|
| Auteur | Message |
---|
InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Coupable - PV Eliowir Mar 28 Avr 2015 - 23:56 | |
| 5 Janvier de l'an 5 de l'âge d'obsidienne
Coupable…
La voix était posée et ferme, mais modulée d’une infime inflexion, une légère… courbure, dans la voix, trahissant quelque chose de contenu, de jugulé. Quelque chose qui menaçait de s’exprimer, mais que l’émetteur parvenait tout juste à endiguer. En était-il effrayé ? Peut-être. Cette simple inflexion contenait trop pour qu’elle ne l’effraye pas. Trop de sentiments, trop de sous-entendus, de promesses étouffées par le désespoir. Cette voix résonnait, dans le silence sépulcral, avec quelque chose de lourd, malgré sa tenue. Et ce simple mot semblait de plomb, plus efficace encore que la hache d’un bourreau. Porté par toute la violence contenue dans ces quelques syllabes, dans ces sons, dans ce petit quelque chose qui ouvrait, clef démente, sur un monde que l’impassible visage ne laissait pas paraître. Son regard de pierre ne quitta pas l’accusé, qui sembla se liquéfier sur place. Déjà mort, pensait-il alors sans la moindre compassion. Il n’en avait plus à offrir. Au début, oui, il avait été dispendieux de cette compassion, de sa pitié, à l’égard de ses infortunées victimes. Il avait donné sans compter, pleurant jusqu’à ce que son pâle visage soit marqué, stigmatisé, par les traînées rougeâtres. Au début il avait atrocement souffert, son cœur et son âme laissés à la merci de son bourreau. Puis la source s’était tarie. Puis…. Il avait cherché à se protéger, à se battre.
Il ne pouvait rien contre les chaînes magiques qui le liait. Mais il pouvait, contre le désespoir et la honte, le sentiment de salissure infecte qui lui collait à la peau. Le Conteur, avec ses valeurs, avec ses idéaux, était une proie terriblement facile. Il avait dû l’oublier. Qui était-il désormais ? Il ne savait plus bien. Pas le Conteur. Il s’en était allé. Quelqu’un d’autre. Quelqu’un qui puisait dans son noir passé, faisant revivre un reliquat de noirceur, de sa propre noirceur… de son ancienne sauvagerie, de son ancienne cruauté et perversité, dans le seul but de ne plus souffrir chaque fois qu’il croisait le regard d’un de ces pauvres hères. Il avait fini par ne plus rien ressentir durant ces tribunes. Il regardait ces créatures dans les yeux, sans jamais rien leur offrir d’autre que cet extérieur de statue. Ces yeux qui hurlaient à la pitié ne lui étaient plus que des contrariétés. Pourquoi devrais-je souffrir pour toi ? Pourquoi devrais-je me sentir coupable de ton infortune ? J’ai bien assez de la mienne. C’était leur faute. Ils étaient coupables ! Coupable de la torture qu’ils lui infligeaient. Pourquoi devrait-il gaspiller sa compassion pour eux alors ? Il n’avait aucune raison de s’outrager pour eux s’ils avaient la folie de ne pas se préserver et qu’importe si la réalité était différente de ce que ses yeux voyaient.
Son esprit était en lambeaux, il devait le préserver. Il devait… mais le faisait-il vraiment ? Parfois, il s’arrêtait et avait l’impression qu’un énorme vide s’ouvrait sous lui. Il avait l’impression de s’enfoncer dans la perdition et de ne plus rien distinguer. S’était-il embourbé dans le jeu de Vraorg ou avait-il réellement attrapé son fil conducteur, ce fil qui le préserverait ? Il ne savait pas… il ne savait plus… Sa paix intérieure était une idylle passée, sa raison la suivait, empruntant le même chemin. Il avait si… mal. Il ne savait plus. Ça n’avait pas d’importance. Il devait survivre. Il le devait ! Edwyn… Edwyn était mort pour eux, il leur avait donné un espoir… il devait vivre pour cet espoir, pour le réaliser. Quoi qu’il doive faire, il devrait survivre, s’accrocher à cet espoir, s’accrocher à l’assurance que tout avait une fin. Tout… même Vraorg. Et il fallait que sa fin vienne avant la sienne. Il devait survivre. S’il ne pouvait plus vivre, il survivrait au moins. Il n’avait pas le choix. Alors il se battait, alors il se murait derrière ses perceptions démentes et distordues. La douleur lui avait durablement embrouillé l’esprit, ou bien était-ce la rage ? Qu’importait…
Il s’avança, s’approcha de sa victime. Culpabilité, un bref instant, comme une dague en plein cœur, avant qu’il ne se crispe, ne se protège. Non pas de culpabilité ! C’était lui le coupable ! C’était lui qui allait souffrir ! Il souffrirait pour sa bêtise, et il souffrirait pour lui, pour lui permettre d’extérioriser toute la rage couvant en lui comme sous la surface d’un volcan. Tout ce qu’il ne pouvait infliger à ses ennemis, ses véritables ennemis, il l’infligeait à ces pitoyables créatures. Douce souffrance… il lui était si facile, alors, d’imaginer les autres, Vraorg, Lorenz, Kylian et toutes leurs cliques, à la place de cette pauvre et misérable créature… de les imaginer se tordre de douleur, supplier, gémir… la voix ne convenait pas… non non, il n’avait qu’à se l’imaginer… il connaissait la moindre de leurs inflexions de voix depuis trois ans, il avait pris un soin maniaque à retenir la plus petite modulation… il voulait pouvoir s’en souvenir… quand le plaisir montait enfin, la sauvage jubilation, et que l’acte se faisait plus simple, plus naturel.
C’était comme monter à cheval, ça ne s’oubliait jamais vraiment. Il avait été si bon à ce jeu-là dans sa jeunesse… son corps se souvenait encore très bien. Et quand les griffes de la passion l’agrippait, faisant pulser son corps d’exultation et de plaisir, de désir, de soif de sang, faisant frémir ses muscles et engourdissant son esprit, chassant la douleur et la culpabilité, alors… les voix finissaient le travail, complétaient l’illusion, parfaite alors. Il se laissait aller, vaincu par ses propres cauchemars, massacrant la créature qu’on lui avait jeté en pâture… mais c’était son seul exutoire… il réalisait ses fantasmes, ses rêves de massacre sur ceux qui le maintenait emprisonné et qui l’avait souillé… Son imagination débridée n’avait alors plus de limites, tant qu’il imaginait que c’était eux et lorsque l’accusé rendait enfin son dernier souffle, la jouissance était presque insoutenable.
Et quand il reprenait ses esprits, la honte le submergeait et l’étouffait, amère, nauséeuse… Et il se haïssait. Il se haïssait pour sa faiblesse, il se haïssait parce qu’il savait tomber dans le piège, lors de ce court moment de lucidité après l’acte, et il se lamentait avant de se refermer sur lui-même une fois encore, et de retomber dans ce cercle vicieux et malsain. Il sombrait dans la démence. Il perdait du terrain un peu plus chaque jour, et un peu plus chaque jour, il s’abandonnait à ses ténèbres pour espérer voir la lumière. L’écarlate le rendait malade. Il l’insupportait. Ses yeux avaient été brûlés par l’argenté terrible du sang d’Edwyn lorsqu’il était mort… rien n’avait d’égal que ce sang-là. Versé par sa faute. Oh comme il se haïssait de cela également. Mais il ne fallait pas y penser, jamais… ces souvenirs-là le terrassait chaque fois, comme un immense pal le transperçant, poupée désarticulée. Non il ne devait pas y penser. Quelle couleur aurait le sang du dragon ? Il caressait l’idée de s’en abreuver, comme une dernière victoire sur lui. Et ensuite… ? Peut-être broierait-il alors Lorenz …
Ah mais il était le dernier de ses soucis, pitoyable créature…. Non il se fichait de lui. Vraorg était… tout. Vraorg était tout. Il fallait le tuer, il fallait lui survivre…. Il fallait….
Il divaguait. Il ne se sentait pas bien du tout. Quelqu’un était là qui n’aurait pas dû assister à cela. Quelqu’un qui lui était lié, oui… des mots lui revenaient, du tréfonds de son désespoir…
Pour toujours et à jamais ?
|
| | |
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Ven 1 Mai 2015 - 0:44 | |
| Trois années. Trois longues, éreintantes, années, qui lui avaient paru éternité. Ironie que celle-là pour un vampire tel que lui, pour lui à qui Temps était censé ne plus avoir d'emprise et être devenu insignifiant. Pourtant, oui, pourtant, il avait beau ne plus compter les nuits, il avait entendu s’égrainer chaque grain dans ce vil et cruel sablier du temps. Trois longues années passées à souiller son âme par ce serment avilissant, à faire taire son impatience et sa douleur lancinantes, à s'enliser lentement mais sûrement dans ce chaos et cette violence sanguinaires qu'on l'obligeait à semer. Combien de fois en avait-il hurlé de rage et d'impuissance honnies ? Combien de fois avait-il laisser son coeur saigner dans le silence de son agonie ?
Et alors qu'il commençait à perdre tout espoir qu'un jour, peut-être, ou qu'une nuit... Alors qu'il croyait toute possibilité révolue pour leurs deux êtres maudits... Après ces impitoyables éons,, enfin Vraorg lui donnait la possibilité de retrouver son aimé, son Prince, son Millénaire. Que cachait donc cette potentielle fourberie ? Il n'en savait rien, n'en avait aucune idée. Si ce n'est peut-être la vile joie de les séparer de nouveau après les avoir réunis... Oui, sans doute. Fort probablement même. Tout cela ne pourrait être qu'éphémère, une trêve passagère dans cette longue errance délétère. Mais qu'importait au final. Oui, qu'importait... même si ce n'était que pour une seconde, il pourrait le revoir, lui parler sans doute au moins une fois, le toucher peut-être, mille émois...
Oui, qu'importait ce qu'on leur accorderait. Eliowir prendrait tout ce qu'on lui donnerait, quand bien même ce ne serait qu'un rien, qu'un infime, qu'une miette dans leur éternel destin. Il voulait s'accrocher au peu qu'ils avaient, il voulait y croire. Se battre aussi, ne pas baisser les bras. Si pour lui, il ne croyait plus en rien, il se devait de croire pour son Millénaire. De croire qu'il pourrait le sauver, le libérer de ces souillures, des ces entraves éhontées, de cette longue agonie de l'âme. Oui, pour Lui, pour son Prince aimé, il se battrait, jusqu'au bout s'il le fallait, jusqu'aux limbes. D'ailleurs n'y était-il pas déjà en un sens dans les limbes ?
Quel effroyable spectacle toutefois que celui qui l'attendait. Oui terrible, horrible et bien funestes spectacle que celui de son aimé, son sage millénaire, son idéaliste de Père, assujetti à pareille infamie. Ô certes, Eliowir connaissait suffisamment son Melethril pour savoir qu'en son coeur, en son âme, un dragon des plus sombres, des plus féroces et des plus sauvages s'y terrait, dans le plus grand secret. Un secret qui lui avait été bien vite révélé, à lui, il s'en rappelait. Il n'était encore qu'un elfe quand il en avait eu les premiers signes. Leur première fois... si rude, si féroce, si âpre... et si douce aussi. Leur première crise, leur première jalousie, possessif qu'était son Achroma. Oui, il le connaissait, du moins en partie... Il le savait capable d'atrocités, oui. Mais...
Mais le millénaire avait nourri pendant tant d'années de forts idéaux de droiture et de justice... Non, cette justice-là n'était pas de lui. Elle ne lui ressemblait pas. Elle lui était imposée, il le savait, le sentait. Mille rumeurs lui étaient effectivement parvenues au sujet de son aimé, de ce Haut Juge implacable et redouté. Elles étaient finalement bien loin de la réalité. Cette justice était plus terrible encore que ce qu'on lui avait décrit. Aveugle, totalement aveuglée par la haine d'un fou, plus aveugle que lui-même dont les yeux morts avaient envie de pleurer. Mais ce fou n'était pas celui qu'on pensait. Ce n'était pas Achroma.
Non, le fou n'était que Vraorg, maudit soit-il, qui leur imposait de son implacable sceau toute cette sinistre mascarade. Avilis, asservis par cette marque abhorrée qui à jamais leur âme entachait. Mais il se battrait. Foi de vampire maudit, il se battrait. Il libérerait Achroma de ce sceau macabre. Quitte à devoir plus encore s'enliser lui-même.
Tout le long que dura l'agonie de l'accusé, Eliowir observa. Il observa oui, maudissant en cet instant ce diadème qu'on lui avait offert, ce diadème unique que son aimé lui avait donné, et qui lui permettait de recouvrer la vision. Lui, dont les yeux morts auraient pu échapper à pareille ignominie, dut ainsi se forcer à ne pas les détourner. Résolu à observer et endurer jusqu'au bout, la descente limbique de son amour comme devenu fou. Fou il était oui, fous qu'ils étaient tous, pensa-t-il en un songe amer, alors que les griffes de la jalousie étrangement l'écorchèrent. Oui, jalousie en lui fulminait. car au moins l'accusé avait-il eu le droit à être par Lui touché.
Un bruissement d'ailes qu'il ne connaissait maintenant que trop bien lui apprit que tout ceci se terminait. Enfin, enfin, cette folie prit fin, alors qu'était enfin assouvie une bien sinistre faim. Faim lui aussi avait soudain, mais ce n'était point de mort ou de carmin. Faim de lui, faim d'Achroma, faim de son Père, de son aimé, de son Millénaire ! Une faim qui toutefois ne pouvait s'exprimer qu'entre eux seuls.
D'un geste il congédia les deux gardes qui étaient venus avec lui, leur intimant de les laisser seuls et de faire sortir l'assistance. D'emporter le corps souillant le sol aussi, ne voulant pas s’incommoder plus longuement de sa mort languissante.
Comme il aurait voulu alors sur lui se jeter, l'enserrer, de son amour l'étouffer... Mais au lieu de cela, il dut se contenter de mots bien insipides, si creux, si déplacés...
- Sire Seithvelj, je vous prie de bien vouloir m'excuser de vous déranger en pareil instant, fit-il tout en s'inclinant révérencieusement devant son amant.
De cette ancienne révérence elfique, de ce salut cérémonial si empreint de profond respect et de considération inconditionnelle pour lui, tel le jeune vampire qu'il était, tel surtout le fils perdu revenant à son père en une si sombre nuit.
- J'aurais préféré le faire bien avant cette nuit troublée, mais on m'a retenu un certain temps, reprit-il d'une voix faussement calme, de son velours grave et rauque.
Mais où quiconque le connaissant pouvait entendre quelques notables inflexions. Emotions vives alors agitaient sa déraison. Un geste de lui, un mot, et il le dévorerait. Pour toujours et à jamais, susurrait une petite voix en lui.
Dans son émoi bien trop prononcé, il avait préféré ne pas se relever. Attendre. Tel un elfe le ferait devant un Ancien qu'il voudrait honorer. Attendre... et espérer... Pour toujours et à jamais, avait-il envie de hurler.
|
| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Jeu 7 Mai 2015 - 21:51 | |
| Il ne pouvait tourner la tête. Il n’osait tourner la tête. Il n’osait le braver, le voir… Il n’osait… Il ne pouvait lui faire face. Il savait qu’il était là, il le sentait dans sa chair et dans son âme. Il le sentait dans sa marque, et dans leur lien. Il le sentait, tout simplement. Ah ! Non ça n’avait rien de simple. Ça n’avait vraiment rien de simple, absolument rien. C’était tout sauf simple. Si ça avait été simple, il n’aurait pas eu si mal, si… mal. Il souffrait tant, de le savoir là, juste à côté, à quelques mètres à peine. Si ça avait été simple, il aurait tourné son regard sur lui, tout simplement, sans accroc, sans réticence. Pourtant il ne le pouvait, cela provoquait une telle cacophonie d’horreur en lui qu’il était certain de ne rien gagner, si ce n’était un avilissement encore plus profond, à croiser son regard. Figé, bloqué, comme frappé par la foudre, il restait là, immobile, les yeux grands ouverts, les doigts légèrement tremblant d’un tic nerveux. Son esprit révulsé refusait d’accepter le piège dans lequel il était tombé tête la première, s’outrageant de l’injustice cruelle avec laquelle on se jouait de lui. Non, il ne voulait, ne pouvait regarder. Il ne pouvait poser les yeux sur lui.
Serrant les crocs, il sentit des larmes carmines monter à ses yeux. Non… Pourquoi ? Pourquoi lui entre tous ? Il hoqueta, sa gorge tressauta alors qu’il ravalait des sanglots, crispant tout son corps, rejetant rageusement la peine atroce montant en lui en même temps d’une terrible vague de nausée. Non, non, non ! La dénégation tournait en boucle, furieusement, dans son esprit, et pourtant elle ne lui semblait jamais assez forte, assez violente, assez véhémente. Non ! Il refusait de tomber aussi bas ! Il refusait d’être de nouveau la victime d’un jeu aussi monstrueux ! Pourquoi ? Pourquoi ? Non… Cela ne se pouvait. Il avait… il était… Le tremblement de ses mains s’accentua. Il ne pouvait le regarder. Cela l’achèverait. Non… non cela ne l’achèverait pas, Vraorg ne voulait pas le voir mort, pas encore… Oh que la mort aurait été douce. Il voulait se jeter dans ses bras, il voulait l’enlacer, la supplier de le prendre, non ! Non il ne le voulait pas… il devait vivre, il devait survivre ! Il devait… il devait endurer, ainsi seulement… penser, oui, sa lueur, sa lueur d’espoir, Edwyn… Edwyn lui avait dit qu’il y avait une lueur, une lueur pour le futur, il devait vivre pour cette lueur….
Ne pas regarder. Il ne pouvait regarder. Il ne devait pas regarder. Non cela ne se pouvait… Il refusait d’être la marionnette d’une aussi pitoyable pantomime. Non ce n’était pas… possible. Eliowir, entre tous ? Vraorg l’avait torturé avec le souvenir de ses proches, il lui avait broyé le cœur et l’âme avec leurs trahisons, l’avait accablé de détails, d’anecdotes, jouissant sans pitié de l’affliction qu’il lui causait, il n’avait eu de cesse d’imprimer jusque sur son corps et son âme les affres de ces félonies. Chaque détail… il connaissait chaque détail de leurs exactions, chaque détail de leur renoncement. Ils l’avaient renié, ils l’avaient abandonné… Abominables traitres, vile engeance ! Ils lui avaient brisé le cœur ! Complices de Vraorg Il ne voulait pas le voir, il ne voulait pas souffrir encore une fois, constater de visu tout ce qui l’avait accablé pendant trois ans. Il ne pourrait pas le supporter… Sa gorge lui faisait si mal, comment était-ce possible ? Il était mort et pourtant… Il n’avait pas mangé depuis un mois, il n’avait rien à vomir… et pourtant il se sentait capable de recracher ses organes.
De petites inspirations nerveuses le trahissaient. Il serra instinctivement les poings pour contrôler ses tremblements. Un piège… On lui avait tendu un piège. Il l’avait vu… mais non, l’autre était un félon, un parjure, il devait déjà savoir, sans doute n’était-ce pas la première fois qu’il venait admirer ce à quoi il prenait part. Oui… oui il devait déjà avoir vu… Il en était certain…. Mais… et si ce n’était pas le cas ? Et s’il n’avait rien vu et si… Pourquoi était-il là ? Mais pourquoi donc était-il là ? Pourquoi venait le torturer encore, pourquoi venir le hanter en réveillant tout cela ? Il aurait voulu la hurler, sa question. Pourquoi ? Les questions, la voix le glaça… Cette voix… elle lui était encore plus insupportable que sa présence. Non il ne voulait pas de cette voix, lui… il la prenait… il la prenait quand… quand il le torturait… il la prenait pour le faire souffrir… Priez tant que vous voulez, je n’ai aucune absolution à vous offrir rétorqua-t-il sèchement, contenant tout sentiment que sa voix aurait pu laisser transparaître, accentuant la note étranglée et sourde dans celle-ci.
Il ne voulait pas le voir, il voulait qu’il parte ! Il voulait qu’on le laisse seul ! Il avait mal… il avait si mal… Non il mentait, il mentait ! Mensonges !! Tout cela n’était que mensonge ! Il aurait tant voulu… ô douleur… que cela s’arrête… il devait le tuer… il devait… fuir ! Il ne voulait pas lui parler… il n’avait pas besoin de parler ! Parler le rendait malade ! Et pourtant… pourtant il répondait… pourquoi ? Pourquoi répondait-il ? Piège… Piège ! Je ne doute pas que vos devoirs vous retienne, Sombre Garde. Mais je suppose que vous savourez à présent votre vicissitude à sa juste valeur. Le résultat est-il à la hauteur de vos attentes ? Félon ! Aurait-il voulu hurler, rugir… Et pourtant il n’y parvenait pas, cela restait coincé dans le fond de sa gorge. Pour toujours et à jamais ? Quelle blague… non il n’y avait pas de pour toujours et à jamais, il n’y en avait plus, démoli par Vraorg et par cette créature qu’un jour il avait tant aimé, follement aimé. Déglutissant, la mort dans l’âme, il se résolu à se retourner enfin, comme poussé par quelque pulsion incontrôlable. Non, non… Pitié non ! Il ne voulait pas ! Et pourtant… il tournait… toujours…
Larmes retenues, voix étranglée, devant cette forme aussi honnie qu’adorée… Relevez-vous donc, ou allongez –vous que je vous piétine, mais cessez votre veule comédie, je ne suis pas votre dieu pour vous voir vous inclinez ainsi…
|
| | |
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Mer 13 Mai 2015 - 1:48 | |
| Etait-ce des... sanglots... qui agitaient soudain le noble vampire devant lui ? Etait-ce... pleurait-il ? Pourquoi ne se tournait-il pas ? Ne voulait-il pas le voir ? Le rejetait-il ? Etait-il horrifié de le voir ? Que... Pourquoi... Etait-ce... Tant de questions s'agitaient, se bousculaient, s'emmêlaient soudain en lui, en son esprit... Pourquoi, qu'est-ce, que signifie tout cela, avait-il envie de hurler. Mais il s'en abstint. D'autant plus quand enfin la voix tant aimée lui répondit.
Priez tant que vous voulez, je n’ai aucune absolution à vous offrir Une voix dure toutefois,polaire, dénuée de tout accent soyeux tant désiré, une voix qui soudain l'incendiait sous le feu de sa froideur et de son âpreté. Eliowir sentit le fouet de la douleur lui lacérer le coeur et manqua de flancher sous la férocité du coup porté. S'il n'était pas déjà courbé en une elfique révérence, sans doute aurait-il chanceler sous l'impact violent.
Mais la voix ne s'en tint pas là. Alors que son prince lui tournait toujours le dos, en un signe évident de rejet.
Je ne doute pas que vos devoirs vous retienne, Sombre Garde. Mais je suppose que vous savourez à présent votre vicissitude à sa juste valeur. Le résultat est-il à la hauteur de vos attentes ?
Cette fois douleur menaça clairement de le consumer totalement. Son esprit encore affaibli par l'étrange expérience qu'il avait vécu avec une certaine Mère des Tempêtes menaçait de complètement basculer dans l'irraison la plus folle. Il le rejetait. Lui, entre tous, pour qui il avait tout donné, pour qui il s'était damné, de maintes et maintes façons, pour qui il s'était auprès du Dragon Blanc avili et pour qui on l'affublait du sceau de trahison... Il le rejetait. Et le damnait ainsi à errer dans les limbes du désespoir et de la douleur éternels, pour toujours et à jamais.
Pour toujours et à jamais, lui souffla une petite voix en lui, tentant de le tirer des abysses dans lesquelles déjà il glissait.
Relevez-vous donc, ou allongez –vous que je vous piétine, mais cessez votre veule comédie, je ne suis pas votre dieu pour vous voir vous inclinez ainsi…
Tel un pantin dont soudain on actionnait les fils, il se releva, sous les ordres du Conteur, sans même s'en rendre compte. Ses yeux morts se fixèrent sur ce visage aux traits altiers qu'il aurait tant aimé redessiner, mais ils ne virent pas vraiment, perdus qu'ils étaient à contempler d'autres peintures tissées par son âme errante et condamnée. Il n'était pas son dieu, disait-il ? Non, il ne l'était pas, il était son Prince, et bien plus que cela... Il était son Millénaire, son noble Père... Il était son amant honni, son aimé maudit... Il était son... son...
Son pour toujours et à jamais, lui souffla de nouveau la petite voix. Oui, souviens-toi. Maintenant souvenirs sont là, certes certains encore enfouis, mais... Là, oui, souviens-toi de cette nuit... De cette nuit où ton corps tu lui donnas, ton âme tu lui offris, et ton sang tu damnas pour le suivre dans ses éternelles nuits... Oui, souviens-toi..
Et il se souvenait. Grâce à une Mère des Tempêtes... Oui, il se souvenait. De tout. Sa vie, son passé, ses crimes, ses peurs, ses sentiments, son amour, son désir, son... aimé. Son aimé par dessus tout, dont les souvenirs enfin entiers avaient été les premiers recouvrés. Il s'était damné pour lui, et pour lui se damnerait encore. Oui, il se souvenait. De son expérience avec la belle dragonne, il avait certes failli en ressortir fou, mais en était revenu finalement plus fort et plus... entier. Plus lui-même. Pleinement lui-même. Avec toutes ses faiblesses certes, amère culpabilité qui de nouveau menaçait de le ronger quand il explorait un peu trop ce lointain passé, mais aussi toutes ses forces. Dont l'une, une fois encore, était Lui.
Lui, lui, toujours lui, encore lui. Tout tournait autour de Lui. Le savait-il seulement ? En avait-il seulement conscience ? Lui... Oui, pour lui il s'était souvenu et pour lui il se souviendrait encore. Il n'oublierait pas l'espoir fou qui l'avait agité quand il avait accepté cette marque honnie. Et il le lui insufflerait. Oui, songea-t-il, une lueur soudain déterminée s'allumant dans ses orbes de glace bleutée, oui, de force s'il le fallait, espoir il lui insufflerait.
Dans sa douloureuse agonie et sa lente résurrection des limbes de son esprit, il n'avait pas vu, pas senti, que son Prince s'était retourné. Il n'avait pas pris garde, il devait avouer, que dans ses méandres de songes désespérés, il s'était comme fermé soudain au monde, ses sens envolés, et son diadème ensommeillé. Ce n'est qu'à cet instant que la pierre de zircon scintilla de nouveau et que la vision de son cher et tendre l'illumina de tous ses feux obscures, faisant étinceler ces yeux d'une lueur de joie infinie.
Enfin. Enfin il le voyait. Il était là, devant lui. Après tout ce temps. Il en aurait pleuré. Non, en fait il pleurait, constata-t-il, mortifié, quand il sentit le liquide carmin couler sur la peau froide de ses joues.
Long silence fut sien l'espace d'un instant qui lui parut languir... avant qu'en fin sa voix grave et profonde ne reprenne vie.
- Vous n'êtes pas mon dieu, non, vous êtes bien plus pour moi.
Il tenta de ne pas flancher sous le regard acéré qui le dardait et menaçait de lui déchirer de nouveau le coeur, et continua en insufflant à sa voix toutes les inflexions de vérité qu'il pouvait. Songeant de toute façon, que le hibou saurait la détecter bien mieux que son maitre entêté.
- Vous êtes mon Père, mon tendre millénaire, pour qui je me bats. Vous êtes mon Prince, de ténèbres illuminé, vous êtes mon amant maudit, mon éternel aimé. A vous je suis lié, pour toujours et à jamais.
Il osa faire un pas. juste un seul. Comme s'il craignait d'effrayer le dragon sauvage qu'il avait en face de lui.
- Oui, je me souviens, de tout, de nous, de vous. Oui, souvenirs me sont enfin revenus, traitres d'eux. Mais enfin je me souviens, ils sont miens, depuis peu. Si vous saviez comment, vous me traiteriez de fous.
Mais là n'était pas la question, s'avisa-t-il. Il avait un ombrageux dragon à dompter et vite... avant que l'idée ne lui vienne de le chatier.
- Piétinez moi si vous voulez. Faites de moi ce que vous désirez. Je suis vôtre, tout entier. Je l'ai toujours été, je le suis et encore le serai. Oh oui, je devine ce que vous pensez. Traitre, vous voudriez vous écrier. Traitre, toi qui t'es avili et à Lui s'est enchainé. Oui, traitre sans doute en un sens. Mais ma traitrise porte un nom : amour en son essence. Oui amour... je me suis lié, enchainé, portant une marque honnie, par amour pour mon millénaire maudit.
Un autre pas encore, et cette fois sanglot lui échappa presque, l'obligeant à détourner un instant la tête pour se reprendre, en même temps que tout le poids qu'il avait essayé de porter ces trois dernières années menaçaient de le faire succomber. Le poids de la culpabilité d'avoir ainsi cédé, d'avoir choisi cette option folle et irraisonnée, dans un espoir tout aussi fou que de vouloir le libérer. Culpabilité de devoir commettre certaines ignominies qui l'abjectaient et qu'il savait qu'elles abjecteraient tout autant son prince aimé. Culpabilité de se retrouver ainsi si impuissant, si incapable, si... si indigne de son père.... si... si... impuissant.
Sauf peut-être... Si son idée qui se dessinait, folle qu'elle était... Si son idée avec son serval...
une vive douleur le vrilla, qui le surprit tant qu'il en ferma les yeux, crispant les poings. Et soudain, il réalisa...
Oui il devait le lui dire. Pas tout, surtout pas tout, lui qui par la marque était aussi lié. Ou par une autre, qu'importait... Non, pas tout, juste ce que le Blanc savait déjà. Lui dire oui, il le devait et vite... avant qu'il ne le puisse plus, consumer par la douleur qui déjà montait rien qu'à cette pensée....
- Mon millénaire... Ne me suis-je pas maudit avec lui, pour lui et par lui ? Ne lui ai-je pas promis de le suivre sur les sentiers de son éternelle nuit ?
Il reporta toute son attention sur Achroma. Puis... Un pas encore. Serrant les poings et se mordant les lèvres sous la douleur, un croc déjà la balafrant plus encore sans qu'il n'y prenne garde. Non, il ne pouvait laisser la douleur s'intensifier. Il ne pouvait la laisser le dominer. Il devait pouvoir lui dire, lui révéler... Et pour cela, il devait controler ses pensées. Oui, controler ses pensées, chasses tout songe de trahison, tout complot, toute trame de rébellion. Oui, voilà, les chasser. Ces pensées-là, il n'avait de toute façon pas besoin de les lui révéler. Il les déduirait peut-être, mais il n'avait pas besoin de lui dire tous ses projets... Juste l'essentiel.
Juste ce que Vraorg déjà savait. Juste ce qui n'était donc pas trahison, mais juste fait. Oui, voilà... Pensées chassées, douleur passée...
Il ne put retenir un léger soupir de soulagement, alors que son corps se sentait libérer de cet étau enfiévré. Il se permit alors un fin sourire, empreint d'une nostalgie ancienne, de cette nostalgie qui l'avait baigné dans sa vie d'elfe et qui le pourchassait dans sa non-vie de vampire, quand il releva des yeux calmes et sereins sur Achroma, prêt à subir le juste châtiment qui serait sien.
- Pour vous, je ferais tout et n'importe quoi, mon aimé. Pour vous, je donnerai tout et plus encore s'il le fallait. Car je vous suis lié, pour toujours et à jamais. Pour vous, je me suis lié à notre tyran oui, et en son nom est commis des ignominies. Oui je me suis avili, et, plus encore qu'il ne l'était, mon nom est honni. Mais tout cela, si je l'ai fait, c'est dans un espoir fou... L'espoir... de vous libérer, oui pour vous, rien que pour vous. Vous mon dragonnier...
Un pas encore, cette fois il était juste devant lui. Il aurait tant voulu l'embrasser, l'étreindre dans ses bras, le prendre là, le rassurer, le... mais il ne le fit pas. Il ne le pouvait pas, pas encore, même s'il ne savait pourquoi. Quelque chose le retenait. Peut-être la peur que l'autre ne veuille plus de lui. Le rejette. Le renie. A tout jamais.
Assurément, il en mourrait. Mais si tel était le choix d'Achroma...
- Mon Melethril, mon aimé...
Au lieu de cela, il se contenta donc de lever une main hésitante, en ce geste si commun pour lui, si coutumier, que de celui de voir avec les mains. Sentir de nouveau ses traits qu'il aimait tant, ses traits qu'en son esprit il avait si souvent redessinés et qu'il rêvait de sentir de nouveau sous ses doigts... |
| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Ven 15 Mai 2015 - 20:43 | |
| Il se relevait… peut-être n’aurait-il pas dû. Peut-être… aurait-il préféré qu’il ne se relève pas ? Qu’il resta ainsi, prostré ? Qu’il lui donner l’occasion de le détruire, d’apaiser un tant soit peu sa souffrance ? Cette souffrance dont il était l’un des instigateurs. Peut-être que oui. Oui, d’une certaine façon, il se sentait prêt à céder à la facilité immédiate, à vouloir le broyer là tout de suite. Il se haïssait de tant chercher le soulagement le plus prompte mais… mais était-ce à ce point incompréhensible, lorsque l’on était plus qu’une bête blessée ? Il savait… Il savait… Il n’était plus qu’une misérable créature qui cherchait à consumer tout réconfort qu’il pouvait s’offrir, et peu importait si ce palliatif ne durait qu’un instant, tant qu’il pouvait en obtenir la jouissance désespérée d’une simple seconde sans douleur. Il n’était qu’un imbécile, une chose inepte incapable de se retenir, brûlant le peu d’apaisement qu’il pouvait trouver comme le gouffre sans fin, la béance d’un incendie monstrueusement délirante. Pour l’euphorie d’un simple instant, il aurait détruit tout ce à quoi il avait un jour tenu. Méprisable, si méprisable… Il savait, pourtant, un coin de son esprit, atrocement conscient savait. Cette jouissance n’aurait été qu’un piège de plus, un chausse-trappe qui lui aurait causé plus de douleurs encore.
Oui, au final peut-être mieux valait-il qu’il se relève. Il souffrait, il en souffrait, mais au moins était-ce une douleur un lambeau plus sain que celle qu’il aurait vécu à l’avoir détruit. Ne pouvait-il simplement partir ? Voulait-il le faire de nouveau souffrir ? Etait-ce vraiment si amusant pour lui ? Par tout ce qui existait, était-il donc destiné à n’être qu’un jouet pour lui ? Pourquoi… et pourquoi pleurait-il ? Pourquoi pleurait-il ? Qu’était-ce encore que cela ?! Pourquoi jouait-il la comédie ? Ou… était-ce des larmes de joie ? Non ça n’en avait pas l’air... pourtant il n’avait aucune raison de pleurer. Il n’avait que ce qu’il avait voulu non ? Il n’avait que ce qu’il avait vendu à Vraorg ! Ce devait être un piège encore une fois ! Un nouveau piège pour le faire douter et avec le doute, tenter de ranimer un maigre espoir… Mais non ! Non ! Il n’avait plus qu’un espoir ! Il n’avait plus que la promesse d’Edwyn… Il ne pouvait se raccrocher qu’à cette promesse ! Ces pleures n’étaient rien… c’était un piège, ce devait être un piège… pourquoi aurait-il pleuré ? A moins que… à moins que quoi ? Non, rien du tout, cela ne se pouvait… mais à moins que… non, était-il seulement déçu de ce qu’il voyait ?
Une horrible ironie lui emplissait soudain la bouche. Se pouvait-il seulement qu’il n’apprécie pas, finalement, ce qu’il avait fait ? Se pouvait-il seulement que la vue de son forfait ne soit pas à la hauteur de ce qu’il en avait imaginé ? Oh… qu’il pleure donc… si seulement son méfait ne lui était plus si doux, mais il ne tomberait pas dans un tel piège. Il le refusait ! Pinçant les lèvres, il lui fallut toutes ses forces pour ne pas grimacer. Il ne voulait pas l’entendre ! Bien plus… comment pouvait-il être plus hein ? Mais au-delà de cela, il sentit sa marque lui tordre l’âme. Hérésie ! Blasphème ! La part de son esprit corrompue et abandonnée à l’asservissement du Voleur de cœur gronda. Blasphème ! Rien n’était au-dessus de Vraorg ! Rien… Non, non, non… Il ne devait pas se laisser déborder ainsi, il ne devait pas se laisser asservir et manipuler, il ne devait pas… il ne devait pas se laisser corrompre ! Il ne fallait pas ! Il n’était pas son jouet, il n’était pas son esclave ! Il ne lui donnerait jamais satisfaction il le refusait ! Il ne céderait pas à la marque ! Il fallait qu’il combatte !
Penser… penser à cette lueur, penser à ce futur espoir, penser à la fin… la fin… La fin de Vraorg… Oui penser à la fin de Vraorg, à son sang quittant son corps, à ses entrailles déchirées, à ses ailes mises en lambeaux, à ses crocs brisés… il voulait le tuer, oh qu’il voulait le tuer… Il en avait des papillons dans l’estomac et son corps se crispa un bref instant. Oh oui, le tuer, peindre la citadelle de son sang et de tous ceux qui le suivait… oui… Non… Non il ne devait pas, si, si, il devait ! Il devait vouloir sa mort… Il voulait son sang, il avait besoin de son sang, il avait envie de son sang… Il en avait tellement envie… Il en tremblait rien que d’y penser. Le sentir… chaud et brûlant, douloureux sur son corps… Oui, il s’en marquerait jusqu’à l’âme et hurlerait son triomphe jusqu’à en secouer les étoiles elles-mêmes. Il voulait entendre son cœur décliner et en jouir, totalement, follement… Il voulait sa mort et il voulait détruire jusqu’à la plus petite parcelle de son être… de tout ce qu’il était.
Les paroles d’Eliowir n’étaient qu’une cacophonie distante derrière les halètements de son esprit enfiévré. Et pourtant il en comprit l’essence sans parvenir à les croire. Ses sens magiques lui disaient qu’il ne s’agissait là que de vérité mais… mais non ! Non cela ne pouvait être vrai ! Il ne parvenait pas à y croire ! Il n’y arrivait pas ! C’était impossible ! Il sentait son esprit se fêler encore davantage, il se sentait brisé, écartelé… Non, cela ne se pouvait ! Il était incapable d’y croire il était… Douleur, Souffrance… il avait si mal, tellement mal… mal à en crever… si seulement… si seulement il pouvait… Il n’en pouvait plus, il ne parvenait même pas à bouger ! Il ne pouvait croire tout cela… quelque chose, quelque chose se brisait en lui, loin en lui… ses yeux s’ouvrant tout grand… Non… qu’il ne le touche pas, non qu’il ne touche pas… Il ne voulait pas souffrir, il en avait assez… assez… assez…. Assez ! croassa-t-il d’une voix brisée et il recula enfin, les gestes nerveux et presque spasmiques. Il le regarda avec une horreur absolue, incapable cette fois de se cacher…
Aimé ? Aimé ? Il avait l’impression qu’il allait littéralement imploser et pourtant, venu d’il ne savait où, il trouva le moyen de poursuivre sans s’effondrer sur le champ. Ne m’appelez pas aimé… pas après… Il serra les crocs et inspira plusieurs fois afin d’essayer de conserver un reliquat de contenance. Sa magie vint déployer une bulle de silence autour d’eux, empêchant les oreilles indiscrètes d’entendre leur conversation. Alors seulement il se laissa aller… là, il laissa s’échapper le sang invisible de sa plaie psychique. Il vomit là tout ce qu’on lui avait infligé, tout ce que Vraorg lui avait dit de ses exactions, de sa trahison, tout ce qu’il avait été forcé de voir et de vivre, tout ce qu’il avait provoqué, lui et ceux qu’il avait appelé, un jour, son entourage. Il parla, parla… toutes leurs valeurs piétinés, tous les viols de ce qui avait été son affection pour lui… Il cracha tout cela d’une voix brisée, blanche et vibrante d’une souffrance et d’une colère abominable mais contenue, qui ne pouvait s’exprimer.
Puis il se tut enfin, l’observant toujours, craignant de tomber en morceaux en un instant… dans le silence déchirant, il reprit son souffle et déglutit avant de se détourner à moitié. Osez seulement me dire encore une fois que je suis votre aimé… vous m’avez détruit, vous m’avez brisé… que voudriez-vous donc faire pour moi que ne sois pas un piège, un traquenard pour me perdre plus encore ? Que pourriez-vous donc faire pour ce qu’il reste de moi ? Pouvez-vous me donner une âme ? Un honneur, une dignité ? Pouvez-vous laver mes mains et mon esprit ? Que voudriez-vous donc libérer et pourquoi ? Je n’ai plus rien, il n’y a plus rien à libérer… je ne suis plus rien… à cause de vous… de vous tous… me libérer ? De quoi ? Comment… Comment pourrais-je seulement… vous accorder ma confiance… tant elle a été brisée…
|
| | |
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Mer 20 Mai 2015 - 2:17 | |
| Assez !
Cette voix, ce soudain éclat... Cela eut l'effet d'un fouet claquant soudain sur sa main, tant et si bien qu'il ne put que reculer et la retirer, la rapatriant contre sa poitrine comme si elle en était blessée. Son regard se fit un instant horrifié, terrifié même. Rejet.
Rejet ! Voilà tout ce qu'il voyait, ressentait. Voilà ce qui soudain le poignardait. Le seul, l'unique, qui jamais ne l'avait rejeté, qui toujours l'avait accueilli comme s'il n'était ni abjection honnie ni malédiction bannie... Le seul, l'unique, finalement le rejetait lui aussi. Et le fuyait même, comme son geste de recul le montrait.
Et l'horreur dans son regard... Finalement lui aussi voyait l'abomination qu'était l'ancien elfe. Finalement vérité aurait-elle ouvert l'esprit et le coeur de son aimé, qui dès lors ne pouvait plus supporter la vue du balafré ? Il aurait pourtant dû le savoir. Il aurait pourtant dû s'en douter. Un tel lien, un tel amour... Cela était bien trop beau pour lui, bien trop donné. Tout cela ne pouvait qu'avoir une fin...
Mais alors les "pour toujours et à jamais" n'existaient-ils pas ? N'avaient-ils jamais existé ? Ou peut-être n'était-ce que pour les autres ? Non, songea-t-il, le coeur en miettes et l'esprit consumé de folle fièvre, non, pas pour les autres. Pour lui, cela existait. Même si jamais ils ne lui seraient partagés, il pensait, il ressentait, ces "pour toujours et à jamais" pour son millénaire de prince. Et quand bien même plus jamais ils ne lui seraient retournés, il ne les abandonnerait pas pour autant sur le bas côté.
Son aimé le rejetait ? Soit, qu'il en soit ainsi, si tel était son souhait. Mais lui à son triste sort ne l'abandonnerait jamais. Il se battrait encore pour lui, pour son Melethril, dans l'ombre s'il le fallait, à son insu puisqu'il en était ainsi. mais il n'abandonnerait pas la lutte. Et en silence souffrirait. Comme il avait souffert en silence ces trois dernières années. Il avait bien appris tout ce temps. Se taire, taire sa douleur, sa souffrance, laisser son coeur pleurer martyr dans les abysses de son âme torturée, et continuer à avancer, lentement, insidieusement, dans le lent et dangereux projet qu'il nourrissait. Oui, il avait bien appris, beaucoup appris, que ce soit ces trois dernières années ou les longues et douloureuses années d'elfe de son passé... Que ce savoir lui serve alors à continuer malgré son amour rejeté.
Rejeté... Il savait ce que c'était. L'avait déjà enduré, l'endurait aujourd'hui aussi... pourquoi ne pourrait-il pas l'endurer encore ? Et que cela vienne de son presque lié ne changerait pas la donne. Tant que pour Lui il se battait... Et quand ce combat-ci serait fini ? Quand son aimé serait libéré et en sécurité ? Et bien... Il aviserait.
Ou assurément il mourrait, si ce n'est de Vraorg, sans doute de peine écartelé. Mais qu'importait. La mort viendrait. Mais en son temps, quand il en aurait fini de la tâche qu'il s'était fixée.
Il en était là de ses pensées, quand la magie craqua autour de lui. Une bulle de silence les entourait. Se forçant à revenir au temps présent, sans se rendre compte que vision s'était effacée, la pierre de zircon éteinte sous l'étreinte de ses sombres pensées, il reporta toute son attention sur son aimé. Et dut déployer des efforts inestimés pour de nouveau voir les traits du millénaire se dessiner.
Il écouta. Calmement. Tranquillement. Offrant à son prince tout ce qu'il avait d'attention aimante. Ecoutant avidement aussi. Son coeur saignant, son âme pleurant, et son sang charriant agonie. Mais il se tut, ne fut que statut polie. Attendant sagement que le flot violent de ce torrent tempétueux s'écoule jusqu'à la mer de souffrance qui noyait son amant ténébreux.
Oui noyé, voilà ce que réalisait soudain le jeune vampire. Noyé, désespéré, broyé, voilà ce que son amant devait souffrir. Oh certes, lui aussi, ces trois dernières années, il s'était senti perdu, seul et abandonné, jeune vampire jeté dans une sombre fosse aux lions affamés, jeune né qui devait tout réapprendre seul et lutter, seul encore et toujours, de son père séparé, seul à devoir surnager dans cette mer enfiévrée, ne pas se laisser justement par le désespoir et l'impuissance noyer. Si emplis de questions, toujours sans réponse, si... si... Mais la noyade qu'il avait en face de lui était tout autre. Et il se sentit face à elle tout aussi impuissant. Et si lui-même souffrit de ce discours dévastateur, si lui-même se sentit déchiré, morcelé, disloqué dans les méandres de ce chaos destructeur, il souffrit plus encore de ce que son aimé avait dû endurer.
Etrangement toutefois, au lieu de le plonger plus encore dans un sombre désespoir, cela lui insuffla une force étrange qu'il n'aurait pas cru nourrir en son coeur noir. La force de lutter plus encore, la force de se battre, combattre, et d'abattre tous leurs ennemis. Tous, autant qu'ils étaient, allaient apprendre ce que vengeance signifiait pour cet ancien elfe banni. Tous deux semblaient se noyer chacun de leur côté et son prince semblait presque avoir touché le fonds ? Soit, alors il apprendrait à nager pour deux et les ramènerait coute que coute sur les berges en amont. Aussi fangeuses qu'elles étaient, elles seraient toujours plus sûre que la vase de ce lac boueux. Et là il pourrait faire déferler les vagues de son ire sur ce spectacle odieux.
Un lourd silence plana lorsque le millénaire en eut fini, ses derniers mots voletant encore entre eux longuement, comme cherchant à s'ancrer plus encore sur les lambeaux de leur âme. Un lourd silence, où seul se fit entendre l'écho de tous les cris silencieux que son aimé devait retenir. Eliowir les entendait pourtant, soudain, ces cris et il avait alors envie de rugir.
Mais au lieu de cela... Au lieu de cela, il s'avança d'un pas, tout son corps jusqu'alors tremblant se forçant à une féroce sérénité. Sérénité, il devait en gagner. Patience aussi, lui qui en était pourtant si peu doté. Mais que ne ferait-il pas pour lui, pour son aimé... Oui, pour lui, il saurait taire toutes ses rancoeurs, toutes ses blessures, pour lui il saurait oublier tous ces mots qu'on lui avait jetés et qui le traitaient presque de vile ordure. Pour lui, il saurait devenir fort et puissant, armure invincible contre tous les coups honnis, pour lui il se transformait alors en bastion imprenable pour faire front à tous leurs ennemis... Oui, pour lui. Voilà la promesse qu'en silence il se faisait.
- Oui, j'ose encore vous appeler aimé. Melethril, père, amant, prince, aimé... Voilà tout ce que vous êtes pour moi et plus encore dans mon coeur lacéré. Sombres et viles manipulations des songes, que ces fausses vérités que vous m'avez contées. Elles sont si savamment mélangées à de sombres mensonges... Moi-même ne saurait vous dire le faux du vrai entier... Fourbes ennemis qui ont su insufflé en votre esprit, tous ces cauchemars éveillés en nous forçant à ce jeu honni.
Il ne put s'empêcher un las haussement d'épaules, alors que sa voix grave descendait encore d'un octave.
- Oui, sans aucun doute, ai-je fauté. Je n'aurais peut-être jamais dû me plier. J'ai pensé qu'en me liant à lui je pourrais vous libérer.
"Et je le pense encore, sombre idiot que je suis", souffla une petite voix en son for intérieur, en même temps qu'une douleur le vrillait.
- Sans aucun doute ai-je fauté d'être si impuissant, si... Tant d'abjection que j'ai commise encore, si souvent.
Oui, sombre garde qu'il était. Des crimes il en avait commis encore et encore... et encore et encore en commettrait.
- Je m'en veux oui, de cela, et de plus encore, oui, bien au-delà. Je m'en veux de ne pas avoir su à cette marque désobéir, de devoir par des actes horribles m'avilir, et vous avilir, vous, et votre honorable nom aussi. Je m'en veux de vous avoir en un sens trahi. Oh pas comme vous le croyez, pas comme on a voulu vous le faire croire. Mais en n'étant pas alors à la hauteur de vos valeurs, de votre noble enseignement et de votre bel étendard. J'ai essayé pourtant et j'essaye encore, malgré tout, apprenant seul, en silence, en patience, envers et contre tout. Mais...
Il releva les yeux, ces orbes claires qui n'étaient que pâle imitation alors de celles de son père, et affronta alors son aimé avec une lueur déterminée scintillant en eux.
- Oui, j'ose toutefois vous appeler mon aimé. Il n'y a que la pensée de vous libéré qui me fait avancer. Pour vous, j'offrirai tout, je donnerai tout, mon âme je livrerai s'il le fallait. Oui vous êtes tout pour moi, ma force et ma faiblesse, mon ire et mon ivresse. Pour vous j'ai tout donné, mon âme, mon corps et mon esprit. Pour vous j'ai traversé les limbes de votre éternelle nuit. Moi qui pourtant à l'idée de votre malédiction était nourri de terreur, je me suis jeté dans l'irraison et vous ai donné mon coeur. Il a cessé de battre pour vous, dépassant les affres de l'agonie. De vous, il est si épris et si fou, qu'il en a cessé sa belle harmonie, criant dans sa langueur votre nom. Et il le criera encore dans mille éons...
Pris dans son étrange élan, il ne s'était pas senti avancer. Pourtant, en cet instant, il n'était plus qu'un quelques centimètres à peine du millénaire. Un millénaire que soudain, il embrassa, sans préavis, attrapant rapidement et férocement sa nuque d'une main pour que l'autre ne fuit pas. Ce fut après ce rapide et brutal baiser, qu'il s'écarta quelque peu, et reprit, d'une voix chuchotant à peine ces mots éhontés :
- Je me souviens enfin. Oui, enfin souvenirs me sont revenus. Folie a bien failli m'étreindre, mais mon amour pour vous m'a retenu. Et mes premiers souvenirs retrouvés, savez-vous lesquels ils étaient ? Les vôtres, mon Prince, les vôtres, et de magnificence ils irradiaient. Notre première rencontre, notre premier émoi, nos premiers... eh bien... Mais aussi ma peur, mon attirance pour vous, tel un sombre aimant devenu complètement fou... mon trépas et ma résurrection, vous me tenant la main... Tout, je me souviens de tout, oui ! Je puis alors vous faire souvenir aussi.
Et de nouveau il l'embrassa, cette fois plus tendrement, donnant alors toute l'ardeur qu'il ressentait pour cet être aimé. Toute sa peine, toute sa souffrance, mais surtout tout son amour désespéré et son fol espoir irraisonné.
- Souvenez-vous vous aussi de ces souvenirs qui sont vérité, et non de ceux vils et fourbes, que cet être sombre vous a insufflés.
Une forte douleur l'irradia, l'obligeant quelque peu à lâcher prise en se mordant la lèvre. Il ne s'écarta pas pour autant. Pas totalement. Jusqu'à ce qu'une idée, folle et sombre idée, lui soit soufflée. D'un geste vif et rapide, dénotant les réflexes que peu à peu il avait acquis, il s'empara de sa dague accrochée à sa ceinture et en pointa la lame... vers lui, vers son propre coeur, la garde touchant presque alors le torse de son aimé, tant ils étaient encore prêts. D'un geste tout aussi rapide, il s'empara de la main d'Achroma et vint la faire s'enlacer sur la garde de la dague, au dessus de sa propre main, qui déjà glissait... laissant l'arme à son autre : à lui alors de décider.
- Et si vraiment vous ne me croyez, si vraiment pour vous nos souvenirs sont ainsi souillés, si pour vous je ne suis que vil être fourbe et cruel vous ayant trahi, alors allez-y, tuez-moi, plantez-moi donc cette dague en mon coeur, et arrêtez-en l'agonie.
Puis abaissant son front, comme l'offrant ainsi au millénaire, il ajouta, en un murmure à peine audible.
- Plongez également la dague de votre esprit dans le mien. Lisez en moi, lisez, tout, prenez mes souvenirs et voyez ce qui m'étreint.
|
| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Dim 7 Juin 2015 - 17:50 | |
| Il les entendait. Ses pensées… il entendait… ce n’était pas sa télépathie, pas… pas exactement. C’était la marque. Noire justice. C’était elle qui les lui faisait entendre, comme une moquerie, comme une ironique, comme un outrage de plus mais… ces pensées étaient distordues, révoltantes et totalement incompréhensibles pour la créature blessée qu’il était. Aucune autre douleur que la sienne ne lui était palpable et il n’en voulait pas d’autres, la sienne était bien assez ravageuse ainsi. Il ne voulait pas parler, il ne voulait pas de sa présence. Il voulait être seul. Il était fatigué, blessé, et il voulait simplement espérer laper ses plaies en silence et loin de toute autre créature. Pourquoi aurait-il voulu parler ? Les mots n’étaient que du vent. Des bouffées pestilentielles qui l’empoisonnaient. Qu’il s’en aille donc ailleurs. Qu’il s’en aille rependre ce venin à d’autres oreilles, lui n’en voulait pas, rien de ce qu’il pourrait dire ne réussirait à le soulager de sa peine et de ce qu’il avait créé. Son carcan de chagrin était le don de ce soit disant amour… si c’était cela, l’amour, si c’était ce qu’il était devenu, plante nourrie de ces champs pestiférés de la théocratie alors… il n’en voulait pas. Cœur de plomb il serait, cœur de pierre ou d’acier, loin des affres et des humiliations, plus rien ne le toucherait. Mais c’était trop simple de le signifier, bien plus compliquée, l’application était. Et bien incapable, il se sentait. Incapable et démunis face à ce monde devenu fou, n’ayant que cette folie rampante et ce désespoir cuisant pour bâtir les fondations de ses boucliers.
Mensonges ? Il appelait ses exactions des mensonges ? Pourtant il les avait vus, de ses yeux, vu ! Il avait senti la cruelle morsure de la désillusion, il avait senti son cœur se briser en tant de fragments qu’il serait impossible de le reconstituer. Jamais. Le libérer ! Ah et quel mensonge était-ce là alors ? Vérité ? Mais quelle vérité pouvait-il y avoir là ! Il ne serait jamais libre, alourdit de tant d’impositions magiques, tant de marques et plus aucune force véritable… pourtant il survivait dans cette unique optique. Il survivait pour reprendre sa liberté, mais n’avait aucun espoir de l’avoir. L’ironie, plus mordante encore que son tourment, manqua l’achever sous la lueur de cette découverte. Il vivait… survivait, pour un espoir lointain, alors qu’il n’en avait aucun lui-même quand bien même il tentait de s’en persuader. Il ne pouvait pas avoir d’espoir, il ne pouvait pas se l’approprier… et au final ? Il se mentait à lui-même, s’imaginant encore qu’il aspirait à une quelconque lumière, dans un utopique futur, alors qu’il n’en était plus capable depuis déjà un long moment. Ce que mille années de cheminement et de peine n’avaient pu accomplir, Vraorg l’avait fait. Aveugle et sourd à toute autre chose que cette abominable constatation, ignorant de cette litanie qu’un oisillon tentait de lui gazouiller, il regardait fixement devant lui, amaurose, incapable de se soustraire à la vérité qui, soudain, le frappait.
Non, il n’avait plus droit à l’espoir, il n’avait plus d’espoir. Même cette aspiration, il l’avait perdue. Son corps, sa peau même semblaient gourds et engourdis, ne ressentant plus rien ou presque. Sous la pression des lèvres ravageant les siennes, il releva légèrement un regard sans fixation, vitreux et ternis, éreinté. Il était fatigué… si fatigué… N’était-ce pas cela que l’on disait de la noyade ? Que l’on se sentait soudain fatiguer et que l’on sombrait en se laissant aller ? C’était ainsi qu’il se sentait. Il n’avait plus goût à tout cela, toutes les considérations personnelles de chacun autour de lui, tout ce que les autres pouvaient bien penser et ressentir ne l’intéressait plus… il s’en était soucié tant et tant qu’il en était à présent répugné et blessé. Poupée sans fils, il laissait à qui voulait prendre, mais aucun n’obtiendrait de lui une réaction volontaire, pas en un tel instant, et peut-être jamais plus. Se souvenir ? Non il ne se souvenait pas. Il ne se souvenait plus. Il n’y avait plus que la douleur, la folie, et l’envie de détruire Vraorg… plus même d’espoir à présent. Plus rien en lui ne pouvait nourrir un espoir véritable, cette petite flamme délicate qui éclairait les ténèbres. Il ne regarda pas la dague et à peine l’être face à lui. Lorsqu’il lâcha sa main, elle retomba sans force, la dague lui échappant pour s’en aller claquer sur le sol de pierre.
Je n’ai pas de souvenirs… souffla-t-il comme dans un horrible songe Il n’y a que de l’obscurité dans mon esprit… Enfin, son regard sembla réussir à se fixer sur lui, mais ils n’exsudaient plus rien si ce n’était de la fatigue. Prend ce que tu veux, le peu qu’il reste de moi si c’est cela que tu veux… que m’importe à présent, je ne suis qu’une coquille vide… ô que Mort me serait doux… si seulement je pouvais… prend, toi qui dit m’aimer, prend à ta guise, je ne puis plus donner, je n’ai rien à donner. Je n’ai plus ni honneur ni fierté, ni regrets, j’ai consommé mes regrets, je n’aspire qu’à un repos, une merci qui jamais ne viendra. Ma vie entière fut consacrée à d’autres… aujourd’hui tout ce que je demande c’est qu’on me laisse me déliter dans mes souffrances. Qu’importe, le vrai du faux, souffrance est ma seule vérité, voilà ce que j’en sais… à présent, dois-je t’en remercier ? Inutile, quelle valeur cela aurait ? Si tu m’aimes-tu achèveras ce cœur qui me tourmente. Engloutis-le si tu le désire que m’importe…
HRP : j'ai conscience que c'est loin d'être une performance, mais j'espère que tu me pardonneras, vu que c'est ma reprise ^^"
|
| | |
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Dim 14 Juin 2015 - 0:40 | |
| S'il avait pu voir ces perles éteintes qui ne le regardaient pas même, Eliowir en aurait certainement été blessé, peiné. Pas pour cette indifférence que l'autre lui offrait alors, pas pour ce dédain, ce mépris presque, dont il était soudain l'objet. Pas totalement du moins. Non, peiné surtout que le millénaire soit à ce point blessé, écorché vif, pour ne plus être capable de s'ouvrir au monde que pourtant dans le passé il chérissait tant. Peiné que son aimé, celui qui lui avait offert une non-vie, l'extirpant de la petite mort dans laquelle il s'était alangui, se meurt soudain à son tour peu à peu, sans les affres de la douleur qu'il endurait.
Le jeune vampire s'en trouvait alors désarmé. Totalement désarmé. Aussi bien physiquement, alors qu'ils laissaient la dague tomber à terre, et psychiquement, alors qu'il sentait son esprit de nouveau se faire délétère.
Je n’ai pas de souvenirs…
Fut là le glas pour lui. Plus de souvenirs. Quand lui les recouvrait, son autre les perdait. Quel cruel destin alors que celui qui les liait. Ne pourrait-il jamais, ô grand jamais, se retrouver enfin sereins, libres et en paix ? Ne seront-ils donc jamais réunis dans une même nuit de douce accalmie ? La fatalité s'amuserait-elle donc toujours à semer sur leur laborieux sentier d'âpres pierres aux arêtes coupantes qui n'attendaient qu'un faux pas d'eux pour les lacérer ?
Qu'il prenne ce qu'il voulait ? Mais.... n'avait-il donc pas compris ? Il ne voulait prendre, mais il voulait donner ! Donner la liberté, donner la paix, donner.... donner l'amour aussi, oui, il pouvait l'avouer. Il voulait donner, donner, et encore donner. Il avait déjà donné, donnait, et donnerait encore, tout ce qu'il avait en lui. Tout, absolument tout, sans concession aucune. Cela semblait comme... ancré en lui. Sans Achroma, sa non-vie n'avait plus de raison d'exister. Sans Achroma, les limbes seraient bien plus accueillantes que cette agonie.
Il voulait mort ? Alors si tel était son souhait, il la lui donnerait. Il ne savait comment, surtout face à tel puissant. Mais il la lui donnerait, la lui offrirait, comme le dernier cadeau de son amour, qui désormais semblait non partagé. Il le lui offrirait, et, lâche qu'il était, se l'offrirait ensuite pour ne pas endurer cette mort de l'âme après la mort d'un coeur par trop éprouvé.
La dague peut-être... non face à un vampire, elle serait bien futile. Le poison ? Non, bien trop long et d'une douleur bien inutile. Un croc de dragon ? S'il parvenait à le maitriser... il pourrait même, futile dernier rêve désespéré, enlacer son aimé, là, maintenant, et tous deux de ce funeste sort les embrasser... Oui, il pourrait essayer. Il pourrait...
Si tu m’aimes-tu achèveras ce cœur qui me tourmente.
Oui, il pourrait, se jura-t-il dans le lourd silence qui les enveloppa de son sinistre manteau. Il pourrait, pour lui, pour son Père, son millénaire, son prince... Pour ce toujours et à jamais qu'Achroma disait réduire en lambeaux. Il pourrait oui. Cela le tuerait, plus assurément même qu'un croc de dragon, mais... mais au final qu'importait ? si tel était là tout ce que son aimé désirait.
- Si tel est ce que vous désirez, si tel est le voeu que votre coeur appelle à grands cris, alors oui, je vous délivrerai... de cette vile existence qui vous honnit. Je vous offrirai mort, si tel est là votre seul souhait, votre seule liberté. Et si vous me le permettez, je vous rejoindrai aussitôt après sur ses autres sentiers. Sans vous je ne saurais, je ne pourrais, seul, continuer. Sans vous, cette non-vie ne serait que non sens éhonté.
Il ferma alors les yeux, lâcha un lourd soupir où s'étrangla un douloureux sanglot.
Il avait échoué. Il avait attendu bien trop. Il avait mis bien trop de temps, bien trop... A quoi servait donc d'avoir recouvré ses souvenirs, s'il perdait alors... s'il... souvenirs.... souvenirs.... et si ?
Et si... Pour lui ses souvenirs semblaient avoir été une clé. Ses souvenirs lui avaient révélé comment il pouvait... vile douleur qui soudain l'enveloppa de ses doigts glacés... vile douleur qu'il rejetta aussi d'une pensée enragée... Oui, après tout, si souvenirs avaient été pour lui une clé pour tenter d'entrebailler une porte, pour trouver la bonne serrure, pour essayer de faire entrer un peu de lumière dans cette sombre masure... si pour lui souvenirs lui avait permis de regagner quelque fol espoir, pourquoi n'en serait-il pas de même pour son millénaire aux abois ?
Et à cette idée, ses yeux morts de nouveau s'ouvrirent. Ils ne voyaient plus, ne voyaient pas, sa pierre de zircon éteinte dans ses sombres éclats, mais il n'avait nul besoin de ce sens là. Il se sentait soudain guidé par une autre force... de cette force qui dormait en lui, et qui dans les moments les plus étranges se réveillait. De cette force que la Mère des Tempêtes avait renforcée. De cette force qu'en lui, là, en cet instant, il sentait vibrer. Une force qu'il voulut alors avec son prince perdu partager.
Mais... folle idée que celle qui soudain l'agitait... et si cela le tuait ? Si cela ravageait le peu d'esprit, d'âme, qui, à son bel Achroma, semblait rester ? Et si.... Mais qu'importait ce "et si". Si cela échouait aussi... alors il tiendrait sa promesse. Et le tuerait de ses propres mains déjà ensanglantées, de sa propre âme déjà de mort entachée, il ferait rugir pour Lui les grandes ailes du noir corbeau... et effacerait ensuite sa propre existence de ce sombre écheveau.
Mais... il se devait tout de même d'essayer. Oui, il se devait... Pour Lui, pour la liée qui dans un désert l'attendait, pour une caste de dragonniers qui sans lui ne saurait exister, pour ce monde qui de son prince ténébreux dépendait, pour... non, pas pour lui. Il doutait que le millénaire finalement l'accepte de nouveau à ses côtés, lui, ce vile fils qu'il dénommait traitre, bourreau et lâche fourberie. Il doutait que de nouveau amour soit partagé, qu'il puisse se promettre à l'unisson un "toujours et à jamais". Ces mots... ces mots si doux, si beaux, qui l'avaient fait vibrer, qui l'avaient transcendé, et lui avaient fait franchir tous les fossés que ses elfiques pensées avaient pu ériger... ces mots si durs, si cruels alors, sombre écho d'un révolu passé... ces mots ne seraient plus qu'un souvenir ancré en lui, des mots qu'il penserait dès lors seul, délaissé... des mots qu'il murmurerait quand il franchirait le seuil du domaine de Mort... si tant est que ce dernier daigne l'accueillir en son sein encore...
Mais il se devait déjà de redonner à son noble millénaire, à son digne père, ce qu'il pouvait peut-être... l'aider à retrouver ?
- Je vous le promets, je vous offrirai Mort, oui. Là, maintenant, elle sera vôtre, dès cette nuit. Mais avant cela, si vous me le permettez... Laissez moi juste... laissez-moi tenter...
Et se disant, il approcha ses mains du beau visage qu'il ne voyait plus mais imaginait. Ses mains tremblantes qui se permirent un court instant d'esquisser à nouveau ces traits majestueux, ce menton dédaigneux, ces lèvres qu'il voulait ravager, ce front qu'il voulait embrasser, ce... Puis, se concentrant, laissant couler alors traitresses carmines sur ses propres joues pâles, il frappa d'un geste se voulant assuré les tempes d'Achroma.
Et s'empressa de rattraper le corps qui menaçait de tomber... tentant de ne pas flancher alors que la haute stature lui tombait dans les bras.
- Laissez-moi vous aider à retrouver les traces de vos souvenirs. Que par ce sort, votre esprit voit de nouveau clair dans le passé et l'avenir...
Il installa alors le corps à terre, tentant de rendre ce petit intermède le moins inconfortable possible, puis s'installa à genou, à son chevet, à ses côtés, tel le gardien des pensées agitées qui devaient en cet instant valser dans l'esprit de son aîné. Telle une statue de marbre qui restait au seuil de la demeure de ce millénaire, pour empêcher quiconque de violer cet instant intime et éphémère... Statue alors totalement immobile, aux traits figés, en une douloureuse expression, les yeux éteints sur un autre horizon, ses pensées s'étiolant dans les limbes de sa folie aliénée.
|
| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Mar 23 Juin 2015 - 17:31 | |
| Sans lui il ne pourrait ? Difficile à croire tout de même. Il avait pu pendant ces trois ans. Et pourtant il n'avait ni la force ni la volonté de le lui faire savoir… s'il voulait le rejoindre, que lui importait, en fin de compte ? Il le pouvait. Dans les bras de Mort, il n'y avait plus aucun conflit après tout, et au moins leurs âmes échapperaient-elles à une souillure plus profonde encore. Oui… dans les bras de Mort, tout irait mieux. Qui était-il, pour refuser le repos final à qui que ce soit ? Mort était un bienfait, le plus grand qui exista en ce monde sans doute. L'observant alors, il se demanda pourquoi il semblait si éperdu. Avait-il peur du trépas ? Il ne fallait pas, mourir n'était pas une mauvaise chose. Elle faisait partie du cycle naturel, elle était un répit véritable, en particulier pour ceux qui, comme lui, avaient trop vécu. Les ailes du corbeau n'étaient pas des ennemies, pas des agresseurs, pas de cruelles et froides amantes qui vous emportait loin de vos proches. Cela, c'était la vision des créatures éphémères, qui le temps d'un battement de cœur, d'un clignement d'éternelles paupières, disparaissaient, soufflés comme la flamme d'une bougie, sans comprendre qu'ils étaient fait pour cette brève existence et non pour perdurer, et que l'immortalité ne leur apporterait, en vérité, nulle joie ou soulagement… Oh Vraorg tentait de corrompre cet état, bien entendu. La douleur qu'il apportait, la souffrance, la peur rampante, et l'agonie déchirante… mais il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas qu'en tout état de cause, une fois Mort venu, tout cela n'avait plus la moindre importance et que le repos valait alors tous les tourments de cette terre. Il ne comprenait pas que son emprise disparaissait une fois par Mort fauché. Tous ceux qu'il avait tué… au moins étaient-ils à l'abri et ne souffraient-ils plus de lui. Et il en allait de même pour ses propres victimes. Ce n'était pas eux qui étaient les plus touchés par ses exactions forcées. Non… c'était lui-même. C'était son âme que l'on distordait, que l'on noircissait plus encore. Tueur il avait été oui, meurtrier de masse, mais jamais sans ses principes, jamais sans… sa ligne de conduite. Qu'avait-il à présent sinon chaos et vile tentation ? Qu'avait-il si ce n'était la possibilité de se perdre dans un bourbier qui le détruirait jusqu'en son noyau intime ? Il n'avait rien… tout simplement. Il n'avait plus rien de lui-même. Qui était-il ? Pourquoi était-il ? Il n'avait plus de raison d'avoir même une identité à lui… Les paroles d'Eliowir ? Oh il les entendit, et une sombre, amère ironie l'emplit soudain. Vraorg fulminerait-il s'il venait à mourir ? Se contrarierait-il de ne plus pouvoir le tourmenter ? Il l'espérait profondément. A défaut de le détruire, il lui lancerait cette ultime insulte. C'était vain, c'était inique, c'était… en contradiction totale avec les volontés qu'il avait tenté, désespérément tenté, de conserver. Tant pis ! Qu'il rage et fume de colère, et qu'il commette quelque impaire qui d'un autre serait la clef ! Oh oui quelle douce pensée…. Elle était bien suffisante pour qu'il décide de laisser celui qui s'appelait son fils effectuer ce qu'il voulait, car quoi que ce soit, il doutait de le voir triompher. On ne fait pas fleurir un jardin d'une terre brûlée, quoi qu'il puisse espérer, c'était déjà vain et défait. Mais il le laissa faire. Il le laissa s'avancer et s'approcher, laissa, sur lui, ses mains se poser… et soudain la magie le happer. A cela cependant, sa propre force s'opposa un bref instant, instinctive et protectrice. Puis, il le laissa faire. Cette magie-là serait toujours moins mauvaise que celle qui le maintenait aux fers. *** Son inconscience fiévreuse dura, dura, et dura encore. Combien de temps exactement ? Il n'aurait su le dire avec exactitude, car il n'en eut aucune conscience. Son esprit brûlait et se consumait sous la magie qui, une fois encore le ravageait. Puis soudain tout s'arrêta, comme si on lui permettait d'émerger d'un lac profond et il chercha instinctivement son souffle, emplissant ses poumons qui n'en avaient pourtant nul besoin, des rivières carmines marquant son pâle visage. Dépourvu de force, soudainement, il ne put que se relever, gisant sur la pierre froide du sol sans un cri, sans une plainte, les larmes purpurines dévalant sa peau pour souiller ses longs cheveux et la surface du sol. Qu'importait, c'était un poids si grand, si énorme, qui s'était abattu sur lui qu'il ne saurait s'humilier ou se vexer de ces petits détails discrets. Son esprit semblait tambouriner, son crâne un gong que l'on sonnait… et cette… pression… qui le broyait sans la moindre merci… J'ai échoué… souffla-t'il doucement, lorsqu'enfin, sa voix il eut retrouvé. La constatation était toujours aussi amère, et il n'eut guère à chercher pourquoi il avait abandonné pareille mémoire. Il avait échoué sur toute la ligne, peu importait ce que l'on pourrait lui affirmer. Sa tâche, il y avait manqué, ses alliés, il les avait abandonné, à l'instant même où il avait accepté la mission d'Elewyn. Et pour quoi ? Pour un hypothétique futur sans véritable fondement. Y croyait-il… non… pouvait-il de nouveau y croire ? Oh Eliowir… J'ai acheté un lambeau de futur incertain au prix de tout ce que je chérissais, de tout ce qui m'était important et de l'existence et l'intégrité de tout un monde… ai-je seulement eut raison de le faire ? Son fils n'aurait aucune réponse réelle à lui apporter. Pour cela il aurait fallu qu'il comprenne ce qu'i avait vécu et sacrifié, là dans les entrailles du monde. Et jamais il ne voudrait lui infliger pareille épreuve, pareille douleur. Edwyn avait-il eu raison ? Avaient-ils suivit un mensonge et un fou ? Non, il ne pouvait voir son aîné ainsi… mais cela ne le réconfortait pas et ne pourrait jamais le réconforter. Pardonne moi… c'est ma faute… tes souffrances sont ma faute… Leurs souffrances à tous en vérité. A tort ou à raison aurait-on pu arguer, mais lui-même ne pouvait l'envisager. Et pourtant était-il entièrement coupable ? Etait-il… n'était-il pas victime, lui aussi ? Il ne parvenait pas à répondre, à faire raison de tout cela, il n'arrivait pas à endiguer le chaos de ses pensées… Tu n'aurais pas dû te damner, pas pour moi… J'aurais donné tout ce que j'avais pour te savoir en sécurité… Il ne voulait, n'avait jamais désirait, qu'on se sacrifie pour lui. Non jamais. Il voulait voir les siens apaisés, en sûreté…. Mais il avait échoué. Ne me répond pas… qu'importe, c'est trop tard… qu'ai-je seulement que je pourrais encore sacrifier pour te permettre la paix ? Une grimace désespérée et d'un amusement plein de dérision tordit ses lèvres Ces émotions vont me tuer… plus sûrement qu'aucune lame ou qu'aucun sort, je m'éteint à petit feu dans leur brasier. Elles ne sont pas dictées par moi, elles sont… folie, je ne la contiens plus je crois… si je l'ai jamais fait… je me suis perdu moi-même en tentant de lui échapper… m'as-tu retrouvé ?
|
| | |
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Lun 29 Juin 2015 - 22:46 | |
| Il ne remarqua pas tout de suite que son millénaire sortait enfin de son étrange transe. Il ne le remarqua pas, ne le vit pas, et manqua sursauter quand la voix tant aimé s'éleva.
J'ai échoué…
Quels mots si durs et si âpres... si déchirants et si tranchants. Eliowir ne put s'empêcher de frémir, ses traits rudes grimaçant. En quoi donc son dragonnier avait-il pu échouer ? Comment pouvait-il donc encore se flageller en de tels reproches immérités ? Mais il n'eut guère le temps de manifester sa désapprobation, que déjà l'aîné reprenait, s'embourbant dans cette irraison.
Oh Eliowir… J'ai acheté un lambeau de futur incertain au prix de tout ce que je chérissais, de tout ce qui m'était important et de l'existence et l'intégrité de tout un monde… ai-je seulement eut raison de le faire ?
Il aurait eu tendance à dire oui. Mais cela aurait été mensonge honni. Avait-il eu raison ? Il n'en savait rien. Car il ne savait rien, ou si peu, de tout ce que son aimé soudain lui chantait. Le peu qu'il avait su, savait, et saurait peut-être à jamais, était que son aimé avait de lourdes responsabilités, un lourd destin, lui beau dragonnier. Qu'il avait une caste à créer. Des dragonniers à rassembler. Si peu, oui... si peu il savait. Répondre alors impossible lui était.
Il garda donc silence, même si son coeur aurait voulu hurler ses mille et une pensées. Qu'importaient les raisons, qu'importaient les choix incertains, qu'importait même le destin ! Achroma avait choisi, avait décidé de suivre un sentier, celui qui lui avait en cet instant semblé le plus approprié... Et peu importait qu'il ait eu tord ou raison, c'était là ses choix, son chemin, son oraison. Et ce serait la sienne aussi, lui simple fils de cette noble lignée.
Et le reste... le reste lui brisa le coeur. Comment Achroma pouvait donc encore s'accuser de façon si implacable ? Comment donc pouvait-il se croire si abjecte, si honni, si... coupable ? Coupable... Son aimé se mortifiait et se jugeait déjà coupable de tous leurs méfaits ! Nierait-il donc à son fils, aussi impuissant et insignifiant soit-il, sa part de responsabilités ? Lui aussi avait fait des choix, pas forcément les meilleurs... Lui aussi était finalement coupable de tous ces malheurs...
Ce qu'il pouvait sacrifier encore ? Mais...
- Rien et bien moins encore ! s'écria-t-il presque, la voix rauque et émue. Vous n'avez rien à sacrifier..
Que votre corps, eut-il la fugace pensée toutefois, mortifié.
- De mes choix vous ne pouvez vous flageller. Des choix que, s'il fallait, je referai encore.
"Pour vous", retint-il juste à temps. Une soudaine lucidité d'un fugace instant. Songeant que ces deux mots, à eux seuls, ne feraient que draper le dragonnier de son lourd linceul. Pour Eliowir, il n'était rien de tout cela, bien entendu...mais allez donc le faire comprendre à ce millénaire têtu.
Non pas qu'il ait fait ces choix par gaité de plaisir, ni même par quelconque cupide désir. Non, là encore, rien de tout cela. Ces choix... Oui, ces choix, il les avait fait pour Achroma. Etait-ce là lui donner raison alors ? Etait-ce là justifier tous ces remords ?
Non, décida-t-il. Non, quand bien même Achroma était sa raison, quand bien même la pensée d'Achroma en lui guidait tous ses choix sans distinction... Non, il était lui-même libre de ces choix et décidait en connaissance de cause. Lui aussi pouvait faire son mea culpa.
Et la suite qui sonna entre eux son glas lui déchira les derniers lambeaux de son coeur. Des émotions le tuant... des émotions qui l'éteignaient, l'étreignaient, le consumant dans sa douleur... Des émotions...qui pour son aimé n'étaient plus que folie ? C'était là tout ce qu'il restait d'eux... de lui ? De...
- Oui je vous ai retrouvé, répondit-il sans même y réfléchir.
Avec une conviction qui était celle de la volonté d'y croire, plus que de la réalité d'en être persuadé. Il doutait, oui, doutait... il avait peur de le perdre, que tout soit fini, détruit, que son Achroma ne veuille plus de lui, que tout soit révolu, passé, qu'il soit rejeté... que...
"Moi, moi, toujours moi", se morigéna-t-il soudain, réalisant alors la pensée égoïste qui le noyait sans fin. Egoïste oui, il était en cet instant. Alors que son être cher était plongé en plein tourment. Qu'importait qu'Achroma ne tienne plus à lui, qu'importait qu'Achroma désirait ne plus ressentir tout ce qui les liait, qu'importait qu'il ressente le besoin de se désunir de toutes leurs émotions qui les drapaient. Les avaient drapé, corrigea-t-il le coeur lourd, saignant, agonisant. Oui qu'importait, même si pour lui tout cela importait à jamais, en tout temps.
- Je ne veux rien vous voir sacrifier. Mes choix je les ai fait, et vous êtes ma paix. Vous savoir en sécurité sera ma paix. Vous savoir libéré de tout ce fardeau, vous savoir de nouveau libre de votre puissance, vous voir retrouver enfin toute votre essence, vous voir le coeur libre et non plus en lambeaux.
"Même si cela signifiait le libérer de moi", réalisa-t-il soudain, son propre coeur aux abois.
- Je suis coupable, Achroma. Oui, coupable, et je vous prie de me pardonner. De mauvais choix j'ai visiblement effectués. Et par eux je vous ai infligé des tourments bien éhontés. Je pensais... je voulais rester auprès de vous, avoua-t-il honteux, baissant les yeux. Pour moi, vous étiez, êtes encore, et serez toujours, mon tout.
Mon univers, mon existence, ma raison d'être... mon essence.
- J'ai pensé aussi pouvoir, arrogant que je suis, vous libérer.
"Et je le pense encore, fou plus fou encore que je ne le pensais."
- Je pensais... je ne voulais en rien vous faire souffrir ni vous torturer. Que je regrette tous mes méfaits... si vous saviez, comme ils me rongent, oui, tous ces regrets...
Il dut inspirer fortement pour calmer le soudain flot de paroles qui se déversaient. Ce n'était pas le moment. Lui qui disait ne pas vouloir torturer son autre, voilà qu'il menaçait de lui infliger encore mille tourments.
Oui, si émotions devenaient affres de douleur incommensurable, alors oui, il devait... il devait... ne pas le faire serait se rendre encore plus coupable.
Mais cela était si difficile, si douloureux, si... torture oui, que tout cela, pour son âme perdu, éperdue, et si...
- Je ne puis vous libérer pour le moment de votre...
"Marque... souillure... avilissure... torture..."
- prison en ces lieux honnis.
Une douleur le vrilla un court instant, qu'il chassa agacé de son esprit vaccillant.
- Mais je peux... peut-être... si émotions vous sont si insupportables... Je peux peut-être...
Quelle horrible idée alors que celle qui en lui avait germé. Quelle horreur, douleur, terreur, abjection qui soudain le hantait.
- Chasser tous ces tourments des sens qui de votre douleur vous semblent coupables.
Il ferma les yeux, lutta contre tout son être qui lui hurlait de n'en rien faire, de se taire, de le garder pour lui, avec lui, avec ces souvenirs enfin recouvrés et ses sentiments avérés, aussi cruels qu'ils puissent être pour son aimé... mais ce serait là tel égoïsme. Tel...
Il manqua suffoquer. Chercha toute la force de volonté qui l'habitait. Chassa de lui tout égoïsme déplacé. Se rappela sa raison d'exister. Lui. Achroma. Qu'il voulait voir plein et entier, qu'il voulait voir enfin libéré...
Rouvrit les yeux, se força à voir, contempla son aimé, son Père, son millénaire, sa raison, sa douleur, sa souffrance, son battement de coeur... et décision fut arrêté.
- Coeur de pierre, je puis sans doute vous offrir, d'ici quelques nuits.
Le temps de se la procurer. Le temps de la trouver, de... de savourer ces quelques instants de sentiments intenses, fous mais immenses, enfin rendus...
- Vous serez ainsi libéré au moins de ce tourment-là. Oui, Père, mon Melethril,cela je dois pouvoir vous l'offrir, noble Achroma.
|
| | | InvitéMon identité Mes compétences Invité
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Jeu 9 Juil 2015 - 11:27 | |
| Rien et moins encore ? Oui c’était sans doute vrai, il n’avait plus rien. Il ne pouvait même plus protéger ce qui comptait pour lui, ceux qui comptaient… Il était au bout du chemin, sans énergie, sans rien. Il n’avait plus rien. Triste constatation. Elle lui était amère, ô tellement amère… Il n’avait plus la force de le dénigrer, de chasser ses paroles. Il n’avait même plus la force de se relever. Finalement abattu… allait-il périr là ? Allait-il l’achever ? Ces mots étaient autant de pals brisant son corps… Oui il allait l’achever. Certainement. Comment aurait-il pu en être autrement ? Le ressusciterait-il ensuite ? Il l’espérait. Ce serait si stupide, si ironique, qu’il tente de le préserver pour l’achever finalement sans autre but que sa perte pleine et entière. Y croire serait trop dur, quand bien même la désillusion la plus totale, la perte de tout espoir, le guettait. Il voulait le voir libre… ? Un piège ? Etait-ce un…non ! Non… cela ne pouvait pas être un piège, pas maintenant. Non, Eliowir était sincère. Et lui devait se raccrocher à cette idée. Pourtant… serait-il vraiment libre et entier, si d’autres étaient enfermés ? Si lui l’était ? Pourrait-il seulement vivre alors ? Tant de questions et si peu de réponses.
Un instant, il ferma les yeux. Il en avait besoin. Se reposer… si seulement. Il aurait aimé se reposer. Mais non… il devait… [color=#0F9DE8]J’aurais… été à tes côtés… quoi qu’il arrive, aimé » Jusque dans la mort. Il serait resté, il aurait erré pour veiller sur lui s’il avait dû, tant qu’il le savait digne et libre. Eliowir voulait le libérer… cruelle décision, cruelle vérité. Il voulait le libérer. Supporterait-il seulement pareille réalité. Cause de tout, destructeur, voilà bien ce qu’il était, semblait-il… Peut-être vaudrait-il mieux pour lui qu’il sombre complètement. Non. Non il ne le pouvait pas. Ce serait pire alors, pire encore. Il ne devait pas sombrer plus avant. Et c’était pourtant si difficile. C’était comme de vouloir absolument rester la tête hors de l’eau, alors même que l’on était attiré vers le fond par le poids terrible d’un boulet. Lassitude, fatigue… faiblesse, tristesse… Je sais Les siens le rongeaient bien assez pour qu’il sache parfaitement de quoi il s’agissait. Il écouta, ne pouvant guère faire davantage. Chaque parole, chaque instant de conscience lui coûtait, après tout cela…
Pendant quelques instants, il ne fit rien. Tout cela n’apportait que plus de désolation encore. Et pourtant. Qu’ai-je encore de noble, aimé… Regarde-moi, qu’y as-t-il de noble en cette carcasse ? Mes valeurs m’ont été retirées, ma dignité est en pièce, et l’être que je chérissais souffre… ceux que je devais protéger souffrent… Non, il n’y avait plus rien que l’on pouvait nommer noble, en son sein. Cœur de plomb, cœur de pierre, je l’accepte… de cette folie, si je puis être épargné… L’idée le soulageait terriblement. Coupablement. Ce serait également sceller ce qu’il pouvait éprouver de positif. Il imaginait ce que ressentirait Eliowir, sans pouvoir s’empêcher de se sentir quelque peu apaisé par cette perspective. Plus de folie. Plus de furie. Plus de cette envie de sang qu’il ressentait, et qui le détruisait chaque fois qu’il y cédait. Plus rien de tout cela, simplement… non, pas un vide, mais un calme bienvenu. Puisant dans des forces qu’il n’avait pas, il éleva la main, lui caressa le visage de ses doigts tremblant. Un instant, les digits s’attardèrent sur ses lèvres…
Préserve nous, aimé… pour cette espoir que tu voudrais raviver, que l’on m’a presque arraché, préserve nous… Cœur de plomb éloignera les dangers de nos pensées, et si ta flamme devait s’embraser… alors, aimé, nous nous retrouverons. Sache que ce plomb, toi seul peut le lever…
|
| | |
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir Mar 14 Juil 2015 - 18:10 | |
| Ce qu'il y avait encore de noble en son Achroma ? Mais tout ! Absolument tout, aurait-il voulu crier, mais la voix lui manqua. D'aveugle il devenait dès lors muet. Tant de douleur palpitant en son aimé. Qu'il aurait voulu lui arracher tous ses tourments, quitte à réduire son coeur à néant.
Cœur de plomb, cœur de pierre, je l’accepte… de cette folie, si je puis être épargné…
Oui, coeur de pierre, coeur de plomb, il donnerait. Ce serait là une autre façon d'empaler les sentiments qui les liaient. Néant serait dès lors ce qui habiterait le coeur de son millénaire. Et ce serait lui, son aimé, son amant, qui l'offrirait à son digne père. Mais, loin de s'en sentir soulagé, loin de se réjouir de cette acceptation, de cette solution par lui-même proposée, il s'en sentait... douloureusement blessé. Douloureusement oui, une torture pour son âme soudain réduite en lambeaux, sa raison se délitant dans ce déchirant écheveau.
C'est alors, avec une joie indicible, cette joie marquée du sceau de la "dernière fois", qu'il accueillit la douce caresse de ses doigts. Il ne put s'empêcher de fermer les yeux, aveugles qu'ils étaient, le monde, après tout, ne valait guère la peine qu'on le contemple. Il s'imprégna de cet instant en son coeur chéri, de cet instant volé, et tenta de l'enfermer en sa mémoire, son propre temple. Il huma ce doux parfum aimé, appuya un peu plus sa joue sur cette caresse éthérée, manqua de peu d'embrasser les doigts volages qui lui effleuraient les lèvres balafrées.
Préserve nous, aimé… pour cette espoir que tu voudrais raviver, que l’on m’a presque arraché, préserve nous… Cœur de plomb éloignera les dangers de nos pensées, et si ta flamme devait s’embraser… alors, aimé, nous nous retrouverons. Sache que ce plomb, toi seul peut le lever…
Il rouvrit instantanément les yeux. Son diadème papillonna, alors qu'il tentait de s'imprégner, une fois encore, de son Achroma. Embraser sa flamme ? Lever le coeur de plomb par sa flamme ? Mais sa flamme à lui jamais ne s'éteindra, n'est-il pas ? Sa flamme à lui, brûlait, là, le consumait, lentement, de son brasier ardent. Nos pensées ? Pourquoi nos... Le coeur de plomb n'était censé... n'est-ce pas ? Que pour Achroma... pas pour... lui aussi ? Achroma désirait-il ? Non, n'est-ce pas ? Il ne pouvait... ne voulait...
Mais refuserait-il cela, si son aimé le lui demandait ? Toutefois, si alors seule sa flamme pouvait lever le coeur de plomb... mais que lui-même en devenait un, comment attiserait-il de nouveau son foyer ? Et soudain mille questions l'agitèrent, le tourmentèrent de leur tourment sans nom.
Non, ce n'était pas le moment de se poser toutes ces questions. Il n'y résisterait pas, il le sentait, allait perdre la raison. Il avait déjà dû tant lutter pour garder... une once de discernement. Si tant est qu'il puisse qualifier sa difficile capacité de pensée en l'état actuel des choses aussi indument...
- Je le lèverai, croassa-t-il, sa voix grave tremblant sous l'ondée de mille sentiments.
Il baissa la tête, laissa quelques dernières carmines traitresses s'échapper, inspira fortement, ravalant le lourd sanglot qui l'étranglait... et puisa tout le courage qu'il pouvait encore posséder au fond de lui, dans les abysses de son coeur éprouvé.
- Oui, je le lèverai, du Coeur de Plomb aussi je vous libérerai.
Du moins ferait-il tout ce qu'il pourrait pour se faire. Si on le lui permettait, en ses sinistres ères...
- Nous nous retrouverons. Dans un mois, un an, ou mille éons. Oui, dans cet espace, ou les limbes d'un autre monde, nous nous retrouverons, murmura-t-il de ses accents elfiques, incapable de retenir ses larmes.
Il n'aurait su dire alors s'il y croyait... ou se raccrochait à ce fol espoir qui menaçait de l'achever.
- Pour toujours et à jamais. Nous nous retrouverons, je nous le promets.
|
| | | Contenu sponsoriséMon identité Mes compétences
| Sujet: Re: Coupable - PV Eliowir | |
| |
| | | |
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |