non, il affirmait, péremptoire, imprimant la marque de sa volonté sur chaque mot. Il ne tolérerait pas que l’on traita les siens de monstres lorsqu’il serait prince. Tous ses actes seraient tournés vers l’accomplissement de cet objectif. Car un jour, oui, on les craindrait pour ce qu’ils étaient vraiment, et non en vision de ces monstres et bêtes stupides qu’étaient les jeunes. Les contacts qu’il avait eus avec les hommes et les elfes lui avaient prouvé qu’ils étaient effectivement capables d’ouvrir les yeux, et de se hisser hors de l’écrin étriqué de leurs peurs, de leurs idées préconçues sur les marcheurs de la nuit. Et si ils en étaient tout de même incapables, même ainsi, alors il serait contraint de plaider une fois de plus sa cause, de monter une tribune en soutient à ses enfants… Après tout, il commençait à en prendre l’habitude. Tout comme il semblait, et à juste titre, prendre l’habitude d’expliquer nombre de choses à son entourage. Il finit par soupirer à ses paroles et hocha la tête avec simplicité, n’ayant guère à ajouter à de telles revendications. Certes, si elle désirait prendre place à ses côtés, il ne serait pas de ces ingrats qui refuseraient tout net, c’était son droit après tout et il ne lui retirerait jamais. Il continuait de penser, cependant, qu’il ne pouvait la conseiller, et ce avec une pointe d’aloès, comme Erin l’aurait fait. Avait-elle mentionné son presque père dans l’intention avouée de le vexer ? Sans doute pas, Cyrène n’était pas aussi vaine et surtout, elle souffrait de la moindre blessure qui lui était infligé. Aussi ne lui en tenait-il pas davantage rigueur que d’un revers de main aventureux. « Soit. J’accepte mère, rien ne pourrait me faire refuser il me semble. Mais n’oubliez jamais que vous êtes libre. Ne mourrez pas pour moi. Cela je ne l’accepterais nullement » Ce n’était point la affirmation soumise à débat, et alors qu’il comptait ponctuer le couperet d’un mouvement, la vampiresse le prit de vitesse.

Caresse indéniable et indéniablement gênante, appelant bien des travers de sa personne. Un contact léger et doux des lippes pulpeuses contre les siennes. Un contact qui nourrissait encore davantage l’aloès de son esprit. Il ferma les yeux, la laissant s’éloigner, aller, tenter de se détourner. Lui-même nourrissait des pensées d’ailleurs, tentant de chasser le ressentit. Une odeur boisée lui parvint et il eut un bref instant la sensation de douces mèches entre ses doigts. Asséné à cette plaisante folie, il revint à celle qui était sa mère, s’approchant et lui dénudant le cou juste assez pour y déposer un baiser. « Je me montre trop sombre et de si nombreuses façons. Tout ceci nous pèse, tout ceci nous trouble… » Il ne voulait attribuer cela à leurs propres corps, à leurs esprits. D’autant qu’il ne pouvait briser cet interdit et qu’il avait… tant de choses en têtes. « Nous devrions… profiter simplement de cet instant sans plus de concession. De ce silence. Nous aurons bien le temps pour tout le reste. Après tout… nous sommes éternelles »
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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeVen 27 Déc 2013 - 0:44

    Représenter l'éternité, par une unique vie, était quelque chose de paradoxal, en aucun cas naturel, et certainement pas un concept accessible à des humains. Vivre une durée infinie et impossible à deviner, était, en réalité, une chose effrayante, terrifiante. Comment imaginer avoir vaincu la mort elle-même ? Dans les faits, cela était certes dérangeant, mais bien plus encore: contre-nature. A travers les expériences acquises, il était possible d'établir une vision globale, un caractère unique et une personnalité propre. Au-delà des considérations purement et bassement matérielles, la vie offrait une vaste quantité de choix et de possibilités aussi divers que variés et hauts en couleur. A partir de là, tout ne devenait qu'une affaire d'opportunités et de décisions. Envisager un futur sans le moindre nuage dans le ciel azur des projets était une utopie dans laquelle mieux valait ne pas tomber.

    Partager un instant, une minute, une heure, une journée, était, quand on avait la malédiction d'une vie éternelle était une notion notoirement superficielle et peu intéressante. Fondamentalement, ne plus vivre une course contre le temps et contre la nature même de la vie changeait la perception des choses. A tel point qu'une année devenait risible. Une journée apparaissait comme un court instant, une heure comme un battement de paupière. Être éternel, c'était simplement devenir terriblement critique vis-à-vis des années. Et plus la vie s'allongeait, et plus ce paradoxe s'étendait jusqu'à devenir une aigreur à la limite de la rancune contre le simple fait d'exister. Velours, elle, ne se considérait ni comme une jeune femme ni même comme un être ancien, mais fatalement comme un fossile ambulant. Même si la puissance des vampires était, bien souvent, déterminée par leur âge, au même titre que leur sagesse, il en était certains qui ne se considéraient que peu eux-même. Et Cyrène en faisait partie, par moments du moins.

    Cyrène, vieille de ses douze siècles d'existence, en était venue à considérer des êtres âgés de quelques siècles comme des enfants immatures. Ce n'était là ni vanité ni une aigreur à l'encontre du temps, mais uniquement un constat provoqué par l'expérience que lui offrait son âge avancé.

    Une telle notion du temps amenait ainsi son lot de soucis, d'interrogations et de questionnements constants. On en venait à ne plus apprécier les choses simples et les petits plaisirs qu'offrait la vie. A contraire, on en devenait bien plus difficile à satisfaire, comme si le simple fait d'avoir tout le temps nécessaire devenait une malédiction atroce. Pourtant, et en dépit de tout cela, certaines satisfactions demeuraient intactes, restant des intarissables sources de joie et de plaisir. Achroma en était une.

    Le dragonnier était l'origine d'un sentiment de fierté grisant et la cible d'un amour maternel farouche. Sa cascade de cheveux couleur de neige, si semblable à celle de sa mère de coeur, lui donnait un air érudit qui contrastait pourtant avec la jeunesse millénaire de son visage lisse, imperméable aux ravages du temps. Et, en dépit de son intelligence, et de celle de sa mère, ces derniers basculaient parfois dans des excès niais dont ils cachaient le secret. D'un ton narquois, Cyrène posa le bout de son doigt sur le nez de son cher fils.

    " - Tu ne me le refuses pas car tu ne peux tout simplement pas te l'avouer à toi-même, mais tu a très envie de mon aide." Elle lui fit un clin d'oeil amusé. " Je compte mourir de vieillesse, très cher, lorsque tu te seras enfin décidé à devenir le héros que tu es destiné à être."

    Quand il lui déposa un baiser dans la tendresse de son cou, Velours frissonna. C'était une attention qu'elle appréciait particulièrement. La délicatesse de son fils était adorable à observer, car il le faisait toujours avec une douceur surprenante, comme s'il craignait de briser la vampiresse séculaire comme une vulgaire statue de verre.

    Elle passa un bras dans son dos, affectueusement. Ce cher petit lui était dévoué et terriblement attaché, et ce depuis plus de mille ans. Cette relation privilégiée, et réciproque de surcroît, lui apparaissait comme une base rassurante, une fondation sur laquelle construire des plans, supports d'un espoir fou. Malgré toute la douceur de la scène, magnifique tableau en fin d'après midi, elle ne pouvait oublier ce qui lui avait été infligé. Et même en cet instant de tendresse absolue, son objectif, reverser Lorenz Wintel, ne rôdait guère loin dans ses pensées. Manipuler son fils afin de parvenir à ses fins étant la dernière chose qu'elle désirait, Cyrène savait pourtant qu'il lui faudrait amener le sujet sur la table, mais à un autre moment, mieux choisi.

    Velours s'approcha de la joue de son fils, et y déposa un nouveau baiser, plus long cette fois, prolongeant le contact entre ses lèvres à la douceur exquise et la peau lisse du dragonnier. Pour la première fois, elle remarqua à quel point son parfum lui était agréable.

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MessageSujet: Re: Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Au commencement était l'étoile, tout comme vous [Pv Cyrène] Icon_minitimeJeu 2 Jan 2014 - 13:58


Il n’avait guère d’emprise sur la vie de sa mère quand bien même il l’aurait voulu, souhaité, désiré d’une quelconque façon… Quand bien même aurait-il affirmé, impérial, qu’elle se devait d’exister qu’il n’aurait rien été des plus qu’un enfant capricieux réfutant les souhaits de cette millénaire qui l’avait élevé. Et pourtant, en essence, il s’agissait une fois de plus d’un abandon, d’une nouvelle trahison, en un certain sens. Un être de plus l’oubliant dans les bras de l’esprit de la mort, franchissant le pas tandis que lui perdurait. N’avaient-ils donc jamais pensé que perdurer seul et sans attache était la pire des tortures ? Sans doute l’avaient-ils fait évidement et pourtant ils avaient, tous, choisit de passer outre. Quel gain y avait-il à leurs trépas, qu’il vaille d’être ainsi laissé en arrière, seul ? Lui qui pourtant pouvait se rengorger d’une certaine perception n’y trouvait-là qu’un voile opaque de questionnement ininterrompu. La défroque d’un héros pathétique ne valait nullement l’importance de ceux qui s’étiolaient… Il ne voulait pas être seul, quand bien même il avait Silarae, ne voulait pas s’attarder alors que tous les autres le quittaient. Une relative solitude, choisie et nuancée, n’était certainement pas la même chose qu’une solitude forcée et totale, une solitude marquée du sceau de l’implacabilité. Silencieux cependant, il ne souffla mot de ces considérations, l’observant simplement de son regard clair, se laissant enlacer, embrasser… Preuves de douceurs, de tendresses, qui n’effaçaient nullement les mots prononcés, la fatalité oscillant au-dessus d’eux.

L’attirant près de lui, un bras autours de sa taille, il eut une impulsion, retrouvant le confort de l’herbe et de la mousse du sol, la faisant basculer avec lui sans s’expliquer, s’installant simplement, là, la gardant contre lui et observant de nouveau la luminosité qui s’épanchait en long haubans dorés les frappant sans hâte. Le détachement l’envahit de nouveau, se refusant à plus d’hypothétiques complots et promesses. Cela suffisait amplement pour cette journée qu’il comptait utiliser à des fins bien plus reposantes. Profiter de la présence de cette femme qu’il admirait et aimait, profiter de la paix du lieu, et certainement à terme, parvenir à un confort et une harmonie intérieure qui le délivrerait des tourments lancinants de son âme fendue en deux. Lorenz n’était en fin de compte qu’un tracas passager dans l’immensité de son existence déjà bien entamée… et comme tout frimas, il finirait par laisser place à de nouvelles saisons, en temps voulu. Ce coin d’été, en cet instant, était le seul plaisir qu’il conservait.


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