Un puits de lumière dans l'obscurité du désert (Pv Mobius)

Mi Janvier de l'an V de l'âge d'Obsidienne

Une oasis...perdue au milieu du désert, source d'eau intarissable et unique salut des voyageurs égarés dans cette immensité de sable fin. Durant la journée, la chaleur caniculaire transformait ce lieu en une véritable fournaise et la réverbération du soleil sur les dunes dorées constituait un piège mortel pour le vampire qu'il était. Aussi ne voyageait-il que de nuit à l'abri de la lumière et des fortes chaleurs afin de parvenir sans risque à destination.

Lorën avait entamé ce dangereux périple à travers le désert d'Esfelia en compagnie d'un guide afin de gagner Fort-Espérance. Profitant d'une halte dans cette oasis, il éprouva soudain le désir de s'isoler au bord du cours d'eau, afin de se perdre dans les méandres de ses pensées. Au dessus de lui, le firmament nocturne de velours, couleur bleu nuit, était constellé d'une myriade d'étoiles, semblables à des milliers de grains de poussière diamantée.

La pleine lune d'une blancheur lactescente illuminait l'oasis et faisait courir ses rayons argentés sur la cime des palmiers et caressait la source d'eau aux flots d'une transparence éburnéenne. La lumière lunaire recouvrait le miroir des ondes de magnifiques reflets luminescents et le souffle d'un vent sec faisait naître de fines vaguelettes à sa surface.

Dans ce lieu isolé qui semblait retiré hors du monde, sous ce magnifique ciel étoilé, le vampire sentit une profonde mélancolie sourdre dans son cœur. Ainsi perdu au milieu de nulle part, fuyant la vindicte du Prince Noir après sa trahison afin de rejoindre le camp des protégés, il lui semblait que le seul être auquel il ne pouvait échapper était lui-même.

Tout d'un coup, un sentiment de doute l'assaillit, avait-il fait le bon choix ? Si Lorenz Wintel le retrouvait, il saurait lui faire payer chèrement le prix de cet affront. Seuls son sang et sa vie seraient suffisants pour assouvir le courroux et la soif de vengeance du prince vampirique.

A bien y réfléchir, cette idée ne l'effrayait pas autant qu'il l'aurait crû, après tout que valait une existence de servitude enchaîné à un monstre de cruauté ? Un esclavage rendu encore plus insoutenable par l'immortalité de sa race, tel un supplice qui ne devait jamais trouver de fin. Tel aurait été son destin s'il était demeuré fidèle à son ancien prince.

Lorën poussa un profond soupir avant de lever les yeux vers les cieux étoilés, qui ressemblaient à un océan de ténèbres où voguaient des âmes errantes, êtres fragiles, prisonniers dans une éternité de noirceur.

A cet instant, il sentit une indicible solitude l'envahir, comme si son cœur se transformait en un puits infini que nul réconfort ne saurait jamais combler. Dans ce monde de sable fin, rendu glacé, morne et sombre par l'obscurité de la nuit, le sentiment de déréliction qui l'habitait et resurgissait parfois n'en paraissait que plus intense.

Instinctivement, le vampire sortit de sa poche une flûte de bois et la porta à ses lèvres. Il avait ramassé cet objet autrefois sur le cadavre d'un humain qu'il venait de vider de son sang pour étancher sa soif. Un peu par hasard, il avait tenté d'en jouer et s'était aperçu qu'il maîtrisait parfaitement cet instrument de musique. Pourtant, il n'en avait aucune souvenance...

Était-ce un lien tenu qui le rattachait à son passé oublié d'être humain ? Lorsque le vampire jouait de cette flûte, il éprouvait l'étrange sentiment que des réminiscences oubliées affluaient à la surface opaque de sa mémoire.

Mais elles étaient fragiles et fugaces, aussi évanescentes que des volutes de fumée ou la caresse d'une brise de printemps. Sitôt apparues, elles s'évanouissaient presque aussitôt sans qu'il puisse les retenir, tel le sable qui s'écoule entre les doigts des mains qui cherchent à s'en saisir.

Lorën ferma les yeux et commença à jouer de son instrument; des notes de musique cristallines s'élevèrent dans l'air et troublèrent le silence de ce lieu, l'emplissant d'une douce mélodie aux sonorités mélancoliques.

Enveloppé par le voile de tristesse et de nostalgie de cette musique enivrante, le vampire avait l'impression de se retrouver enfermé dans une bulle d'éternité, un autre univers où personne ne pouvait l'atteindre. Il demeura ainsi un long moment, savourant cette retraite à l'intérieur de lui-même, réfugié dans un îlot paisible de rêverie avant de devoir revenir à la dureté de la réalité.

Soudain, le vampire cessa de jouer, tous les sens en alerte; il sentait une présence toute proche. Doucement, il ouvrit ses yeux pailletés d'or et tourna le regard dans la direction d'où venait ce nouvel arrivant.

A travers la clarté sépulcrale du clair de lune, Lorën discerna les contours de la silhouette massive d'un dragon. La majestueuse créature, aux grandes ailes éployées arborait un corps musclé avec un large poitrail et un long cou surmonté par une tête triangulaire hérissée de pointes. Sa peau écailleuse arborait une splendide couleur bleutée, mélangeant diverses nuances allant du bleu céruléen au bleu marine. Les reflets lunaires faisaient briller les écailles de l'énorme reptile fièrement dressé au bord de l'eau, peut-être pour y contempler son image.

A la vue de ce dragon, le vampire ressentit un début de peur; était-ce un allié ou un ennemi ? Un tel animal pouvait facilement le tuer s'il le désirait, aussi Lorën demeura-t'il immobile, figé dans une méfiance prudente. De plus, il ne pourrait rien y faire, autant attendre la réaction de l'animal pour connaitre ses intentions à son égard.

C'était la première fois que le vampire se trouvait face à face avec l'un des représentants de cette espèce. A ses yeux, ceux-ci représentaient une sorte de légende ou d'abstraction auquel il n'avait jamais vraiment prêté attention. Et voilà que dans cette oasis au milieu du désert, l'apparition d'un dragon brisait la solitude de la nuit...

Le silence et la paix, voilà ce qui régnaient en ce lieu qu'est le désert d'Esfelia. C'était tout ce que le dragon souhaitait pour prendre du recul vis-à-vis de toute cette agitation que créait les bipèdes. Seul le battements de ses ailes fendant l'air venaient briser ce roi invisible. Mais cet affront était bien moindre que s'il s'était amusé à rugir. Si cela avait été le cas sans doute qu'il y aurait eu un écho, de quoi réveiller les habitants du protectorat. La seule idée de jouer de ses cordes vocales avec l'immensité du désert lui plaisait énormément, mais sortir de leur sommeil tout ces bipèdes ... Non trop peu pour lui, il les appréciait la n'était pas la question, mais parfois Möebius avait besoin de se retrouver seul avec lui-même. Lors de ces longues journées à chercher des solutions pour mettre fin à la guerre et tenter d'aider les prisonniers ne lui laissait que très peu de temps pour songer. Sa plus grande activité après le vol bien sûr. Le bleuté aimait plus que tout, ou du moins autant que de parcourir les cieux : rêver. Laisser ses pensées divaguer pour imaginer tout et rien à la fois sans aucune limite hormis celle que son imagination lui imposait, il était le roi.

En cet instant également il l'était, seul au dessus de l'immense désert la lune sur les écailles ainsi que son allié le vent lui murmurant des choses. Tout était parfait, rien ne semblait être réel : la guerre, sa soit-disant captivité dans le protectorat, les horreurs qu'avaient vécu le peuple de son dragonnier, celles de sa propre race aussi. Il était simplement seul au monde. Et puis lorsque nous sommes seuls, rien ne peut venir nous atteindre hormis la solitude. Mais en cette belle nuit elle était elle aussi son amie, tout comme l'astre du soir.

L'écailleux azur ferma les yeux pour se concentrer sur ses mouvements, ses émotions et son ressenti lors de son vol. Jamais il n'avait réellement pris le temps de se rendre compte sur l'importance de ce rituel. C'était une question de physique car il devait bien sur s'entretenir et s'améliorer, mais aussi pour son moral : un dragon sans aile était comme un homme sans jambes, ou un aigle sans ses yeux. C'était tout simplement impossible pour lui de vivre sans. Certes il avait bien sûr souffert pour apprendre à les maîtriser et réaliser des prouesses par la suite, mais à présent ... Lui, le ciel, la lune et les nuages ne formaient plus qu'un.

Il rouvrit les yeux et laissa son regard se perdre dans le vaste horizon qui se présentait à lui, les dunes de sables brûlants du jour laissaient leurs places à des collines azures et fraîches, un régal pour lui de se rouler dedans pour se rafraîchir. Mais ce qui commençait à le titiller n'était pas un besoin de profiter de la chaleur mais de se désaltérer un peu. Voilà un moment qu'il volait à parcourir le désert dans un sens puis dans l'autre. Pourquoi ? Peut-être était-ce inconscient de chercher sans cesse un moyen de sortir d'ici ...

Quoi qu'il en soit le dragon se laissa porter par les courants d'airs chauds pour décrire un grand cercle dans le ciel, l'oeil vif et alerte il se mit à chercher un point d'eau, avec un peu de chance il devait y en avoir un non loin.

Il lui fallut plus de patience qu'il ne l'aurait pensé pour trouver cet oasis en plein désert, une source de joie et de soulagement pour bon nombre de bipèdes qui osait s'aventurer jusqu'ici.

Lorsqu'il en prit la direction, le dragon constata qu'une drôle de forme entouraient le point d'eau, des visiteurs ? Surpris il ne changea pas d'avis et s'avança vers l'oasis. Plus il avançait plus il constatait qu'il n'y avait pas une forme mais plusieurs. Un son plutôt agréable s'arrêta soudainement, l'un d'eux était musiciens ? Le dragon était plus que ravis à l'idée de demander à cet homme de lui jouer un air. Cependant le bleuté mit son admiration de cet art de côté pour venir atterrir non loin d'eux. Il renâcla de mécontentement en voyant que son poids créé un nuage de poussière. Il secoua légèrement la tête pour retirer le sable restant puis avança tranquillement vers lui, cette soit disant seconde forme n'était qu'une invention dans son esprit. La fatigue ? Surement. Peu importe ce qu'il en était vraiment tous pouvait faire des erreurs.

D'un pas lent et sûr il se rapprocha de l'homme et calmement tendit son esprit vers le sien pour le saluer.

- Bienvenu à toi dans le désert d'Esfelia, puisses-tu y trouver ce que tu cherches si ta quête t'as menée ici bipède. Etait-ce toi qui jouait une mélodie ?

Curieux qu'un tel visiteur soit venu là, Möebius tendit le cou dans sa direction et le scruta des pieds à la tête l'oeil attentif aux moindres détails. Habillé de couleurs foncées et un visage atypique de par ses pomettes saillantes, cet individu dégageait un aura particulier qui alerta Möebius, quelque chose le dérangeait chez lui mais quoi ? Non ça n'était pas ses longs cheveux noirs ni son regard mordoré, non autre chose ... De plus subtil mais qui était bien présent.

Ni prêtant pas attention, le dragon renâclant bruyamment en laissant échappé de la fumée de ses narines, il trouverait bien, au lieu de continuer à la fixer de la sorte, l'écailleux se tourna vers le point d'eau et s'y pencha pour boire, il plongea le bout du museau dans le liquide frais et si agréable et bû par petite gorgée. Ses ailes quant à elles se replièrent finalement contre ses flancs, cette chose qui entourait cet individu l'intriguait, ses ailes étant si précieuses il ne fallait pas lui laisser l'occasion de les abîmer si tel était son intention.

Une fois qu'il se sentit mieux car moins déshydraté, le dragon releva la tête vers le visiteur et le questionnna encore.

- Qui es-tu et d'ou est-ce que tu viens ? Je t'écoute musicien, si plus tard tu pourrais me jouer en air. J'en serais ravis

Lorën demeurait immobile, son regard mordoré rivé sur la mystérieuse forme bleutée qui se tenait penchée au dessus du miroir argenté du point d'eau. L'apparition dont les ailes déployées faisaient naître un bruissement dans l'air et soulevaient un nuage de poussière dorée sembla s'apercevoir de sa présence.

Le vampire se demanda l'espace d'un instant si ses sens ne lui jouaient pas un tour et s'il ne se trouvait pas en présence d'une illusion, d'un mirage, comme le désert en faisait naître dans l'esprit des mortels. Mais inconsciemment, il savait que ses sens aiguisés de prédateur ne pouvaient pas le tromper si facilement et depuis bien longtemps il ne rêvait plus...

Cette vision tout droit descendue du firmament étoilé et qui se tenait dans cette oasis, c'était un dragon. Lorën n'avait jamais eu l'occasion de rencontrer l'un d'entre eux depuis leur retour sur Armanda...Avant cela, il les considérait comme des sortes de légendes dont l'existence même lui avait paru sujette à caution, et se retrouver seul en présence d'un spécimen de cette race mythique ne manquait pas de le troubler.

Toutefois, le vampire garda son sang froid et continua à fixer l'étrange animal, qui lentement s'approcha de lui d'un pas sûr. Ce dernier ne semblait pas hostile, du moins, d'après ce que Lorën pouvait en juger car il n'était pas spécialiste des dragons, loin s'en fallait.

Tout d'un coup, le mystérieux nouvel arrivant s'adressa à lui d'une bien étrange façon: le vampire étendait sa "voix" qui résonnait au sein même de son esprit, au plus profond de lui-même, aussi distinctement et clairement que si le dragon avait ouvert la gueule et prit la parole pour le saluer et lui souhaiter la bienvenue.

Lorën savait que les dragons étaient différents des autres créatures qui peuplaient le continent d'Armanda; d'après les légendes anciennes, ils possédaient une sagesse et des connaissances à nulle autre pareilles. Cependant, le vampire n'avait jamais pensé que ceux-ci soient en mesure d'utiliser un tel procédé pour communiquer avec autrui.

" Bienvenu à toi dans le désert d'Estefelia, puisses-tu y trouver ce que tu cherches si ta quête t'as menée ici bipède. Etait-ce toi qui jouait une mélodie ?"

Lorën resta silencieux, ne sachant quelle attitude adopter vis-à-vis de son étrange interlocuteur. Devais-il s'adresser à celui-ci à voix haute ou lui répondre "mentalement" en se contentant de formuler ses pensées dans sa tête.

L'animal fit preuve d'une certaine curiosité à son égard et le détailla de la tête aux pieds comme s'il cherchait à le cerner. Après cet examen minutieux, il replia ses grandes ailes céruléennes, renâcla bruyamment, faisant jaillir de la fumée de ses naseaux et se pencha sur les flots bleutés pour s'y abreuver.

Puis ayant terminé de se désaltérer, le dragon azuré releva la tête vers lui, semblant l'analyser profondément, et le questionna de nouveau:

" Qui es tu et d'ou est ce que tu viens ? Je t'écoute musicien, si plus tard tu pouvais m'en jouer un air. J'en serais ravis".

Cette fois-ci Lorën prit la parole et dit d'une voix calme et douce:

-Mon mon est Lorën Arcaë et je me trouvais à Caladon il y encore peu de temps. A présent, je cherche à traverser ce terrible désert pour gagner le Protectorat".

Le vampire ajouta, un peu intimidé en fixant l'impressionnante gueule de l'animal mythique avec qui il entretenait une discussion en plein milieu du désert.

- C'est bien moi qui jouait de la musique, je pensais être seul et j'ignorais que quelqu'un m'avait entendu...Je pourrais vous en jouer un air plus tard si vous le désirez.

Le vampire hésita une minute puis se hasarda à poser la question qui lui brûlait les lèvres depuis le début de cette étrange conversation.

- Excusez la naïveté de ma question car c'est la première fois que je rencontre un dragon, mais comment faites vous pour "parler" à l'intérieur de mon esprit ? S'agit-il d'un pouvoir propre aux dragons ?

-Mon mon est Lorën Arcaë et je me trouvais à Caladon il y encore peu de temps. A présent, je cherche à traverser ce terrible désert pour gagner le Protectorat".

Encore un voyageur perdu. Décidément les bipèdes avaient un très mauvais sens de l'orientation, car si sa mémoire ne lui jouait pas des tours, ce n'était pas le premier qui se perdait de la sorte. Allait-il l'aider ? Peut-être, car plus le Protectorat aurait de membres, plus ils seront nombreux à lutter contre Vraorg, oui il l'aiderait surement si celui-ci ne se montrait pas offensant. Pour l'heure il se contenta de l'écouter parler, dans son attitude se lisait une certaine méfiance, n'ayant montré aucun comportement hostile, pourquoi était-il ainsi ? Bien sûr cela ne se voyait pas d'un oeil humain ou elfique. Non seul son oeil draconique lui permettait de voir jusqu'au détail près, jusqu'au plus petit soupir même le plus silencieux d'un homme. Il était intimidé ? Et il avait bien raison, quiconque ne l'était pas avait donc un égo surdimensionné, et ce genre d'individu, Möebius ne les aimait guère.

- C'est bien moi qui jouait de la musique, je pensais être seul et j'ignorais que quelqu'un m'avait entendu...Je pourrais vous en jouer un air plus tard si vous le désirez.

- Et bien non Lorën Arcaë, personne ici n'est seul, je ne suis pas le gardien de ce désert mais je veille dessus, plus je suis attentif et précautionneux plus je protège le Protectorat d'arrivants suspects. Personne ne m'a imposé cette quête, mais j'estime qu'elle est nécessaire. Et oui cela serait avec plaisir que je voudrais t'entendre jouer. L'art est quelque chose que nous ne connaissons pas nous dragons. Si tu as une mélodie joyeuse à me faire entendre, alors je suis toute ouïe pour toi et ta chanson.

Mais cette réponse ne sembla pas atteindre son interlocuteur, quelque chose le dérangeait ou du moins occupait son esprit. Etrangement le bleuté s'avait qu'il allait le lui dire. C'est pourquoi il patienta tranquillement sans le presser.

- Excusez la naïveté de ma question car c'est la première fois que je rencontre un dragon, mais comment faites vous pour "parler" à l'intérieur de mon esprit ? S'agit-il d'un pouvoir propre aux dragons ?

- Ainsi dont je comprends mieux ta nervosité lors de mon arrivée. Tu n'as jamais aperçu l'un des miens auparavant ? Dans ce cas je suis ravis d'être le premier de ma race à t'adresser la "parole". Pour répondre à ton interrogation c'est un pouvoir qui nous est propre à nous, dragons et à nos dragonniers. Nous parlons par l'esprit. Nos paroles viennent jusqu'à tes pensées et ainsi nous pouvons rendre nos discussions secrètes. Mais nous pouvons aussi étendre nos paroles aux plus grands nombres. Chacun aura "ma voix" dans son esprit, je trouve cela d'autant plus simple que de nous mettre aux langages humains, à effectuer des dizaines de grimaces par phrases. Pour nous dragons ceci est réellement ... Surprenant de vous voir bipèdes parler à haute voix.

Lorën écouta attentivement les réponses du dragon et peu à peu, sa réserve de départ commença à s'estomper. L'animal ne semblait pas animé d'intentions hostiles et lui avait avoué son appartenance aux protégés. Le vampire se détendit et fixa l'étonnante créature avec une certaine curiosité. Haute de plusieurs mètres, le pâle reflet de la lune faisait étinceler ses écailles bleutées, ce qui lui conférait une impression de froideur marmoréenne, telle une grande statue de glace.

"Il a vraiment une grosse tête, de grandes dents et une longue queue", pensa Lorën en le détaillant avec attention. Néanmoins, c'était tout à fait naturel pour un dragon; du reste, sa couleur d'un bleu opalescent ne manquait pas d'attrait.

Le vampire réfléchit aux paroles du dragon: "et bien non Lorën Arcaë, personne ici n'est seul", elles résonnaient étrangement en lui et l'intriguaient.

- Vraiment ? Personne ici n'est seul ? Peut-être, à bien y réfléchir ce désert porte de plus en plus mal son nom. De nombreuses personnes le traversent la nuit car en journée, celui-ci représente un péril mortel pour les humains, les elfes et les vampires. Et cette oasis accueille de nombreux voyageurs qui s'y arrêtent le temps d'une halte, le temps de se reposer et de s'y désaltérer.

Lorën hésita un bref instant avant de confier la suite de sa pensée au dragon mais après tout pourquoi pas, même s'il n'était pas convaincu que l'animal mythique soit en mesure de comprendre.

- Je ne me suis pas très bien exprimé quand je parlais du fait d'être seul...parfois, il m'arrive de rechercher volontairement la solitude et d'éprouver le désir de m'isoler d'autrui pour réfléchir ou me réfugier dans mon "monde". Lorsque je jouais, j'avais l'impression que l'univers alentour disparaissait soudainement et qu'il n'existait rien d'autre que cette musique, semblable à un chant de lumière triste...c'est pour cette raison que j'ai été un peu surpris de votre arrivée.

Disant cela, il leva ses yeux pailletés d'or vers l'immensité du firmament étoilé et le contempla avant d'ajouter avec un sourire désabusé:

- Quand je regarde cette infinité d'étoiles perdues dans le lointain, il m'arrive parfois de m'interroger ou de me sentir un peu mélancolique. Elles m'évoquent et ravivent un sentiment que j'éprouve parfois, celui d'être seul même si je suis entouré d'autres personnes. Elles aussi sont nombreuses mais solitaires et séparées des autres par une immensité d'obscurité.

Lorën se pencha doucement et ramassa un petit caillou plat qu'il lança vers la source d'eau où celui-ci fit plusieurs ricochet à la surface avant de couler à pic.

Ensuite le vampire se tourna vers le dragon et lui dis d'une voix douce:

- J'aimerais pouvoir jouer une mélodie joyeuse mais j'ignore si j'en connais. Pour être franc, je n'ai jamais appris la musique...du moins, j'en ai perdu toute souvenance. Un jour, j'ai trouvé cet instrument et je me suis aperçu par "hasard" que je "savais" en jouer.

Lorën réfléchit à la dernière phrase du dragon; certes le procédé lui semblait un peu déroutant sur le moment, mais après tout cela n'est pas si étrange finalement.

- En effet, je n'ai jamais approché de dragon d'aussi près auparavant. En vérité, l'occasion ne s'était jamais présentée et notre rencontre de cette nuit relève du pur hasard.

Le vampire songea que son ancien maître, Lorenz Wintel avait tué un dragon autrefois mais qu'il valait mieux ne pas aborder ce sujet "épineux" avec ce visiteur nocturne. Ce dernier serait capable de se vexer ou de mal prendre la chose.

- Pour être franc, en vous voyant arriver, j'ignorais si vous étiez un ennemi ou un allié mais depuis que vous m'avez avoué votre allégeance au Protectorat, me voilà rassuré. Certains des vôtres servent la Théocratie, même si je doute qu'ils survolent ce désert, je préfère être prudent, dit-il avec un sourire amusé. Puis je savoir à qui ai je l'honneur ?

Quant à l'explication sur le procédé télépathique, le vampire la trouva satisfaisante.

- J'avais en effet entendu des rumeurs à ce sujet mais je n'avais jamais expérimenté une telle forme de communication auparavant et je préfère me méfier des on-dit. Quant au fait de voir les "bipèdes" parler à haute voix, j'ai souvent l'impression que certaines personnes parlent pour ne "rien dire" ou qu'au contraire parfois des "silences" sont plus parlants que de longs discours. De plus, il existe d'autres moyens de communiquer avec quelqu'un que d'utiliser des mots, le corps possède également son propre langage.

A cet instant, Lorën se remémora le regard empli de frayeur glacée de nombre de ses victimes humaines, les battements affolés de leurs cœurs. Grâce à cela, il pouvait lire en elles sans qu'elles aient besoin d'ouvrir la bouche pour crier ou le supplier de leur laisser la vie sauve. Ses sens aiguisés de prédateur lui donnait un autre regard sur le monde que celui que pouvait avoir un être humain ou même un elfe.

Le vampire parvenait même à sentir les battements du cœur de ce dragon, même si à ses yeux cette créature demeurait autrement plus difficile à cerner que les autres mortels.

- Je suppose que oui, pour vous cela est aussi surprenant que pour moi de vous entendre parler dans ma tête. J'imagine aussi que ce qui est inconnu parait toujours un peu étrange, du moins au début...

- Vraiment ? Personne ici n'est seul ? Peut-être, à bien y réfléchir ce désert porte de plus en plus mal son nom. De nombreuses personnes le traversent la nuit car en journée, celui-ci représente un péril mortel pour les humains, les elfes et les vampires. Et cette oasis accueille de nombreux voyageurs qui s'y arrêtent le temps d'une halte, le temps de se reposer et de s'y désaltérer.

Le dragon se contenta de le fixer longuement dans les yeux comme pour acquiescer à sa manière sur ses dires. L'inconvénient avec les bipèdes c'est qu'ils ne sont que très peu ouvert d'esprit concernant le langage corporel. C'est peut-être pour cela qu'ils sont si bavard pour certain ? Sûrement. Mettre des mots ou parfois ça n'est pas nécessaire semble leur faire plaisir. Au moins Möebius n'avait pas à se forcer pour se faire comprendre auprès de son lié, tout était tellement plus simple lorsque les sentiments sont aussi limpides et clairs qu'une eau scintillante.

- Je ne me suis pas très bien exprimé quand je parlais du fait d'être seul...parfois, il m'arrive de rechercher volontairement la solitude et d'éprouver le désir de m'isoler d'autrui pour réfléchir ou me réfugier dans mon "monde". Lorsque je jouais, j'avais l'impression que l'univers alentour disparaissait soudainement et qu'il n'existait rien d'autre que cette musique, semblable à un chant de lumière triste...c'est pour cette raison que j'ai été un peu surpris de votre arrivée.

Vraiment ? Il ne l'avait pas entendu venir ? Soit il était réellement très enfermé dans son propre monde, soit le dragon avait fait des progrès pour se faire discret. Au choix ... Il préférait la seconde option ce qui était logique, néanmoins il ne se faisait pas d'illusion, le bipède était simplement très distrait. Möe renâcla doucement en le regardant, laissant de la fumée s'échapper de ses naseaux. Il était calme et attentif aux gestes de Lorën, il observa le ciel étoilé, ce que le dragon finit par faire à son tour.

- Quand je regarde cette infinité d'étoiles perdues dans le lointain, il m'arrive parfois de m'interroger ou de me sentir un peu mélancolique. Elles m'évoquent et ravivent un sentiment que j'éprouve parfois, celui d'être seul même si je suis entouré d'autres personnes. Elles aussi sont nombreuses mais solitaires et séparées des autres par une immensité d'obscurité.

Alors que l'écailleux saphir allait ajouté quelque chose le vampire continua de parler.

- J'aimerais pouvoir jouer une mélodie joyeuse mais j'ignore si j'en connais. Pour être franc, je n'ai jamais appris la musique...du moins, j'en ai perdu toute souvenance. Un jour, j'ai trouvé cet instrument et je me suis aperçu par "hasard" que je "savais" en jouer.

- En effet, je n'ai jamais approché de dragon d'aussi près auparavant. En vérité, l'occasion ne s'était jamais présentée et notre rencontre de cette nuit relève du pur hasard.

- Si vous n'en êtes pas capable alors tant pis, jouer moi une mélodie, celle que vous apprécier le plus. Et peut-être ai-je une réponse à votre interrogation : vous êtes mélancolique car vous ne vos souvenez pas de vôtre ancienne vie. Se poser des dizaines de questions sur ce que vous êtes sans avoir de réponses est frustrant et même déroutant. Il faut savoir vivre avec ce poids sur les épaules sans qu'il ne vous écrase de plus en plus avec le temps.

Le bleuté leva la tête vers le ciel et continua de parler.

- Le fait que vous n'aillez pas rencontrer de dragon avant moi n'est guère surprenant ... Nous sommes tellement peu nombreux, que certains bipèdes disent que croiser la route de l'un des miens leur apportera un cadeau, un souhait réalisé ou quelque chose du genre, nous sommes rares tout simplement, je crois que c'est ce qu'il voulait dire.

- Pour être franc, en vous voyant arriver, j'ignorais si vous étiez un ennemi ou un allié mais depuis que vous m'avez avoué votre allégeance au Protectorat, me voilà rassuré. Certains des vôtres servent la Théocratie, même si je doute qu'ils survolent ce désert, je préfère être prudent. Puis je savoir à qui ai je l'honneur ?

Navré de vous avoir inquiété mais je me contentais d'effectuer mon devoir, autrement je me nomme Möebius, je suis rattaché au peuple des elfes, quelques uns m'appellent le Saphir Bienveillant. Et ... je suis assez d'accord avec vous, parfois certains ne parlent que pour faire du bruit, leurs paroles ne sont guère intéressante mais ils se sentent obligé malgré tout de le faire. Est-ce ainsi pour tous ? Ou seulement une minorité ?

Puis enfin le bleuté s'approcha franchement de lui pour le regarder dans les yeux, il dû même mettre sa tête de profil par rapport à son interlocuteur pour le regarder au plus près.

- Tout concernant les bipèdes m'intrigue, pour la simple et bonne raison que nous sommes différent, mais j'ai appris à apprécier les membres de certains des peuples, seuls les vampires et les alayiens me sont réellement ... Difficile à comprendre, car j'ai eu de très mauvaises rencontres avec des membres de ces peuples.

Durant leur conversation, le dragon demeura le regard rivé sur lui comme s'il cherchait à sonder son âme. Lorën pouvait admirer de très près ses grands yeux, aux prunelles iridescentes, dans lesquelles il voyait se refléter sa propre image.

L'animal mythique semblait très attentif à ses propos et paraissait acquiescer de manière non verbale grâce à des indices visuels; malgré tout, le vampire se sentait un peu troublé par cette "proximité" physique avec une telle créature. C'était une situation pour le moins inhabituelle que de se retrouver à discuter avec un dragon au milieu d'une oasis, en pleine nuit; cependant, ce dernier paraissait l'écouter calmement et ne manifester aucun signe d'animosité ou d'agacement.

Pendant un instant, ils observèrent en silence la voûte céleste aussi sombre d'un voile de satin noir et constellée de poussières étincelantes. Lorsque Lorën avoua son incertitude quant au fait d'être capable de jouer une musique joyeuse, le dragon répondit:

- Si vous n'en êtes pas capable alors tant pis, jouer moi une mélodie, celle que vous apprécier le plus. Et peut-être ai-je une réponse à votre interrogation : vous êtes mélancolique car vous ne vos souvenez pas de vôtre ancienne vie. Se poser des dizaines de questions sur ce que vous êtes sans avoir de réponses est frustrant et même déroutant. Il faut savoir vivre avec ce poids sur les épaules sans qu'il ne vous écrase de plus en plus avec le temps.

Étrangement, la créature reptilienne semblait un peu déçue à en juger par sa réponse. Dès lors, le vampire se demanda si celle-ci ne manifestait pas une préférence pour les mélodies "joyeuses". Mais après tout, même les dragons pouvaient posséder des "goûts musicaux" malgré leur ignorance de l'art.

Lorën poursuivit d'une voix calme:

- Disons que ma façon de "jouer" est un peu particulière, elle fait moins appel à un savoir conscient qu'à des émotions qui m'habitent. Au moment où je saisis cet instrument et que je le porte à mes lèvres, des notes s'en échappent pour former une mélodie. Souvent, celle-ci est une surprise pour moi car c'est comme si elle venait du plus profond de mon être. A cet instant, ce n'est pas mon esprit qui s'exprime...mais mon cœur, du moins je le crois...
Peut-être que si j'étais d'humeur gaie, je parviendrais à jouer une musique joyeuse...Je veux bien tenter l'expérience. Après tout qui ne tente rien n'a rien, termina t'il en riant.

Ayant achevé sa phrase, le vampire porta son instrument à ses lèvres et entama une mélodie douce et cristalline. Celle-ci lui venait "naturellement" sans qu'il ait besoin de réfléchir aux notes de musique. A cet instant, Lorën songea qu'il s'agissait d'une "communication" sans paroles où les notes pouvaient "parler" de manière plus éloquente que ne le ferait un long discours.

Lorsqu'il eu terminé de jouer, il regarda l'animal d'un air un peu intrigué. La suite de la réponse de celui-ci l'avait laissé un peu dubitatif et songeur. Certes, Lorën avait évoqué le fait que certains souvenirs demeuraient effacés de sa mémoire. Toutefois, se pouvait-il que sur base de ce seul indice la mystérieuse créature ait deviné qu'il avait oublié l'entièreté de sa vie passée ? Son existence d'être humain plus précisément...

Le vampire savait qu'en apparence il ressemblait à un homme, hormis si on prêtait attention à certains indices comme son teint diaphane, ses canines acérées s'il jugeait opportun de les dévoiler ou sa peau aussi froide que la glace.

Peut-être que ce dragon avait malgré tout "remarqué" ou soupçonnait son appartenance à la race vampirique. Néanmoins, si tel était le cas, ce dernier n'en laissait rien paraître...

Lorën réfléchit au conseil du dragon; celui-ci semblait plein de bon sens et le vampire savait que parfois, il valait mieux accepter ce qu'on ne pouvait changer ou éviter de trop réfléchir afin de mener une existence "apaisée". Cependant, il était dans sa nature de se questionner et de tenter de reconstituer ce passé "oublié" qui paraissait éternellement se dérober à lui.
Par ailleurs, il savait que certains vampires pouvaient se souvenir de leur ancienne existence lorsqu'ils atteignaient un âge assez avancé et la sagesse leur permettant de mener à bien cette quête.

- Disons qu'il s'agit d'une sorte de "quête" peut-être vaine mais que je me suis imposé et que j'estime utile. Une partie de mon existence est égarée et il m'arrive de ressentir un "vague" à l'âme qui m'indique que quelque chose manque à ma vie. Malgré tout, je reste optimiste et je crois que les choses s'éclairciront le moment venu. Il est encore simplement trop tôt et en attendant je dois "vivre" avec ce "vide" sans qu'il me détruise... Une part de moi voudrait arrêter de chercher et trouver la "paix" mais une autre ne peut s'y résoudre et me pousse à continuer envers et contre tout.

Puis il se tourna vers le dragon et le regarda fixement en esquissant un léger sourire:

- Quant à certains de mes accès de mélancolie, j'ignore si la perte de mon passé est la seule en cause ou si d'autres éléments de mon présent pourraient en être le déclencheur. J'ai souvent l'impression que les choses sont terriblement complexes, au point que je suis moi-même dérouté par mon propre ressenti. Toutefois, j'ai conscience que mes propos doivent paraître bien "abstraits" voire "étranges"...

Ensuite le dragon lui dit en levant les yeux vers le ciel:

- Le fait que vous n'aillez pas rencontrer de dragon avant moi n'est guère surprenant ... Nous sommes tellement peu nombreux, que certains bipèdes disent que croiser la route de l'un des miens leur apportera un cadeau, un souhait réalisé ou quelque chose du genre, nous sommes rares tout simplement, je crois que c'est ce qu'il voulait dire.
Navré de vous avoir inquiété mais je me contentais d'effectuer mon devoir, autrement je me nomme Möebius, je suis rattaché au peuple des elfes, quelques uns m'appellent le Saphir Bienveillant. Et ... je suis assez d'accord avec vous, parfois certains ne parlent que pour faire du bruit, leurs paroles ne sont guère intéressante mais ils se sentent obligé malgré tout de le faire. Est-ce ainsi pour tous ? Ou seulement une minorité ?

Lorën acquiesça en riant:

- C'est vrai qu'on ne croise pas de dragon tous les jours et j'imagine mal une telle rencontre se produire dans les rues de la ville. D'ailleurs, je comprends que certains "bipèdes" puissent considérer cela comme un cadeau car souvent ce qui est rare est considéré comme précieux et rappelle un "trésor". Quant à votre question sur le fait de parler pour ne rien dire, n'aimant guère généraliser, je dirai que ça dépend des individus et du contexte. De plus, il y a une part de subjectivité concernant "l'intérêt" de certains propos. Ce qui me semble intéressant ne le sera pas pour un autre et vice versa.

Juste après, la créature mythique se présenta; elle se nommait Möbius et était rattaché au peuple des elfes. Et ayant terminé sa phrase, cette dernière se rapprocha et regarda le vampire dans les yeux et lui dit:

- Tout concernant les bipèdes m'intrigue, pour la simple et bonne raison que nous sommes différent, mais j'ai appris à apprécier les membres de certains des peuples, seuls les vampires et les alayiens me sont réellement ... Difficile à comprendre, car j'ai eu de très mauvaises rencontres avec des membres de ces peuples.

Lorën garda ses prunelles pailletées d'or rivées sur le dragon et répondit calmement:

- Vos mauvaises rencontres vous ont rendu amer et haineux à leur égard ou simplement perplexe quant à leurs actes ?

- Disons que ma façon de "jouer" est un peu particulière, elle fait moins appel à un savoir conscient qu'à des émotions qui m'habitent. Au moment où je saisis cet instrument et que je le porte à mes lèvres, des notes s'en échappent pour former une mélodie. Souvent, celle-ci est une surprise pour moi car c'est comme si elle venait du plus profond de mon être. A cet instant, ce n'est pas mon esprit qui s'exprime...mais mon cœur, du moins je le crois...
Peut-être que si j'étais d'humeur gaie, je parviendrais à jouer une musique joyeuse...Je veux bien tenter l'expérience. Après tout qui ne tente rien n'a rien, termina t'il en riant.

Le bleuté allait ajouter quelque chose, mais le vampire, porta son instrument à ses lèvres pour entamer une mélodie. Reprenant un regard un peu plus doux, le bleuté observa le musicien tandis qu'un son aussi doux qu'envoûtant vînt à l'oreille du dragon. Il ferma les yeux pour se laisser aller et profiter au maximum de cette ravissante mélodie cristalline. C'était la première fois que quelqu'un jouait pour lui, du moins sans compter son dragonnier, quelques instants avant son éclosion, celui-ci avait jouer quelques airs de sa mandoline, une musique qui lui avait tout simplement permis de sortir de cette cage qu'était son oeuf. Une protection du même temps qu'une prison. Aujourd'hui la musique, il l'associait à une délivrance, un moyen d'exprimer un sentiment sans parler. Peut-être même raconter une histoire, qui selon les nuances de notes pouvaient se révéler triste ou au contraire joyeuse voir amusante ! Totalement détendu, le bleuté semblait plus "léger", plus heureux.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, le bipède l'observait intrigué. N'avait-il pas le droit de vouloir pleinement apprécier cette mélodie qu'il lui offrait ? Il devrait se sentir flatter qu'un dragon lui ai demandé une telle chose ! N'importe quel bipède aurait été heureux de jouer de la musique pour l'un de ses semblables, peut-être ne réalisait-il tout simplement pas ? Mais au fond, le bleuté s'en moquait, il avait eu ce qu'il voulait de la part de ce vampire nomade.

- Disons qu'il s'agit d'une sorte de "quête" peut-être vaine mais que je me suis imposé et que j'estime utile. Une partie de mon existence est égarée et il m'arrive de ressentir un "vague" à l'âme qui m'indique que quelque chose manque à ma vie. Malgré tout, je reste optimiste et je crois que les choses s'éclairciront le moment venu. Il est encore simplement trop tôt et en attendant je dois "vivre" avec ce "vide" sans qu'il me détruise... Une part de moi voudrait arrêter de chercher et trouver la "paix" mais une autre ne peut s'y résoudre et me pousse à continuer envers et contre tout.

Möebius écouta attentivement son interlocuteur, l'oeil de nouveau alerte et non compatissant. Il savait lui aussi ... Le fait de vivre au jour le jour car on ne se souvenait plus de ce que nous souhaitions faire. Des personnes que nous connaissions et la crainte passer à côté d'eux sans les reconnaître, oublier ses propres capacités et ainsi perdre totalement confiance en soi ... Oui le dragon connaissait ces désagréables sensations par coeur, à présent tout était derrière lui, mais il gardait un souvenir très net de cette douleur dévorante ... Renâclant de colère le bleuté regarda le vampire mais ne l'agressa pas pour autant. Rien qu'en songeant à nouveau à tout ce qu'il avait vécu, cela l'énervait. Autant tout stopper avant de faire peur à son interlocuteur.

- Quant à certains de mes accès de mélancolie, j'ignore si la perte de mon passé est la seule en cause ou si d'autres éléments de mon présent pourraient en être le déclencheur. J'ai souvent l'impression que les choses sont terriblement complexes, au point que je suis moi-même dérouté par mon propre ressenti. Toutefois, j'ai conscience que mes propos doivent paraître bien "abstraits" voire "étranges"...

Au moins ce bipède sans vie n'avait pas perdu sa faculté de réflexion, c'était peut-être cela la réponse à toutes les interrogations vis-à-vis des vampires : certains se croyaient encore en pleine possession de leurs moyens mais ça n'était pas le cas. Une affirmation qui devait être creuser !

Le bleuté lui donna son avis concernant les dragons après s'être présenté, ce à quoi Lorën répondit tout de suite.

- C'est vrai qu'on ne croise pas de dragon tous les jours et j'imagine mal une telle rencontre se produire dans les rues de la ville. D'ailleurs, je comprends que certains "bipèdes" puissent considérer cela comme un cadeau car souvent ce qui est rare est considéré comme précieux et rappelle un "trésor". Quant à votre question sur le fait de parler pour ne rien dire, n'aimant guère généraliser, je dirai que ça dépend des individus et du contexte. De plus, il y a une part de subjectivité concernant "l'intérêt" de certains propos. Ce qui me semble intéressant ne le sera pas pour un autre et vice versa.

Le bleuté ne répondit pas avant de se présenter au vampire.

- Vos mauvaises rencontres vous ont rendu amer et haineux à leur égard ou simplement perplexe quant à leurs actes ?

- Cela dépend de l'approche que j'ai avec l'un de ces membres, je dirais donc méfiant.

Lorën observait la créature bleutée du coin de l'œil et esquissa un sourire amusé; à son grand étonnement, cet étrange animal semblait apprécier sa musique. Mais après tout, croiser la route d'un dragon, "mélomane" qui plus est, n'était peut-être pas si incongru que cela. Peut-être même accepterait-il de lui en "offrir" plus s'il y tenait.

Quoiqu'il en soit, celui-ci semblait pendu à ses lèvres et l'observait avec attention. A un moment, l'expression du dragon parut se durcir et il lui lança un regard dénué de compassion.
Et les sens aiguisés du vampire sentirent le cœur de son interlocuteur battre plus fort dans sa poitrine comme s'il était en proie à une vive émotion, sans doute de la colère. Lorën le dévisagea avec curiosité, pourquoi le bleuté réagissait si "intensément" à l'évocation de son passé perdu ? Le vampire avait abordé cet épisode de son existence avec sang-froid, gardant ses émotions à distance, mais l'animal semblait bouleversé. Est-ce qu'il souffrait ou ses propos lui rappelaient-ils de mauvais souvenirs ? Peut-être...

Malgré tout, c'était curieux qu'un dragon puisse être tellement affecté par de simples paroles au point de renâcler de colère. Toutefois, le vampire n'avait ressenti aucune hostilité de la part du bleuté envers lui à cet instant.

Lorsque Lorën questionna la créature sur son sentiment à l'égard des vampires et des Alayiens; celui-ci répondit de manière laconique tout en précisant témoigner d'une certaine méfiance envers eux.

Le vampire l'observait attentivement tout en gardant un calme serein: il avait l'impression qu'en dépit de son aspect puissant et imposant, ce mystérieux animal abritait une certaine fragilité, une sensibilité profonde qu'il tentait de masquer derrière une carapace. Était-ce donc pour cette raison qu'il appréciait cette mélodie cristalline et qu'il avait réagi si fort à ses propos ? Cherchait-il à se protéger ?

Lorën se demandait ce que pouvait ressentir un dragon: l'amour, la haine, la peur, la colère, la tristesse étaient-elles des émotions familières ou inconnues ? Qu'est-ce qu'une telle créature éprouvait pour son dragonnier ? Une dévotion inconditionnelle ? Une franche amitié ou une indifférence polie ? Se sentait-il seul parfois ? Nourrissait il des rêves, des espoirs ou des ambitions ?

Le bleuté ne parlait pas beaucoup mais semblait l'écouter très attentivement depuis le début de leur conversation. Cependant, le vampire ignorait quelles pensées se dissimulaient derrière ses grandes prunelles brillantes. D'ailleurs un dragon versait-il parfois des larmes ?

- Vraiment ? J'avoue que dans bien des cas votre méfiance est justifiée. Mais d'après vous sont ils tous capables d'atrocités ou bien est-ce une minorité ? demanda le vampire en croisant les bras sur sa poitrine et en regardant le dragon avec attention, attendant sa réponse.

- Vraiment ? J'avoue que dans bien des cas votre méfiance est justifiée. Mais d'après vous sont ils tous capables d'atrocités ou bien est-ce une minorité ?

- Je n'en ai pas la moindre idée, mais je dirais que à chaque fois, que cela soit dans le peuple de la nuit, ou même celui des humains, une minorité avec des idées très affirmées et des têtes pensantes s'emparent de l'esprit de tout les autres, ils sont tellement perdus en ce monde qu'ils désespèrent de ne trouver leur juste place. Et puis d'autres on le coeur sombre dés leur plus jeune âge. Tout ceci additionné créer de puissantes armées, quant aux autres ils sont obligés de suivre le mouvement de peur d'être supprimé. Ces victimes n'ont ni tort ni raison, ils ne suivent qu'un instinct millénaire : celui de la survie.

Le bleuté observa cette fois-ci l'horizon dans cette nuit fraîche. La brise légère venait chatouiller ses fines écailles sur la tête, mais sur le reste de son corps il n'était quasiment pas réceptif, sa protection azur était beaucoup plus épaisse, à tel point que le surnom dragon des glaces lui avait été donné, car la chaleur de son corps n'était pas perceptible. Cela ne le gênait que peu, mais en cet instant il aurait apprécié sentir un peu mieux le vent qui se levait, soulevant le sable. Y allait-il avoir une tempête ? Non peut-être pas, le dragon leva la tête pour cette fois-ci observer le ciel, non pas de nuages plus conséquent, mais c'est vrai qu'ils bougeaient plutôt vite, le vent allait certainement s'intensifier dans ce cas.

- Et vous Lorën ? Etes-vous comme ces horribles personnes ? Ou bien cherchez vous à connaître les autres afin de les comprendre pour tenter de cohabiter avec eux ? Pour ma part c'est ce que je tente de faire, vous comprendre avant de vous jugez malgré mes désagréables souvenirs avec les vampires. J'espère que cet effort sera réciproque.

Ajouta le dragon avec un ton non pas froid mais disons, plutôt interrogatif, si jamais le vampire répondrait par la négative à cela, l'écailleux comprendrait que celui-ci n'était pas un vampire qui ferait avancé les choses. Mais dans ce cas sa présence même était une insulte au Protectorat et aux Esprits. Ce n'était pas pour rien que le dragon était ici et surveillait les passages des voyageurs entre la barrière et le Protectorat, il ne manquerait plus qu'une personne de mauvaise intention y pénètre pour tout gâcher.

Mais il s'agissait aussi la d'une promesse, que si Lorën se tenait tranquille et se révélait même utile au Protectorat voir sympathique, le bleuté ne lui ferait pas le moindre mal, il finirait peut-être même par l'apprécier, mais avant d'en arriver la il y avait encore une sacré route à parcourir pour le vampire et le dragon pour qu'ils se tiennent main dans la patte !

Lorën écoutait attentivement les paroles de la créature bleutée qui se tenait à ses côtés tout en gardant ses prunelles dorées rivés sur elle.

Le mystérieux dragon confessa son ignorance quant à savoir si les vampires et les humains étaient tous capables de commettre les pires atrocités ou s'il s'agissait de l'œuvre d'une infime minorité, guidée par une incommensurable soif de pouvoir. Cependant, il énonça ce qu'il pensait être son opinion à ce sujet, ce qui ne manqua pas d'interpeller le Nocturne.

La "voix" draconnique du saphir bienveillant résonnait dans son esprit et trouvait un écho dans son cœur, éveillant en lui maintes sentiments profondément enfouis. Bien des fois, le vampire s'était questionné et demandé la raison de ces guerres incessantes qui frappaient le continent d'Armanda, encore et encore, comme si elles ne devaient jamais connaître de fin. La paix ne constituait-elle qu'une chimère et une douce utopie ? Certainement, si on se fiait aux derniers événements.

Était-ce donc dans la "nature" des êtres de s’entre-tuer indéfiniment ? Dans leur for intérieur, les humains ne désiraient-ils pas s'abreuver de sang aussi ardemment que les vampires ?

Lorën n'avait jamais crû à la supériorité morale des humains par rapport aux vampires. Quant aux elfes, l'exquis masque de beauté de certains membres du "beau peuple" pouvait dissimuler la noirceur de l'âme. La Dame blanche, dirigeante d'Althaia la Terrible, en constituait un exemple éloquent. Et l'horrifiant dragon albinos, Vraorg, représentait à lui seul l'archétype du désir de tout-puissance, de l'asservissement d'autrui et du "monstre" se délectant du sang et de la souffrance de ses victimes.

- Comme vous, je n'ai pas de réponse définitive à cette question, mais il m'ait arrivé de me la poser très souvent en constatant le déroulement des événements sur Armanda. Pendant longtemps, je me suis contenté de suivre le mouvement, me laissant ballotter telle une feuille morte emportée par le courant...La peur était mon guide et m'attachait à mon prince telle une lourde chaîne...j'essayais simplement de survivre voire de tirer profit de cette situation de chaos...

Lorën s'arrêta un bref instant, pensif et contempla les reflets argentés de la lune dansant sur le miroir d'eau de l'oasis. Le souffle du vent caressait doucement le visage du vampire et faisaient virevolter certaines de ses longues mèches d'un noir de jais.

Puis, il reprit la parole d'un ton calme mais sa voix était agitée par un léger tremblement:

- Vous dites qu'il existe des têtes pensantes qui s'emparent de l'esprit des autres et que ces derniers, dès lors, deviennent des victimes...Cependant, j'ai l'impression que malgré la situation, chacun conserve sa part de responsabilité et son libre arbitre quant aux actes commis. Les plus "faibles" se dédouanent en se disant qu'ils ne font que survivre et que leur comportement ne possède qu'un impact limité sur le cours des choses car ils sont insignifiants face à la puissance des grands de ce monde. Mais, je ne suis pas certain que cela soit tout à fait la vérité...

Ayant terminé sa phrase, il se pencha et ramassa des poignées de sable fin entre ses mains avant de les laisser s'envoler au fil du vent:

- Les "petits" de ce monde paraissent aussi insignifiants que ces minuscules grains de sable; toutefois, ils sont si nombreux que leurs comportements finissent par peser lourd sur la balance. Tout comme des millions de grains de sable entassés l'un sur l'autre finissent par construire des dunes gigantesques. Je crois qu'il en va de même pour les actes que nous posons chaque jour, même ceux qui nous semblent sans importance. Chacun d'entre-nous joue un rôle dans les évènements en cours et nous devons cesser de nous voiler la face en accusant nos dirigeants.

Ensuite le saurien couleur d'azur lui posa une question, cherchant sans doute à sonder ses intentions afin peut-être d'écarter un "indésirable" du Protectorat.

Lorën répondit d'une voix douce:

- A dire vrai, j'ignore ce que vous entendez par "horrible" car pour certains individus, les vampires sont par "nature" des "abominations", des créatures maléfiques et abjectes, indignes d'exister. Moebius, jugez-vous les êtres sur ce qu'ils sont ou sur leurs comportements ? Quant à mes intentions, j'ai l'espoir de pouvoir cohabiter en paix avec les autres protégés même si j'ignore si j'arriverai à combler l'immense fossé incompréhension mutuelle qui nous sépare...Toutefois, j'essayerai.

Le vampire contempla un bref instant le firmament constellé d'étoiles, les nuages avançaient rapidement à sa surface couleur bleu-sombre. Et un vent sec venu des profondeurs du désert enveloppait le Nocturne et le saurien de son souffle.

Lorën reporta son attention sur le bleuté qui semblait perdu dans ses pensées; il se remémora l'instant où celui-ci s'était approché de lui afin d'entamer une discussion. Sur le moment, ce dernier n'avait écouté que sa frayeur mais à présent, la scène lui revenait en tête et il revoyait certaines images distinctement. Moebius avançant dans sa direction avec une démarche un peu gauche et maladroite, malgré sa stature imposante et la puissance que lui conférait son appartenance à la race draconique. Puis, le vampire se rappela la colère qui se lisait dans les prunelles iridescentes du dragon lorsque qu'il avait évoqué sa mémoire perdue...Comme si derrière la cuirasse de son armure de saphir, la créature mythique cachait une fragilité insoupçonnée.

- Puis-je vous poser une question un peu indiscrète ? Tout à l'heure, lorsque j'ai abordé la question de la perte de mes souvenirs, vous sembliez...très affecté. Est-ce que mes paroles vous ont blessées ou offensées ? demanda t'il.

- Vous dites qu'il existe des têtes pensantes qui s'emparent de l'esprit des autres et que ces derniers, dès lors, deviennent des victimes...Cependant, j'ai l'impression que malgré la situation, chacun conserve sa part de responsabilité et son libre arbitre quant aux actes commis. Les plus "faibles" se dédouanent en se disant qu'ils ne font que survivre et que leur comportement ne possède qu'un impact limité sur le cours des choses car ils sont insignifiants face à la puissance des grands de ce monde. Mais, je ne suis pas certain que cela soit tout à fait la vérité...

- Les "petits" de ce monde paraissent aussi insignifiants que ces minuscules grains de sable; toutefois, ils sont si nombreux que leurs comportements finissent par peser lourd sur la balance. Tout comme des millions de grains de sable entassés l'un sur l'autre finissent par construire des dunes gigantesques. Je crois qu'il en va de même pour les actes que nous posons chaque jour, même ceux qui nous semblent sans importance. Chacun d'entre-nous joue un rôle dans les évènements en cours et nous devons cesser de nous voiler la face en accusant nos dirigeants.

- Oui il leur faut simplement de l'aide. Une personne plus une autre et encore une autre et ainsi de suite ne donne pas un groupe de personne mais une assemblée. Voilà ce qu'il faut pour ces "victimes" qu'ils se tiennent la main face au combat venant vous avez raison.

- A dire vrai, j'ignore ce que vous entendez par "horrible" car pour certains individus, les vampires sont par "nature" des "abominations", des créatures maléfiques et abjectes, indignes d'exister. Moebius, jugez-vous les êtres sur ce qu'ils sont ou sur leurs comportements ? Quant à mes intentions, j'ai l'espoir de pouvoir cohabiter en paix avec les autres protégés même si j'ignore si j'arriverai à combler l'immense fossé incompréhension mutuelle qui nous sépare...Toutefois, j'essayerai.

- Je suis souvent indécis, je cherche toujours à me fier à ce que je vois et ressens en voyant une personne s'avancer vers moi. Mais je ne peux pas non plus me permettre de jouer le sourd lorsque l'on m'informe que cette personne à commis des meurtres horribles par le passé, ou pire encore qu'il s'agirait d'un tueur de dragon. Si par exemple Lorenz lui-même venait à ma rencontre croyez-vous que je ferais abstraction de tout ce que j'ai pu entendre ou même voir de lui ? Non je ne le pourrais pas car il représente une menace. C'est la toute la difficulté en ce monde : il faut savoir trouver un équilibre pour s'entourer des bonnes personnes pour se protéger.

Ravis de constater que ce vampire était quelqu'un de fréquentable le bleuté regarda le ciel et pensa alors au Dracos, était-ce lui ou un esprit qui envoyait de bonne personne comme ce vampire au Protectorat ? Peut-être, quoi qu'il en soit, le bleuté le laisserait passer, il l'avait suffisamment juger pour comprendre qu'il n'avait pas un mauvais fond.

- Puis-je vous poser une question un peu indiscrète ? Tout à l'heure, lorsque j'ai abordé la question de la perte de mes souvenirs, vous sembliez...très affecté. Est-ce que mes paroles vous ont blessées ou offensées ?

- Effectivement ... J'en ai été très affecté car moi-même je connais la souffrance que peu engendrer la perte de la mémoire. Ce n'est plus d'actualité cela fait maintenant trois ans que j'ai récupéré mes souvenirs mais suite à la bataille des bois sombres, Vasa a jeté une malédiction sur les divers combattants, mon lié et moi furent touché de pleins fouet. Pour ma part je me suis réveillé et je ne savais plus rien, pas même mon nom, ou comment voler alors que je suis normalement fait pour cela. Comment parler l'elfique ... Qui avais-je croiser sur ma route auparavant, mes amis si j'en avais. Tout cela fut réduit à néant en quelques secondes. Voilà jeune vampire maintenant tu sais. Je t'en parle car je ne souffre plus de cette période et que cette bataille et n'est un secret pour personne et que tu me sembles quelqu'un de bien.

Le vampire demeura pensif et silencieux, écoutant les paroles du bleuté, tout en contemplant l'immensité de la voûte étoilée. Le ciel nocturne sembla soudain s'éclaircir et le vent s'apaiser comme si cette nuit, nulle tempête ne devait troubler la sérénité du désert.

Loren esquissa un sourire avant d'ajouter:

- Oui, il leur faudrait de l'aide, quelqu'un ou quelque chose qui fasse en sorte que des liens se tissent entre des êtres isolés voire antagonistes afin qu'ils unissent leurs forces. Peut-être aussi que certains voient leurs existences basculer du jour au lendemain, suite à un évènement d'importance qui modifie leur vision du monde et leur donne une bonne raison de se battre contre l'oppression. Après tout, pourquoi demeurer éternellement une victime "consentante" ? D'autres cherchent peut-être à défendre des idéaux et à faire advenir un monde meilleur, y compris au prix de leur sang. Et une autre catégorie possède sans doute des motivations plus ambivalentes ou moins avouables.

Loren quitta des yeux le firmament criblé d'étoiles et regarda le saurien avant d'ajouter d'une voix calme:

- Depuis plusieurs années, le continent d'Armanda ne cesse de devoir faire face à d'innombrables menaces comme si la destinée des individus consistait à devoir lutter sans cesse contre la fatalité de la guerre. Et vous Moebius, croyez-vous que de cette guerre entre Vraorg et les esprits pourra émerger un plus avenir moins sombre ?

Quand le nocturne demanda au dragon s'il jugeait les êtres sur leur "nature" ou sur leurs "actes". Celui-ci répondit que lors d'un nouvelle rencontre, il tentait de se fier à son instinct mais qu'il ne pouvait, malgré tout, pas faire abstraction du passé de l'individu. Moebius expliqua que si sa route venait à croiser celle du terrible prince des vampires, Lorenz Wintel, il serait forcé de le considéré comme une menace en raison de ses crimes.

Loren acquiesça de la tête; il était bien placé pour connaître la cruauté du prince noir pour l'avoir servi durant de nombreuses années. Du reste, l'intendant n'avait jamais apprécié son ancien maître.

- Est-ce que c'est votre recherche de cet équilibre qui vous a amené à discuter avec moi alors que vous aviez deviné ma nature vampirique ?

Ensuite, il ajouta avec un sourire amère.

- Aux yeux de bien des êtres, nous sommes des créatures abjectes ne méritant pas d'autre sort que la destruction. Néanmoins, j'ai crû comprendre que votre méfiance à l'égard des vampires résultait surtout de mauvaises expériences et non pas d'une répugnance particulière à leur égard.

Puis, le bleuté répondit de bonne grâce à la question du vampire concernant le fait qu'il ait paru très affecté par ses propos concernant sa perte de souvenirs.

Loren continua à le fixer, un peu interloqué par cette révélation; il n'imaginait pas qu'un dragon ait pu vivre une telle expérience. Toutefois, si tel était le cas, alors celui-ci pouvait comprendre l'indicible manque d'engendrait cette mémoire "amputée" .

- Merci de votre confiance, elle m'honore et je comprends à quel point cette épreuve vous a bouleversée. Pour ma part, je n'ai gardé comme souvenir de ma vie passée que mon nom, tout le reste est effacé et ne resurgit, peu à peu, que sous forme de réminiscences. C'est comme si je devais reconstituer un rêve oublié bribes par bribes. Mais le temps est mon allié dans cette quête car si j'atteins un âge suffisamment avancé et la sagesse nécessaire, je pourrais alors essayer de dénouer les fils de l'oubli et retrouver ma mémoire perdue.

La brise faisait danser de fines ondulations sur la surface de l'eau, sur laquelle se reflétait la forme imposante et azurée du saphir bienveillant.

- Il est temps pour moi de vous quitter, je dois bientôt reprendre ma route dans ce vaste désert en compagnie de mon guide. La journée, les chaleurs sont telles qu'il constitue un danger mortel pour les humains, les vampires et les elfes. Je dois donc quitter ce lieu bien avant le lever du jour pour continuer mon chemin en direction du Protectorat. Nos routes se quittent à présent et j'ignore quand elles se recroiseront à nouveau. En attendant, prenez soin de vous, Moebius, le saphir bienveillant.

- Oui, il leur faudrait de l'aide, quelqu'un ou quelque chose qui fasse en sorte que des liens se tissent entre des êtres isolés voire antagonistes afin qu'ils unissent leurs forces. Peut-être aussi que certains voient leurs existences basculer du jour au lendemain, suite à un évènement d'importance qui modifie leur vision du monde et leur donne une bonne raison de se battre contre l'oppression. Après tout, pourquoi demeurer éternellement une victime "consentante" ? D'autres cherchent peut-être à défendre des idéaux et à faire advenir un monde meilleur, y compris au prix de leur sang. Et une autre catégorie possède sans doute des motivations plus ambivalentes ou moins avouables.

- La est le plus dur désormais : trouver le moyen de les aider. Les convaincre que l'union fait la force et que s'ils doivent tomber ils ne souffriront pas seuls mais ensemble. Mais rien qu'à l'idée de souffrir la plupart s'enfuit, ils n'ont pas tort en un sens, mais du coup rien ne change.

Le bleuté regarda son interlocuteur, leurs yeux ne se quittèrent pas avant que celui-ci ne reprenne la parole.

- Depuis plusieurs années, le continent d'Armanda ne cesse de devoir faire face à d'innombrables menaces comme si la destinée des individus consistait à devoir lutter sans cesse contre la fatalité de la guerre. Et vous Moebius, croyez-vous que de cette guerre entre Vraorg et les esprits pourra émerger un plus avenir moins sombre ?

- Je l'ignore ... J'aimerais vous répondre que non, les choses vont s'améliorer mais je n'ai à vrai dire aucune garanti la dessus. Ils nous faudra nous battre pour obtenir ce que l'on souhaite. Encore une fois le combat serait notre seul moyen de nous faire entendre face à eux.

- Est-ce que c'est votre recherche de cet équilibre qui vous a amené à discuter avec moi alors que vous aviez deviné ma nature vampirique ?

- Il s'agit d'autre chose Lorën, je voulais voir si tout les vampires étaient comme leur tyran. Apprendre à vous connaître était un de mes objectifs en dehors de lutter contre la guerre via de nouvelles relations. Mais je dois dire que cette rencontre a été pour moi plus qu'un simple échange.

Soudain le vampire se mit à sourire, une grimace qui déformait leur visage et qui était apparemment synonyme de joie, le bleuté n'en était pas tellement convaincu ... Son esprit vagabonda alors sans qu'il puisse lutter contre.

Lorsqu'il cligna des yeux son interlocuteur était en train de parler de tout autre chose. Il lui parla une nouvelle fois de ses souvenirs, rien qu'à l'évoquer, le bleuté était envahit par une mélancolie si familière. Non il ne devait pas se laisser abattre encore une fois ! Le moment était mal choisi.

- Merci de votre confiance, elle m'honore et je comprends à quel point cette épreuve vous a bouleversée. Pour ma part, je n'ai gardé comme souvenir de ma vie passée que mon nom, tout le reste est effacé et ne resurgit, peu à peu, que sous forme de réminiscences. C'est comme si je devais reconstituer un rêve oublié bribes par bribes. Mais le temps est mon allié dans cette quête car si j'atteins un âge suffisamment avancé et la sagesse nécessaire, je pourrais alors essayer de dénouer les fils de l'oubli et retrouver ma mémoire perdue.

Le bleuté le regarda fixement quelques secondes puis hocha la tête comme un humain, il avait appris cela bien des années auparavant et espérait ne pas mal sans servir lors de ces diverses discussions. Finalement il baissa la tête pour boire à cet oasis laissant le vampire terminé ce qu'il avait à dire.

- Il est temps pour moi de vous quitter, je dois bientôt reprendre ma route dans ce vaste désert en compagnie de mon guide. La journée, les chaleurs sont telles qu'il constitue un danger mortel pour les humains, les vampires et les elfes. Je dois donc quitter ce lieu bien avant le lever du jour pour continuer mon chemin en direction du Protectorat. Nos routes se quittent à présent et j'ignore quand elles se recroiseront à nouveau. En attendant, prenez soin de vous, Moebius, le saphir bienveillant.

- Ce fut pour moi un plaisir de croiser la route d'un vampire comme toi Lören. Je te souhaite de trouver la paix et le confort qui te sierra le mieux au Protectorat. Un jour nous nous reverrons, je n'ai pas pour habitudes de parler sans savoir, mais quelque chose me dit qu'un jour nos chemins prendront la même direction jusqu'à se rencontrer à nouveau. Ce fut autant divertissant qu'instructif.

Déployant ses ailes le dragon le regard encore une fois comme pour imprimé dans son esprit le vampire si différent des autres et qui lui avait fait changé d'avis. D'un bond il décolla soulevant le sable et faisant vibrer la surface liquide. Une fois dans le ciel il décrivit un grand cercle comme pour continuer de l'observer, puis c'est seulement après qu'il prit une tout autre direction : il se dirigea vers le coeur du désert, la ou il rencontrait peut-être d'autres voyageurs égarés, ou surveillerait la barrière des Esprits.

[C'est une conclusion pour moi, souhaites-tu encore répondre ?]

Le vampire écouta attentivement les propos du dragon bleuté concernant l'attitude de la minorité opprimée, et du fait que la peur entravait leur mobilisation. A cet instant, le nocturne pensa que c'était ce même sentiment qui l'avait empêché d'agir et maintenu attaché contre son gré à Lorenz Wintel. Pourtant, à présent, le sentiment de sa liberté retrouvée lui procurait une euphorie grisante.

Quant aux interminables combats que les Armandéens menaient depuis des années; hélas, il semblait que ceux-ci perdurent encore un moment afin de leur permettre d'atteindre leur but. Un sourire d'amère ironie s'afficha sur le visage du vampire à cette idée, mais puisqu'il n'existait aucune autre solution alors autant tenter de survivre et même essayer de tirer parti de cette situation de guerre.

Lorsque Loren questionna Moebius à propos de la raison qui l'avait amené à discuter avec lui, ce dernier donna une réponse qui ne manqua pas de l'intriguer. Il disait vouloir voir si tous les vampires ressemblaient au tyran, Lorenz Wintel. Cette pensée fit frissonner de dégoût l'intendant. Quelle horrible idée ! Fort heureusement, tous les vampires ne ressemblaient pas à ce monstre de Prince vampirique.

Après cela, le nocturne décida de mettre fin à cette conversation et salua l'imposante créature mythique. Celle-ci lui fit part de son plaisir d'avoir pu croiser sa route, plaisir partagé par Loren malgré le côté "inhabituel" d'une telle rencontre. Et peut-être que la destinée remettrait un jour en présence, le vampire et le saphir bienveillant. Le Dracos et les esprits étaient grands et l'existence réservait souvent bien des surprises....

Ensuite, le dragon déploya ses immenses ailes d'un bleu céruléen, faisant voltiger autour de lui des poussières de sable d'or et naître des vaguelettes sur la surface limpide du cours d'eau.

Et d'un bond, il s'élança en direction du firmament étoilé, jetant de temps à autre un regard en direction du "bipède" avant de disparaître à l'horizon. Demeuré seul, l'intendant resta un peu pensif à la pensée de cette étrange rencontre à la fois fascinante et très instructive.

Quelques minutes plus tard, son guide apparut et l'informa qu'il était temps de reprendre leur route afin de rejoindre le Protectorat. Puis, ensemble, ils s'enfoncèrent dans l'immensité de sable fin, entourés par le voile satiné de l'obscurité. Et Loren songea qu'au milieu de ce magnifique ciel étoilé, volait un dragon aux ailes d'azur: le fier et mystérieux gardien du désert d'Esfelia.

Spoiler:

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