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| Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE | |
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| Sujet: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mer 9 Oct 2013 - 19:31 | |
| Les Forêts Elfiques avaient toujours un effet apaisant sur Amyelenor, comme si tous ses doutes, ses peurs, ses appréhensions, ses interrogations, étaient subrepticement gommées, effacées de son esprit. L’on trouvait en ces lieux le repos de l’âme, malgré la destruction qui régnait en dehors des frontières ceignant le Royaume Sylvestre. Et ce soir, à la veille des négociations pour lesquelles ils étaient venus, la Lame Noire avait grand besoin de se changer les idées, de prendre un peu de temps pour penser. Les hautes frondaisons des arbres, dispensant une fraîcheur agréable de fin d’Eté sur le promeneur, les gazouillis des oiseaux et le chant des créatures vivant en ces lieux, le souffle du vent entre les troncs, faisait bouger leurs branches dans une lente mais majestueuse chorégraphie, … Si Amy avait été poète, nul doute qu’il aurait écrit en ces lieux ses plus belles œuvres.
Mais il n’était pas poète, il était soldat, et ne vivait que pour protéger son souverain et ceux de son sang, n’hésitant pas à ôter la vie pour défendre son Empire, ni à mettre la sienne en jeu pour les mêmes raisons. Encore que, en ce dernier point, la présence d’Atalos l’avait fait s’interroger. Il n’avait pas le droit de sacrifier la vie de son Dragon, et ne voulait pas que lui meure suite à son propre décès. Amy ne craignait pas la mort, mais plutôt ses conséquences. Il n’était plus seul sur la galère qu’était sa vie. Non, un être formidable l’avait rejoint, et manœuvrait la barre avec lui. Lorsque le désespoir l’envahissait, il sentait comme une flamme que rien ne pouvait éteindre brûler à l’intérieur de lui, une flamme qui grandissait et brûlait avec plus d’ardeur, dans laquelle il puisait la force de se relever, de continuer d’avancer. Atalos était arrivé telle une comète dans son existence, pour n’en plus repartir. Leur relation était indéfinissable pour qui n’en avait jamais vécu une comparable. Lorsque vous disiez ne faire qu’un avec votre Lié à des gens, ceux-ci ne comprenaient pas, ou avaient du mal à imaginer le "concept" en question. Etre Dragonnier était vraiment un statut à part, et pas seulement au niveau des honneurs que le commun des races leur allouait ; il était à part, car les Dragonniers acquerraient une nouvelle conception des choses. Plus le temps passait au contact de leurs Dragons, plus leurs manières de pensée évoluaient. Oui, Amyelenor se sentait vieilli, changé, plus… Moins fou, plus calme, plus réfléchi. Certes, le fait qu’il soit bombardé Général par la Princesse Esmelda malgré son jeune âge, et envoyé lutter contre les Vampires à Feusacré, première bataille d’une longue série, y était très certainement pour quelque chose, tout comme celui de voir nombre de frères d’arme mourir à ses côtés, sous ses ordres. Mais la plus importante mutation spirituelle, bien que longue et lente, était due à Atalos.
Tout à ses pensées, Amyelenor n’avait pas fait attention à son chemin, et ses pas l’avaient mené non loin du Puits Flamboyant, où d’après les Baptistrels logeaient les Vampires. Ici, la chaleur était bien plus élevée que partout ailleurs dans le Domaine, et la végétation y était un peu plus luxuriante, si cela était possible en ces lieux où, à quelque endroit que se posât le regard, l’on voyait des plantes et des arbres en quantité. Malgré la tombée de la nuit, l’endroit était lumineux, comme si… Non, la lumière émanait bien du centre du Sanctuaire du Feu, de là où provenait la chaleur. Quel étrange lieu que le Domaine de la Rhapsodie, vraiment. Même lui qui d’ordinaire n’était pas sensible à la magie ressentait un peu cette dernière, tellement l’endroit en était imprégné.
Quelles pouvaient bien être les préoccupations de ceux qui jusqu’à présent saignaient les siens, songea Amyelenor en regardant vers le Puits. Tant de proximité avec le Haut Commandement Vampirique… Et tant d’impuissance à agir. Parviendraient-ils vraiment, tous autant qu’ils étaient, à mettre de côté leurs inimitiés, la haine séculaire qui les séparait, afin de s’unir contre la menace Alayienne ? Et quelle alliance fragile ce serait. Si les différentes parties seraient suffisamment sages pour éviter de s’entredéchirer avant la fin de la guerre, il y avait fort à parier que l’union volerait en éclats sitôt le dernier Alayien tué ou repoussé à la mer. Mais après tout, n’y avait-il pas un vieux dicton qui disait qu’il valait mieux s’entourer de ses ennemis afin de les garder à l’œil ? Oui, dans l’ombre, chaque armée se préparerait certainement à attaquer l’un de ses "alliés" sitôt la guerre terminée, ou à réagir à la trahison. De confiance, il n’y en aurait point.
Amyelenor ferma les yeux et se massa les temps. Une brusque fatigue venait de l’envahir. Malgré le repos des dernières heures, il n’arrivait pas à récupérer de ces longs mois de guerre incessante. Il n’avait même pas pu se reposer correctement à Gloria, le stress de l’assiégé assaillant chacune de ses nuits. La seule façon qu’il avait de n’y point penser, du moins de ne pas trop y songer, était d’arpenter les murs afin de vérifier les défenses, discuter avec les hommes. Le sommeil ? Il en était venu à oublier ce que c’était. Un bruit dans son dos le fit se retourner vivement, et la proximité du campement Vampirique fit, dans un pur réflexe, se porter sa main à la poignée de son épée, sise sur la hanche gauche… Du moins, là où aurait dû se trouver son épée s’il ne l’avait pas remise aux Elfes lors de son entrée en le Domaine. Un homme aux cheveux clairs, blonds, aux yeux d’un bleu intense, d’une très grande beauté, se tenait derrière lui, à quelques mètres. Etrangement, son visage lui évoquait quelque souvenir brumeux, mais… Impossible de clarifier ceux-ci. Sans doute n’était-ce qu’un effet de son imagination, qui cherchait à se rassurer après le brusque afflux d’adrénaline dans ses veines. Dans tous les cas, pour le bien des négociations, il se devait de se montrer courtois, car Elfe ou Vampire, la personne qui se tenait en lieu n’appartenait clairement pas à sa délégation. Aussi Amyelenor se redressa, les mains le long du corps, aussi digne que le demandait son rang, et s’adressa d’une voix claire à l’inconnu.
« Veuillez me pardonner, Messire, je pensais être seul, et votre arrivé m’a quelque peu surpris. Je vous souhaite le bonsoir, en ce doux crépuscule. » |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Sam 12 Oct 2013 - 14:13 | |
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Il allait sans véritable but, cloué au sol par l’absence de sa dragonne qui s’en était allée batifoler dans l’immensité de l’empyrée. Aussi, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, ses pas l’avaient mené par la plaine et tout autour du domaine. Il prenait alors la direction du sanctuaire du feu avec la ferme l’intention de se reposer quelques heures et laissait le vent léger caresser sa peau de marbre alors qu’il marchait sans hâte vers son objectif, l’herbe haute venant onduler autour de lui, faisant lever sa chevelure comme une gaze illuminée… Dans le silence entrecoupé de bruits naturels, le vampire tentait de penser avec plus de légèreté, de recule, qu’il ne l’avait fait depuis de longues semaines. Des semaines passées à conspirer, à s’entretenir avec d’autres de tant de choses… Son entourage n’avait guère autre chose à l’esprit que ce genre de choses, ils avaient leurs ambitions, leurs considérations et rien d’autres il fallait bien le dire. La majorité des vampires manquait tout simplement de profondeur sur bien des sujets. Vains et orgueilleux, ils jouaient au jeu de politique avec le doigté gauche d’un sanglier lancé en pleine charge… aussi vieux qu’ils paraissent ils étaient toujours bien trop jeunes comparé à lui, à son expérience. Et immanquablement, à sa façon de voir le monde. Ils voulaient le voir tomber… et bien ils ne le verrait pas de sitôt. Et en attendant c’était lui qui tissait les fils de son futur, les fils de sa victoire… une victoire qui reposait cependant sur la confiance et la capacité à travailler ensemble de bien d’autres individus. Certains biens plus jeunes que les conseillers vampiriques qui l’horripilaient. Mais au moins, ceux-ci étaient-ils encore récupérable… encore prêts à grandir et à s’améliorer, tout le contraire des vieillards aigris qui se prenaient pour des aînés, lorsqu’ils n’étaient que des adolescents inconséquents… Capricieux, sans sensibilité, sans capacité de voir les véritables importances de l’existence…
Lorsqu’il serait prince, certes, il commencerait par nettoyer tout cela. Il purgerait son peuple de la pourriture qui l’habitait et lui redonnerait sa dignité, redorerait son blason. Non pas le sien propre, mais celui de son peuple… Il voulait éduquer les siens, faire des jeunes de véritables êtres, des individus raisonnables et raisonnés, capables de se restreindre en leur soif, en leur violence. Si il était capable de le faire avec un jeune, alors il pouvait le faire avec d’autres, avec tous même. Mais ce n’était pas tout de suite… non il devait faire preuve de patience, de beaucoup de patience. Tant que Lorenz était en vie, il n’y avait rien à faire mais le prince en titre avait tant d’ennemis et tant de faiblesses qu’il était simple de manœuvrer pour conduire à sa perte. Il devait user de tout son intellect pour voguer en ces eaux troubles, un défi à la hauteur de ce qu’il était et qui offrait une occasion d’union aux deux facettes de son être. Il en avait d’ailleurs bien besoin, car le dragon au fond de lui semblait décidé à le battre froid depuis qu’il avait laissé s’en aller Eliowir sans même prendre une gorgée… c’était impressionnant avec quelle virulence il s’accrochait à l’elfe et désirait le détruire. Rare pourtant était les proies qui l’attirait et le fascinait autant, au grand dam du Conteur qui lui n’avait absolument pas l’intention de lui retirer son fluide vital. Après tout, il avait assez mangé pour les prochains jours, surtout du sang d’elfe. Immunisé ou non, c’était toujours du sang d’elfe… et si il avait les papilles suffisantes pour apprécier le met délicat que représentait un sylvestre ne disposant pas de l’immunité, il était tout de même adepte des plats simples. Même les nobles humains se lassaient des crises de fois sur des plats outrageusement préparés. Il ne pouvait qu’émettre des hypothèses sur les raisons qui poussait son dragon intérieur à une telle agressivité… aussi sinueuse soit-elle.
Et n’était pas convaincu d’avoir trouvé la réponse. Heureusement, il le laissait pour l’instant en paix, ayant peut-être comprit qu’à trop tirer sur sa patience il finirait par tenter de l’emprisonner manu militari. Aussi en profitait-il un peu, tant qu’on lui en laissait la possibilité. Zaphirel était occupé, Kedrildan également, Silarae voguait dans les cieux clairs… Il savourait la compagnie discrète et silencieuse de Merveille qui avait apparemment suivit le mouvement pour le garder à l’œil et l’aider au cas où. De toutes évidences, il n’en avait pas eu besoin puisqu’il rentrait à présent sans que quoi que ce soit ai troublé son repos bien mérité… Dans la luminosité étrange de cette fin d’après-midi, tirant vers la soirée, il vit bientôt se dessiner les bâtisses du sanctuaire du feu, avec leur étrange agencement et leurs couleurs singulières. Sans parler bien entendu de la chaleur infernale qui régnait là comme dans le jabot d’un dragon… le puits flamboyant était une source de pouvoir qui forçait le respect, tout autant que ceux qui lui étaient liés. Comment pouvait-on vivre avec même une infime part de cette entité en soit, là dans son corps et ses tripes, son âme ? Il ne parvenait pas à s’imaginer, trop froid sans aucun doute pour y parvenir… et peut-être n’était-ce pas plus mal. Il avait bien assez à faire avec la conception de son devoir de dragonnier sans y rajouter celle d’un Baptistrel. Et il y avait également la fameuse caste des dragonniers que prêchait Lyroë… Il fallait qu’il puisse lui apporter son appui, d’une manière ou d’une autre. Mais que pouvait-il bien faire pour elle qui ne risque pas d’être mal interprété ? Il connaissait bien les jeunes à présent et ils ne verraient certainement que son statut de vampire, pas le reste. C’était bien dommage…
Il en était là de ses réflexions lorsque un battement de cœur, juste devant lui, lui fit relever les yeux. Il avait parcouru bien plus de chemin qu’il ne le pensait et devant lui se dressait soudain un vivant, dont la chaleur corporelle flottait dans l’air, enveloppé de la mélopée du sang dans ses veines. Il n’oubliait que rarement les visages qu’il avait déjà contemplé, aussi le sien lui revint immédiatement en mémoire, avec une lame de tristesse. Ah oui… le jeune dragonnier humain qu’il avait dû mordre pour préserver la vie de Kedrildan lors de l’infiltration de Gloria. Amyelenor Farkstein n’est-ce pas ? Il avait pris du galon semblait-il… la vie ne l’avait pas épargné. La vie, les vampires et à présent très certainement les Alayiens. Comment s’en sortait-il ? Peut-être pas si bien, il était toujours un enfant projeté dans un conflit à l’échelle affolante dont l’enjeu n’était rien moins que le libre arbitre. Il semblait toujours particulièrement frêle et pâle… presque en mauvaise santé, et aussi étrange que cela paraisse, il s’en inquiéta quelque peu. L’autre ne semblait pas se souvenir de lui, ce qui n’était pas étonnant quand on y pensait, la dernière fois qu’ils s’étaient vu les choses avaient été quelque peu compliqués.
La dernière fois, le vampire portait un masque magique dissimulant son physique véritable, et ils ne s’étaient guère observés. Ce jeune humain avait été un otage utile, rien de plus. Aujourd’hui cependant, les choses étaient différentes, il avait peut-être la possibilité de discuter avec lui et d’en apprendre davantage sur ce qu’il vivait et pensait. Sur ce qu’il était également. Et l’autre rompit le silence avant lui, le saluant poliment. Il ne répondit pas immédiatement, le détaillant encore, et discutant mentalement avec Silarae qui s’intéressait à sa trouvaille humaine. Et oui, elle n’avait après tout jamais eu l’occasion de rencontrer les autres élus, elfes ou humains. Il comprenait sa curiosité, mais restait réservé quant aux conséquences d’une telle rencontre. « Je pensais également être seul, il n’y a rien à pardonner » Il fronça légèrement les sourcils en approchant, faisant fi, probablement, de certaines convenances, pour déposer un doigt dans le col du jeune homme et l’écarter, cherchant sur sa gorge la marque des crocs qu’il lui avait laissé. La peau pâle était légèrement marquée, mais à peine. Il fallait le savoir pour le voir. Ne lui infligeant par le contact plus longtemps il retira ses doigts et contempla ce visage trop honnête. « Vous semblez avoir été pris en charge à temps, voilà qui est parfait. J’avais craint qu’on ne vous abandonne à votre sort, ou pire… parfois, les humains sont d’incompréhensibles monceaux de haine aveugle » La blanche eu un commentaire acide qui le fit sourire en se détournant « Vous ne vous souvenez plus de moi, de toutes évidence »
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Dim 20 Oct 2013 - 18:42 | |
| Ce fut le silence qui répondit d’abord à ses salutations. Quelque chose dans la manière de se tenir de l’inconnu fit pencher la balance de ses doutes en faveur des Vampires. Un Elfe se serait montré bien plus amical, du moins aurait répondu sans tarder à ses paroles. Et alors qu’un Elfe, il fallait le reconnaître, embellissait son environnement par sa seule présence, l’homme aux cheveux longs et blonds, lui, … Semblait porteur d’une calme menace, une menace froide, même s’il ne manifestait pas d’intentions meurtrières à son égard. En quoi cela était normal, car lui aussi devait être soumis au même serment que les Humains. Mais que devait faire Amyelenor en cet instant ? Devait-il rester et attendre que l’inconnu lui réponde, ou bien devait-il partir ? Seulement, partir signifiait tourner le dos à ce qu’il avait considéré jusqu’à aujourd’hui comme une menace, et sans connaître véritablement les effets du serment s’il venait à être rompu, Amy préférait ne pas s’exposer inutilement à un danger. Ah, par le Dracos, les choses étaient bien plus simples avant les négociations, avant les Alayiens. Ses soldats, ses frères d’armes, et lui-même avaient un seul ennemi, et devaient l’exterminer pour le bien de leur Empire et de ses citoyens. Et voilà qu’aujourd’hui, les Humains devaient garder l’épée au fourreau en compagnie du Peuple de la Nuit. Sans compter la Dame Tuwiel et son fol désir de créer une caste interraciale de Dragonniers. Ses paroles revinrent le hanter, comme elles le faisaient depuis qu’ils s’étaient rencontrés. L’étranger en face de lui, devait-il le considérer non pas comme un Vampire, mais comme un Armandéen, tout comme il l’était lui aussi ?
Enfin, le Vampire brisa le silence qui commençait à s’appesantir. Mais sa réponse prit le soldat au dépourvu. Ce n’était pas tant le contenu en lui-même, mais plutôt… La voix. La voix de celui dont il ne connaissait toujours pas le nom – encore qu’Amyelenor ne s’était pas présenté non plus – était plus douce, plus posée, qu’il aurait imaginée pour un être issu du peuple aux longues dents. Que savait-il vraiment des Vampires, à part ce qu’on lui avait appris ? De chaque fois qu’il en avait entendu parler, c’était en mal. Non ! Non, il ne pouvait pas se laisser aller à les considérer comme des êtres égaux : combien des siens avaient-ils tués ou transformés ? Mais n’avait-il pas promis, juré même, à l’Elfe rousse de ne pas les tuer par plaisir ? De ne pas ressentir de plaisir en les renvoyant dans la mort ? Si, mais cela devait-il le pousser pour autant à la compassion ? Il n’y avait qu’un pas entre les deux, une simple frontière. On disait les Vampires maudits, et pour cause ; mais avaient-ils vraiment tous mérité cette malédiction ? Et les Vampires n’étaient-ils pas pour la plupart d’anciens Humains ?
Le Vampire avança dans sa direction, et fut rapidement sur lui. Amyelenor sentit ses muscles se crisper, tandis que les battements de son cœur s’accélérait. Le sang tapait bruyamment à ses oreilles, et il devait lutter contre lui pour ne pas reculer. Maintiens les apparences, se morigénait-il. Ne leur montre pas que tu as peur. Alors il se tint droit, immobile tel une statue de marbre, dont il avait plus ou moins la couleur, surtout depuis qu’il avait été mordu. Malgré qu’il ait toujours vécu au grand air, sa peau était restée obstinément blanche. Allez savoir s’il n’avait pas du sang de Nordien qui courait dans ses veines, quelque part. Il n’avait jamais pris le temps d’examiner sa généalogie, préférant manier l’épée que parader en compagnie des nantis de l’Empire, surtout qu’il était fils cadet, et ne pouvait prétendre à rien, ni titre, ni terres, ni aucune richesse appartenant à la Maison Farkstein.
Il ne put retenir des frissons lorsque les doigts du Vampire rentrèrent en contact avec sa peau, précisément à l’endroit où il avait été mordu. Pourquoi avait-il regardé ici ? Pourquoi… Non, comment pouvait-il le savoir ? Se pouvait-il que celui qui se tenait en face de lui était celui-là même qui avait failli causer leur trépas, à Atalos et lui ? La nuit de l’infiltration était confuse, et embrumée dans son esprit, et brouillés étaient les visages de ceux qui se trouvaient présent. Aussi ne se rappelait-il absolument pas des traits qu’avait son agresseur. Atalos l’aurait sans nul doute reconnu, mais aurait très certainement rompu le serment Baptistral en voulant se venger. Leurs regards se croisèrent tandis que le Vampire reprenait la parole.
« L’Empire n’abandonne aucun de ses enfants, Messire… »
Mais Amyelenor trouva que ses mots sonnaient faux. Pourquoi avait-il été sauvé ? Parce qu’il se trouvait dans un lieu où il était possible de le faire rapidement ? Parce qu’il était une Lame Noire ? Peut-être. Parce qu’il était un Dragonnier, et que l’Empire ne pouvait se permettre de perdre l’un des deux seuls représentants de cette noble caste ? Sans doute. Oui, c’était très certainement pour cela. S’il n’avait été qu’un simple soldat, que serait-il advenu de lui ? Rappelle-toi Feusacré, souffla une voix désagréable à son esprit. Oui, rappelle-toi ces hommes que tu as condamnés à mort. Feusacré… Lorsque la bataille s’était terminée, et que l’Armée qu’il menait s’en retournait à Gloria, certains de ses subalternes, blessés, qui avaient été mordus, n’auraient pas pu attendre les soins des mestres de la Capitale. Et sur son ordre, ils avaient dû tuer ces pauvres malheureux. Que l’on ait ensuite brûlé leur corps pour leur rendre hommage rachetait-il le fait d’être mort par une épée amie ? Amyelenor avait bien ensuite essayé de se convaincre que les véritables responsables étaient les Vampires, mais au final, qui avait prononcé la sentence de leur trépas ? On le considérait comme un héros, mais comme tout héros, ses actes n’étaient pas tous auréolés d’une éclatante lumière. Certains, la plupart, même, étaient entachés de sang, et obscurcis de faits dont personne ne voulait vraiment en connaître la vérité. Mais pourtant, la Princesse Esmelda ne lui témoignait-elle pas une amitié douce et sincère ? S’était-elle souciée de lui, lorsqu’il était en convalescence entre les mains de Maître Faudar, uniquement parce qu’ils représentaient un atout stratégique d’envergure avec son Lié ? Non, pas elle. La Princesse n’était pas comme ça, et Amyelenor ne méritait pas une telle attention de sa part.
« Je suis navré, non. De la nuit où j’ai reçu le baiser des vôtres, je n’en garde aucun souvenir, sinon des cris et des éclairs de lumière. Qui êtes-vous, Messire, pour ainsi savoir… Pourquoi avez-vous tant voulu voir cette cicatrice ? Est-ce vous qui… Qui avez apposé votre bouche contre mon cou, vos dents contre ma peau ? » |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mar 22 Oct 2013 - 19:13 | |
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La plus grande révélation est le silence
Il ne dit rien, l’observant avec grande attention à cette réponse pour le moins sujette à caution qu’il lui servait comme la plus immuable des vérités. Insuffisant, à ses yeux, qu’une telle excuse, et il semblait bien que les rouages de l’esprit humain l’avaient également comprit. Il n’y avait rien de plus faux que ce qu’il venait d’énoncer avec un aplomb qui aurait dû faire fleurir les sourires à ses lèvres mais ne lui tirait qu’une grimace intérieur percluse d’ironie mordante. Il y avait beaucoup à dire à ce sujet, peu de bien et beaucoup de mal, de son point de vue, de sa propre expérience… Ce n’était véritablement là qu’un rempart de vélin contre un typhon agressif venu du tréfonds de la rancœur la plus immémoriale, comme l’empreinte d’un fer chauffé au rouge et depuis longtemps apposé sur une peau tuméfiée. La volonté de répondre à un tel aveuglement lui était un caprice inutile, l’autre était déjà corrompu par la graine d’un doute fort naturel et qui croissait à chaque interrogation comme une plante vénéneuse qu’une cruelle part de son être aurait volontiers embellie de sa touche personnelle. L’empire était beaucoup de chose, une icône aux maints visages, mais il ne détenait certainement pas l’oriflamme de l’abnégation et de l’altruisme, loin de là en réalité. L’empire, quoi qu’on puisse penser de lui, n’était ni meilleur ni pire que le conseil vampirique ou l’impérial majesté elfique, il avait ses travers compréhensibles, accordant davantage d’importance à la valeur de certains de ses individus qu’à d’autre et il aurait été stupide de prétendre qu’un dragonnier avait la même importance aux yeux de tous qu’un paysan des environs de Gloria… Le dragonnier serait sauvé, au prix de la vie du paysan, quoi qu’on puisse en dire par la suite. Oh oui, des manifestations de tristesses, de recueillement, mais qui ne changeraient absolument rien à la triste réalité de l’existence humaine. Que ce jeune homme y réfléchisse attentivement, et qu’il en tire les conclusions qui s’imposaient, mais le Conteur n’était pas dupe et ne le serait jamais….
Il comprenait vite toutefois et il hocha lentement la tête, sans cacher la vérité qu’il prisait au-delà des siens. « Oui. C’est de moi que vous avez reçu la morsure. J’aurais préféré une alternative quelconque, mais hélas je n’avais d’autres possibilités » Soupirant il l’examina de près. Son visage juvénile, témoin du peu d’ans qu’il avait vu passé, sa peau pâle, vierge de la brûlure du soleil, qui ressemblait étrangement à celle qu’il avait eu, adolescent, encore humain… et l’éclat légère de sa chevelure inhabituelle lui apprenait que le venin avait eu un début d’effet quoi qu’on en dise. Ce jeune homme aimait-il sa viande saignante ? Voilà une perspective amusante. Amusante et pathétique à la fois, quoi qu’on veuille bien en tirer, il aurait été parfait en tant que vampire. « Votre lié ne vous as donc rien dit ? Pas plus que la princesse ? Quoi que je n’attends rien d’eux. Ferrus de haine envers les miens, je doute qu’ils aient vu les mêmes fins que moi. Mon disciple vous avez poignardé profondément sur un coup de folie, et d’une arme cruelle et dangereuse. Votre compagnon était sur le point de le réduire en charpie et je ne pouvais vous sauver tous les deux en même temps. J’ai fait la seule chose susceptible de faire cesser ce chaos en pareil instant. Je vous ai mordu. Dans le meilleur des cas le venin aurait ralentit l’effet de l’arme en permettant aux vôtres de vous sauver, et aux miens de s’enfuir. Dans le pire des cas vous n’auriez pas été perdu, et, vampire, vous auriez continué de contribuer à la restauration de la magie en notre continent bien aimé » Le mensonge n’était pas dans sa nature, quand bien même il était vampire, ce n’était pourtant pas au nom de cela qu’il lui dévoilait ses pensées. En réalité, il exposait simplement les faits, répondant à une question posée. La conclusion était sienne. Lui n’avait pas le pouvoir de l’influer, surtout pas si il s’avérait aussi têtu que les autres humains qu’il avait pu croiser…
« Sans doute ne comprendrez-vous pas quel honneur j’ai pu vous faire, sachez cependant qu’il s’agissait véritablement d’un honneur. Et ce, quoi que je puisse regretter de cette malencontreuse aventure » Son regard se fit sombre, pensif « Je me nomme Achroma Seithvelj, seigneur des anciens, prétendant au titre de prince des vampires, membre du conseil et premier dragonnier vampirique. Voilà qui je suis aujourd’hui. J’étais humain voilà très longtemps, quoi qu’on me confonde parfois avec un ancestral. Et je connais bien l’empire, bien mieux que nombre de vivants, certes, je le connais… lui et ses travers. Mais je ne puis guère le juger, tout au plus le commenter » Après un instant de silence, il préféra ajouter « Sachez cependant que si j’avais pu m’abstenir de vous mordre je l’aurais fait. Ce qui s’est passé m’y a contraint malgré moi. Je comptais simplement vous relâcher le moment venu… le moins que je puisse faire envers l’un des seuls espoirs du peuple humain»
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Lun 28 Oct 2013 - 21:08 | |
| Alors qu’il avait posé la question, Amyelenor en pressentait déjà la réponse. Les insinuations de son interlocuteur, et puis le fait qu’il soit directement venu voir l’endroit où il avait été blessé, faisant fi de la plus élémentaire des politesses, et sans avoir l’air de faire cela au hasard, l’en avaient persuadé. Et les derniers doutes furent balayés lorsque le Vampire acquiesça, provoquant là un haussement de sourcil de l’Humain. Comment n’avait-il pu avoir d’autres possibilités ? Il n’était pas le seul homme en armes ce soir-là, n’était pas la seule menace, alors pourquoi Dracos disait-il n’avoir eu comme possibilité que celle-ci ? Comme s’il sentait les nouvelles interrogations qui venaient à l’esprit d’Amy, le presque-vivant poursuivit. En parlant de son Lié, fort heureusement, celui-ci ne se trouvait pas avec lui ce soir-là, car alors la Lame savait qu’elle n’aurait pas pu empêcher Atalos de se ruer sur leur interlocuteur. Mais en effet, ni lui, ni Son Altesse Esmelda ne lui avaient parlé de son agresseur, de celui qui l’avait envoyé dans les limbes séparant la vie de la mort. Car ce soir, oui, il aurait très bien pu finir Vampire, si Faudar ne s’était pas trouvé dans le Palais. Encore qu’il se doutait que les siens auraient plutôt préféré le voir mort, avec Atalos, plutôt que de prendre le risque de perdre un couple de Liés au profit de l’ennemi. Peut-être, sans doute même, Esmelda aurait-elle tout fait pour s’y opposer, mais qu’était la voix d’une Princesse, fut-elle la sœur de l’Empereur, face à celle du Conseil tout entier. A l’époque, les Alayiens n’étant pas encore arrivés, la restauration et le maintien de la magie n’étaient pas des priorités suffisamment importantes face à fournir un nouveau Dragon aux Vampires.
Et en effet, il ne comprenait pas en quoi cela pouvait bien être un honneur d’être mordu par un représentant du Peuple de la Nuit. Bien que de moins en mois obtus, son esprit était encore trop fermé pour ces chose-là, bien que Lyroë, malgré lui, avait bien contribué à le rendre plus ouvert… Du moins, à lancer le processus. Il n’arrivait plus à considérer les Vampires avec haine et dégoût, c’était déjà ça. Plongeant son regard dans celui du dénommé Achroma, Amyelenor acheva de l’écouter. Ainsi, il se trouvait en face d’un confrère Dragonnier. Avait-il déjà été approché par l’Elfe rousse ? Et, si oui, qu’avait-il dit, pensé ? Il émanait en effet de lui une plus grande sagesse que… C’était une sagesse étrange, profonde, presque… D’une sphère supérieure. Sans doute était-ce le fruit des nombreuses années de vie du Vampire, qui devait avoir passé plusieurs siècles sur Armanda. L’être en face de lui… Amyelenor ne devait être rien d’autre qu’un enfant face à lui, malgré qu’il ait atteint l’âge adulte depuis longtemps pour les siens. Amy se pencha légèrement en avant, s’inclinant afin d’honorer le Vampire, puis de se présenter à son tour.
« Je suis Amyelenor, de la Maison Farkstein, Lieutenant des Lames Noires, Général de l’Armée Impériale, Seigneur Set… Seithvelj. »
Sa langue avait fourché sur le nom de son interlocuteur, mais Amy espérait qu’il ne lui en tiendrait pas rigueur. Repensant à ce qu’il venait de lui dire, de lui expliquer, l’Humain eut un léger rire, triste.
« C’est étrange. Mon conditionnement me hurle de ne pas vous écouter, mais… Jusqu’à présent, je n’ai jamais envisagé qu’un Vampire puisse regretter avoir mordu, et c’est pourtant ce que vous semblez visiblement faire. Vous dîtes m’avoir fait là un honneur, mais pardonnez-moi, je ne comprends effectivement pas en quoi il s’agit d’un honneur… Je veux dire… Si je mets de côté tous mes aprioris à l’égard de votre peuple, je ne vois rien d’autre, d’après ce que vous m’avez dit, que le résultat d’un choix tactique. »
Amyelenor, à l’inverse de son Lié, dont il avait vu à son réveil les réactions dès lors que l’on parlait de Vampire, n’était jamais arrivé à en vouloir réellement à celui qui l’avait mordu. Du moins, pas pour lui-même. Dire ce qu’il éprouvait était étrange, mais… Non, il n’avait éprouvé aucune mauvaise pensée à l’égard de son agresseur ; il avait plutôt juré après l’espèce Vampirique au complet pour avoir fait preuve de tant d’audace et avoir blessé la Princesse.
Achroma Seithvelj. Un prétendant au titre de Prince ? Cela signifiait-il qu’il existait entre lui et le tenant actuel du titre, Lorenz Wintel, des divergences d’opinion ? Qui était-il, réellement ? Qualifier à tout bout de champ les siens de Vampire ne laissait pas de place à leur humanité, faute d’un meilleur terme, pour qu’elle puisse s’exprimer. Tout comme un arbre qualifiait de manière générale un cerisier, un olivier, un pin, un cèdre ; tout comme un Humain qualifiait de manière générale un honnête commerçant, un vil courtisan, un sage guerrier, un Noble assassin ; tout comme ces deux qualificatifs généraux, Vampire pouvait-il cacher plusieurs esprits différents ? Y avait-il d’autres Eliow parmi eux ? Achroma en était-il un ? Ou bien suivait-il sa propre voie, envers et contre tout ? Lui-même avait dit qu’il avait été Humain, autrefois. Lui et Amyelenor partageaient une même appartenance d’origine. Il existait deux différences fondamentales entre eux, mais au final, n’étaient-ils pas issus de la même souche ? Et Achroma avait-il choisi d’être ce qu’il était devenu ? Avait-il voulu être vampirisé ?
Assez ! Assez assez assez ! Depuis sa rencontre avec l’Elfe, son esprit était en pleine confusion, et le Baptistrel qui s’était occupé de son œil, Merithyn, n’avait pas contribué à apaiser la tempête qui secouait ses convictions. Avant, il voyait le monde seulement teintés de deux couleurs : le noir et le blanc. Mais ce qu’il avait vécu l’avait amené à remettre en question, de plus en plus, cette vision manichéenne.
« Il est devenu difficile pour moi de vous considérer comme un être foncièrement mauvais. Je commence à penser que l’on ne peut juger un Vampire sur ce qu’il est, mais plutôt sur ce qu’il fait. Il semble que je vous doive la vie, Seigneur Seithvelj, mon corps se rappelle encore de la blessure causée par votre semblable, et j’ai donc une dette envers vous. Mais je dois avouer que… Vous m’intriguez. Je n’arrive pas à me faire une idée précise de vous. Vous êtes si différent des Vampires que j’ai été amené à combattre à Feusacré… »
Amyelenor s’interrompit, quelques secondes le temps de réfléchir à ce qu’il venait de dire, et reprit.
« Non, là n’est pas le bon exemple, car Feusacré était une bataille, et la guerre nous transforme tous… Mais jamais l’on ne m’a parlé de Vampires agissant de manière à sauver… Quelqu’un qui les aurait tué s’il en avait eu l’occasion… Car je vous l’avoue, Seigneur Seithvelj, ce fameux soir, je vous aurais tué si j’en avais été capable… Point par haine, mais par devoir… Celui de protéger le Sang Impérial, l’Empire… Et voilà qu’aujourd’hui, j’apprends que l’un de ceux que je pensais être des ennemis absolus… Ne souhaitait point ma mort. »
L’émotion commençait à gagner sa voix tandis qu’il continuait de s’exprimer.
« Je ne sais plus ce que je dois penser à votre égard, à l’égard de votre peuple, Seigneur Seithvelj. Autant votre Prince incarne à mes yeux le mal absolu, autant… Autant je ne vois plus en la plupart d’entre vous que des êtres souffrant d’une malédiction qu’ils n’ont point désiré pour un grand nombre. Qui êtes-vous, Seigneur Seithvelj ? Qui êtes-vous vraiment, vous, votre peuple ? » |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mer 30 Oct 2013 - 1:10 | |
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L’humain était jeune, extrêmement jeune, même pour les critères de sa race. Il n’avait pas encore la dureté et le manque de maniabilité des vieillards de son peuple, son esprit, comme une jeune pousse, pouvait encore s’ouvrir sur des horizons bien différents que les préceptes qu’on lui avait inculqués avec une détermination sans doute proche du fanatisme. Bien des êtres, en Armanda, se trouvaient en sa présence affligés d’une jeunesse renouve-lée et parfois humiliante… des soldats de l’armée humaine aux conseillers vampiriques et elfiques les plus dignes, tous n’étaient que de vagues enfants encore informes dans leurs pensées et leurs sentiments, la précision et l’expérience. Seuls, Cyrène sa blanche mère et Erin son sinueux père, étaient à même de s’estimer ses supérieurs en toutes choses. Qui aurait donc eut le cran de se croire réellement supérieur à lui, en dehors de ce fou de Lorenz ? Bien mal lui en prendrait d’ailleurs lorsque le couperet retomberait. Car mieux valait ne pas se leurrer, il tomberait à un moment ou un autre. Il était l’aîné des dragonniers, l’aîné du monde, d’une certaine façon, l’un des plus vieux bipèdes encore en existence et il avait vu bien plus de tragédies que tout autre… Plus encore que ses propres parents qui avaient dormis toutes ces années. Il avait vu le plus mauvais en chacun, et le meilleur, et même si il était immensément puissant et immensément instruit, intelligent, sage, ouvert… il n’était pas l’avenir du monde et loin de là. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était préparer la succession, offrir ses connaissances aux jeunes afin de les voir grandir, s’en servir comme d’une base pour leurs propres développement personnels. La jeunesse était synonyme d’aveuglement et de naïveté certes, mais également d’espoir, de potentiel futur… c’était un état passager vers l’harmonie ou le chaos de l’âge mûr. Parfois, l’on pouvait même passer de l’un à l’autre en cultivant sa propre personne, son esprit et son âme… il l’avait lui-même fait, et c’était là un travail de longue haleine, ardus, et fatiguant, terriblement difficile… le résultat était incertain, le chemin complexe. Indéniablement, tous ne possédaient pas la force de caractère. L’humain la possédait-il ? Il avait envie d’y croire.
Il s’inclina en réponse à son geste, courtois et eut un bref sourire en le voyant buter sur son nom. Compliqué, certes. C’était là des sonorités nordiques, pas forcément les plus simples, transcrites en langage commun depuis le haut parlé de l’hiver, un dialecte que seuls utilisaient les hommes de Glacern. La signification de son nom d’emprunt était une flatterie offerte par sa mère, lorsqu’il avait décidé d’abandonner son patronyme de naissance, signifiant par là même qu’il cessait d’exister tel qu’il l’avait été en temps qu’humain et ce bien qu’il garda toujours en mémoire ses racines. Ainsi, ce jeune homme était également un noble. De moindre, très moindre rang, comparé au sien, mais noble tout de même, avec toute l’éducation que cela sous entendait… Dans un sens, il était bon que le dragon d’or n’ait pas choisit un paysan ignare. C’était loin d’être un mépris outragé envers les basses castes, mais il était bien plus difficile d’éduquer un esprit qui ne l’avait jamais été, du moins pas sur les sujets qui les intéressaient tous deux. Lui prêtant une oreille attentive quoi qu’amusée de le voir patauger avec des codes de politesse envers un être qu’il avait certainement toujours considéré comme un ennemi à abattre. Il pouvait presque voir le cheminement de pensée sous la chevelure claire du dragonnier face à lui, de façon fort ludique d’ailleurs, tandis qu’il lui observait le fond des yeux. Cet Amyelenor venait de quitter le monde bienpensant de bien et de mal pour tomber à pieds joints dans celui, bien plus obscure et compliqué, brumeux, des nuances de gris, innombrables. Un monde où rien n’était simple, où la moindre certitude se payait dans le sang et par des années de doutes, pour se trouver le plus souvent éparpillée aux quatre vents à la moindre rencontre, sous l’impact du choc de pensées. Lui-même en avait été victime plus d’une fois, jusqu’à comprendre qu’il n’avait en rien le droit de se confronter aux autres, préférant bien davantage débattre sur un pied d’égalité afin d’apprendre de l’autre, plutôt que de s’imposer à lui.
Laissant un bref moment le silence s’installer suite à cette longue et innocente tirade, il finit par hocher la tête et prit le partit de soulager son corps en s’asseyant sur une roche proche de l’endroit où il se trouvait actuellement, invitant l’humain à faire de même. Puis, et presque avec amusement, il laissa échapper. «Vos questions appel plus un récit de fond qu’une courte réponse ciblée, vous vous en doutez je suppose ? » Tournant la tête pour jouer des cervicales, détendant son corps, il reprit finalement « Qui je suis… c’est une vaste question. Y répondre clairement et de façon organisée demanderait sans doute de nombreuses heures mais je tâcherais d’offrir une simple proposition » C’était, en effet, plus dure qu’il ne pouvait y paraître, de se décrire soit même en toute objectivité, aussi décidât-t-il de faire quelque chose qu’il n’avait jamais : Il commença par le tout début. « Je suis né humain. Mon nom… mon nom était Sylath Elusis, prince de la maison Elusis de Glacern, héritier de ma lignée, et fiancé dès ma naissance à la dame Svenn de l’époque. Une alliance honorable qui aurait préposé ma maison à la seconde place de Glacern. Comme tout bon fils de l’hiver, je fus éduqué selon de très stricts codes, jusqu’à mes six ans. Ce fut le jour jalon de ma naissance que je réveillais alors, par accident, ce qui sommeillait au plus profond de ma personne, car contrairement à mes pairs, mes frères de sang, les nordiques, je possédais un fabuleux potentiel magique, de ceux qui ne naissent qu’une fois en une centaine d’années. Exceptionnels disaient-ils. Exceptionnel, certes… mais méprisable à leurs yeux. Ils détestaient la magie et je me trouvais être un opprobre sur leurs noms. Un mal dans leurs demeures. Je fus, ainsi, banni loin de ma partie. Traité avec honneur et dignité certes mais toujours banni, envoyé à Gloria pour devenir mage de bataille. Et pendant des années je vécus là, à la cour de l’Empereur, une curiosité parmi les jeunes nobles, un étranger sur un sol qui n’était pas le sien. Et alors que j’atteignais mes vingt ans, lors d’un voyage vers le sud, je fus transformé »
Il avait encore le clair souvenir de sa première vision, une fois vampirisé. Le beau visage, enchanteur, de sa mère, Cyrène qui l’observait… une étoile à qui l’on aurait donné une forme humaine. Une étoile qui avait adoucit et apprivoisé sa sauvagerie sans coup férir. « Une attaque éclaire sur notre convois. De sombres formes mouvantes, et une femme plus belle que tous les rêves qu’on pourrait imaginer virent à bout de moi, malgré tout mon fana-tisme et ma puissance. Cyrène était… est, son nom. Une vampiresse aussi blanche que le plus blanc des dia-mants, le plus magnifique, étincelant comme une étoile à mes yeux. J’étais frappé d’immobilisme, émerveillé, charmé et envoûté, ne voyant plus qu’elle… à tel point que je fus incapable de l’empêcher d’approcher, l’empêcher… de poser ses crocs sur ma gorge, pour me vider de mon sang. Je ne rentrerais pas dans les détails. Ce serait un récit lui-même trop long pour le délacer ici. Néanmoins, je fus transformé, par le caprice de ce songe de chair et de crocs. Et elle me garda avec elle, m’enseigna ce qu’elle savait, m’apprit à affiner mes capacités magiques, m’entraînant au combat mais pas seulement. J’avais l’esprit étriqué d’un nouveau-né, et elle fit de mon éternité une continuelle recherche de savoir, de connaissance, de sagesse autant que d’empirisme. Elle ne m’enseigna pas tant à être fier de ma condition que de replacer celle-ci dans le contexte de ce monde, à penser… comme un être et non comme une bête. Me forgeant un psyché unique. Une nouvelle identité, une entité qui ne cesse de se construire, aujourd’hui encore, au travers de ses expériences et de ses rencontres… » Il l’observa avec attention, continuant de son ton posé et calme d’orateur entraîné « J’ai participé à de nombreuses guerres antiques, j’ai combattu avec les dragonniers d’antan, j’ai vu la fin de la magie, le départ des dragons et la découverte des souterrains, j’ai vu le déclin de mon peuple qui devenait, d’année en année, plus stupide, violent et animal. J’ai vu les miens, les anciens, sacrifier leurs temps et leurs esprit en un sommeil sans fin au profit d’un espoir ténu. J’ai vu des lieux que l’imagination mortelle ne conçoit pas, j’ai voyagé dans les terres oubliées et inconnues… jusqu’au bout du monde. Combattu des fantasmes. Et finalement, je suis revenu auprès de mon peuple… par devoir, pour le servir et le guider, pour le tirer hors de sa fange et faire de lui un véritable peuple »
Il y avait beaucoup d’affect, en lui : amertume, espoir, détermination… et il ne cessait de parler. « Je suis celui qui aurait dû être prince. Et qui par pur lâcheté, s’est enfuit, abandonnant les siens à la griffe de Lorenz Wintel. Oui.. je suis aussi cela, général Farkstein. L’on m’a servi le pouvoir sur un plateau d’or et je l’ai refusé, ne me sentant nullement prêt à porter un pareil fardeau. Encore trop jeune, encore trop téméraire, trop impulsif, encore trop baigné de ma jeunesse sanglante pour recevoir le drapé du prince en toute légitimité. Je ne me trouvais pas prêt. Tout comme, et j’en arrive à la conception d’honneur dont j’ai fait mention, je ne me sentais tout simple-ment pas prêt à assumer le rôle de père. Vous, mortels et éphémères, prévoyaient la continuité de votre souche par l’étreinte physique et sexuelle. Nous, par la morsure. Le vampire auquel nous donnons naissance est notre enfant au même titre qu’un nourrisson issu de deux parents humains. Nous avons des devoirs envers lui, des obligations… l’éduquer, comme ma mère le fit pour moi, lui apprendre la discipline, la restriction, le contrôle de la soif et de la violence… de tant de choses. Je ne me sentais pas prêt à cela. Comment l’aurais-je pus, alors que je ne parvenais pas toujours à m’auto-discipliner, à faire raison de mon chaos. Tous ces éons durant, je n’ai jamais accepté que le venin de mes crocs transforme qui que ce soit. Vous mordre était un choix oui, un choix stratégique… et un honneur. Si vous aviez dû embrasser notre éternité, je préférais être votre parent, et vous offrir la stabilité de mon esprit, plutôt que la bestialité de celui qui vous poignarda. Aujourd’hui, certes, je me sens plus à même de supporter la charge qu’est un enfant… Vous dites, nous voir comme des êtres souffrants d’une malédiction que nous n’avons pas voulu. Je n’adhère pas à cela. Le vampirisme n’est pas une malédiction. Plus vraiment, devrais-je dire. Elle est une part d’Armanda, au même titre que les elfes ou les humains. Elle est un état. Singulier, avec ses hauts et ses bas. Pas plus mauvais, réellement, que les autres, bien que nous soyons plus aisément tournés vers ce mal. Ce n’est pas notre naissance qui nous conditionne. Si vous empêchez un être humain, dès la naissance, de développer son affect, il sera aussi mauvais qu’un vampire si non plus. Non la véritable malédiction si elle existe, est issue de l’ingérence de nombreux adolescents de mon peuple qui ont abandonnés leurs devoirs à l’égard des nouveau-nés, les laissant croupir dans leur sauvagerie sans leur laisser la moindre chance. Un parent absent, un parent ne faisant pas son travail, ne remplissant pas son devoir… voilà la plaie de mon peuple oui »
Il secoua la tête. « Je suis vieux, général. Bien plus vieux que vous n’imaginez. J’ai dépassé le millier d’années. Et quand je regarde le monde, je ne vois pour beaucoup que de jeunes enfants. Mais alors que votre jeunesse est une source d’espoir, celle de mon peuple est une agonie. Des prétendus seigneurs vampires tentent de s’élever jusqu’aux sphères qui sont les miennes, et celles de mes pairs, sans parvenir à rien d’autre qu’à un statut de parvenu vain et volage, sans la moindre solidité. Quand aux plus jeunes, ils sont tellement engoncés dans leur étroitesse d’esprit qu’il faudrait des années et un travail sans relâche pour les éduquer. C’est une perte terrible pour nous. Nous les anciens. Nous sommes les véritables vampires, jeune dragonnier. Voilà, en quelques humbles mots, ce que nous sommes, et ce que je suis. » Franc, il le regarda en face « Je suis un vampire. Je ne suis… ni bon, ni mauvais, mais une harmonie des deux, j’ai mes parts d’ombres et mes parts de lumière. Mes erreurs et mes victoires. Mes rêves et mes cauchemars. Je suis un être qui existe, pleinement. Avec ses idéaux, ses volontés… Je ne souffre pas. J’ai accepté ce que je suis. Je suis tel que je suis, et je ne peux me changer. Pourquoi avoir honte de ma condition, alors que je possède plus de sagesse que des villes entières d’hommes ? Plus de pouvoirs que des bataillons de mages ? Pourquoi devrais-je être humilié d’être appelé vampire, quand ce vampirisme m’a donné la possibilité, la chance unique, de devenir meilleur que je n’étais, de me forger, à l’épreuve du temps, au-delà de la condition bassement physique, un esprit ne souffrant nulle comparaison. Unique. Et remplit d’expériences. Cette éternité qui m’a donné l’occasion de côtoyer des êtres formidables et de trouver ma liée, par-delà le temps même ? Pourquoi Amyelenor Farkstein, devrais-je souffrir de cela ? C’est un cadeau. » Il soupira un bref instant, puis reprit plus lentement, sans se laisser, cette fois, débordée de passion pour le sujet « Je sais comment vous pouvez penser. Et je sais que c’est naturel. Vous êtes surpris de savoir que je ne vous voulais pas de mal ? Pourtant c’est la vérité. Oui je savais que vous auriez tenté de me tuer. J’y suis habitué, cela fait longtemps que je suis sujet à ce genre de réaction. Cela ne m’atteint pas, je sais ce que l’on vous inculque, comment on vous éduque, j’ai vécu bien pire à Glacern, croyez moi. Je ne vous reproche pas votre certitude à vouloir me voir périr. Elle est instinctive. Mais pour ma part je ne veux de mal à personne sachez-le, tout comme vous je ne lève mon arme que pour le bien des mieux. Parce que je suis un père, et un guide, et qu’il est de mon devoir de protéger les jeunes de ma race et de tenter… de les préserver, jusqu’à pouvoir leur offrir une dignité pleine et véritable. J’agis autant par devoir que vous. Tout comme je le fis à Feusacré… Vous me trouvez différent ? Je ne sais. Bien souvent, les conflits naissent d’une perception bien singulière, car c’est là la seule image que l’on possède. Point de vérité, seulement la perception que l’on en a. Alors après un si long discourt de ma part messire… que percevez-vous ? »
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mer 6 Nov 2013 - 17:36 | |
| Jamais Amyelenor n’aurait un jour pensé parler, seul, à un Vampire à côté de qui il serait assis. Mais ces derniers jours, beaucoup de ses convictions s’étaient trouvées ébranlées, et il en était venu à faire ou dire des choses auxquelles il n’aurait jamais songé par le passé. Comme s’intéresser au Peuple Vampirique autrement que comme une race ennemie tout juste bonne à être exterminée. Un récit de fond, disait-il, eh bien soit. Il avait tout son temps, étant libéré de ses obligations militaires habituelles, surtout des contraintes horaires, et puis… Et puis il avait réellement envie d’en savoir plus. Bien que celui-ci l’ait mordu, Amy ne se sentait pas en danger en compagnie de cet Achroma, et le serment Baptistral bannissant toute forme et intention de violence n’y était pour rien. Etrange… Et pourtant. Il comprenait un peu mieux ce que voulait dire Lyroë. Tournant son visage vers celui de l’être nocturne, la Lame écouta celui-ci avec attention, presque comme un enfant à qui l’on compte une histoire passionnante.
Glacern l’Oubliée. Cette ville portait bien son nom, car son éloignement avec le cœur de l’Empire était tel que beaucoup oubliaient son existence, même dans les hautes strates de la Noblesse. Terres inhospitalières, et peuple aux rudes mœurs, tout était réuni pour que peu de métropolitains s’y rendent. Amyelenor en avait entendu parler quelque fois, lors de leçons d’Histoire ou de Protocole, et savait que la Maison régnante était celle des Svenn. Ainsi, Achroma était autrefois un Noble de cette cité, rejeté à cause d’un don, un simple don. Rejeté par sa propre famille et condamné à n’être qu’une pupille de plus à la Cour Glorianne.
Lorsqu’il parla de sa transformation, l’esprit d’Amyelenor fut une nouvelle fois soumis aux limites de son ouverture. Mais cette fois-ci, c’était parce qu’il ne comprenait pas comment l’on pouvait être ainsi… Désarmé face à une femme, fût-elle Humaine, Elfe ou Vampire. Rejetant la compréhension étriquée qu’il avait du Peuple de la Nuit, Amy s’efforça de ne plus écouter que comme une feuille blanche, un manuscrit encore vierge, en essayant de ne pas juger Achroma pour ce qu’il était, ni même pour ce qu’il avait fait ; en somme, il ne voulait pas le juger, comme il l’aurait fait avant. Il voulait apprendre de lui, entendre ce qu’il avait à lui dire suite à sa question. L’homme était vieux, très vieux. S’il avait servi aux côtés de ses prédécesseurs Dragonniers, s’il avait vu des endroits et des événements que nul être vivant en ces temps n’avait été amené à percevoir, alors… Oui, il avait dû accumuler un savoir qui ferait pâlir d’envie les plus grands érudits de l’Empire.
Amyelenor réprima une exclamation de surprise, lorsqu’il lui expliqua avoir refusé de devenir Prince, et se contenta de lui adresser un regard où l’étonnement disputait la place avec la stupéfaction. Le visage de la présente guerre aurait sans doute été bien différent s’il avait accepté, voire même n’aurait-elle pas eu lieu. Si Wintel lui faisait l’effet d’un fou mégalomane, ce Seithvelj diffusait naturellement une aura qui inspirait le respect. Mais là où il voyait de la lâcheté, Amy voyait plutôt une grande preuve de sagesse. Refuser le pouvoir pour les raisons qu’il avait évoquées témoignait d’une grandeur peu commune. Dans une moindre mesure, dans la Noblesse Humaine, ceux qui, généralement, héritaient jeunes des Seigneuries de leurs pères étaient plus susceptibles de moins gouverner par leur tête que par leurs impulsions que ceux héritant à un âge plus avancé. Bien qu’il était impossible de savoir comment les choses auraient pu tourner si Achroma avait accepté de diriger les siens, Amyelenor honorait son choix.
Et ce qu’il disait sur les enfants… Il y avait du vrai, et de la même manière, cela se retrouvait chez les Humains : un enfant élevé sans amour, sans être éduqué avait plus de chance de mal tourner qu’un ayant grandi normalement. Il n’avait jamais vu les Vampires comme des êtres ayant la fibre maternelle ou paternelle ; il ne les avait même jamais considéré comme des enfants pour ceux à peine transformés, ni comme des tuteurs-parents pour ceux qui les avaient vampirisés. Il semblait néanmoins que c’était le cas, que les Vampires « à l’ancienne », de ce qu’il comprenait, prenait à cœur ce rôle de formateur, d’éducateur. Amyelenor était trop mal placé, n’ayant jamais vécu dans ce milieu, pour juger si, effectivement, la sauvagerie des Vampires auxquels il avait été confronté était due à un manque d’éducation,, à un désintérêt de leur parent, aussi n’eût-il d’autres choix que de croire Achroma. Achroma qui lui faisait l’effet d’un idéaliste, dans le bon sens du terme. Amyelmenor ne put non plus s’empêcher d’être touché lorsqu’il lui reparla de l’honneur qu’il lui avait fait. Expliqué comme il l’avait fait, il comprenait mieux ce que le Vampire avait voulu dire au tout début de leur rencontre. Une telle pensée aurait très certainement fait bondir son Lié, mais s’il avait vraiment dû devenir Vampire, mieux aurait valu en effet être accompagné par un sage plutôt qu’un amoureux de la violence. De cette manière, il serait sans doute resté plus fidèle à lui-même qu’il n’aurait pu l’être.
Quelques humbles mots. Ces « quelques humbles mots » lui en avaient plus appris moins d’une heure que des heures et des heures d’étude dans de vieux livres. De ce qu’il saisissait de ses dires, les Vampires n’étaient plus que l’ombre de ce qu’ils étaient, au point de vue de la grandeur morale de leur peuple. Si les véritables tenants de la sagesse disparaissaient, l’obscurité attendait les races. Mais il ne sentait pas de désespoir dans ses paroles, plutôt… Oui, une profonde tristesse, mais pas une de celles qui empêchaient d’avancer. Achroma faisait partie de ces rares personnes qui avaient appris à vivre telles qu’elles étaient.
Lorsqu’il termina de parler, Amyelenor ne répondit pas tout de suite, occupé à assembler ses idées. Cela lui faisait tout de même étrange de s’entendre dire que son interlocuteur ne lui en voulait pas d’avoir voulu le tuer, si l’occasion s’était présentée, cette nuit-là. Jamais jusqu’à présent il n’avait pensé qu’un Vampire pouvait ne pas vouloir du mal à quelqu’un. Un père ? Oui, cela semblait bien le décrire, en effet. Un père qui ne désirait qu’un avenir meilleur pour ses enfants, pour son peuple.
« Ce que je perçois ? commença-t-il doucement, levant les yeux vers les étoiles d’un air songeur. Ce que je perçois, c’est qu’il me vient l’idée que Vampires et Humains ne sont, au final, guère si différents les uns des autres. Mon peuple verrait pure hérésie dans mes paroles, mais… C’est ce que vos paroles me font ressentir. »
Amyelenor redescendit ensuite son regard vers les yeux d’Achroma, et reprit.
« Enfin… Je parle de différences… Si, nous sommes différents en bien des points, il serait inutile de le nier, et vous-même, Seigneur Seithvelj, êtes à part des vôtres. … Quoique je ne sache plus très bien si différence il y a… Jusqu’à présent, je voyais les Vampires comme la couleur noire, et les Humains comme le blanc, bien que je sache pertinemment que parmi les miens, certains étaient plus qu’haïssables. Mais… Nos deux races ne seraient-elles pas plutôt les deux faces d’une seule et même pièce ? »
Le Général reprit sa respiration.
« Chacune des faces tente désespérément de s’exposer à la lumière du monde, au détriment de l’autre. Mais… Nous avons oublié qu’une pièce reposant sur sa tranche expose ses deux faces, et non une seule. Peut-être aurions-nous pu nous entendre, si… Les choses étaient allées autrement. Nos races… »
Amy s’interrompit, prenant sa tête entre ses mains, et ferma ses yeux tandis que ses doigts appuyaient sur ses tempes.
« Je ne sais plus que penser… Vos paroles, votre histoire… M’ont plongé dans un trouble plus grand que celui dans lequel j’étais. Vampire… Ennemi… Ces mots qui étaient pour moi comme synonymes… Je les dissocie maintenant, mais… La brume s’empare de mon cœur… Ce que je croyais juste… L’est-il toujours ? »
Dans ses yeux semblaient perler quelques diamants d’humidité.
« Il y a une femme… Elle appartient à un groupe d’armes que mon serment de Lame Noire oblige à poursuivre, voire à éliminer. Et pourtant, alors que j’allais me jeter sur elle, l’arme au clair, elle a su me montrer que nos deux voies n’étaient pas antinomiques. Elle fut la première à m’ouvrir les yeux sur la réalité de ce monde, sur le non-manichéisme qui est le sien. Elle toucha également mon cœur, et bien que mon devoir envers mon Empereur m’obligerait à la tuer, j’en serais incapable, Messire Seithvelj. Et ce que je ressens aujourd’hui est assez semblable… Rassurez-vous, je ne suis pas tombé amoureux de vous. »
Sa phrase fut ponctuée d’un petit rire et d’un sourire innocents, mais dans lesquels transparaissait une certaine tristesse.
« Cela n’est pas dû au serment des Baptistrels, mais… Pourrais-je lever à nouveau mon épée contre un Vampire pour la simple et bonne raison que son cœur ne bat plus comme le mien, après ce que vous venez de me dire ? … Je n’en ai aucune idée, vraiment aucune… Toujours est-il qu’il m’est devenu difficile de vous haïr sans me poser de question… » |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Dim 10 Nov 2013 - 10:33 | |
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Il laissa le silence s’installer, ne cherchant nullement à le briser, tandis que le jeune humain qu’il venait de noyer sous son flot de paroles prenait visiblement son temps pour digérer l’information et pour réfléchir à tout ce que cela pouvait signifier. Curieux, il observait le visage pâlot en tentant d’imaginer ce qu’il pouvait bien pondérer de ses paroles, ce qu’il imaginait… ce qu’il pouvait retirer de tout ceci. Quelles idées se formaient, là devant lui, prenant naissance comme des fleurs en plein frimas d’une intolérance raciale ancrée chez ses parents, et les parents de ses parents, remontant jusqu’à sa propre époque et même bien au-delà, vers l’arrivée des humains en Armanda. Etrangement, il se prit à espérer et à s’angoisser de ce que ce jeune humain pourrait penser… ne désavouant pas le fait qu’une partie de cette angoisse était liée au statut de dragonnier de l’humain. Il avait sauvé Kedrildan en raison de sa valeur pour le continent tout entier, sachant que lui-même pouvait supporter le point de la malédiction… ce n’était certainement pas pour finir par tuer un autre de leurs pairs, comme cet Amyelenor. Plus que tout le reste, il désirait protéger leur caste, autant que son peuple car tout aussi important… Il était l’aîné après tout, le plus vieux des dragonniers présents en Armanda, et il avait décidé d’aider la jeune Tuwiel à former une caste à part…En observant Amyelenor, il commençait à entrevoir une réponse à ses doutes et à ses questions sur sa véritable tâche, sur le devoir qui était siens et sa place comme dragonnier. Il ne pouvait prétendre être, comme ce jeune homme, une figure d’héroïsme et de rêves pour tous, un symbole de justice… son passé était trop entaché pour cela. Et cependant il pouvait offrir sa sagesse et sa mémoire, sa protection à ceux qui avaient besoin qu’on ouvre leurs esprits. Oui, il semblait de plus en plus certain qu’il s’agissait là de la tâche qui lui avait été confié, mais n’aurait guère pu en juger auprès de qui de droit…
Silencieux, il attendait que le jeune homme réponde à sa question, ne le pressant nullement en cela. Il avait beaucoup de temps devant lui. Tellement de temps en cette soirée, qu’il pouvait, et devait se montrer patient. Il l’était naturellement, certes, mais plus que cela… Il ne désirait pas forcer son interlocuteur à la moindre concession. Si il préférait rejeter ses paroles et le voir comme un monstre il n’y pourrait pas grand-chose de plus malgré tout ce qu’il avait pu prouver. Et même si il s’angoissait, ce n’était que dans le bon sens du terme… il ne désirait pas forcément qu’Amyelenor en arrive à ses conclusions à lui, non ce qui l’angoissait c’était véritablement qu’il puisse faire état de tout cela. Et soudain, il prit enfin la parole, lui enlevant cette bouffée d’inquiétude qui avait prit naissance au sein de son cœur mort. Clignant doucement des yeux, il hocha la tête, un geste léger, pour marquer son accord. Oui différence il y avait il aurait été stupide de le nier mais c’était là chose normale, et même ces différences rapprochaient l’humanité de son pendant nocturne… C’était une bonne conclusion effectivement, deux faces d’une même pièce, incapables qu’ils étaient de survivre les un sans les autres. Les humains avaient été façonné par les guerres avec les vampires et pouvaient apprendre d’eux bien des choses, tandis que les vampires eux ne pouvaient se passer du sang qui était leur nourriture de tout temps. Une facette mortelle, l’autre immortelle… un autre état. Il avait parfois clamé que les vampires prenaient le meilleur des deux races dont ils étaient issus. Ce n’était pas totalement infondé, bien qu’ils en aient certainement prit les travers en même temps pour la majorité… Non, la totalité. Il arrivait même aux anciens de pêcher par orgueil. Qui d’ailleurs ne l’avait jamais fait ?
Pas une seule personne pensait-il au fond de lui-même. Et celui qui dirait le contraire serait un bien mauvais menteur. Le tout était de savoir sur quoi cela débouchait. Dans son cas il avait attenté à la vie de bien des êtres durant les guerres antiques et encore aujourd’hui il lui arrivait de faire des erreurs. C’était naturel. L’erreur est humaine dit on… voilà qui résumait bien les choses. L’erreur est humaine oui, mais les miracles également. Il eut un sourire tendre à l’égard du jeune homme, à la suite de son histoire. Ah… l’amour était sans doute le meilleur remède existant. Et le pire également, tandis que son cœur se serrait douloureusement. Adryne… il avait aimé son fils de tout son cœur et de toute son âme, il lui avait tout offert de sa sagesse et de ses enseignements. Sa confiance, son estime… tout. Et il était mort à présent. Longtemps il avait pleuré sa perte et aujourd’hui encore il en restait inconsolable, incapable de refermer le gouffre béant au fond de lui qui lui rappelait quotidiennement que le veilleur n’était plus là. Oh il avait quelqu’un d’autre à présent, une jeune pousse, un bouton d’affection à peine éclot et déjà puissant, déjà vivace, même sous le frimas du deuil… Un autre être à aimer oui. Eliowir. Mais l’elfe ne remplaçait pas Adryne, il était lui-même, différent, unique… et c’était très bien ainsi. Il ne doutait nullement que l’affection qu’il ressentait pour Eliowir, allié à celle, inconditionnelle de Silarae, parviendraient à adoucir ses années… mais c’était tout de même une souffrance profonde. Et c’était un prémices de cette même peine qu’il semblait voir chez son interlocuteur. Etait-il arrivé malheur ? Il n’aurait pu en jurer et pourtant…
« Alors cette femme possède une sagesse enviable. Peu d’individus sont réellement à même de voir le monde en tant de nuances de gris quoi qu’ils en disent. La réalité n’est jamais simple, et une haine irraisonnée est comme un incendie ravageur : il détruit sans distinction » Il hésita et sonda les yeux tristes du dragonnier humain. Etrangement, il se sentait une grande facilité à lui parler et à partager ce qu’il était. Aussi, avec douceur, il reprit. « J’y étais sujet moi-même. Encore récemment » Une pointe douloureuse flamba dans son cœur « Lors de mon retour j’ai découvert que la personne la plus chère à mon cœur… avait été tuée. Tuée par Lorenz Wintel. J’étais fou de rage, de chagrin… et j’ai bien faillis le tuer. Je ne voyais plus rien d’autre que le gouffre béant en mon cœur de savoir cette personne loin de moi pour toujours, arrachée par la mort. J’aurais… tout donné, pour pouvoir échanger non place, qu’il vive et que je m’éteigne. Il avait encore tellement à faire et à accomplir. Mais cela ne fonctionne pas ainsi. Hélas. Tout ce qu’il me restait c’était cette horrible vengeance. Et si seulement j’avais pu réussir… je ne puis dire avec certitude que tout aurait changé, mais ce que je sais, c’était que j’ai commis une erreur… » Il secoua doucement la tête « Je me suis… rarement permis d’attaches si forte qu’avec ce vampire-là. J’ai bien cru mourir, j’ai cru perdre ma raison d’exister… et finalement Silarae a éclot pour moi »
Un sourire lui vint, triste mais plein d’émerveillement, les yeux brillant comme deux étoiles au souvenir de la jeune dragonne sortant de son œuf sous ses yeux « Elle était tellement magnifique, tellement hors de propos dans ce paysage noir et sombre… comme moi semblait-il… Elle m’a sauvé de la folie et de la tristesse et m’a rendu une raison de continuer à accomplir mon devoir… Et… » Il ne termina pas sa phrase. Levant les yeux vers le ciel soudain éclairé, il la vit enfin, revenant vers lui, semblant attirée par ses sentiments, ou était-ce simplement son envie ?
* Silarae…. tu m'écoutais ? *
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Lun 11 Nov 2013 - 14:49 | |
| Un, deux, trois... Les battements d′ailes se faisaient sans vraiment qu′elle y pense tandis que l′air glissait sur ses écailles polies, telle une caresse que le ciel lui offrait. Mais c′était normal, songeait Silarae. N′était-elle pas une dragonne, la reine des cieux ? Paresseusement, elle amorça un virage à droite, prenant soin de ne pas trop s′éloigner. Si son lié avait besoin d′elle, elle devait pouvoir le rejoindre le plus rapidement possible. Et Dracos savait qu′il semblait avoir un don certain pour se mettre dans d′étranges situations. Rapidement, la dragonne blanche tendit son esprit vers Achroma. Tout allait le mieux semblait-il... Au moins était-il seul ; son unique compagnie semblait venir de ses pensées et, ne voulant pas l′interrompre dans sa reflexion, Sila se contenta de lui envoyer une vague de chaleur mentale avant de se détacher de lui, ne gardant qu′un mince fil de contact avec lui. Telle une mère protégeant son enfant, une amante, celui qu′elle aime, une sœur, son frère, elle veillait sur lui à tout instant, ou du moins essayait. Bien qu′il soit vampire, il restait un bipède, une fragile créature n′ayant ni écaille ni queue pour se défendre. Comment avaient-ils réussit à dominer Armanda ? D′autant plus que de tous, les humains étaient les plus faibles, et pourtant ils avaient réussit à conquérir la plus grande majorité des territoires. Stupides êtres roses. Tels des bébés n′ayant jamais évolués, ils étaient capricieux et exigeants. Bah, ils ne méritaient pas que l′écailleuse pense à eux. L′ère des dragons reviendrai, elle en était sûre, et ils remettraient de l′ordre sur Armanda.
Se décidant à profiter pleinement de sa liberté aérienne, la belle blanche effectua une série d′arabesques aériennes, appréciant l′absence totale de limites qui caractérisait le vol. Elle se demandait parfois comme faisait sa moitié pour supporter de ne pas voler. Bientôt, ils seraient ensemble... En attendant, il lui fallait chasser. Non pas qu′elle ait vraiment faim, elle avait mangé il n′y avait pas si longtemps que cela. Mais il ne fallait jamais refuser un peu de viande quand l′occasion se présentait, et elle se sentait suffisamment en forme pour avoir envie de débusquer un charmant petit repas ambulant. La chasse était l′une des choses les plus agréables qu′elle connaisse, avec l′adrénaline que procurait le combat. Malheureusement, l′endroit manquait d′occupation, et hormis décoller délicatement la tête de Lorenz Wintel, chose qu′elle ne pouvait malheureusement pas faire, Sila ne voyait pas qui pouvait avoir l′insigne honneur de provoquer sa colère. D′autant plus qu′avec cette trêve absurde passée dans le royaume baptistrel, elle n′avait pas la possibilité de s′offenser de qui que ce soit. Oh, mettre le soi-disant prince dans une situation embarrassante pouvait être amusante, mais pour cela, il lui faudrait briser le serment et entacher son honneur de dragonne. Et cela, il n′en était tout simplement pas question.
Se laissant porter par les courants, elle tenta de repérer une possible proie sans pour autant s′éloigner de Frère-d′Âme, ce qui s′avéra plus compliqué que prévu. Difficulté qu′en oublia vite en sentant brusquement une étrange douleur lui saisir le cœur, et qui ne pouvait venir que de son lié. Affolée, elle s′empressa de rétablir un lien plus fort tout en se rapprochant d′Achroma. Les images défilèrent dans son esprit, qui ne lui appartenaient pas. Un visage navigua jusqu’à elle par le bien du lien l′unissant à son dragonnier. Un vampire :Adryne. Le nom résonna dans son esprit, et par-dessus les arbres, la dragonne gronda, écoutant ce que pouvait bien dire Achroma et à qui il le faisait pour que de tels souvenirs lui reviennent ainsi. Qui donc osait provoquer cette douleur ? La réponse vint par la suite de la connexion. Un humain. Un dragonnier que son lié avait déjà vu à Gloria. Dracos tout puissant, qu′avait-il donc dit pour provoquer pareil afflux de sentiments dans le cœur du Double Royal ? Mais le registre changea rapidement, et ce fut une onde de tendresse qu′elle ressentit tandis qu′il parlait d′elle à son étrange interlocuteur. Elle était tellement magnifique, tellement hors de propos dans ce paysage noir et sombre. Silarae eut une bouffée de chaleur à l′égard de son lié tandis que sa fierté palpitait. Magnifique, oui elle l′était. Évidemment. Elle était une reine. Et allait le montrer à l′étranger. En réponse à la question qui résonna dans son esprit, elle trompeta bruyamment avant d′amorcer une descente vers la terre ferme. Quel dommage... Le ciel était son royaume, son lieu de vie. Enfin, le sol fut sous ses pattes tandis que l′air vrombissait encore des puissants coups d′ailes. Les repliant, elle marcha jusqu’à se trouver à côté d′Achroma.
*Moi ? Si peu... Qui est-ce ?*
Elle émit un ronronnement en tournant la tête vers lui, cherchant son affection. Il y avait bien longtemps, lui semblait-il, qu′ils n′avaient pas été simplement ensemble, à partager un moment de douceur et de tendresse. Puis son regard mordoré se posa, curieux, sur l′humain en face d′elle. Dragonnier, il en avait l′odeur. Il avait donc était choisit par l′un ou l′une de ses frères ou sœurs d′écailles. Peut-être méritait-il un peu plus de considération qu′elle n′en aurait offert à un simple humain. Dirigeant son esprit vers l′étranger, elle projeta sa pensée pour le questionner :
*Avec qui partages-tu ton esprit, dragonnier ?*
Peut-être pourrait-elle rencontrer le lié de l′étranger. Un dragon doré. Une dragonne peut-être ? La seule chose qu′elle savait de lui –sa couleur– venait d′Achroma. A celui-ci, elle ajouta avec dédain :
*Que veut-il ?* |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mer 20 Nov 2013 - 15:47 | |
| Le regard des deux Dragonniers se croisa, et Amyelenor eut la soudaine impression qu’il essayait de lire en lui en même temps qu’il lui parlait. Et pourtant, loin de s’en offusquer, l’Humain ne fit rien pour l’en empêcher, laissant leurs iris se chercher mutuellement. Son vis-à-vis avait cerné Amelian bien plus rapidement que lui-même au début. Etait-ce dû à sa sagesse millénaire, qui lui faisait voir les choses sous de multiples angles différents ? Sans doute. Mais alors, comment Amelian, en une humaine existence, avait-elle su elle aussi voir ce qu’était réellement le monde qui les entourait ? Ses paroles avaient été bien plus efficaces que son épée, bien plus profondes, bien plus aptes à ouvrir les yeux de jeunes fanatiques comme il l’était alors. Et aujourd’hui, voilà que, coup sur coup, une Elfe et un Vampire bouleversaient à nouveau ses convictions. Les bouleversaient, mais sans détruire son équilibre mental, plutôt en le renforçant, d’une certaine manière.
Achroma semblait hésiter à poursuivre, comme si ce qu’il allait dire éveillerait en lui une douleur sourde et profonde. Hésitait-il car celui lui était réellement douloureux, ou bien était-ce parce qu’il ne voulait pas s’ouvrir à un être éphémère, malgré le don de vie millénaire apporté par son Lié ? Peut-être un peu des deux. Après tout, Amyelenor n’était pour lui qu’un étranger quelques heures plus tôt, même si le fait qu’il ait été mordu par le sage sans âge avait eu l’air de créer un certain lien entre eux, un lien ayant une dimension particulière : profond et ténu à la fois, charnel et pourtant spirituel, … Mettant fin à ses interrogations, le Vampire se mit alors à lui parler, et Amy sentait une profonde tristesse dans chacun de ses mots. Les souvenirs qu’il ramenait à la surface n’étaient pas des plus joyeux, bien au contraire. Perdre un être cher… Il n’y avait rien de pire. Ce sentiment de perdre une part de soi, cette culpabilité, même, d’être celui qui avait survécu, … Et cette perte n’avait rien eu d’accidentelle, mais était le fruit de l’ambition d’un seul homme, d’un seul Vampire : encore ce Lorenz Wintel. Ainsi, il faisait même couler le sang de son propre peuple, celui-là même dont il se proclamait Prince.
La souffrance qui émanait de l’être de la nuit l’émut à un tel point qu’il ressentit une sincère compassion à son égard, tandis que la peine de son interlocuteur lui donnait une raison de plus de se rendre compte que les Vampires ressentaient, comme eux les Humains, des sentiments tels que l’amour. Obéissant à une impulsion venant du cœur et non de ses réflexions, Amyelenor porta la main sur l’avant-bras d’Achroma, l’effleurant sans s’y poser, comme s’il craignait d’aller trop loin en agissant ainsi, de briser l’intimité de l’éternel. Ce fut un mouvement fugace, aussi léger que le battement d’ailes d’un papillon, mais qui néanmoins semblait vouloir dire qu’il n’était pas seul dans la peine, que même s’il ne pouvait pas se mettre à sa place, qu’il était là. Simplement.
Lorsqu’il en vint à parler de sa Dragonne, Silarae… Achroma semblait comme transformé de l’intérieur, comme s’il irradiait une chaude lumière porteuse d’un message d’espoir et de renaissance. Sauvé il avait été ? Amyelenor voulait bien le croire. Il avait ressenti lui aussi un grand et pourtant magnifique bouleversement lorsque Atalos s’était lié à lui, alors il comprenait à quel point cette salvation avait dû être intense pour le Vampire, en une période aussi sombre que celle qu’il avait vécue.
Levant les yeux en même temps que lui lorsqu’il s’interrompit dans son récit en regardant vers le ciel, Amy vit que quelque chose de grand, et de blanc, se rapprochait d’eux. Il reconnut entre mille la silhouette d’un Dragon. La coïncidence était trop grosse pour être vraie : s’agissait-il de la Liée du Conteur ? Lorsqu’elle se posa à leurs côtés, tournant le museau vers le Vampire, le doute ne fut plus permis. Amyelenor contempla un instant la blancheur de neige pure des écailles de la Dragonne, jusqu’à ce qu’elle tourne le regard vers lui en lui adressant la parole. Cela lui faisait étrange de parler télépathiquement avec un autre être qu’Atalos ; il était habitué à entendre résonner sa voix dans son esprit, et pas celle d’un autre Dragon.
*Atalos, le Dragon d’Or, est mon Lié, honorable Immaculée.*
Détachant son regard du magnifique être ailé, Amy reporta son attention sur Achroma.
« Nos Liés sont comme un second souffle de vie, pour nous. Je n’irais pas jusqu’à dire que je comprends ce que vous ressentez, car chaque peine est unique, chaque deuil laisse en nous une empreinte particulière. Mais, qui qu’elle fut, cette personne devait vraiment être un véritable joyau, pour vous, pour que vous vous y attachiez à ce point, Messire Seithvelj. J’ignore ce qu’il advient réellement de notre âme après la mort, j’ignore si les croyances disent la vérité, ou si elles ne sont que le reflet de ce que nous souhaitons au plus profond de nous-mêmes, mais je suis comme persuadé que, quoi que soit devenu celle de cette personne, son souvenir continue de veiller sur vous. Puisez dans celui-ci le bois qui allumera un feu dans votre cœur, dont votre Liée est la Gardienne. »
Amyelenor se tut quelques instants, puis reprit, la voix tremblant légèrement sous le coup d’une forte émotion.
« Je sais que je ne suis rien pour pouvoir vous dire cela, que je n’ai ni votre expérience, ni votre sagesse, mais… N’ayez aucun regret, cessez de penser que vous avez commis une erreur, Messire Seithvelj. Si vous aviez entaché votre âme sous le coup de la haine, le destin aurait pu ne pas mener vos pas vers ceux de votre Liée. Si elle vous a guidé hors des ténèbres, alors faîtes vôtres les tâches de cette personne à qui vous teniez tant. Vous lui rendrez ainsi un plus grand honneur que si vous aviez succombé à la vengeance. Vous porterez plus haut encore sa mémoire. »
Il se tut, le cœur battant, conscient d’en avoir peut-être trop dit, mais sans quitter des yeux Achroma. |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Dim 24 Nov 2013 - 14:19 | |
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Aucun être ne pouvait se comparer à Silarae. Quel que soit l’éclat des autres dragons, ils n’étaient pas elle. Ils n’étaient pas cette superbe créature taillée pour le vol autant que le combat, déliée et gracieuse dans le moindre de ses gestes, intense dans la moindre de ses pensées. Ses écailles irisées la journée renvoyant mille feux mirifiques aux alentours, parant le paysage de songes diamantins et cristallins alors qu’en pleine nuit, pâle spectre, pâle esprit, elle allait, ressemblant à un rêve fugace de neige et de sable blanc. Ses ailes immenses ressemblaient aux tentures d’un dôme céleste étranger et ses yeux d’ambre en fusion apportaient une touche de chaleur et de feu à cet ensemble immuablement pur… Parfait. Elle était parfaite, c’était un terme qui lui convenait, qu’elle semblait naturellement porter, une parure de plus… mais une parure souveraine, au front écailleux de cette reine des cieux. Elle l’avait entendu et était venue le rejoindre, part impérissable de son âme qui l’accompagnait à sa manière, proche et lointaine, tendre et féroce… Il eut un sourire en l’entendant ronronner et laissa échapper une nouvelle bouffée d’affection à son égard, attendrit de cette preuve de tendresse autant que de son apparition à un moment si opportun. Sans surprise, la présence de Silarae le soulageait d’une partie du poids qui pesait durement sur lui, tel un second souffle, une nouvelle vie, elle l’éclairait de sa présence. Il n’y avait qu’en ces rares instants qu’il semblait à nouveau apte à rêver naïvement, de longs vols sur son dos, de simples instants de communions, leurs esprits fondus l’un dans l’autre… Oui, ils n’avaient jamais véritablement eut de temps pour eux, simplement pour eux, sans que quelque incartade extérieur vienne les déranger ou les tenir éloigner. A réflexion, ils n’avaient jamais eu d’occasion de vivre tous deux sans le moindre souci. Triste constat. Mais un triste constat qui pourrait bientôt changer.
* Nous nous sommes rencontrés par hasard. Nous… discutions de certaines choses. Simplement. Il a été éduqué comme un humain, en haïssant les vampires pour la simple raison qu’ils sont des vampires. Et de cela découle de nombreux point de vue que j’essaye, à défaut de balayer, d’au moins ouvrir à d’autres considérations * Il tourna son regard vers Amyelenor * Je le trouve très à l’écoute, ce qui n’est pas une mauvaise chose. Il aurait tout aussi bien pu se braquer et me voir comme un monstre, surtout après notre dernière rencontre. Je suis agréablement surpris. Peut-être l’idéal de Lyroë n’est-il pas aussi ardu que ce que j’avais tout d’abord pensé *
Il était soulagé de voir que le dialogue n’était pas si impossible que cela, avec ces nouvelles générations. C’était bien ce qu’il avait le plus craint à leurs sujets : que les haines raciales, bien ancrées et cultivées, ne soient trop forte pour qu’il parvienne à un débat quelconque et se trouve bloquer en compagnie de barbares aux idées primitives et étriquées. Il n’était nullement faiseur de miracles, et se trouver en bute avec des esprits fermés lui serait tout autant une fin à ses ambitions qu’à celles de l’elfe dragonnière qu’il avait accepté d’aider. Hors Amyelenor était une surprise agréable et qu’il ne dédaignait nullement. Une preuve qu’il y avait de l’espoir pour leur caste naissante de ne pas être tuée dans l’œuf. Oh il doutait que tous seraient aussi bon publique, mais c’était déjà un avantage de se trouve un interlocuteur tel que ce jeune humain qui prenait les choses avec une simplicité appréciable. Lui prêtant d’ailleurs l’oreille, il se fit attentif à ce qu’il lui confiait. A nouveau, une certaine tendresse à l’égard du dragonnier lui vint, alors qu’il lui offrait un sourire délicat et paisiblement attristé, mélange d’approbation et de douleur intérieur qui se distillait comme un alcool… Ses idées et ses considérations étaient agréable et innocente, presque trop pour lui, d’une certaine façon.
*Je ne suis plus capable d’un tel espoir *
Faire sien les tâches d’Adryne ? En avait-il seulement le droit ? Il n’en était pas certain, alors même que ce jeune humain était le second à lui faire cette réflexion. Il chérissait la mémoire de son fils bien entendu et pourtant… pourtant il n’était pas certain d’avoir la force de reprendre son flambeau. Personne n’était parfait, lui moins que tout autre. Et il lui fallait déjà tellement de force et de détermination pour être capable de s’accrocher à l’existence et à sa santé mentale qu’il ne pouvait guère en oublier pour quoi que ce soit d’autre. Commentait-il une erreur ? Ne se poussait-il pas assez ? Il ne pouvait être certain de cela. Mais ce dont il était certain en l’instant c’était qu’il ne pouvait certes pas rester sans rien répondre, alors même que Amyelenor semblait inquiet de sa réaction. Son ouïe vampirique percevait les battements rapides de son cœur mortel, et il rompit le silence, se refusant à mettre plus mal à l’aise encore son interlocuteur.
« Je vous remercie, Amyelenor. Je ne sais si je pourrais réellement reprendre le rôle qui était sien, car il n’échoit qu’à un nombre restreint d’élus. Mais ce que je sais néanmoins ce que je sais ce qu’il me conseillerait à mon propre sujet… à défaut de plus. Je me dois d’accomplir mon devoir quoi qu’il m’en coûte. Et l’un de ces devoirs et de préserver mes pairs dragonniers. Dont vous faites partie. Moi qui mieux que quiconque connait les erreurs et les faiblesses de nos pairs d’antan, je me dois de veiller à ce que nos générations ne reproduisent pas de tels actes » Il secoua doucement la tête « Je ne pense pas qu’ils aient… été véritablement mauvais ou prit de folies, ils n’étaient pas en erreur véritable… et pourtant, même en les comprenant parfaitement, je ne puis qu’espérer que nous parviendrons à de meilleurs résultats. Nous avons beaucoup à gagner à être capable de nous comprendre. Pouvoir discuter avec vous est une véritable chance… Je sais que Dame Tuwiel désirait vous rencontrer, mais je craignais, je dois l’avouer… de ne pas trouver les mots pour moi-même »
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Lun 25 Nov 2013 - 22:32 | |
| Atalos, le dragon d′Or.. Non, elle ne le connaissait pas, pas vraiment du moins ; mais les quelques mots ramenèrent quelque chose dans son vaste esprit ; elle se souvenait encore de la petite silhouette écailleuse, de l′éclat doré qu′elle avait aperçu il y avait bien longtemps, au milieu des cris et des flammes, lors de sa première bataille. Atalos, son frère d′écailles. Avec qui, sûrement, elle avait partagé ses longues heures, journées, siècles même, d′attente. Ainsi, elle avait face à elle son dragonnier. Étrange coïncidence ? Pas vraiment. Armanda était trop petit pour que deux dragons et leurs liés y règnent sans se croiser. Le plus déroutant était peut-être simplement le fait que sur sa route, elle ne trouve que l′humain. Quelle deception également ! Elle aurait ainsi pu échanger, de vive voix, avec l′un des siens. Elle qui mourrait d′envie de rencontrer ses pairs ne semblait pas avoir la chance de son côté. Le temps viendrait probablement où son rêve se réaliserait, et en attendant ce moment tant espéré, elle allait devoir prendre son mal en patience.
*Intéressante rencontre. Sans doute est-il plus sage que ses compatriotes, bien que cela ne soit pas difficile.* Un compliment, de sa part, la provocation étant adoucit par l′onde de douceur transmis en même temps. *Il est jeune, semble-t-il, cela joue sans doute en sa faveur. Il n′a pas vu ni connu la noirceur. Mais c′est mieux ainsi. Reste à savoir si tous seront aussi ouverts...*
Et pour ce dernier point, étrangement, elle restait sceptique. L′idéal de Lyroë, l′ancienne dragonnière, semblait encore un rêve bien lointain, une utopie sans espoir malgré le départ encourageant qu′offrait le dragonnier humain. Mais après tout, elle avait apprit, de force plus que de gré, la patience dans son œuf. Elle ordinairement si peu patiente se fit la réflexion qu′il leur suffirait probablement de garder courage et que cela payerait. Son lié le pouvait, cela ne faisait aucun doute ; quant à elle... ce que dragon veut, il peut.
Baissant la tête jusqu’à se trouver à hauteur d′Amyelenor, Silarae le fixa dans les yeux, semblant fouiller son âme de ses yeux pleins de mystères. Il avait été choisit par l′un de ses frères, et semblait la respecter. Achroma l′appréciait, son être respirait la bonté et l′envie de faire le bien. Elle se redressa satisfaite de son examen, et émit un grondement approbateur en entendant ses paroles. Ses mots étaient justes et la vérité se cachant dans le creux de ses phrases. Un humain, un simple humain, et pourtant bien différent de ses pairs. Mais il était dragonnier, et nul doute qu′il devait être supérieur à ceux de sa race pour avoir été choisit par l′un des maîtres du ciel et de la Terre ; certes il ne pourrait jamais être comparable à Achroma, mais du moins n′était-il pas, aux yeux de la blanche dame des cieux, aussi bas que l′était la plupart des bipèdes. Oui, il méritait qu′elle lui consacre son temps.
*Vos paroles sont pleines de sagesse, Dragonnier d′Atalos, Lié de mon Frère d′Ecailles. Mais je crains que la douleur ne soit mauvaise conseillère, et elle hante encore son esprit.*
S′il pouvait le raisonner, un grand pas serait fait. Qu′il ne souffre plus en songeant à son aimé disparu était impossible ; mais qu′il cesse de s′en vouloir, voilà le but cherché. Silarae avait déjà tenté de le faire changer d′avis ; mais pour cela, il restait inébranlable dans ses convictions. Sans doute, s′ils avaient put passer davantage de temps ensemble, partager des moments seuls où ils auraient abordé de tels sujets, peut-être serait-elle parvenue à lui faire entendre raison. Mais elle n′avait put s′attarder ; ils étaient toujours dérangés. Elle souffrait de le voir ainsi, brûlait de colère contre Lorenz et ce qu′il avait infligeait à son Frère-d′Âme. Reprendre les tâches de son fils semblait être une idée lumineuse ; s′il y parvenait, le deuil serait plus facile à terminer.
*Il a raison, et tu le sais. Je t′aiderai. Nous pouvons y arriver.*
Une puissante vague de réconfort accompagna ses paroles. L′incertitude qu′elle voyait étinceler dans l′esprit du Conteur devait disparaître. Il était fort, elle avait foi en lui et, du haut de sa grandeur de dragon, elle savait ce dont il était capable. Il ne devait plus douter. Propageant sa pensée, elle fit en sorte que les deux l′entende distinctement, bien qu′elle sache parfaitement que le vampire n′aurait aucun soucis pour l′entendre.
*Des erreurs de nos ancêtres, nous avons apprit. Pour nous, Dragons, la mémoire coulant dans nos veines nous met en garde et ne peut que nous profiter ; mes frères et sœurs devraient comprendre le bien fondé d′une telle action. Nos actions ne peuvent qu′être meilleures que celles du passé*
A l′intention exclusive de son lié, elle reprit :
*N′ai crainte, Achroma ; il n′est plus temps de douter.* |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mer 4 Déc 2013 - 16:00 | |
| L’attente était difficile, tandis qu’Amyelenor étant dans le flou, ne cessant de se demander si, dans sa hâte de remonter le moral du Vampire, il n’avait pas été trop loin, n’avait pas outrepassé ses droits en tant qu’interlocuteur. Bien qu’il n’ait pas parlé dans le but de vexer Achroma, comment réagirait celui-ci s’il jugeait ses paroles trop dures, trop déplacées ? D’aucuns auraient très certainement considéré qu’il était de leur devoir de remettre à sa place ce jeune Officier si peu conscient de ses droits, mais comme il put en juger quelques instants plus tard, ce n’était pas là le cas du sage être nocturne.
On ne pouvait pas dire qu’il manquait de confiance en lui, ce n’était pas ça, mais plutôt qu’il… Qu’il ne se sentait pas capable de reprendre le flambeau abandonné par cet être qui lui était si cher. Etait-ce à cause de ce que l’on nommait la « culpabilité du survivant » ? Avait-il été tellement touché par cette perte qu’il avait comme l’impression d’avoir perdu une partie de lui-même, celle-là même qui avait la l’envie, et surtout la force, de continuer ? Amyelenor devait sûrement se tromper ; ne ressentant pas les tourments qui devaient se dérouler dans l’esprit du Vampire, il ne pouvait pas savoir ce qu’il pensait, ni ce qu’il vivait. Mais cela lui suffisait pour éprouver de la compassion pour son interlocuteur. La perte d’un être cher devait toujours faire souffrir au plus haut point, quelle que soit la race.
Ce qui restait de son ancienne manière de pensée et de considérer les Vampires termina de voler en éclat lorsqu’Achroma utilisa le terme de « devoir ». Surtout qu’il s’agissait non pas de servir uniquement son peuple, mais bien, au contraire, de faire fi des différends entre leurs races pour ne plus subir de guerre comme celle qui avait vu le départ des Dragons d’Armanda. Mais ce qu’il disait était vrai. A l’époque, les conflits raciaux avaient pris une envergure démesurée, celle-là même qui menaçait de se reproduire si les Alayiens n’étaient pas arrivés bouleverser la géopolitique continentale. Leurs ancêtres choisis par les Seigneurs du Ciel ne devaient considérer que leurs races respectives, et non les autres. Amyelenor n’était pas si différent d’eux, avant… Avant ces rencontres. Ainsi, lui aussi avait rencontré Lyroë ? Quelle ironie que ces deux êtres, appartenant à des races qui se haïssaient cordialement, aient pu avoir la même idée, la même ambition, en quelque sorte. Ironie ou… Volonté supérieure. Ce ne devait pas être le fruit du hasard, qu’ils soient tous réunis en ces lieux, créant des liens qui n’auraient jamais pu voir le jour autrement.
« Je ne vous cacherais pas que ma rencontre avec Dame Tuwiel m’a fait prendre conscience de beaucoup de choses, même si, comme en ce moment, j’en suis sorti troublé, bien plus que je n’aurais pu l’imaginer. Je pensais qu’il était trop tôt, et qu’il me serait impossible de mettre de côté ma haine pour votre peuple, même pour un devoir aussi supérieur que celui d’une caste de Dragonniers, mais… Je vous ai rencontré. »
Les lèvres d’Amy se fendirent en un petit sourire.
« Vous m’avez fait comprendre que… Qu’il était possible de construire quelque chose entre nous. Vous avez parfaitement su trouver les mots, Seigneur Seithvelj… Non, vous avez été vous-même. Et en cela, vous n’auriez pas pu avoir plus de chance de réussir à passer outre ma cuirasse d’aprioris, de préjugés. »
La pensée d’Atalos lui vont alors aux yeux. Amyelenor n’était pas sans savoir la haine viscérale qu’il éprouvait envers leurs, peut-être, ennemis d’hier. Aussi, comment réagirait-il lorsque la Lame Noire viendrait lui parler de ce Vampire pas comme les autres, qui pouvait être la pierre de fondation d’une véritable paix, d’une véritable union, autre que des signatures d’encre sur une feuille de parchemin ? D’autant plus qu’il s’agissait de celui qui l’avait mordu au Palais Impérial. Même si Amy était persuadé que ce contact charnel si particulier avait comme établi une sorte de lien entre eux, il aurait du mal à lui faire accepter l’idée d’une caste, surtout au vu de la réaction qu’il avait eu lorsque l’Elfe Tuwiel leur en avait parlé.
*Je ne pense pas, répondit-il à Silarae qui venait de lui parler à nouveau mentalement. Je ne suis qu’un simple mortel d’à peine une vingtaine d’années, là où le Seigneur votre Lié est un être multiséculaire. Sa sagesse est le fruit de toutes ces années passées à voyager et à réfléchir. Moi, le feu et la fougue des jeunes âges m’habitent toujours, me menant parfois sur des voies où je pourrais regretter m’être engagé par la suite. Nous autres, Humains, vivons avec la douleur, et nous en servons comme d’un moteur pour continuer à avancer. Elle ne disparaîtra sans doute jamais entièrement des pensées et des sentiments de votre Lié, mais la ressasser sans cesse ne pourra que le conduire vers de plus grands malheurs. Mais vous, de ce qu’il m’a dit, êtes sa lumière, son phare. Vous avez le pouvoir de lui rendre le monde plus doux, plus agréable.*
Reportant son regard, qui s’était inconsciemment tourné vers la Dragonne blanche, sur Achroma, Amy reprit la parole.
« Pardonnez-moi d’y revenir à nouveau, mais je pense toujours que vous ne devriez pas abandonner l’accomplissement de cette personne qui vous tenait tant à cœur. Qu’est-ce qu’un élu ? C’est un être, Vampire, Elfe ou Humain, qui a un jour décidé de brandir l’étendard d’une noble cause. Il vous suffit de vous pencher pour ramasser celui qui fut lâché à vos pieds. Votre devoir est là où vous le voulez, et nul part ailleurs. Et puis, rajouta-t-il en désignant la Dragonne d’un léger mouvement de tête. Votre Liée n’est-elle pas la preuve que vous-même êtes un élu du destin. Qui d’autre que vous, qui avez été choisi par un être aussi sage qu’un Dragon, peut se considérer comme suffisamment digne pour reprendre les tâches entreprises par la personne qui hante tant vos souvenirs ? Vous pouvez reprendre ce rôle. Seul votre choix vous sépare encore de cette voie, et rien d’autre, Seigneur Seithvelj. »
L’Humain écouta avec attention les paroles de Silarae. Ils se trouvaient effectivement à une époque charnière de l’histoire d’Armanda. Les choix qu’ils entreprendraient tous, dirigeants comme Dragonniers, et même simples citoyens, détermineraient l’avenir du continent, le sort de trois races, le futur de la sève qu’était la magie pour leurs terres.
*Peut-être bien que les Alayiens sont arrivés pour nos permettre de prendre conscience de ce que nous avions à perdre si nous continuions de nous déchirer entre nous, dit-il, ne sachant si Achroma pouvait l’entendre à travers Silarae. Le prix est lourd à payer, mais si cela nous permet de ne plus faire couler de sang à l’avenir… Oui… N’oublions pas les enseignements du passé…* |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Dim 8 Déc 2013 - 20:34 | |
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Il aurait pu sourire de la façon dont elle maniait la taquinerie. Douée dragonne qu’elle était ! Sa digne liée oui, car après tout c’était lui qui lui avait appris les façons des mortels. Et elle avait bien appris oui, elle avait non seulement appris mais elle l’avait fait sien, et que pouvait-il répondre à pareille chose, lui, si ce n’était qu’il l’aimait décidément trop et qu’elle lui manquait encore cruellement, son âme au supplice, assoiffée du contact de la dragonne et pourtant retenue par les chaînes d’une raison qui pesait terriblement sur ses épaules… Oui, cela ne suffirait sans doute jamais à combler le besoin dévorant qu’il avait de sa présence et de son contact. Mais avec le temps sans doute que cette irrépressible nécessité se calmerait, s’apaiserait… Sans doute oui, ce n’était qu’une passade, un temps qui n’avait d’infini que l’importance qu’il lui accordait et si il estimait sans ambages qu’il était vital pour eux deux de reformer un couple uni, il savait également que souffrir un temps n’était rien pour eux qui avaient attendu plus de mille ans. Ils pouvaient attendre encore un peu, sans doute. Quant à l’idéal qu’ils défendaient, il était certain que cela ne serait pas de tout repos, mais il avait toujours été capable de trouver les mots exacts en fin de compte, même si il n’y croyait pas lui-même…. Il doutait simplement que les autres se laissent faire. Beaucoup étaient trop bornés pour voir au-delà de leurs querelles raciales. Et il avait encore beaucoup à faire rien qu’en compagnie de Kedrildan. Mais mieux valait garder les sujets qui fâchent pour plus tard.
En attendant, il fallait avouer que les voir se liguer contre lui était particulièrement amusant. Il semblait alors encore capable de les étonner, lui comme elle… surtout elle en vérité, car après tout, elle était son âme et le connaissait bien. *Il n’est point ici question de raison ou de capacité ma douce… cela n’entretient nul rapport * Non, ce n’était pas aussi simple, pas aussi simple du tout… Il ne pouvait pas car il n’était pas l’élu que l’on attendait. Cependant, la vague de réconfort envoyée par Silarae lui fit du bien et il ne s’appesantit pas davantage là-dessus, ne désirant nullement entretenir un débat dans lequel ses interlocuteurs n’avaient pas toutes les clefs. Leurs paroles étaient sages, au demeurant et il les saluait pour cela, mais les faits étaient là, il ne pouvait nullement échapper à cette fatalité. Il n’avait pas ce que Adryne avait, ce quelque chose de très spécial qui avait fait de lui le veilleur. Il avait ses propres qualités, différentes, mais pas celle que l’on attendait d’un tel devoir… Avec lassitude, il se laissa baigner dans les ondes mentales de la dragonne, la caressant de son esprit avec douceur. Mais hélas, le doute était toujours présent. Et il en fit voix. « Je ne sais si tes pairs ont réellement appris Silarae et ce sans offense aucune… Je ne peux que témoigner de ce que l’aveuglement peut parfois accomplir » Il n’était certes plus temps de douter… mais il doutait pourtant. On ne pouvait guère le taxer de ne pas se remettre en question, à tout le moins.
Une chose à la fois cependant. Car en cet instant Amyelenor lui se montrait ouvert d’esprit. * Mieux vaut se concentrer sur chaque instant, je l’oubli trop aisément * Il ne pouvait voir que la providence en cette soirée malgré tout. Ici se tenait un dragonnier qui serait peut-être sauveur de son peuple, et du continent tout entier, un jour. Un dragonnier qui siègerait peut-être aux côtés d’elfes et de vampires, parlant avec eux d’égal à égal… sans barrières et dans le respect mutuel. Oui il l’espérait volontiers. Il avait parlé sans drapés, sans ronds de jambes, simplement et avec foi et il semblait que ce fut parfaitement perçu… c’était un énorme pas en avant, et malgré son affirmation à Silarae, il semblait bien que les doutes ne pouvaient que rapidement s’écrouler. Il se prit soudain à rire aux mots de l’humain, un rire chaud et véritable, alors qu’il décochait un regard mi réprobateur mi affectueux au jeune homme. « Vous pardonner de mettre tant de bonne volonté à essayer de me remonter le moral et de m’épargner un deuil difficile ? Que pourrait-il avoir à pardonner, vraiment ? Je vous suis reconnaissant, tant de constance me touche et me flatte. Et je suis en faute, vous ne possédez pas tous les éléments nécessaires à cette histoire, par ma faute…Celle qui aurait pu me permettre de poursuivre la tâche de mon fils m’a déjà rejeté » C’était triste mais vrai. Il ne sourit pourtant pas moins en poursuivant après un instant de silence « Vous m’offrez plus que d’altruiste paroles, jeune homme… vous m’offrez une certitude, celle d’avoir au fait un bon choix un jour dans ma vie »
Il se laissa retombé près de Silarae, et s’installa de nouveau sans cesser d’observer le dragonnier qui lui faisait face. « Accepteriez-vous de me parler de vous et de votre lié ? J’aimerais savoir comment vous vous êtes rencontrés. Je pensais que les œufs n’avaient été transmis qu’aux elfes, dans un premier temps. Mais j’ai pu me tromper »
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Lun 9 Déc 2013 - 15:50 | |
| La psychologie humaine était à la fois simple et complexe, mais Achroma en étant plus proche que de celle des vampires, Silarae commençait à avoir un bon aperçu de la chose. Cela ne voulait toutefois pas dire qu’elle la comprenait, d’autant que « ressembler » n’était pas « faire partie de » et son lié avait à bien des égards une pensée vampirique. Sa pensée l’atteignit de plein fouet, et la dragonne laissa un instant le silence s’installer avant de lui répondre.
*Le choix est tien, Frère d’Âme. Mais tu sais que si tu acceptais la mission, je te soutiendrai.*
«Tu as fait bien pire» songea-t-elle en réprimant la colère qui recommençait à l’envahir. Le moment n’était pas venu de reparler des erreurs du passé, elle les avait acceptées. Quoi qu’il en soit, disserter sur la conscience achromienne ne semblait pas non plus être une excellente idée alors que le jeune dragonnier face à eux racontait ses souvenirs et se dévoilait peu à peu. Il se jugeait bien sévèrement, songea la dragonne, s’il pensait vraiment avoir une « cuirasse d’aprioris, de préjugés. ». A moins qu’il ne se surestime, mais quel que soit le mot employé, il était dans le tort.
*Tu n’as pourtant pas eu besoin de tellement d’efforts qu’il le laisse penser n’est-ce pas ?* Sa longue queue brisa une branche basse tandis qu’elle cherchait une position confortable. *Espérons que son armure soit une meilleure cuirasse que ses préjugées, sans quoi son dragon doit avoir fort à faire pour le protéger*
Ses yeux s’éclaircirent, trahissant son amusement, tandis que des paillettes d’or tournoyaient au fond des prunelles plus sombres. Elle l’aimait bien ce petit. Il possédait un étrange mélange de naïveté touchante et de sagesse dissimulée, sans doute due à son dragon. Aucun humain, le meilleur soit-il, ne pouvait rivaliser avec un dragonnier, pour la simple et bonne raison qu’il n’avait jamais fréquenté d’écailleux.
*La sagesse n’attend pas le nombre d’années…*
Elle avait répondu doucement, telle une vieille sage qui n’allait pas le rester très longtemps.
*…Bien que sur ce point ce ne soit effectivement pas exact. Mais ne t’inquiètes donc pas, jeune dragonnier, je ne laisserai pas cette torche s’éteindre*
Impossible de ne pas ressentir la tendresse dissimulée dans ces quelques mots. Quel que soit le passé, ils avaient à présent l’occasion de passer davantage de temps ensemble, de profiter l’un de l’autre et de s’ouvrir, laissant leurs souffrances se mêler. Non, la blanche ne pouvait pas laisser Achroma s’enfoncer dans quelques souffrances que ce soit. Elle était là pour lui, elle le soutiendrait, le hisserai vers le haut dusse-t-elle s’effondrer à sa place. Si elle-même était un guide pour Achroma, lui était son souffle. Aussi libre et indépendante qu’elle puisse être, elle n’était complète qu’en sa présence.
Les paroles du jeune humain la flattèrent, et Silarae releva la tête vers la cime, enorgueillit par le compliment. Bien sûr qu’il était unique puisqu’elle l’avait choisi !
* Les Esprits n’ont certainement pas envoyé ses enfants à la mort pour le simple plaisir de voir s’ils se souviennent des leçons passées. Non, je ne crois pas que les alayiens aient à faire quoi que ce soit avec ce ceci, mais cela ne nous empêche nullement de mettre à profit notre expérience passée. C’est à nous qu’il revient d’ouvrir les yeux, mais tu es bien sévère avec les miens, mon lié*
Elle s’allongea, posant son énorme tête sur ses pattes avant, tel un gros chien un peu étrange.
*Que penses-tu de lui ? Il a de belles paroles certes, mais sera-t-il capable de répandre et convaincre nos pairs ? Il est jeune et semble malléable, j’ai grand peur qu’il ne change facile d’avis s’il se trouve face à un dragonnier ne partageant pas nos avis.*
Son regard se reporta sur le concerné, tandis qu’elle continuait à l’étudier instinctivement. Comprendre son adversaire aussi bien que ses alliés. Achroma s’installa près d’elle, et elle savoura cette proximité, attentive malgré tout à ce qui allait sortir des lèvres fines d’Amyelenor.
*Quand donc mon frère d’écailles a-t-il éclot ?*
Un autre dragon… Elle en avait déjà rencontré, mais les souvenirs étaient lointains, et l’idée de croiser les siens était toujours excitante. La petite dragonne de l’ombre également, elle aurait aimé la recroiser. Sans parler, bien entendu, de tous ses aînés, donc la sagesse n’avait d’égale que la taille.
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Dim 19 Jan 2014 - 20:17 | |
| Amyelenor leva des yeux surpris vers la Dragonne, après que celle-ci lui eût parlé. Il ne comprenait pas comment la sagesse pouvait être due à autre chose qu’à l’âge. Oh, certes, ce n’étais pas une condition sine qua non, loin de là, mais il imaginait mal une personne de son âge être aussi sage que… Que Faudar ou Achroma, qui tous deux n’étaient plus de la première jeunesse – encore que cela ne se voyait évidemment guère pour le deuxième. Peut-être voulait-elle dire autre chose ? Oui, ce devait certainement être cela, car malgré tout, Amyelenor ne se sentait pas plus sage qu’un rondin de bois. Une étrange pensée, fugace, traversa son esprit : et si les rondins de bois avaient eux aussi une conscience ?
*Peut-être la sagesse est-elle indépendante de l’âge, honorable Immaculée, mais je ne me sens pas encore… Mes yeux ne sont pas encore assez ouverts sr le monde pour que je puisse me prétendre érudit. »
Et comment cela aurait-il pu en être autrement, lui dont tout prédestinait à n’être qu’une simple Lame Noire au service de la Famille Impériale ? Lui qui, jamais, n’aurait un jour pensé occuper les fonctions de Général, et encore moins de Dragonnier. Dragonnier. Les écrits historiques présentaient les élus, quelle que soit leur race d’origine, comme des êtres bien au-dessus de l’immense majorité, presque égaux aux Princes et Empereurs. Des personnes dont le cœur avait attiré l’attention d’êtres encore plus fabuleux. Oui, jamais il n’aurait pensé un jour se trouver en un endroit où l’avenir de tout un continent allait se décider, se jouer, hormis peut-être pour assurer la sécurité du plénipotentiaire ? Et cela n’aurait clairement pas été la même chose.
Son regard croisa celui d’Achroma lorsque celui-ci… Fit bien plus que de lui répondre. En acceptant les paroles que lui avaient dites le jeune homme, il… Le gratifiait ainsi d’une certaine considération. Même plus que cela. « La certitude d’avoir fait un jour dans sa vie un bon choix » ? S’il fut flatté par les paroles de l’atypique Vampire, Amyelenor ne put cacher la surprise de se peindre sur son visage. Il ne sut que répondre, car cela était comme… C’était un compliment magnifique, fait par quelqu’un qui l’avait un jour envoyé dans de sombres limbes d’inconscience pour lui sauver la vie. Cela lui donnait assurément une valeur remarquable. Ses lèvres esquissèrent un sourire, une façon de remercier implicitement Achroma, car aucune parole ne lui venait à l’esprit. Du reste, aucun mot n’était assez fort pour exprimer ce qu’il avait ressenti sur le moment.
Lorsque les deux Liés abordèrent le sujet de l’éclosion d’Atalos, les pensées d’Amyelenor se perdirent dans un délicieux flot de souvenirs. Oui, le jour où le Dragon d’Or avait brisé sa prison ovulaire, le jour où leurs deux esprits étaient rentrés en contact pour la première fois, fusionnant dans une danse langoureuse, était gravé dans sa mémoire, et nul passage de temps ne pourrait l’effacer. Jamais ce souvenir ne disparaîtrait. Alors, la voix emplie d’un amour presque palpable pour son Âme-Liée, la Lame Noire raconta :
« Vous ne vous trompez point, Maître Seithvelj. Aucun œuf de Dragon n’a passé les portes de Gloria, aussi la voie tracée par le Dracos ne pouvait être le fait du hasard. C’était quelques temps avant Feusacré ; je faisais partie de l’escorte d’un Ambassadeur Impérial envoyé négocier quelque alliance militaire avec les Elfes, du moins en poser les bases. Lorsque nous sommes arrivés, nous – les membres de l’escorte – avons été guidés vers nos logements. Mais sur le chemin, j’ai été attiré par… Une sorte de force invisible, une attraction impalpable. C’est alors que j’ai vu l’œuf. Il était posé là, sur une petite tablette en colonne, rayonnant de mille feux, comme un phare dans la nuit. Je m’en suis approché, pour le contempler, car je n’avais jamais rien vu de si beau, de si… Pur. Ces nervures sur la coquille, semblables à des veines ; cette lumière intérieure qui palpitait comme un cœur… Et puis, je ne sais pas pourquoi, j’ai eu envie de le toucher, de ressentir cette chaleur qui semblait émaner de lui. Obéissant donc à cette subite impulsion, j’ai posé ma paume dessus, et… Vous avez certainement ressenti la même chose que moi, cette sensation de… D’être complété. C’était… Merveilleux. Comme si je retrouvais une part de moi-même perdue depuis… Des millénaires. Et puis, a débuté alors notre… Vie commune. Nous avons appris à nous connaître, et paradoxalement, nous nous connaissions depuis le début. Mon seul regret est que… Cette période idyllique qui a suivi sa naissance n’a duré que trop peu de temps… Nous avons trop vite été plongés… Non, Atalos a trop vite été plongé dans les flammes de la guerre. Mais lorsque nous passions nos nuits à préparer des plans de bataille, du crépuscule jusqu’à l’aube… Il était là, me soutenant, m’apportant son réconfort, sa chaleur. »
L’émotion menaçait de le submerger, une nouvelle fois. Amyelenor avait l’impression d’être à fleur de peau depuis le début de cette conversation, comme si sa maîtrise de lui avait volé en éclat au contact d’Achroma.
« Hélas, j’ai souvent la sensation de… Ne pas faire assez pour lui, de ne pas lui apporter autant que ce qu’il m’apporte à moi. J’ai peur que notre relation ne soit qu’à sens unique. Je suis plus qu’heureux d’avoir été choisi par Atalos, de m’être lié à lui, mais je me demande souvent pourquoi moi ? Il y a sûrement des milliers de personnes plus… Plus aptes que moi. Ma seule certitude est que je l’aime plus que tout, et que rien au monde ne pourrait le remplacer. » |
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mer 22 Jan 2014 - 19:28 | |
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Sévère ? Non, il les jugeait justement. Et certainement avec moins de délicatesse à l’égard de l’égo de ces créatures que n’en aurait quiconque. Pour avoir vécu cet âge ancien, l’avoir vu de ses propres yeux. Pour avoir expérimenter. Oui, il s’adjugeait le droit de le faire, en toute connaissance de cause, car c’était autant leur entêtement que la folie des dragonniers qui avait conduit à la ruine du continent. La honte ne pesait pas uniquement sur les bipèdes quand bien même on tendait naturellement à la leur attribuer. En réalité, c’était bien plus complexe que cela et n’entretenait pas uniquement honte et gêne à m’égard du passé… Oui, ces couples de liés étaient certes responsables du départ des nuées, cela était impossible à nier. Mais il y avait bien plus que cela. On ne pouvait réellement affirmer qu’ils avaient conduit le monde à la ruine pour le simple plaisir d’un tel affront, bien loin de là. Ils ne se battaient certainement pas pour rien. Ils se battaient pour des convictions que lui-même respectait profondément, plus que cela même… il les admirait sincèrement, en un sens.
Etre capable de mourir, mais également de supporter le poids des reproches de tout un continent, au nom de convictions si profondes était la preuve d’une véritable force de caractère. Etre capable de partir au combat en sacrifiant un futur pour espérer en faire naître un autre… Oui cela il le respectait. Qu’ils aient put se tromper complètement sur les tenants et aboutissants était tout aussi exacte qu’ils avaient été très juste sur ceci : toujours se battre et supporter jusqu’au bout ses propres convictions. Il l’avait appris d’eux. Une leçon qu’il s’était juré de ne jamais oublier ce jour-là, lors de la dernière grande bataille, en voyant les dragonniers vampiriques prendre les airs. Oui il s’était juré que, quoi qu’il arrive, rien en ce monde ne le ferait dévier de ses idées. *Les Esprits n’ont rien envoyés, Silarae. Ce sont tes pairs qui nous ont laissés une chance et nous-mêmes qui décidons de mourir ou de vivres. Quant aux Alayiens… je crains qu’ils ne soient la lumière sur les répétitions d’anciennes erreurs. Il n’a pas tort en cela, quoi que ce soit tout à fait involontaire de la part de ces… charmants envahisseurs*
Il resta muet quelques instants, pondérant ses propres paroles ainsi que celles de sa liée. * A nous de renforcer les germes de ses affects en ce cas. Son innocence et sa franchise peuvent convaincre bien mieux que mes discours adroits parfois. Il n’est pas un orateur ça au moins c’est certain* Chacun avait ses propres prétentions après tout. Lui se servait plutôt bien de sa langue, et ce jeune humain semblait l’incarnation du chevalier en armure blanche. Un fils prodigue qui pouvait servir d’icône aisément et fidéliser les foules. Poster un véritable chef n’était pas toujours la solution après tout. L’on pouvait offrir aux yeux une figure et un conseiller avisé. Ils n’en étaient pas là pour le moment. Amyelenor venait à peine d’apparaître et ils avaient tout leur temps afin de déterminer si ils pouvaient pleinement lui faire confiance… et si oui, comment se comporter ou le considérer. Il sourit à son vis-à-vis, en réponse à la plénitude de ses lippes et caressa des doigts les écailles immaculées de Silarae.
Il était mignon en tout cas… un enfant adorable dont les sentiments transparaissaient si aisément qu’ils en étaient des ornements fragiles pour sa personne. Aussi écouta-t-il avec grande attention, très intéressé de connaître la teneur de son récit. Et l’on sentait à sa voix que les souvenirs étaient d’une belle nature. Agréable. Il avait l’air d’apprécier raconter ces instants-là et lui ne pouvait guère le blâmer pour ça. Il comprenait, bien entendu, très facilement. Il comprenait l’attraction, la sensation, et pourtant le jeune humain possédait quelque chose de plus que lui n’avait eu avec Silarae. *Les dangers les guettant étaient sains* Les leurs ne l’avaient pas été… par sa faute entre autre chose. Une puissante vague d’amertume et de regret l’enveloppa un instant avant de passer ses lèvres avec un soupire. Il n’y pouvait rien. Et les doutes de ce jeune homme rejoignaient les siens naturellement… Des doutes parfaitement raisonnés dans leurs situations.
« Oh oui… je comprends, jeune homme, je comprends parfaitement… Je ressens la même chose. Ces doutes, ces questions… moi aussi je me les pose. Pourquoi moi ? Oui après tout… pourquoi pas un autre ?» Il ferma un bref instant les yeux, la voix lente, pensive… « Pourquoi moi après tout ce temps ? J’ai vécu les anciennes guerres, j’aurais pu faire éclore un œuf pour moi en ces instants et pourtant… pourtant Silarae m’a retrouvé et s’est liée à moi » Il glissa son regard vers elle avec affection « Pourtant… il y a forcément quelque chose en nous, n’est-ce pas Blanches-écailles ? Il y a quelque chose de singulier. Quoi je ne sais pas. Je ne sais pas ce qui nous différencie des autres. Mais c’est bien là… » Avec un rire chaud, il se retourna vers Amyelenor « Nous ne pouvons que nous fier à leurs jugements car après tout, il y a des choses que nous ne pouvons comprendre et qui leurs sont propres… »
Et ainsi passa le reste de la soirée, de la nuit même, en une discussion unique... une rencontre entre deux dragonniers qui tournait bien, pour une fois.
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| Sujet: Re: Le Souvenir Charnel [PV Achroma]TERMINE Mar 28 Jan 2014 - 19:37 | |
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