24 Mai dans les plaines rebelles de l'Est au sein d'un campement protégé

Enfin c'était finit, elle était arrivé à son but, le protectorat, tout cela grâce au fait qu'elle n'avait à aucun instant lâcher le morceau, mais aussi car elle avait pu avoir de l'aide que ce soit celle d'Harthea, ou d'Aegnor. En somme elle avait pu faire confiance à des elfes de confiances pour l'aider, et elle avait pu rentrer au protectorat vivante, et non tomber entre les mains de Vraorg pour y subir un sort pire que la mort. Mais malheureusement là où Aramis avait réussi beaucoup d'autres avaient échoués, mais il restait qu'il fallait faire en sorte que ce sacrifice ne soit pas vain, et ce devoir était autant celui d'Aramis que de tout le protectorat, et de tout ceux qui le composent.

Vraorg comme l'on pouvait s'y attendre avait toujours une idée derrière la tête que ce soit pour consolider son règne, ou pour exaucer tout ses caprices pervers… Parmi l'une de ses idées il y avait celle de marcher sur le protectorat avec une assez solide armée, et du coup les protégés étaient bien entendu sur le pied de guerre, et n'ayant pas prit la peine de rentrer dans le désert au vu de l'urgence de la situation Aramis décida de fournir son aide dès qu'elle arriva à un campement protégé où s'organisait une future opération, elle était encore fatigué de toute cette fuite, et de tout Morneflammes, mais elle pouvait encore tâcher d'aider de son mieux. Elle ne pourrait malheureusement pas livrer bataille au vu de son état, mais elle pouvait au moins aider aux tâches excluant le combat, ou la mission en elle-même.

Elle se retrouvait donc dans ce camp, bien évidemment il n'y avait pas encore de blessés à l'heure actuelle, ou bien peu, après la mission par contre les blessés, les morts ce ne serait pas ce qui manquerait loin de là pour peu que cela dégénère ce qui n'était pas exclu, et l'aide de quelques baptistrels ne serait certainement pas de trop… Et d'ailleurs préparer le nécessaire pour soigner bientôt les blessés que ce soit le matériel, ou autre faisait partie de la tâche nécessaire, après tout il valait mieux soigner des blessés dans les meilleures conditions possibles après la bataille…

Mais il restait aussi une autre chose qu'elle avait à faire, elle avait certes pu faire ses retrouvailles avec une partie de sa famille baptistrelle, mais pas avec tout le monde si on comptait par exemple Aléria, Dawan, ou Eawyn dans le tas. Ces derniers avaient dû être occupés, et puis ce n'est pas comme si Aramis était arrivé depuis longtemps...

Elle eu donc un moment de libre quand elle finit de préparer le nécessaire pour les soins pour partir à la recherche notamment d'Aléria qui était peut-être libre elle aussi pour le moment, et présente dans le camp vu qu'Aramis percevait son chant nom, quand Dawan dont elle percevait aussi le chant elle irait le voir certainement bientôt, mais avant tout Thredë voulait d'abord voir son ancienne élève, une jeune humaine talentueuse, qui 'était rien d'autre qu'une chantecielle. Elle la considérait comme une sœur, non pas une petite sœur, mais une égale à ce niveau là car même si bien moins âgé vu qu'elle était humaine Aléria avait fait plus que ses preuves au point de devenir Cawr, et faisait preuve d'une sagesse, et d'un dévouement admirable pour une baptistrelle. S'il y avait bien une joie qu'Aramis appréciait par dessus tout c'était celle de la fierté qu'elle avait quand elle voyait le progrès de ses anciens élèves.

Et donc lorsqu'elle arriva non loin de la chantecielle Aléria, Aramis dit d'une voix douce comme la brise d'été, et chaleureuse, et d'une certaine manière fraternelle. « Je suis heureuse de vous retrouver Cawr Aléria. » Arborant un sourire magnifique Aramis approcha calmement la chanteciel puis poursuivit harmonieusement.

« Si vous avez vous aussi un peu de temps devant vous Aléria j'aimerai pouvoir profiter de vôtre aimable compagnie, car cela fais après tout trois ans que nous ne nous sommes pas vu ma chère amie, et nous avons tant à nous dire... » Elle ne rajouta pas que ce serait peut-être l'une des dernières occasions vu ce qui risquait d'arriver bientôt pour ne pas rajouter une note sinistre à tout ceci.

Il y avait longtemps qu’elle n’avait pas vu ce visage, ces longs cheveux blonds, ses petites lèevres et ses yeux verts. Un visage qui ne s’était jamais présenté dans le camp protégé, mais qui elle savait, n’appartenait pas aux ennemis. Et elle était la, comme venant d’un miracle, elle était revenue parmi les siens, et s’était approchée si simplement et naturellement alors que la Chanteciel n’en revenait pas de revoir son ancienne maîtresse, bouche bée. Comment pouvait-elle être aussi formelle après tant d’années sans seulement la voir ou entendre sa voix. Elle savait que les prisonniers de morneflamme devaient s’évader, mais il y avait longtemps qu’elle attendait sans nouvelles, et que personne du nom d’Aramis ne pointait le bout de son nom dans la tente des blessés.

Mais elle était la maintenant, pas tout a fait en terres protégées, mais probablement plus en sécurité.

-Aramis, souffla-t-elle presque inconsciemment, la mâchoire qui ne voulait pas se fermer, et les yeux emplis d’espoir et de nostalgie.

Elle osa approcher une main qui se refusait d’admettre la réalité de sa présence, la déposant sur sa joue après avoir hésité un instant. La Chanteciel sourit de toutes ses dents comme cela n’arrivait jamais sans avoir à dire un mot. Elle s’avança sans prévenir pour l’enlacer, reconnaissant son chant nom : Ce n’était pas une autre. La femme relâcha son amie en reculant d’un pas, toujours souriant, mais plus calme.

-Vous êtes si formelle…Bien sûr que je peux vous accorder du temps.

Elle aperçut un Enwr derrière la Chantebrise, un peu plus loin. Dawan, elle lui adressa un sourire serein, il comprendrait probablement en voyant Aramis, il la reconnaitrait, même amaigrie, usée par les années qui multipliait leur impact dans cette prison.

-Depuis combien de temps êtes vous arrivée?... Oh! Vous devez être fatiguée…Et affamée, je peux vous trouver quelque chose a manger si vous le voulez.

Elle s’inquiéta ensuite a son sujet, sans trop le montrer pour ne pas inquiéter la Chantebrise ou ramener de mauvais souvenir, valait mieux se montrer rassurant, et c’était souvent le cas pour les blessés aussi. Était-elle blessée? Il était certain qu’elle avait subi des blessures dans cette prison qui avait si mauvaise réputation…Et avait elle été capable de se guérir toute seule? Il n’était pas toujours facile de se concentrer pour user de magie lorsqu’on était fatigué et blessé.

-Avez-vous besoin de soins? Je ne me doute pas de vos capacités magiques, mais nous ne sommes pas toujours en état de nous soigner…surtout lorsque c’est nous qui sommes blessés.

Aléria n'avait quasiment pas changé à part son expression fatigué, et elle était toujours en vie après trois ans d’absence d'Aramis, et pouvoir retrouver son ancienne élève vivante ne pouvait que réjouir la chantebrise bien entendu. La chanteciel arborait dorénavant un teint bronzé s'alliant harmonieusement avec es yeux bleu, et son visage jeune. Et oui la cawr Aléria dégageait toujours cette aura de calme, et de sérénité plaisante, et attisait toujours naturellement la bienveillance naturellement rien qu'en la regardant, mais cela n'était guère étonnant de la part d'une lié à la colombe, un totem plus qu'approprié à l'étincelle de Lianta'ar comme aimait la surnommer Aramis.

Et si Aramis était arrivé à rester calme, et à maîtriser ses émotions pour le moment, Aléria ne cachait en rien sa surprise devant le fait de voir sa sœur du vent. « Oui c'est moi... » Murmura t-elle douce avec un sourire bienveillant au lèvre quand Aléria murmura son nom les yeux débordant d'émotion, cela faisait si longtemps…

Elle laissa Aléria s'approcher, et étreignit celle-ci quand cette dernière s'était avancer pour l’enlacer. Profitant quelques instants de cette proximité fraternelle avec sa sœur baptistrelle. "Je suis si fier de toi, et heureuse de te revoir Tinu Lianta'ar..." Murmura t-elle doucement. Et quand l'étreinte s'acheva Aramis écouta les quelques paroles calmement prononcés d'Harthea, et y répondit toujours souriante, et calme.

« Cela faisait si longtemps, j'étais presque arrivé au point de croire que je ne vous reverrai jamais alors que j'étais enfermés dans cette maudite prison nommé Morneflammes… Et y avoir échappé à cette tourmente, et vous retrouver Aléria vous, et tout mes frères, et sœurs baptistrels... Cela me semblerait presque être trop beau pour être vrai. Que les 7 soient bénis d'avoir pu permettre ceci... » Elle laissa une larme s'écouler, elle pourrait pleurer, mais elle s'y refusait, oui il fallait q'elle reste forte, tout allait mieux pour le moment, et puis ce n'était pas encore terminé, il fallait encore venir en aide au protectorat, néanmoins elle était encore vivante, et libre pour le faire… Dans tout les cas elle était heureuse de revoir Aléria, Dawan dont elle percevait le chant nom, car oui au fond elle avait retrouvé sa famille.

« Je… Ne vous inquiétez pas pour moi Aléria, je me reposerai quand le moment sera venu.... » Mais pour le moment ce n'était pas le moment idéal car elle avait à faire, et puis peut-être qu'elle n'aurait plus l’occasion de parler à Aléria si dans quelques jours l'opération prévu contre l'armée théocrate basé dans les plaines échoué… Donc autant en profiter.

« Je n'ai pas de blessures préoccupantes actuellement, je ne dirai pas non à du repos, ou à de la nourriture, mais pour les soins ce n'est pas nécessaire... Actuellement ce dont j'avais envie, et besoin c'était de vous revoir. » Dit-elle en réfléchissant calmement, oui pas de blessures préoccupantes, plus des écorchures, et ce genre de choses pas vraiment graves… Quand à revoir Aléria cela lui avait fait un grand bien mal moralement.

« Aléria vous êtes toujours aussi belle, et dévoué… Je suis contente de voir que ces trois années vous ont été plus indulgente qu'à moi. De Même qu'à vous Dawan… Je suis revenu, et je compte bien ne pas repartir de sitôt, j'ai trois ans à rattraper dorénavant, et même si je suis une elfe, ces trois ans m'ont fait l'effet d'une éternité..." Acheva t-elle avant de se tourner vers Dawan. Invitant celui-ci à s'approcher davantage.

Sur le chemin vers le désert, une rencontre opportune avait appris au Cawr Eawyn, à son apprenti, et à la petite troupe qu'ils formaient, la bataille qui s'apprêtait à avoir lieu non-loin. Eawyn avait proposé ses services, Dawan avait affirmé vouloir le suivre. Ils avaient alors bifurqué vers les plaines. Arrivé au camp, Dawan avait vite su quoi faire, recevoir des informations lui paraissait être une formalité à laquelle il se dérobait aisément, laissant ses interlocuteurs parler dans le vite pour partir aussitôt s'occuper de ce qui l'attendait. Préparer les endroits dont disposeraient les soigneurs, aider à la préparation de potions, offrir sa magie pour modeler la terre, la roche, la tourner à leur avantage, offrir ses petites mains pour finaliser d'éventuels brancards, offrir son sourire à ceux, trop fiers et trop sûrs, qui affirmaient qu'ils allaient vaincre si aisément que les ancêtres draconiques de Vraorg le renieraient. Les dragons allaient être avec eux: Ashy, Möebius, Isyndar... Et Silarae, qui avait retrouvé son Lié. Dawan ne se lassait pas de se réjouir de cela, lui qui avait connu la dragonne terrassée par la peine, se terrant dans le coeur froid du protectorat. Il se réjouissait moins, en revanche, de savoir les Liés au combat. Ils étaient fragiles, ils étaient l'essence de ce monde, il aurait fallu les tenir loin de tout danger, les protéger... Mais il comprenait. Il comprenait que ce n'était pas stratégique de les protéger maintenant. Cela n'aurait été qu'affaiblir leurs défenses, pour mieux les blesser le lendemain. Que tous les dragons s'allient était ce qui devait être fait. Mais pas ce qui aurait dû être.

Le nez levé vers le ciel, Dawan laissa l'archet de sa vièle glisser lentement le long des cordes, résigné mais déçu. Il avait fini ce qu'il avait à faire, s'était accordé le repos de la musique. Son esprit en était encore tout empli du chant d'Olosir, quand elle avait prié les Huit qu'ils soutiennent ceux qui pour eux allaient risquer ce qu'ils avaient de plus précieux. Feu et Mort, que leur regard se pose avec bienveillance sur la fragile création de leur frère Vie, et qu'ils soient miséricorde et compassion. Ses grands yeux gris se détachèrent du ciel, passèrent tout autour de lui. Humains et, dans une moindre mesure, elfes et vampires. Alliés. Belligérants, pour la plupart, leur arme fétiche à la hanche ou dans leur tente, mâles et femelles à égalité devant le futur qui se dessinait.Si Dawan ne comprenait pas ceux qui s'enjouaient à l'idée du massacre de théocrates qu'ils allaient mener, il comprenait ceux qui étaient venus, de façon générale. Poussés, sans doute, par le même sentiment de devoir que lui, même si d'une façon différente. Il vit deux humains plaisanter grassement. Jeunes, les hormones dans le vent. Ils lui arrachèrent un sourire. Dans quelques jours, il verrait leurs cadavres.

Il était loin de savoir cela. Il était dans la musique, un peu dans les nuages, et contemplait le monde autour de lui comme si une longue distance les séparait. Peut-être était-il devenu invisible et impalpable, pour certains. Olosir retrouva son étui, l'étui revint sur son dos. Le sang dans ses veines lui paraissait neuf. Il pouvait continuer sa journée convenablement, désormais.
Ses jambes appréciaient le pseudo-repos qu'était la présence en ces lieux. Oh, il bougeait encore, courait à droite et à gauche, mais c'était tout de même différent d'un voyage qui débutait à l'aurore et s'achevait au crépuscule. Les températures tombaient mollement, sans hâte. Il le sentait sur ses joues et dans son coup, dans le bout de ses doigts. Que pouvait-il faire, désormais...? Les livres se faisaient dramatiquement rare dans sa vie, ils lui manquaient. Maitre Eawyn devait être occupé. Il y avait Shi'Ry... Il pouvait s'occuper d'elle. Il allait s'occuper d'elle ! Jouer un peu, lui faire un gros câlin plein de poils, de poussière, de chaleur... Il pourrait enfouir sa main sous ses crins, là où la chaleur était particulièrement importante. Il était certain qu'en échange de gratouilles, la jument n'y verrait aucun souci.

Le petit Enwr s'était donc levé, frais comme après un bon réveil, neuf. Il s'était déplacé au sein des protégés sans vraiment les voir, toujours aussi distant.Un voile paraissait s'être posé sur son regard, il ne souriait pas malgré la douceur de son futur proche. Il n'entendait pas vraiment ceux qui l'entouraient. Un murmure très lent, fait des trois mêmes notes qui se répétaient, s'échappait de ses lèvres closes.
Soudain, un son, qui l'attira, le figea. Une voix semblable à nulle autre, un souffle de vent qui pourtant n'était pas celui qui engourdissait le sang. Puis la confirmation, d'une voix pure et limpide. Les Cawrs. Aramis. La Disparue.. L'attention du jeune elfe partit immédiatement en cette direction, son coeur battant d'une joie sans émule. Unique... C'était une certitude, désormais, et une certitude qui réchauffait le sang de l'apprenti. Elle était en vie, elle était parmi eux. Les rêves les plus fous avaient à peine osé caresser cette hypothèse. Une envie, désormais: lui sauter au cou, bondir autour d'elle, lui faire part de sa joie, la chanter sur tous les toits, et fêter la Retrouvée !
Son corps refusa d'obéir. Comme s'il savait, avant même d'avoir vu. Cela lui laissa le temps de découvrir la main d'Aléria qui venait vers sa Soeur, et cette étreinte d'une sincérité qui ne mentait pas. Dawan en fut tout déstabilisé, tout troublé dans son envie de sautiller. Il resta planté là, totalement immobile, l'expression neutre, observant et écoutant sans pouvoir s'en défaire cette scène. Pourtant il ne perçut pas vraiment que le sourire d'Aléria lui était accordé. Il entendit qu'Aramis devait être affamée, et cela le fit réagir, d'un seul coup. Oui, il fallait s'occuper d'elle ! C'était important. Quelques bonds, et il était éloigné de la scène.

Il revint quelques instants plus tard, tenant entre ses papattes deux écuelles, de cette étrange ratatouille qui avait été préparée par le totem vache de ces lieux. Elle sentait rudement bon. Ils devaient faire de peu, et les légumes trempaient allègrement dans leur jus, s'étaient vus aromatisés de moult herbes, pour cacher la quantité limité dont ils disposaient, malgré les efforts d'Eawyn. Tout en venant vers les Cawrs, Dawan ne pouvait s'empêcher d'observer et écouter tout autour de lui si bien que, de prime abord, il n'avait pas son visage tourné vers elles, en leur tendant les écuelles. Cela vint quelques secondes plus tard, et les Cawrs purent recevoir un fin sourire, un léger mouvement de tête pour les inciter à se saisir de ce qu'il avait été chercher pour elles. Coincées entre la main de Dawan et l'écuelle, trois plumes étaient proposées, dans le même temps, à Aramis. Des présents qu'il avait accumulés en attendant de la revoir, qu'il avait été chercher dans son étui à vièle.
Il n'eut pas un mot. Ce ne serait pas ainsi qu'il témoignerait de sa joie à Aramis. Et pas maintenant. Son devoir accompli, il n'aurait pas de raisons de se mettre entre la chanteciel et... Celle pour laquelle elle paraissait avoir beaucoup d'affection.

Si la Chanteciel n’avait pas été élevée apprenant autant de convenances et de politesses, elle lui aurait peut-être offert une seconde étreinte, mais Aléria considérait déjà la première sur la limite de l’excès de proximité. Elle se fichait bien de ce que les autres autours d’elle pensaient, mais elle ne voulait pas envahir l’espace de la Chantebrise. Ses mots ne pouvaient que l’émouvoir et entendre sa fierté, juste à côté de ce surnom qui lui était propre éteignaient toute inquiétude en son cœur concernant la bataille qui menaçait de s’enflammer d’un jour à l’autre.

-C’est fini, Cette prison est loin derrière vous, elle ne vous fera plus jamais de mal…voulut elle la rassurer en déposant un doigt sur la larme qui s’échappait rebellement, afin de la chasser doucement.

La baptistrelle eut le cœur crispé rien qu’en s’imaginant l’ennui qu’elle avait dû vivre, certes trois ans pouvait-être un battement de cils pour un elfe, mais morneflame, selon ce que Aléria avait entendu, était un endroit inimaginable. Comme une exception brisant toutes les règles, les illusions et les douceurs d’une manière beaucoup trop violente. Elle ne pouvait pas lui demander de ne pas s’inquiéter, surtout, surtout pas après ça. Et elle voulait prendre soin d’elle, certainement pas continué de lui parler sans se soucier de son état. De toutes manières, elle pouvait très bien lui tenir compagnie et la nourrir en même temps.

-Je comprends, Aramis, il est vrai que parfois nos proches sont plus vitaux que bien des choses. Surtout lorsque nous avons besoin de soutien. Je suis certaine que je ne serai ps la seule à vous offrir le mien. Vous êtes en vie, c’est tout ce qui est important pour l’instant…

Aléria remarqua un bref instant que Dawan n’était pas venu voir La Chantebrise directement, peut-être ne l’avait-t-il pas reconnue? Difficile à croire, mais possible néanmoins. Ce n’était pas plus grave que ca, elle lui trouverait elle-même quelque chose à manger…Sauf qu’elle n’eut pas le temps de joindre la parole à l’acte, lorsqu’elle revit l’enwr, c’était avec de la nourriture dans les mains, et l’offrant aux deux Cawr. Le jeune elfe arracha un sourire à l’humaine, il semblait se faire tout petit, et discret. Et pourquoi n’y avait-il pas de portion pour lui, il jeunait? La baptistrelle accepta néanmoins la nourriture en s’asseyant au sol, les jambes croisées, invitant son ancienne maître ainsi que l’élève d’Eawyn de faire de même…ou alors ca faisait un peu étrange de s’asseoir comme ca tout seul pendant que les deux autres discutent tranquillement debout…Même si c’était tout à fait le genre de la baptistrelle.

-Alors Dawan, vous n’avez pas faim? Ce serait triste que vous nous regardiez manger sans rien faire.

Souriante, la Chanteciel posa l’écuelle entre l’enwr et elle, afin de lui proposer ainsi de partager. Ce met semblait par contre délicieux, elle ne refusait pas d’en prendre une bouchée.

-Merci beaucoup Dawan, dit elle en le regardant de ses yeux posés.

« Elle est certes derrière moi pour le moment, mais rien ne dit que qui que ce soit ne souffrira pas à nouveau de cette expérience abominable. Et il est donc de mon devoir est de faire en sorte que cela n'arrive plus... » Dit-elle calmement. En se reprenant, oui la théocratie était toujours là, Vraorg faisait toujours souffrir les innocents pour peu qu'il en ait le caprice, et il fallait donc continuer à faire son devoir car ce n'était pas finir, Morneflammes n'était qu'une preuve de ce donc Vraorg était capable, et elle savait que beaucoup d'autres innocents souffriraient autant voir plus qu'elle si elle ne faisait rien.

Enfin Aléria tâchait de la rassurer, et cela enjolivait l'humeur d'Aramis qui se permit de sourire, oui elle n'était plus seule, et elle pouvait entièrement compter sur sa sœur baptistrelle. Elle avait retrouvé sa famille, et elle pouvait maintenant se consacrer à cette dernière ainsi qu'a ses devoirs de baptistrelle, il y avait tant à faire après tout... Il restait tant à faire, et elle n'allait sûrement pas baisser les bras, dès qu'elle ce serait reposé elle reprendrait sa tâche de baptistrel à vive allure. Elle n'était point du genre à se laisser abattre, et si on pouvait retenir une chose positive de son sejour à Morneflammes c'est qu'il l'avait convaincu d'autant plus qu'il fallait tout faire pour stopper les exactions que commettait la théocratie.

« Et que vous soyez en vie Aléria, de même que là plupart de mes frères, et sœurs baptistrels. Car si vous aviez été morte, ou prisonnière vous ainsi que Dawan, Eawyn, et les autres... Cela aurait suffit à me faire souffrir bien davantage. » Le genre de perte dont on ne pouvait pas se remettre pas après avoir passé tant de temps à leurs côtés, avec autant de dévouement, tant de choses auraient été perdu, que la Rhapsodie soit encore là était en soit une bénédiction pour le continent entier.

Puis Dawan revint peu après avec des écuelles, et des plumes, deux écuelles, trois plumes. Aramis comprenant que les plumes était un cadeau pour elle les accepta avec joie, après tout c'était l'intention qui comptait, et Dawan avait prit la peine de trouver un cadeau qui correspondait son élément, et elle dit donc agréable. « Merci Dawan, je suis contente de vous revoir jeune Enwr, et certaine que vous avez encore fait d'énorme progrès. » Elle accepta ensuite l'autre écuelle que tendit Dawan, se baissa un court instant, et étreignit légèrement ce dernier. « La Rhapsodie est ma famille est en cette qualité je vous considère comme mon petit frère, et je tâcherai de faire de mon mieux pour être une grande sœur digne de ce nom pour vous. » Puis elle s'assit avec Aléria quand cette dernière le fit, et entama son repas avant de dire ensuite quand la chanteciel eut fini de parler.

« Je ne me trompe pas en pensant que c'est vous qui avez préparé cela Dawan ? » Dit-elle ensuite, après tout le repas était bien fait, et elle se rappelait bien qu'elle lui avait donné un cour de cuisine, et voir que les enseignement de ce cours avait porté leurs fruits, ne pouvait que satisfaire Aramis.

« Veuillez m'en excuser. Car j'aurai un peu de mal à parler de Morneflammes, mais si vous le désirez je le ferai, mais avant parlez moi de ce qu'il s'est passé pendant ces trois ans je vous prie. Et des nombreux changements qui ont eu cours au sein de nôtre ordre alors que je suis arrivé, et du rôle qu'occupe les nôtres au sein du protectorat. » Dit-elle calmement, elle aurait préféré que cette conversation soit uniquement tourné vers des sujets léger, mais il y a certaines questions qu'elle devait poser avant. Et elle ne désirait pas être un poids mort pour le siens, bien au contraire.

Entendre son prénom fit un effet bizarre à Dawan. Il en pencha légèrement la tête sur le côté, ce qui lui donnait une mine interrogative. Il réalisait qu’il aurait aimé que ces dames ne le remarquent pas, malgré cette autre envie en lui qui était de d’exprimer son bonheur à Aramis. Ah, il aurait dû pousser les écuelles via télékinésie, et ne venir que plus tard ! Ce n’était pas le moment, et il le savait. Petit impatient, petit empressé, qui ne faisait pas attention au rythme des cœurs autour de lui. Et l prétendait à l’harmonie ! Quelle douce ironie.
Les écuelles avaient quitté ses mains. Il répondit à Aramis par son habituel sourire tout doux, portant une main sur son cœur. Une façon pour lui de dire qu’il en allait de même le concernant, que le plaisir qu’il avait à la revoir, et à la revoir en vie, était tel qu’utiliser des mots pour le décrire serait une erreur, serait abîmer la force et la pureté de son sentiment, ou pire, mentir par faiblesse de définition. Si elle désirait percevoir son chant-nom, elle savait qu’il avait toujours dit accepter d’être un livre ouvert pour les Cawrs. En cette situation, une telle « communication » non-verbale lui paraissait bien plus appropriée. Aramis aurait pu voir ainsi, également, combien le son de sa voix l’avait affecté, combien il avait eu l’impression de le redécouvrir et combien cette découverte lui avait fait l’impression d’une rafale d’air frais en plein désert.

Il ne le lui dirait pas, il ne s’en vanterait pas, mais oui, en trois ans, il avait bien progressé ! Les soins n’avaient plus de secrets pour lui, il avait rempli son carnet de chants et de musiques, et, surtout, avait beaucoup gagné en matière de magie. Il l’avait senti, plus clair que jamais : ses sorts étaient bien moins épuisants, il en usait presque sans limites à son goût. Cela lui convenait tout à fait. Sentir la magie le traverser lui donnait toujours cette étrange impression d’être en phase avec une partie de ce monde.
Il ne songea même pas à cesdits progrès. Il avait toujours en tête que là, actuellement, et malgré le grand plaisir qu’il avait à voir Aramis, malgré la réciprocité manifesté de son sentiment, il n’était pas à sa place. Une impression assez inconfortable, qui empêchait son attention de rester posée sur la chantebrise uniquement. Il ne la regardait plus dans les yeux. Il entendit les paroles lointaines d’un des rares vampires dont disposait le protectorat, puis réalisa ce que l’aérienne elfe lui annonçait. Un nouveau sourire, un léger mouvement de temps : il savait qu’Aramis était plus qu’une grande sœur et, surtout, qu’elle était plus que digne. Une dignité qui se passait de support, qui n’était pas digne « de ». Cette dignité-là dépassait les bipèdes et leur petit jugement. Mais lui, il le savait.
En revanche, pour le repas… Il se pointa du doigt, puis pointa l’écuelle du doigt, avant de secouer négativement la tête. Oh non non non, ce n’était pas lui qui avait fait cela ! Il avait certes fait des progrès, mais pas au point de pouvoir nourrir une armée. Cette dernière n’avait pas besoin d’une intoxication alimentaire de groupe. D’autres que lui étaient bien plus qualifiés pour de telles occasions, et ils étaient ceux à remercier. Il n’avait été que messager entre l’artisan et ceux qui profitaient de ses œuvres.

L’Enwr s’assit, en tailleur, l’échine légèrement courbée pour mieux compenser le poids de sa vièle. D’un geste de la main, il refusa poliment la proposition d’Aléria. Il n’avait pas faim. Pas pour l’instant. Et quand il aurait faim, il saurait trouver le chemin vers sa propre écuelle. Qu’elle profite plutôt, sans tronquer sa pitance ! Cela lui plairait davantage.
Aramis demanda des informations, et Dawan n’eut pas un seul de ces subtils mouvements qui indiquent habituellement que quelqu’un veut ou va prendre la parole. Au lieu de cela, il laissait son attention jongler entre les deux Cawrs, visiblement songeur et lointain, souriant de temps à autre. Son impression lui paraissait se confirmer, bien qu’il ne trouva pas les indices qu’il cherchait. Les idées en lui commençaient à naître. Mais il ne pouvait les appliquer dès lors. Mieux valait les laisser manger, prendre des forces. Après, éventuellement, si les forces d’Aramis le lui permettaient, et si les deux Cawrs étaient partantes, il pourrait mettre son plan à exécution…

[HJ : …ça fait quand même bizarre de finir un post d’Enwr sur le mot « exécution ».]

Dawan semblait avoir perdu sa langue, ce qui inquiéta légèrement la Chanteciel, sentiment qui se lisait dans le regard qu’elle lui adressait, en plus du fait qu’il ne souhaitait pas manger. Elle se sentit un peu mal tout d’un coup d’avoir oublié la bataille qui risquait d’éclater d’un moment à un autre…l’espace d’un instant, celui où elle avait retrouvé sa maîtresse. Il était façile de se remémorer la bataille de l’aube rouge et tous ses blessés, ses morts lorsqu’on pensait à ce qui arrivait bientôt. Et Aramis elle, ne serait pas rassurée de sitôt…Elle n’était certainement pas prête à pardonner les évènements, à tourner la page aussi rapidement et à se relever en force. Oh elle savait qu’elle le ferait, que cet évènement ne pouvait qu’alimenter cette tempête qu’était Aramis. Aléria avait foi en la Chantebrise, peut-être parce qu’il s’agissait de celle qui lui avait appris ce qu’elle savait, et qu’elle lui semblait invincible…Et elle souhaitait que plus jamais Aramis ne ressente autant de souffrance, mais malheureusement…la Chanteciel ne serait pas toujours là, son existence étant bien plus courte que celle de l’elfe.

-Je serai là, Aramis, si vous avez besoin d’une épaule sur laquelle vous appuyer, ou d’une oreille à laquelle vous confier. Et je ferai de mon mieux pour qu’il ne vous arrive plus telles atrocités…

Le silence de Dawan restait lourd, même si elle le savait heureux du retour de la Chanbrise. Elle savoura le repas sans émettre un bruit, mais plus lentement qu’Aramis. La Chanteciel ne sut quoi dire, baissant les yeux.

-Les protégés doivent franchir le désert afin d’être réellement protégé par les esprits. L’ordre est surchargé, il aide beaucoup que ce soit par les soins ou autres de nos talents. J’ai énormément servi de guérisseuse, mais je tente de donner quelques leçons ici et là lorsque le temps me le permet. Mais avant de penser à être utile, vous devez penser à vous reposer et à reprendre des forces, ordonna-t-elle presque maternellement, le sourire aux lèvres.

La Chanteciel, ne sachant pas quoi ajouter afin de briser le silence, décida de taire les mots afin de laisser place aux notes. Elle sorti alors sa flûte traversière afin de jouer une pièce joyeuse, espérant que ses amis se joindraient à elle. Elle improvisait peut-être un peu, mais elle ne pouvait pas supporter de penser à Aramis dans cette horrible prison, et désirait plus que tout chasser ces souvenirs de la tête de la Chantebrise.

Dawan ne parlait pas, visiblement il n'avait pas envie de le faire, c'est qu'il n'en avait pas besoin… Comme Aramis pu le percevoir dans son chant nom, et ce qu'elle percevait par le chant nom était amplement suffisant de toute façon… Dawan... Il était encore si pur après trois années où Vraorg avait régné. Elle était heureuse de le revoir elle aussi, et touché par sa sollicitude, même s'il faisait de trop de sollicitude au fond, mais c'était l'intention qui comptait. Mais au fond Aramis était un peu gêné qu'on la traite comme si elle était une blessé de guerre revenu d'un conflit, mais elle arriva à dissimulé cela pour en pas inquiéter ses frères, et sœurs. L'heure était après tout aux retrouvailles heureuse.

Elle sourit donc d'un sourire bienveillant à Dawan quand ce dernier indiqua qu'il n'avait pas préparé le repas, ce n'était guère grave de toute manière. Elle n'ajouta rien au passage, après tout il n'y avait rien à dire, visiblement elle devinait ce que penser Dawan, et ce dernier devait se douter de l'inverse. Il était encore si jeune pensa t-elle... Il avait encore tant à faire, et à vivre. Et elle espérait pour lui qu'il puisse contempler de son vivant un avenir meilleur.

Aramis le savait, il fallait qu'elle soit forte, mais pas pour elle. Pour eux, elle ne voulait pas les perdre, elle considérait la rhapsodie comme sa famille, et sa famille avait déjà assez souffert. Rien qu'en pensant à Merithyn qui ne faisait plus partie des leurs Aramis savait qu'il y avait beaucoup à faire, et Eawyn qui avait prit la succession en tant que gardien… Ce n'était probablement pas une mauvaise chose, Eawyn voulait bien faire après tout, mais elle voulait aussi avoir une discussion avec lui quand elle aurait le temps, après tout il était autant son frère que les autres baptistrels. Et elle ferait de ce fait tout son possible pour l'aider.

« Merci Aléria, et réciproquement je veillerai sur vous comme une soeur le fait pour son autre sœur, mais ne vous inquiétez pas je me remettrait de cette épreuve. Et quand à l'avenir, si nous nous soutenons entre frère, et sœur baptistrels celui-ci ne peut que se présenter sous de meilleurs auspices. » Dit-elle avec application.

Voir Aléria baisser les yeux n'était pas vraiment pour rassuré Aramis, non elle ne voulait pas inquiéter sa sœur avec cela, oui elle avait souffert à Morneflammes, mais maintenant c'était terminé, elle ne voulait pas qu'Aléria s'inquiète pour elle, cette dernière avait déjà beaucoup de raison de s'inquiéter avec ce qui se passait pour le protectorat.

Aléria lui dit donc que l'ordre était surchargé, guère étonnant, et qu'il y aurait beaucoup à faire, Aramis savait donc qu'elle ne manquerait pas de travail, et cela n'était pas vraiment une bonne chose dans le sens que la situation était délicate si les baptistrels étaient autant sollicités, mais elle ferait de son mieux… Et quand Aléria donna un ordre de façon bienveillante, il fallait bien se rendre compte qu'elle avait raison, il fallait avouer qu'elle avait encore des séquelles au fond...

« Vous avez raison, si je veux être utile de toute manière je le serai davantage en meilleure forme. » Dit-elle avec un sourire grâcile, oui elle n'était pas dans un état glorieux, et elle pensait encore davantage à son devoir qu'a elle-même, au moins elle n'avait pas perdu ce trait là après Morneflammes. Peut-être même qu'au contraire après e qu'il s'était passé là-bas, maintenant qu'elle était libre son désir de faire son devoir était encore plus fort…

Et ensuite le silence vînt, un silence que personne n'osait troubler, ou plutôt que personne ne voulait troubler. Délicatement alors qu'Aléria sortait sa flûte, Aramis elle sortit sa lyre, elle avait pu récupérer cette dernière après tout à Morneflammes, et ça faisait si longtemps qu'elle n'avait pu en jouer. Mais d'instinct ses doigts parcouraient déjà cette dernière, renouant avec ce qu'elle n'avait pu faire depuis qu'elle avait été fait prisonnière, et en cela cet instant était d'autant plus précieux alors que peu à peu les notes se mélangeaient dans un tout harmonieux. Les instruments parlant bien mieux du sentiment général, et des espérances de demain que les mots au fond. La musique après tout n'était-elle pas en soit la langue de la vérité ? En tant que messagère des sentiments profond de ceux qui la pratiquait...

C'était bien là un fait certain: l'Ordre ne manquait pas d'occupations. Sa nouvelle place le rendait totalement indispensable à ce peuple qu'étaient devenus les Protégés. Les chants de soin et de création étaient devenus de véritables piliers pour leurs congénères sous la protection des Esprits. En début d'année, Dawan s'en souvenait, il galopait encore vers le coeur des cavernes où son maître s'évertuait à faire pousser de quoi nourrir les habitants du désert. Dracos, que cela semblait loin. Que le coeur du désert était loin, sous cette douce tiédeur de début de nuit. Nombre d'êtres chers à son coeur étaient tenus éloignés de ces terres dangereuses. C'était autant pour le rassurer que pour l'alourdir de nostalgie. Sa petite Luna, trop longtemps il ne l'avait vue qu'au travers de leur pierre de communication.
Même Caladon paraissait loin, tout à coup. Et avec Caladon, la chaleur. Ainsi, de fil en aiguille, les mots innocents d'Aléria firent naître un brusque frisson dans le dos du petit Enwr, qu'il fit passer pour du froid. C'était du froid, il se recroquevilla un peu pour profiter de sa propre chaleur. Soudain, un sentiment de vide l'envahissait. Comme si son petit corps venait d'être déposé au milieu des plaines de sable. Seul et démuni. Les chants de lyre et de flûte gagnèrent peu à peu les environs. Seuls les baptistrels permettaient un tel miracle, avant une bataille. La musique toucherait-elle le coeur des guerriers alentours ? Leur rappellerait-elle ce dont ils ne se rappelaient eux-mêmes, prenant les armes ? Elle s'enroulait autour du coeur du petit elfe comme une étreinte bienveillante, cherchait à forcer un peu son sourire. Il étira un peu ses lèvres, son regard songeur teinté de regrets. Il avait l'impression que les notes des deux instruments, se mêlant et s'emmêlant, n'étaient que démonstrations plus fortes encore de ce que lui avait cru apercevoir. Et encore, lui n'avait pas accès aux vibrations, que les Cawrs devaient animer comme autant de lucioles pour mieux encore accompagner leurs instruments. Il devait passer à côté du plus beau de la musique…

Elle était une démonstration des sentiments, elle était la joie des retrouvailles et des craintes qui s'apaisaient. Il le sentait. Sans doute aurait-il pu, lui aussi, sortir sa vièle et les accompagner. Mais… Non. Il ne voulait pas mentir. Il exprimerait sa joie quand cette dernière serait à nouveau maitresse de son âme. Là, trop de mélancolie aurait avili l'harmonie créée par le duo. Il le savait, il le sentait. Alors il resta muet, le regard vague mais l'oreille attentive malgré tout, appréciant les sons sans parvenir à s'en imprégner pour autant. Un tel délice auditif était un cataplasme pour plaies de l'âme, qui rendait plus distante son humeur. Il se sentait un pu loin de lui-même. Ce n'était pas désagréable, dans ce cas.
Il aurait pu rester un long moment ainsi. Son corps calmé par les sons aurait pu s'endormir, roulé en boule, sur le sol. Ç'aurait été la plus belle façon de tomber de sommeil qui soit. Cette idée lui arracha un fragment de passé pour le ramener à ses sens. Aigue-Royale… Il l'écarta, du mieux qu'il put. Trop loin, il n'y fallait pas penser. La musique lui parut un moment perdre en volume. Bien. Peut-être était-il temps de faire ce qu'il avait à faire, tant que ses muscles n'étaient pas endormis.

L'Enwr se remit sur ses deux jambes, sans hâte particulière. Quand il sentit les regards posés sur lui, il eut un geste de la main pour inciter les Cawrs à le suivre, un chant au fond de sa gorge pour leur indiquer qu'elles pouvaient continuer la musique sans souci. Il les guida, de son pas lent et légèrement bondissant, à travers le camp, entre les humains qui s'agitaient de plus en plus calmement à la lueur des braseros, entre les elfes qui préparaient leurs armes, les vampires qui discutaient de façon plus ou moins expressive. Ils traversèrent tout cela sans que Dawan ne prête vraiment à ce beau peuple qui les entourait. Tout juste quelques coups d'oeil en arrière, de temps à autre, vérifiant que les Cawrs le suivaient. Oui. Il continuait.
Il les poussa à s'écarter, dans les plaines, suivant une direction qui donnait l'impression d'être posée sur l'horizon tant le regard du petit elfe ne quittait pas ce dernier. Mais là où les plaines paraissent plates, elles sont en réalité pleines de multiples crevasses traîtresse et de reliefs cachés. Il les fit descendre dans une brève crevasse au coeur des herbes haute, où un arbre se cachait. Là, au pied de ce dernier, il s'arrêta. Se tournant vers les deux Cawrs, il leur désigna l'endroit de la main. C'était pour elles, pour qu'elles puissent profiter à loisir d'un endroit bien plus propice à leurs retrouvailles et à leurs sentiments. Lui… Eh bien, il n'avait plus rien à faire là, désormais, ayant accompli son rôle. Il leur offrit un sourire puis, rapidement, fit le tour de l'arbre, avant de devenir invisible à qui était au sol. Seul le bruit des feuilles pouvait indiquer ce qui était advenu de lui.

Sa flute quittant ses lèvres, elle l’avait doucement descendue après avoir terminé les légères notes qui concluaient la chanson. Ce n’était pas grave s’il ne parlait pas, il y avait bien assez de chanteurs, et encore beaucoup de chansons sans mots. La Chanteciel suivit l’enwr jusqu’à l’endroit où il voulait mener les deux Cawr. Elle fut légèrement déçue de le voir partir, elle aurait voulu guérir les maux qui terrassaient son âme, comprendre la raison de son mutisme beaucoup plus en profondeur. Mais elle ne voulait pas le forcer à rester, elle prit donc place assise au sol, profitant de l’herbe, du peu d’arbres présents, de la mousse humide au sol, jusque dans l’écorce. La chaleur du sable avait son charme mais n’avait pas cette rareté qui faisait qu’elle nous manquait. Sa douceur s’étendait sur une étendue beaucoup trop grande, étouffante de sa densité. La baptistrelle ferma les yeux en laissant l’air circuler en ses poumons, la parcourir, accompagné du parfum de la nature. Elle aimait cette odeur presqu’autant que celle de la fraicheur du soir lorsque le soleil se couchait sur Sandur. Il s’agissait de la certitude qu’elle était vivante.

Aléria tourna la tête vers sa maîtresse en lui accordant un sourire calme, empli de joie malgré qu’elle ne montre pas ses dents, elle avait beaucoup trop de retenue. Puis elle se laissa glisser dans un silence agréable, puisque les mots étaient inutiles et plus lourd que les notes qui glissaient doucement dans les vibrations. Aramis avait suffisamment parlé de morneflamme, et raconter n’était pas synonyme de soulagement en ce moment précis. Elle aurait forcément besoin d’en parler, mais cela pourrait attendre. Et Aléria n’avait pas tellement à raconter, si ce n’était les hommes qu’elle avait soigné, les leçons qu’elle avait donné, et les moyens de survivre en cet endroit. La Chantebrise pouvait facilement s’imaginer, étant elle-même baptistrelle, savait que certains sorts leur permettaient d’immenses possibilités.

Et puis les minutes passèrent doucement, sans qu’un seul mot ne soit prononcé. La Chanteciel finit par se retrouver couchée dans l’herbe, profitant de la compagnie de sa maîtresse. Peu de gens pouvaient rester ainsi silencieux et comprendre qu’aucun malaise n’était présent. Il y avait bien la princesse Ataliel, et Aramis qu’elle connaissait depuis beaucoup trop longtemps pour qu’elle ne comprenne pas. Elle avait simplement besoin d’être là, près d’elle, et d’écouter son chant nom de temps à autres, ouvrant le sien à la Chantebrise.

Au final ils arrêtèrent leurs mélodie, car visiblement le jeune Dawan voulait amener les deux Cawrs quelque part, et pour sa part Aramis ne voyait aucune raison de le frustrer dans ce fait. Néanmoins elle aussi quand elle arriva eu lieu dit aurait aimer que le jeune Enwr reste, mais encore une fois elle aussi ne pouvait pas le forcer à rester. Et elle prit donc la décision de se préoccuper de lui bientôt, et dans la mesure du possible. Son mutisme même s'il était dû à la bataille prochaine, et au sang, et à la mort qui s'y déchaînerait n'était aucunement de bon augure, et entre frère, et sœur l'on devait savoir se soutenir.

Et Aramis pensa encore au fait que malgré son état, et ce qu'elle avait vécu elle était porté par son désir d'aider les autres, une chose qui avait était étouffé à Morneflammes, et qui rejaillissait… Oui elle avait retrouvé sa famille, retrouvé son devoir, et elle était heureuse de ceci, elle ne pouvait se sentir bien que chez les siens, et en faisant ce qui lui semblait être le mieux pour Armanda. Guider les enwr, aider son prochain, transmettre le savoir, les arts, et soigner, ou servir de médiateur. Les préoccupations des baptistrels étaient si nombreuses, et toutes si essentielles…

Elle rendit son sourire à Aléria, et elles restèrent ici dans ce silence apaisant, oui au final elle comprenait en partie la réaction de Dawan, en cet instant les mots n'étaient pas forcément nécessaires… Cela faisait trois ans, trois ans qu'elles ne s'étaient pas vu... De quoi pourraient-elles parler à cet instant ? Rien qui ne pourrait entretenir le soulagement en l'instant, oui parler était superflu. Oui elle était en compagnie de son amie, de sa sœur, et cela lui suffisait, l'instant présent était apaisant, l'air souffler calmement, et doux. Alors que le chant nom d'Aléria résonnait comme une douce mélodie, et qu'elle ouvrait aussi le sien. Alors qu'elle contemplait les environs, et profiter d'un moment calme comme elle n'avait pas pu vraiment en connaître depuis Morneflammes. Si bien qu'elle sentit son cœur s'apaiser.