Les pas silencieux de la dame se voulaient lents aux côtés de l’animal enjoué à ses côtés. Leto courrait, mais devait rapidement se raviser et se mettre à marcher, au rythme de sa maîtresse qui ne se souciait pas de l’excitation de la bête. La seule chose qui inquiétait Autone, c’était de savoir son chien aussi insouciant alors que c’était à cet endroit qu’elle l’avait trouvé, peu après sa naissance, mourant et étendu près de ses frères et sœurs, sa mère déjà morte en couche. Un peu comme elle au fond, alors qu’elle cherchait à survivre, après trois ans de combat continu, étouffée entre les cadavres ambulants, elle s’était tenue debout pour cette petite parcelle de vie qui lui restait. Un souffle entre les lèvres, cela avait suffi. De la chaleur, elle en avait eu, c’était suffisant, de l’amour, elle n’en avait pas manqué.
Long voyage, Autone n’avait pas pris goût aux convenances avec les années et elle priait, bien qu’elle savait qu’il n’y avait plus d’esprits, elle priait que ses enfants n’aient pas à subir la chose exécrable qu’était une fête impériale. Il ne s’agissait que de sa deuxième et elle commençait à se dire qu’elle était peut-être allergique aux empereurs. Elle n’avait pourtant rien contre eux, dans morne flamme Korentin Kohan n’était plus une menace, c’était peut-être juste les châteaux…Oui, elle était allergique aux châteaux, c’était le mal qui la rongeait. Autone détestait voir les nombreuses richesses dont elle avait été privée et cet environnement dans lequel chacun se croit précieux. Elle avait hâte de retrouver ses enfants, leurs adorables visages et leurs joues rondes par leur jeunesse. Leurs yeux identiques, qu’elle savait différencier d’instinct. Quitter des bambins, aussi longtemps, les nôtres, c’était inconcevable mais c’était tout aussi impossible de rester à la maison en permanence parce qu’elle était une mère. Elle avait peur de revenir et de ne plus les reconnaître, d’être bien trop consciente qu’elle avait manqué trop de jours de leurs vies, ces précieux jours qui pouvaient s’éteindre n’importe quand tellement ils étaient fragiles…Pour une invitation de mariage qui au fond, n’avait aucune réelle importance.
Mais pour l’instant, Caladon l’accueillait, comme une deuxième maison elle s’y sentait en sécurité entre les murs du marché noir…Ce qui avait déjà été le marché noir. Guilde marchande, qui resterait en son cœur le lieu qui l’avait logé, nourri, guéri et lavé pour la première fois après son évasion. Il y avait longtemps qu’on ne l’avait pas vu, mais les gens connaissaient son visage, ses traits qui étaient d’abord inconnus tellement elle s’était fait discrète dans ses débuts. Autone avait doucement pris un peu de place, d’importance dans la guilde. Ses sourires subtils se savaient complices, elle avait appris à se tenir droite et à ne plus baisser la tête. ''Léonie’’ prononça-t-elle en reconnaissant la jeune femme. Pas tout à fait amies, Autone se reconnaissait en elle. ''Cela fait longtemps que nos routes ne se sont pas croisées.’’ Ses prunelles calmes se posèrent sur Leto qui jappa joyeusement avant de se raviser sous les yeux dérangés des passants. Elle sourit légèrement avant de se pencher pour caresser la bête pour la rassurer. ''Ma grossesse ne m’as pas permis de voyager beaucoup. Vous devez en avoir entendu parler...Les oiseaux ont été mes plus grands amis ces dernières années. '' Afin de transmettre ses messages, les voyages étaient beaucoup moins nombreux et nécessaires.