Le grand jour était enfin arrivé. La cité était en effervescence, tous attendaient avec joie et impatience l’heure de l’union impériale. Pour cette occasion, Estëllin était magnifique. La cité avait été décorée avec goût par des Elfe y ayant mis tout leur cœur. Fleurie comme au printemps, l’espoir secret des elfes était prêt à accueillir cet événement. Il régnait sans nul doute enthousiasme et nervosité mélangés dans les rues de la cité…

Le jour se levait à peine le bout de son nez lorsque la Princesse Elfique s’éveilla. Par la haute fenêtre de sa chambre, les premières lueurs du jour pointaient à peine. Le ciel avait pris une teinte rose-oranger particulièrement belle, à l’image de cette journée. Les paupières de l’Elfe papillonnèrent quelques instants, puis s’ouvrirent pour de bon. Le bleu glacial de ses iris contrastait avec ses traits détendu et son air serein. Cette journée était celle de son neveu et de sa plus proche amie, mais également – d’une certaine façon – celle de toute Armanda. L’ensemble des peuples étaient représentés pour cette union, tel un écho au Traité. Après quelques minutes à se prélasser, Orfraie quitta la chaleur de son lit. Vêtue de sa seule dignité, elle s’approcha de la haute fenêtre. Elle donnait sur les montagnes, la Princesse ne craignait donc pas d’éventuels voyeurs. D’une main, elle ouvrit cette fenêtre et laissait l’air doux du – faux – printemps venir caresser sa peau, lui arrachant tout de même un frisson. Cette journée sera magnifique, songea Orfraie à cet instant.

Tirith quitta sa contemplation des sommets enneigés et referma la fenêtre, puis elle se dirigea vers une chaise située à côté d’une petite table. Elle y récupéra une fine tunique qu’elle passa avant de quitter sa chambre. Dans son séjour, la rôdeuse se dirigea immédiatement vers la table qui se situait là et cueillie une pomme dans le panier qui était posé dessus. Avec un regard gourmand, elle en croqua un morceau et le savoura à sa juste valeur. C’est alors que trois petits coups secs furent frappés sur sa porte. La princesse se retourna prestement puis invita ses visiteurs à entrer, sachant d’ores et déjà de qui il s’agissait. Deux femmes firent leur apparition afin de préparer un bain à la Princesse.

Quelque temps plus tard, Orfraie était fin prête pour ce grand jour. En tant que témoin de la mariée, il était hors de question qu’elle fasse tache dans le tableau, mais également hors de question qu’elle fasse de l’ombre à Aramis, elle ne se le pardonnerait pas. Tirith avait donc revêtu sa robe des quatre saisons. Légère, faite de soie raffinée, cette robe changeait de couleur en fonction de la saison. Toutefois, la magie qui maintenait Estëllin dans un printemps artificiel semblait perturber la magie de sa tenue. Celle-ci mélangeait donc les couleurs de l’hiver et du printemps : un vert foret et un bleu tirant tout de même vers le vert. Le mélange était toutefois saisissant et se mariait parfaitement avec la chevelure lie-de-vin de la princesse. Sans nuls doutes celle-ci serait facile à repérer, aujourd’hui. Cela la fit sourire. À sa tenue s’ajoutait son diadème, seul symbole de son rang aujourd’hui. Enfin, sa longue chevelure avait été coiffée par l’un des serviteurs du palais. Toutefois, cela restait simple, conformément au souhait de la princesse. Ainsi tressée, sa chevelure contribuait à lui donner une allure guerrière tout en restant en harmonie avec le reste de sa tenue et l’évènement de la journée. Le dernier accessoire d’Orfraie fut sa dague, dont elle fixa le fourreau à sa cuisse. En tant que générale des rôdeurs, même pour un évènement si joyeux, Orfraie prenait ses précautions.

Lorsqu’elle fut totalement prête, la sentinelle quitta ses appartements et rejoignit ceux d’Aramis. Pour l’occasion, elle n’avait pas vu son futur époux depuis hier après-midi et ne se trouvait donc pas dans les appartements de l’Empereur. Près de sa chambre, il régnait une effervescence plus que palpable, de nombreux elfes s’agitant pour que la Chantebrise soit prête pour son époux. C’est donc avec une certaine nervosité qu’Orfraie pénétra dans la chambre d’Aramis, curieuse et nerveuse à la fois de découvrir celle-ci dans sa robe de mariée.

Tirith fit quelques pas dans la pièce, puis s’arrêta lorsque son regard se posa sur sa plus proche amie. Aramis était magnifique et resplendissante… Orfraie ne trouvait pas d’autres mots pour la qualifier. S’approchant davantage de la blonde - tout en restant à l’écart de façon à ne pas gêner les serviteurs dans leurs dernières retouches - Orfraie vint croiser ses mains devant-elle, un doux sourire aux lèvres. " Tu es magnifique, Aramis. " La complimenta Orfraie, quelque peu émue. Son neveu et sa plus proche amie, cela avait le don de la laisser à fleur de peau et aujourd’hui était un jour où elle ne voulait pas garder ses émotions sous contrôle. Lorsque les serviteurs eurent enfin terminé, ils se retirèrent, laissant les deux femmes seules. Orfraie s’approcha alors de son amie et, avec une infinie douceur, posa la paume de sa main sur sa joue. Son regard était empli d’une certaine fierté, heureuse pour le chemin que la vie d’Aramis avait emprunté, heureuse pour elle que le destin l’ait placé sur la route d’Aegnor. " Je suis tellement heureuse pour toi. Ma future nièce. " Ajouta Orfraie avec humour avant de retirer sa main. Elle lui tendit ensuite son bras. " Prête ? "

Bras dessus, bras dessous, les deux femmes quittèrent la chambre. En quittant le Palais, elles furent rejointes par Luna, à qui Orfraie offrit un doux sourire accompagné d’un clin d’oeil. L’humaine portait elle aussi sa robe des quatre saisons, en parfaite adéquation avec Tirith. À elles deux, elles faisaient la paire. Aramis, flanquée par Luna et Orfraie, fut escortée jusqu’à l’esplanade où l’union aurait lieu.

Au bout de l’allée menant à l’autel, Orfraie lâcha le bras de son amie. Elle se tourna ensuite vers elle et lui offrit un grand sourire, avant de l’invitée à passer devant d’un geste de la main. La princesse lui emboîta le pas, accompagnée par Luna. À l'instant où le trio s’avança, la rôdeuse sentit tous les regards converger vers elles. Bien entendu, s’était Aramis qui était observée, même si les convives ne manquaient pas d’observer les demoiselles d’honneur. Le regard d’Orfraie détailla Aegnor, à qui elle rendit un petit sourire. Ses iris se posèrent ensuite sur le Baptistrel qui allait unir les deux époux. Elle reconnut sans mal Dawan et répondit à son sourire par un autre.

Le silence se fit lorsque la mariée saisit la main de son époux. Les quelques mots de l’Empereur à l'égard de sa future femme amusèrent la princesse, qui réprima un sourire tandis qu’elle prenait place sur l’estrade.

Orfraie ne quittait plus le couple des yeux. Son coeur emplit de joie, elle se sentait particulièrement bien en cet instant. Elle n’avait jamais connu la joie du mariage et ne la connaîtrait sûrement jamais, mais assister au bonheur de sa plus grande amie - sa soeur même - et de son neveu lui suffisait. Elle avait l’impression de presque ressentir leur propre joie en les regardant. Pendant un instant, toutefois, ses yeux se posèrent sur Matis, le témoin d’Aegnor. Elle ne le connaissait pas vraiment. Peut-être que la suite des festivités seraient l’occasion de faire connaissance. En tout cas, son armure lui sieait bien, même s’il dénotait un peu parmi les autres invités à cause d’elle. Toutefois, cela n’était pas choquant et Orfraie trouvait l’homme élégant avec son air un peu décoiffé.

Puis, Dawan se mit à chanter. Ce chant, Orfraie en saisissait toute la portée, sûrement bien plus que n’importe qui dans l’assistance si ce n’est les Baptistrels. Ancienne membre de l’ordre, elle en connaissait toute la portée et toute la beauté. Elle ne pouvait en saisir toutefois le sens, car il appartenait aux deux époux et uniquement à eux. Cela, toutefois, n’empêchait guère d’en profiter, de l’apprécier.

Le regard d’Orfraie se posa donc sur son jeune ami, qui se donnait corps et âme à son chant. Il tenait sans nul doute à faire honneur à son rôle mais il n’avait guère besoin de se forcer pour cela. La princesse ne disait rien, à vrai dire elle ne bougeait même pas. Personne ne bougeait, ou alors ils étaient très discrets.
Durant tout le chant, la guerrière garda son regard posé sur le couple. Qu’elle reste immobile durant des secondes, des minutes ou des heures ne la gênait pas. À dire vrai, elle s’en rendait à peine compte tant elle était attentive.

Puis le chant cessa doucement et l’esplanade entière sembla revenir à un état de conscience. Aegnor fut le premier à bouger en lançant un regard à sa presque femme. Celui-ci n’échappait pas à Orfraie, qui se trouvait derrière Aramis.
Un baiser scella leur union. Orfraie détourna brièvement le regard, troublée. Toutefois, il revint rapidement se poser sur les deux époux tandis qu’Aegnor demandait à sa femme de mettre un genou à terre. La princesse savait ce qu’il comptait faire. C’était la première fois qu’elle voyait la couronne d’Aramis et elle la trouva magnifique, ses petites gemmes roses scintillant au soleil.

Aramis s’était agenouillée en tant que bapsitrelle, en tant qu’épouse. Elle se relevait en tant d'impératrices et mère de tout un peuple. Cette pensée fit naître un sourire sur les lèvres d’Orfraie, qui fut l’une des premières à acclamer son amie, sa soeur et à jamais un membre à part entière de sa famille. Et cette idée emplissait son coeur de joie.